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Les fonctions de l’alternance codique

Dans le document Analyse de discours (Page 47-50)

Chapitre 2 : L’alternance codique

2.1. Remarques générales et aspects théoriques

2.1.2. Les fonctions de l’alternance codique

Les études faites en contexte d’hétérogénéité linguistique et ethnolinguistique ont démontré que les choix linguistiques correspondent à des stratégies communicatives. Cela a amené les chercheurs à s’intéresser à la dimension fonctionnelle de l’alternance. Et dès lors, ils ont essayé de décrire les mécanismes explicatifs d’AC. À partir de là il y a eu deux tendance de chercheurs qui ont présenté des interprétions distinctes : les uns se fondent pour l’explication de AC sur les facteurs internes ou linguistiques et les autres se basent sur tout ce qui est externe ou extralinguistique (c'est-à-dire psychologique ou social).

Clyne (1967) est l’un des auteurs qui explique l’alternance codique dans la conversation par des facteurs linguistiques. Pour lui, il y a des éléments linguistiques préalablement utilisés par le locuteur ou l’interlocuteur qui jouent le rôle de déclencheur du changement de langue .Il classe ces déclencheurs en quatre types :

1- Le « déclenchage conséquent » qui survient lorsque le locuteur doit utiliser un lexique commun aux deux langues

2-Le « déclenchage anticipatoire » intervient quant à lui quand le locuteur utilise un élément commun entre les deux langues.

3- « Le déclenchage en « sandwich », qui résulte de l’apparition d’éléments communs placés entre des mots logiques » (Zongo, 1996 :2)

48 4- Le « déclanchage contextuel »est produit par les éléments qui organisent le contexte (situation de communication).

D’autres chercheurs, après Clyne, ont développé le répertoire des facteurs de l’alternance codique en prenant aussi en compte les facteurs externes (c’est-à-dire facteurs extralinguistiques : psychologiques ou sociaux). Dans cette perspective, Valdès-Fallis(1978) explique l’alternance par des schémas comprenant deux types de facteurs nous les citons ci-dessous tels que donné par Zongo(idem) :

1) facteurs externes qui sont : a-les rôles sociaux (alternance situationnelle), b-les

contextes (situation de communication, sujet de conversation, contexte physique), c- les marqueurs d’identité, d-les noms propres, e- les citations et les paraphrases (dans la même langue employée par le locuteur).

2) Facteurs internes :

a- La fréquence relative d’éléments d’une des langues,

b- Le besoin lexical lié à des phénomènes de domination linguistique ou à des trous de mémoire,

c- Le déclanchage par certains mots,

d-Les préformulations relevant de la routine linguistique, e-Les marqueurs de discours (embrayeurs),

f- Les citations et les paraphrases formulées dans une langue autre que celle utilisée par la personne citée,

g-Les figures de rhétorique (emphase, contraste) qui aboutissent à l’alternance métaphorique,

h-La reprise dans une réplique de la dernière langue utilisée par le locuteur précédent, i-La modulation du mélange des langues proportionnellement à l’interlocuteur.

Nous remarquons qu’il y a une certaine ambiguïté quant à la distinction entre facteur externe et facteur interne puisque des facteurs tels que « les marqueurs d’identité » et « les noms propres » rangés dans la catégorie des facteurs externes peuvent être considérés comme des facteurs internes puisqu’ils se rapportent à des composantes linguistiques.

Parallèlement à ces approches qui s’articulent autour de la notion de facteur pour appréhender l’alternance, des auteurs tels que Scotton et Ury (1977), Saville-Troike (1982) et Gumperz (1989) se fondent dans leur approche sur la motivation (au sens d’intentionnalité) de l’alternance codique et parlent non pas de facteur mais de fonction. Saville-Troike (1982) dégage huis fonctions de l’alternance codique :

49 1) Adoucissement/renforcement d’une demande ou d’un ordre,

2) Répétition pour intensifier ou pour éliminer l’ambiguïté, 3) Humour/citation/imitation,

4) Message idéologique (noms propres), 5) Besoins lexical,

6) Exclusion d’un tiers locuteur, 7) Stratégie d’évitement,

8) Stratégie de réparation (changement d’une langue estimée inadaptée).

Nous pouvons remarquer ici aussi une certaine ambiguïté puisqu’une fonction comme celle du « message idéologique » peut très bien renvoyer à un facteur.

Gal (1979), s’inscrivant dans la même tendance que ces chercheurs, va tenter de mettre en corrélation AC et le degré de familiarité. A partir d’un corpus bilingue allemand/hongrois recueilli en Autriche chez des locutrices femmes, il a voulu savoir avec quels interlocuteurs, elles allaient soit utiliser une seule de ces langues soit les deux à la fois. Et il est arrivé à la conclusion que l’AC apparaît dans les échanges avec des personnes proches (famille, amis…) par contre les échanges à caractères plus officiels se font en une seule langue (soit en allemand ou bien en hongrois).

Pour notre part, nous allons nous inspirer dans notre travail de recherche pour l’interprétation de la typologie des fonctions conversationnelles de l’alternance codique telles que dégagées par Gumperz et cela même si comme l’affirme l’auteur « une liste de fonctions ne peut expliquer à elle seule ce que sont les bases linguistiques de la perception de l’auditeur, ni comment elles affectent le processus d’interprétation » (1989 :82). Gumperz a dégagé six fonctions à partir de l’analyse de conversations où il y avait une alternance entre hindi et anglais, espagnol et anglais et slovène et allemand:

a- la citation et le discours rapporté : l’auteur constate qu’en situation de communication bilingue, le locuteur qui rapporte reprend les mots du locuteur x en utilisant la langue dans laquelle ils ont été énoncés.

b- La désignation d’un interlocuteur : le locuteur passe d’un code à l’autre pour s’adresser à un locuteur (bilingue) choisi parmi plusieurs autre locuteurs présents.

50 c- Les interjections : pour Gumperz, les exclamations et les mots de transition servent comme marqueur stylistique d’identité ethnique et sont souvent employés par les locuteurs qui ne maîtrisent pas assez la langue dans laquelle se produit l’alternance.

d- Les réitérations : ici l’alternance a une fonction paraphrastique. Gumperz déclare à ce sujet « il est fréquent qu’un message exprimé d’abord dans un code soit répété dans un autre, soit littéralement, soit sous une forme quelque peu modifiée. Dans certains cas ces répétitions peuvent servir à clarifier ce qu’on dit, mais souvent elles ne servent qu’à amplifier ou à faire ressortir un message » (p77).

e- La modalisation d’un message : pour l’auteur, la fonction de l’alternance « consiste à modaliser des constructions telles que phrases et compléments du verbe, ou prédicats suivant une copule » (p78).souvent le locuteur modalise ou précise le contenu d’une proposition principale à l’aide d’une deuxième phrase énoncée dans une autre langue. f- La personnalisation versus l’objectivation du message : sous cette fonction sont

regroupés divers éléments tels que : « la distinction entre parler de l’action et parler en tant qu’action », contester une affirmation et la rectifier, s’impliquer ou ne pas s’impliquer dans le message produit (ici le changement de code indique le degré d’implication du locuteur dans son énoncé) et exprimer une opinion personnelle versus un fait généralement admis.

Dans le document Analyse de discours (Page 47-50)

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