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4. Résultats

5.2 Forces et faiblesses de l’étude

Cette étude fait partie des premières études en France où un risque d’accident corporel est estimé en rapportant l’accidentalité à la mobilité (Gabet 2005; Mercat 2006; Licaj, Haddak et al. 2011; Hurez and Bernagaud In Press), et qui permet ainsi de comparer les risques entre modes de transport.

C’est l’une des toutes premières études permettant de comparer ces risques en se basant sur les dénombrements du Registre du Rhône. L’étude précédente se focalisait sur les jeunes et sur les caractéristiques des territoires (Licaj, Haddak et al. 2011).

Utiliser le Registre du Rhône est plus adéquat que les données des forces de l’ordre (BAAC) pour comparer les modes de transport entre eux. Les BAAC souffrent en effet d’un sous-enregistrement différencié selon le type d’usager, avec un enregistrement particulièrement faible pour les cyclistes (7%). A contrario, les taux d’enregistrement des cyclistes dans le Registre sontde 81% (Amoros, Martin et al. 2007) ; le registre est bien plus exhaustif que les données des forces de l’ordre (BAAC) et surtout représentatif en termes de type d’usager (Amoros 2007). Pour étudier l’insécurité routière des cyclistes, il est donc primordial d’utiliser cette source de données.

Le Registre a aussi l’avantage de fournir un niveau de gravité : ainsi, nous avons estimé le risque d’être blessé toutes gravités confondues, d’être blessé hospitalisé, d’être sérieusement blessé (MAIS 3+) et d’être tué. Le score de gravité MAIS est basé sur une classification médicale, traumatologique, où à chaque lésion, codifiée, est associé un score de gravité immédiate. Cette échelle est utilisée internationalement.

La mobilité est estimée grâce à l’Enquête Ménages Déplacements de Lyon (EMD), et secondairement grâce à l’Enquête Nationale Transports Déplacements (ENTD). Ces enquêtes sont très riches. Elles permettent notamment d’estimer la mobilité selon plusieurs critères : le nombre d’utilisateurs, le nombre de déplacements ou trajets, les kilomètres parcourus, et les heures passées. En particulier, au niveau de l’Enquête Ménages Déplacements de Lyon, il a été possible de raisonner au niveau fin des trajets et non pas au niveau plus large des déplacements : un déplacement peut comprendre plusieurs trajets, où chaque trajet correspond à un seul mode. Cela permet donc une estimation plus fine de la mobilité par mode de transport.

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L’Enquête Ménages Déplacements de Lyon souffre d’une restriction saisonnière : elle couvre novembre à avril, et les seuls jours de semaine « typique » (excluant week-ends, jours fériés et vacances scolaires). La pratique du vélo étant liée à la saison et au type de jour (semaine, week-end), nous avons choisi d’appliquer une correction de saisonnalité aux estimations basées sur l’EMD. Cela a déjà été fait dans l’étude sur Grenoble, en se basant sur une boucle de comptage de vélos (Mercat 2006). Ici, la correction de saisonnalité des données de mobilité du Rhône se base sur l’Enquête Nationale Transports Déplacements (ENTD), et sur son estimation France entière. Le plan de sondage de celle-ci ne permettait cependant pas d’être représentatif du Rhône. Il aurait été possible de faire des estimations représentatives au niveau de la région Rhône-Alpes-Auvergne, mais il nous a paru plus pertinent d’utiliser les estimations sur la France entière, qui inclut d’autres grandes villes, et qui se base sur des effectifs plus importants. La correction de saisonnalité s’avère tout à fait utile et pertinente puisque les ratios de saisonnalité entre la période hors EMD et la période EMD sont autour de la valeur 2 pour les cyclistes ; de plus, ce ratio varie selon le sexe (un peu plus élevé chez les hommes), l’âge (avec un pic à 4 chez les 5-14 ans, et un gradient décroissant selon l’âge) et selon le degré d’urbanisation (un peu plus élevé hors ville, en heures).

