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Contrairement aux autres commodités utilisées dans les sociétés modernes, l’électricité est extrêmement difficile à stocker et doit donc être produite au moment même où elle est consommée. De cette spécificité découle une organisation complexe du système électrique que nous décrivons dans la première partie de ce chapitre, organisation que vient encore complexifier la pénétration du renouvelable variable comme nous le montrons dans une deuxième partie. Partant de l’enjeu technique posé par l’utilisation de modèles dédiés à l’analyse du fonctionnement du système électrique pour des études de long terme, nous explicitons les stratégies adoptées par les modélisateurs pour intégrer des éléments propres à ce fonctionnement dans les modèles de prospective. Nous montrons alors que chaque stratégie présente des avantages et des inconvénients, et justifions le choix méthodologique retenu dans ce travail pour aborder la modélisation des évolutions à long terme des systèmes électriques.

2-A. Fonctionnement du système électrique

Dans cette partie, nous présentons le fonctionnement du système électrique en régime normal et en régime perturbé, nous explicitons ensuite le problème de la stabilité du système électrique, avant de présenter les analyses réalisées à court, moyen et long termes pour garantir un dimensionnement et une gestion adéquats de ce système.

2-A.1. L’équilibre production - consommation en temps réel : conduite et réglages

Les études amont réalisées lors de la planification du système électrique en permettent un dimensionnement adéquat afin qu’il soit en mesure de répondre à chaque instant à la demande, en minimisant les coûts et en limitant les risques de défaillance (partie 2-A.3). Les mécanismes de marché et les régulations mis en place dans le secteur électrique sont également autant d’outils visant notamment à accroître le niveau de qualité de la fourniture d’électricité (annexe A-1.2). Ces actions en amont ne peuvent toutefois dispenser les gestionnaires de réseau et les producteurs d’une bonne gestion en temps réel du système électrique. En régime dit « normal », cette gestion recouvre les activités de conduite et de réglage du système électrique.

2-A.1.a. Conduite en temps réel du système électrique

La conduite du système électrique consiste à « maintenir en permanence les conditions nécessaires d’un équilibre entre la production et la consommation » (Bornard, Pavard, et Testud 2005a, part. 1). Elle repose, en France, sur des centres de conduite, le centre national d’exploitation du système de

RTE et sept centres de conduite régionaux, chargés de surveiller les anomalies pouvant survenir sur le système transport-production, de définir les actions à mettre en œuvre en cas d’anomalie et de les faire exécuter aux installations (centrales de production et postes de transport). Pour mener à bien leur travail, les dispatchers disposent d’informations sur l’état du système électrique, fournies par un réseau de téléinformations et rafraichies toutes les dix secondes (Augé et Brunet 1989, part. 4,21).

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Lorsque production et consommation sont équilibrées, l’état du système électrique est caractérisé par la fréquence, commune à l’ensemble du système interconnecté (50 ou 60 Hz), et par les tensions électriques en chaque « point » du réseau. La fréquence fixe la vitesse de rotation des machines synchrones connectées à ce système. Les tensions sont imposées par les générateurs synchrones et les transformateurs en certains points, et varient essentiellement du fait des transits de puissance réactive comme nous le verrons par la suite (partie 2-A.1.c). Les plans de production étant établis la veille pour le lendemain (partie 2-A.3.b) et ajustés en infrajournalier, il ne s’agit pas tant pour les opérateurs du réseau de « maintenir l’équilibre entre la production et la consommation (…) que de maintenir la fréquence et la tension dans des limites contractuelles » (Bornard, Pavard, et Testud 2005a, part. 2.1). C’est le problème du réglage, intimement lié à celui de la conduite.

Enfin, le choix des groupes de production (et éventuellement des capacités d’effacement) permettant de répondre à la demande se fait sur un critère économique : c’est le principe d’empilement des centrales suivant leur coût marginal de production à la base de la formation des prix de l’électricité, et illustré par les Figure 2-20 et Figure 2-21. Dans la première figure, la

production renouvelable fatale (hydraulique au fil de l’eau, éolien, solaire, mais également cogénération aujourd’hui, auxquelles il faudra ajouter les énergies marines à l’avenir) est modérée.

La production en base est assurée par cette production renouvelable et du nucléaire. La production de pointe est assurée par les mêmes moyens auxquels il faut ajouter les centrales thermiques de semi-base (charbon, cycle combiné gaz) et les centrales thermiques de pointe (turbines à gaz et turbines au fioul). Ce cas de figure correspond à ce qui est aujourd’hui observé pour le système

électrique français. La deuxième figure correspond à un cas fictif avec une forte production renouvelable fatale, dans un système électrique similaire à celui de la première figure. Dans ce cas le nucléaire n’est utilisé que durant les périodes de forte consommation, et les centrales thermiques fossiles ne sont plus démarrées. En réalité, en présence de renouvelable variable, les deux cas de figure se succèdent selon que les conditions météorologiques sont favorables ou pas à cette production renouvelable. Sur l’année, cela conduit à une baisse du facteur d’utilisation des centrales utilisées en base comme de celles utilisées pour la pointe. La rémunération des moyens conventionnels, qui provient de la différence entre le prix de l’électricité (qui correspond au coût marginal du moyen marginal appelé) et leur coût marginal, s’en trouve donc réduite et ne couvre plus leurs frais fixes. La situation que nous venons de décrire suppose que les centrales peuvent être démarrées et éteintes au gré des besoins ce qui n’est pas le cas, notamment pour le nucléaire. Dans la réalité, une production fatale telle que décrite dans la Figure 2-21 nécessiterait :

 soit le remplacement des centrales nucléaires (ou d’une partie de ces centrales) par des moyens capables d’être démarrés et arrêtés rapidement (centrales thermiques fossiles, notamment turbines à combustion) ;

 soit d’accepter de perdre une partie de la production fatale ;

55 En réalité des critères techniques (temps d’arrêt et de démarrage des centrales), ou liés à la disponibilité des

groupes (hydraulicité, maintenance, pénurie de combustible), viennent interférer avec cette vision purement économique de l’empilement des centrales sur un critère de coût marginal.

56 La cogénération n’est pas nécessairement renouvelable (cogénération au gaz, au charbon, etc.).

57 On aurait également pu ajouter l’hydraulique de barrage et les STEPs aux centrales utilisées à la pointe (du

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 soit de stocker la production fatale en période de faible consommation et de la déstocker en période de pointe. Des centrales thermiques fossiles nécessiteraient alors peut-être d’être fermées ;

 soit d’exporter le surplus produit, selon les besoins des pays interconnectés.

Figure 2-20 : Schéma illustrant le mécanisme de formation du prix de l’électricité par empilement

des centrales sur critère de coût marginal, lorsque la production fatale est modérée.58

Figure 2-21 : Schéma illustrant le mécanisme de formation du prix de l’électricité par empilement

des centrales sur critère de coût marginal, lorsque la production fatale est importante.59

Toutefois ce « principe d’empilement des centrales par coût de production n’est possible que si à chaque instant le réseau est capable d’acheminer de l’électricité depuis les centrales produisant au

58 Dans le cas 1, la demande est faible, le nucléaire est le moyen marginal de production ; dans le cas 2, la

demande est élevée, le moyen marginal est une Turbine à Combustion au gaz ou au fioul.

59 Dans le cas 1, la demande est faible, les renouvelables fatales sont le moyens marginaux de production ; dans

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moindre coût » (Carrive 1991). La création d’un réseau électrique correctement dimensionné est donc l’un des éléments fondamentaux de la planification des systèmes électriques.

2-A.1.b. Le réglage de la fréquence

i. Fréquence et équilibre des puissances mécaniques

Sur les systèmes électriques la fréquence constitue un remarquable indicateur de l’équilibre entre production et consommation, du moins lorsque le synchronisme est partagé. En effet, tout écart

entre ces deux grandeurs se traduit automatiquement par une variation des vitesses de rotation des alternateurs (équation (2-1) qui n’est autre que la 2ème loi de Newton pour un solide en rotation). Les

vitesses de rotation sont l’image de la fréquence du système électrique via le nombre de paires de pôles du rotor (équation (2-2)). Ce lien entre l’équilibre production-consommation sur le système électrique et les variations de la fréquence est illustré par la Figure 2-22.