L’EMD et l’ENTD sont des enquêtes, avec un plan de sondage, et comme pour toute enquête se pose la question de la représentativité, et notamment pour les pratiques de mobilité moins fréquentes. C’est le cas de l’utilisation du vélo et du deux-roues motorisé, notamment dans la période hivernale. Cela semble critique pour le deux-roues motorisé. Sur le département du Rhône, il représente 2,6 fois moins d’heures passées que le vélo. Plus encore, les estimations déclinées selon l’âge, le sexe, mettant en jeu de plus petits effectifs encore, nous ont paru curieuses : il y a de grandes disparités d’estimations de ratios de saisonnalité ou de taux d’incidence entre classes d’âge ou de sexe. Cela nous parait excessif et nous questionne sur leur fiabilité. Ainsi, les résultats pour les usagers de deux-roues motorisés ont été mis en grisé, et nous ne les avons pas commentés.

La mesure de la mobilité se limite à celle des résidents du périmètre considéré, celle des résidents hors du périmètre de l’EMD n’étant pas estimable. Les accidents des non-résidents sont présents dans le Registre (où le critère d’inclusion est le département du Rhône comme lieu d’accident) ; par cohérence avec les données de mobilité, ils ont été exclus de l’analyse. Il serait intéressant de pouvoir inclure ces non-résidents dans l’étude ; cela comprend notamment les touristes qui ont des pratiques de mobilité différentes, et peut-être une accidentalité différente.

L’Enquête Ménages Déplacements de Lyon de 2006 a un périmètre très étendu, qui couvre quasiment l’ensemble du département du Rhône. Par cohérence, les données du Registre ont été restreintes à ce

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périmètre. L’Enquête Ménages Déplacements de Lyon de 1994-1995 couvre seulement l’agglomération lyonnaise ; les données du Registre ont donc été restreintes à ce périmètre ; cela implique que l’étude de l’évolution des taux d’incidence est réduite à l’agglomération lyonnaise.

Nous avons fait le choix de garder les accidents hors réseau routier. L’étude se focalisait initialement sur les accidents à vélo et nous voulions couvrir l’ensemble de la pratique. Celle-ci peut être différenciée grâce à la « variable en ville dense » / « hors ville dense ». Pour donner un ordre de grandeur, les accidents à vélo hors réseau routier représentent dans le Registre 7% des accidents à vélo, mais un tiers sont de type de réseau inconnu.

Le Rhône est un département très urbanisé. Afin que les résultats n’en soient pas trop affectés, nous avons produit des estimations des taux d’incidence selon le degré d’urbanisation : en ville dense et hors ville dense. Par ailleurs, l’étude de la relation multivariée entre les taux d’incidence et les caractéristiques âge, sexe, degré d’urbanisation, type d’accident n’a guère de raison d’être liée au département ; elle est donc généralisable à la France entière.

Les analyses multivariées ont permis de tenir compte à la fois de l’effet de l’âge, du sexe, de l’urbanisation (en ou hors ville dense) sur les taux d’incidence ; cela nous a permis d’étudier l’effet propre de l’un, toutes choses égales par ailleurs (pour les autres variables du modèle).

Il n’a pas été possible d’estimer des intervalles de confiance des taux d’incidence ; la raison en est la multiplicité des étapes de l’estimation : estimation de la mobilité sur enquête (avec plan de sondage complexe), estimation de ratios de saisonnalité sur une autre enquête (avec plan de sondage complexe), estimation (dénombrement) des blessés par le Registre, et ratio de ces estimations. Il est possible de produire des intervalles de confiance à chaque étape mais il n’est pas aisé de les combiner.

Des intervalles de confiance ont été produits dans les analyses multivariées sur données agrégées. Cependant, ces analyses sont réalisées comme si les ratios de saisonnalité étaient parfaitement connus, et non pas estimés sur des données d’enquête ; en d’autres termes, ces analyses négligent la variabilité des ratios de saisonnalité. Cela signifie que les intervalles de confiance produits par ces analyses sont conservateurs ; ils devraient être plus larges.

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