(2-1) 𝐽 𝑑𝛺 𝑑𝑡 = 𝐶 , − 𝐶 , (2-2) 𝛺 = 2𝜋𝑓 𝑝

Avec i un indice permettant de numéroter les alternateurs raccordés au réseau étudié ; Ji l’inertie de l’alternateur i ;

Ωi la vitesse de rotation du rotor de l’alternateur i ;

Cm,i le couple moteur de l’alternateur i (lié à la production d’électricité) ;

Cr,i le couple résistant opposé à l’alternateur i par le réseau (lié à la consommation d’électricité) ;

pi le nombre de paires de pôles de l’alternateur i ;

et f la fréquence du système électrique.

Afin de maintenir la fréquence autour de sa valeur nominale les opérateurs de réseau disposent généralement de trois réglages en fréquence :

 le réglage primaire de fréquence maintient l’équilibre production – consommation à une fréquence admissible ;

 le réglage secondaire ramène la fréquence à sa valeur nominale et rétablit les échanges contractuels entre les réseaux ;

 enfin, le réglage tertiaire permet de reconstituer les réserves primaire et secondaire suivant un critère d’optimum économique.

Nous présentons maintenant ces trois réglages plus en détail.

60 Par exemple, le système électrique japonais est séparé en deux zones fonctionnant à des fréquences

distinctes (l’une à 50 Hz et l’autre à 60 Hz), faiblement interconnectées par une liaison à courant continu capable de transporter une puissance de 1,2 GW (Fairley 2011).

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Figure 2-22 : Illustration du lien entre l’équilibre production-consommation et la variation de la

fréquence autour de sa valeur nominale (Fraisse et Karsenti 2014, fig. 3).61

ii. Le réglage primaire de fréquence

En régime permanent, la vitesse de rotation des machines est constante et fixée par la fréquence synchrone du réseau (50 Hz en Europe). Pour chaque machine il y a alors égalité entre son couple moteur et le couple résistant opposé par le réseau électrique. Suite à une variation brusque de la consommation ou de la production (écart par rapport à la prévision de consommation, panne d’un groupe, court-circuit d’une ligne électrique), le couple résistant perçu les machines varie également (variation ΔC du couple résistant Cr sur la Figure 2-23) entrainant une accélération ou une

décélération du rotor proportionnelle à cette variation. Cette accélération (respectivement ce ralentissement) va à son tour augmenter (respectivement réduire) le retard du champ statorique sur le moment magnétique du rotor, ce qui a pour effet de réduire (respectivement augmenter) le couple moteur (déplacement du point de fonctionnement de M en M’ sur la Figure 2-23). Sans action corrective, la vitesse de rotation des machines concernées, et donc la fréquence va s’établir à un nouveau point d’équilibre après quelques oscillations (Hare 2005, part. 1.2). En vertu de l’équation

(2-1), la fréquence aura donc été modifiée par rapport à la fréquence nominale (de Δf par rapport à f0

sur la Figure 2-23) et ce d’autant moins que l’inertie J des masses tournantes est importante.

Afin de ramener la fréquence à sa valeur nominale, il est nécessaire de modifier la puissance mécanique apportée par les turbines (déplacement du point de fonctionnement de M’ en M’’ sur la Figure 2-23). C’est le rôle du régulateur primaire de vitesse des groupes qui agit sur les organes d’admission du fluide moteur des turbines (Bornard, Pavard, et Testud 2005a, part. 3.2.1). Cette régulation, automatique et décentralisée au niveau de chaque groupe de production, permet ainsi

61 Si la production est supérieure à la consommation, la fréquence augmente, à l’inverse si c’est la

consommation qui est supérieure à la production, la fréquence diminue.

62 Ces oscillations sont nuisibles à l’alternateur et doivent être amorties par des enroulements spécifiques. 63 Toutes les installations de plus de 120 MW ne reposant pas sur une source fatale d’énergie primaire, et ayant

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de « répartir les fluctuations de la charge, dont la fréquence est l’image, au prorata des capacités nominales des groupes pondérées par un gain » suivant l’équation (2-3) (Bornard, Pavard, et Testud 2005b, part. 2.1.2).

Le régulateur primaire doit agir rapidement (en quelques secondes) pour limiter l’excursion en fréquence. Celle-ci doit en effet rester dans une plage de fonctionnement linéaire, c’est-à-dire que l’écart à la fréquence nominale doit être suffisamment limité pour que les lois de commande linéaires puissent s’appliquer.

(2-3) ∆𝑃 + 𝐾∆𝑓 = 0

Avec ΔP la variation de la puissance appelée sur le réseau ;

Δf la variation de fréquence du réseau par rapport à la fréquence nominale du fait de la variation de puissance appelée ;

K l’énergie réglante primaire, exprimée en MW/Hz, traduit la variation de puissance que doit fournir un réseau pour limiter la variation de fréquence à 1 Hz.

Figure 2-23 : Caractéristiques du couple moteur Cm et du couple résistant Cr en fonction de la

fréquence f (Bornard, Pavard, et Testud 2005a, fig. 5).64

L’Union pour la Coordination de la Transmission d’Electricité (UCTE) établit des recommandations, revues périodiquement, concernant aussi bien la puissance mobilisable pour le réglage primaire en fréquence (la réserve primaire) que l’énergie réglante primaire. En 2005, ces recommandations

40 MW pour les autres, ont obligation de participer au réglage primaire de fréquence suivant des modalités décrites dans l’article 4.1 de la documentation technique de référence de RTE (RTE 2013a).

64 Etape 1 : Modification du point de fonctionnement de la machine suite à une variation du couple résistant

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étaient de 3 000 MW pour la réserve primaire du système électrique européen interconnecté (dont une participation de la France à hauteur de 700 MW) et de 21 000 MW/HZ pour l’énergie réglante primaire (RTE 2013a).

L’énergie réglante primaire permet par ailleurs d’évaluer l’intérêt de fonctionner avec un système électrique interconnecté sur une grande étendue : RTE a en effet calculé que la perte d’une centrale nucléaire de 1 300 MW serait responsable en France, en la supposant non interconnectée au reste de l’Europe, d’une chute de fréquence de 260 mHz pour une participation de chaque groupe à hauteur de 13% de leur puissance nominale. Le même calcul effectué pour le système interconnecté européen donne une chute de fréquence de seulement 65 mHz avec une participation des groupes à hauteur de 3,2% de leur puissance nominale. L’interconnexion constitue donc un levier essentiel pour « mutualiser les participations au réglage primaire de fréquence et à chacun de réduire le dimensionnement de sa réserve primaire » (RTE 2004, 177).

Notons également que les gestionnaires de réseau de transport imposent des spécifications très précises aux différents groupes quant aux temps de réponse de leur réserve primaire. En France, RTE requiert par exemple que les installations soumises à l’obligation de participation à la réserve primaire puissent augmenter leur puissance active de 2,5% de leur puissance maximale en moins de 30 secondes, et de la moitié de cette valeur en moins de 15 secondes pour tout écart de fréquence négatif de moins de 200 mHz. Cette puissance doit alors pouvoir être maintenue durant 15 minutes (RTE 2013a).

iii. Le réglage secondaire de fréquence

Malgré la valeur généralement élevée de l’énergie réglante, tout déséquilibre entre la production et la consommation d’électricité se traduira toujours par un léger décalage de la fréquence par rapport à sa valeur nominale sous la seule action du réglage primaire. De plus, ce réglage conduit à une désoptimisation du plan de production qui peut notamment affecter les échanges entre réseaux voisins. C’est le réglage secondaire de la fréquence, également automatique mais centralisé, qui a pour rôle de ramener la fréquence à sa valeur nominale et de rétablir les échanges contractuels entre les réseaux. Afin de ne pas perturber le fonctionnement du réglage primaire, le réglage secondaire intervient avec un temps de réponse plus long, de l’ordre de quelques minutes. En France toutes les installations de plus de 120 MW ont obligation de participer au réglage secondaire de fréquence et doivent pouvoir fournir 4,5% de leur puissance maximale à ce titre. Afin de pouvoir participer à ce réglage, les installations doivent être munies d’un dispositif capable de recevoir le signal de consigne envoyé par RTE et d’ajuster leur production en fonction de ce signal (RTE 2013a). Selon les jours de l’année, la France doit participer à cette réserve secondaire à hauteur de 500 à 800 MW (Bornard, Pavard, et Testud 2005b, part. 2.1.3).

iv. Le réglage tertiaire de fréquence

La vocation des réglages primaire et secondaire est de faire rapidement face aux déséquilibres qui peuvent survenir sur un système électrique. Ils ne peuvent toutefois pas compenser durablement un écart entre la production et la consommation. C’est le rôle du réglage tertiaire en fréquence, qui permet de rétablir les réserves primaire et secondaire en cas de futurs déséquilibres, de se substituer à d’éventuels groupes indisponibles, et de modifier la localisation géographique de la production en cas de perte d’un ouvrage du réseau de transport. En France cette réserve tertiaire est toujours

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supérieure à 1 500 MW de manière à pouvoir faire face à la perte du plus gros groupe (Bornard,

Pavard, et Testud 2005b, part. 2.1.4). Contrairement aux réserves primaire et secondaire, l’appel à cette réserve se fait manuellement, par appel téléphonique des centres de conduite de RTE vers les centres de conduite des centrales. Il existe en réalité plusieurs niveaux de réserve tertiaire, classés selon leur temps d’activation, et ce afin de pouvoir faire face à des variations plus ou moins rapides de l’écart entre production et consommation. Les groupes les plus rapidement mobilisables sont ainsi activés en moins de 13 minutes alors que d’autres ne le seront qu’en quelques heures (RTE 2013a). Notons que sur certains réseaux, dont la France depuis 2003, les acteurs participant à la réserve tertiaire sont mis en concurrence via un mécanisme d’ajustement, ce qui permet de sélectionner

les meilleures offres sur un critère de préséance économique. Le règlement financier des écarts liés à l’ajustement des productions (et des consommations en cas d’effacement) se fait alors via les responsables d’équilibre (annexe A-2.1.a) à un prix indexé sur les prix SPOT de référence (Commission de Régulation de l’Energie 2016f).

La correction des déséquilibres entre la production et la consommation sur les systèmes électriques repose donc sur une succession de régulations qui interviennent à différentes échelles temporelles : l’énergie cinétique des masses tournantes (les rotors des alternateurs) permet de compenser le déséquilibre pendant les premières secondes, puis les réserves primaires prennent le relais, avant d’être remplacées par les réserves secondaires au bout de quelques minutes, et enfin par les réserves tertiaires. Cet empilement des régulations est illustré par la Figure 2-24.

65 L’ENTSO-E préconise que chaque pays puisse pallier la perte de son plus gros groupe en moins de 15

minutes. En France, c’est la somme des contributions de la réserve secondaire et de la réserve tertiaire mobilisable en moins de 15 minutes, la réserve rapide (1 000 MW), qui jouent ce rôle et représentent a minima 1 500 MW. Dans un deuxième temps la réserve tertiaire complémentaire (500 MW), mobilisable en moins de 30 minutes, vient se substituer à la réserve secondaire (Commission de Régulation de l’Energie 2016f).

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Figure 2-24 : Succession des régulations utilisées suite à une baisse de fréquence pour résorber un déséquilibre production-consommation (Fraisse et Karsenti 2014, fig. 4).

2-A.1.c. Le réglage de la tension

i. Plan de tension et transmission de puissance

Contrairement à la fréquence, la tension est une grandeur locale du système électrique. Sur un système donné, elle est fixée en certains points, et dépend des transits de puissance sur le reste du réseau. Afin de bien comprendre comment peut être ajustée la tension, il est donc nécessaire de la relier aux valeurs des éléments constitutifs du réseau. Pour cela, le schéma équivalent d’une ligne de la Figure 2-25 est adopté.

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Figure 2-25 : Schéma en π d’une ligne électrique reliant un nœud i et un nœud j (Bornard, Pavard, et Testud 2005a, fig. 3).67

Sur les lignes à haute tension les effets résistifs (Rij) et capacitifs (Cij) sont négligeables devant les

effets inductifs (Xij) en première approximation. Sous cette hypothèse, les relations entre les tensions

Vi, Vj et le courant circulant sur la ligne s’obtiennent par une représentation de Fresnel (Figure 2-26),

et sont données par les équations (2-4) et (2-5).

Figure 2-26 : Diagramme de Fresnel des tensions correspondant à la Figure 2-25.68

(2-4) 𝑋 𝐼 = 𝑉 𝑠𝑖𝑛 ∆𝜃

(2-5) 𝑉 = 𝑉 𝑐𝑜𝑠 ∆𝜃

La puissance active transmise (Pij) s’exprime alors par la relation suivante :

(2-6) 𝑃 = 𝑉 𝐼 =

𝑉 𝑠𝑖𝑛 2∆𝜃 2𝑋

La puissance transmise est donc maximale pour un déphasage de π/4 et vaut alors Vi²/2Xij. Or, en

maintenant la tension Vj à la valeur Vi, la puissance maximale transmise est égale à Vi²/Xij soit deux