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INTRODUCTION

Les eaux de rivières sont issues d'un mélange d'eaux météoriques empruntant des parcours variés dans le sol et le sous-sol. Ces parcours s'accompagnent d'un fort contraste de temps de séjour. Dans le détail, le concept des zones contributives variables, communément admis, décrit 3 processus d'écoulement distincts : (1) le ruissellement par excès d'infiltration (partial-area overland flow) ; (2) l'écoulement superficiel de saturation (saturation overland

flow) et (3) l'écoulement souterrain (subsurface flow) qui regroupe l'écoulement

hypodermique et les écoulements souterrains de nappe (Cappus, 1960; Hewlett et Hibbert, 1967). La contribution respective de l'une ou l'autre de ces composantes dépend en particulier du contexte physique du bassin versant (notamment la topographie, le type de sol, la profondeur du saprolite, la végétation, les fractures, la densité du réseau) et des conditions climatiques (notamment la hauteur des précipitations, les variations saisonnières des précipitations, la température, l'évapotranspiration) et des activités anthropiques (notamment l'irrigation, les barrages, les gravières, les activités agricoles). Ces conditions déterminent en effet la quantité d'eau qui contribue directement aux eaux de rivières par lessivage des horizons superficiels, la quantité d'eau stockée temporairement à la surface sous la forme de glace, de neige ou dans des lacs et la proportion d'eau qui s'infiltre. Avant d'atteindre les rivières les eaux de précipitations présentent donc des temps de résidence variables sur le bassin versant. Ces temps sont un des paramètres qui déterminent l'intensité des interactions eau-roche, processus au cours desquels l'altération chimique des roches aboutit à la mise en solution de certains éléments qui sont transférés par la suite vers les eaux de rivières.

Dans un premier temps nous avons cherché à caractériser le trajet de l'eau dans les sols et à proposer des temps de résidence moyens à partir de l'étude de la composition isotopique en H de l'eau. En effet sous climat continental, les variations de la composition isotopique en deutérium et en oxygène des précipitations suivent un cycle saisonnier été-hiver (Gat et Dansgaard, 1972; Yurtsever, 1975). Ce signal se propage ensuite dans la partie supérieure des sols. Le délai de réponse des eaux de sols à ces variations cycliques, si celui-ci est significatif, peut nous permettre de tracer les mouvements de l'eau dans les sols et d'estimer des temps de résidence moyens. Cette étude à fait l'objet d'un article soumis à la revue Journal of

Hydrology, présenté ici sous la forme d'une section rédigée en anglais. Les variations

météorologique du «Réseau France Agro-Clim» à Mirecourt avec un pas de temps journalier. Pour la même période temporelle, les valeurs δD des eaux de sols, prélevées par deux techniques (drainage et bougies poreuses) sur une même parcelle agricole (la parcelle expérimentale «La Justice», INRA Mirecourt) ont été comparées. Les sols de cette parcelle expérimentale sont caractéristiques du sous-bassin du Madon sur le plateau lorrain, ainsi les résultats obtenus précédemment ont permis d'interpréter, à plus grande échelle, les flux d'alimentation en eau de cette rivière. Les compositions isotopiques en H, obtenues sur les eaux du Madon et des eaux de source prélevées avec un pas de temps bimensuel, ont été comparées à celles obtenues sur les eaux de précipitation et les eaux de sols échantillonnées durant la même période, entre mars 2003 et octobre 2005 (période incluant la «sécheresse de l'été 2003», perturbation majeure du système hydrologique). Ce suivi régulier de la composition isotopique en H des eaux sur un bassin versant agricole est complémentaire à l'étude réalisée sur des bassins versants forestiers dans les Vosges dans le cadre de la thèse d'Angéli (en cours). Enfin nous avons cherché à élargir nos interprétations à l'ensemble du bassin versant de la Moselle par l'analyse des valeurs de δD d'eaux de rivières correspondant à différents régimes hydriques (échantillonnage préliminaire limité à 7 campagnes de prélèvement pour des raisons logistiques).

Ce travail propose une estimation qualitative des temps de résidence de l'eau sur le bassin de la Moselle. Déterminer précisément des temps de résidence par modélisation hydrologique, principalement à partir de modèles non déterministes dits de «boîte noire» (lumped-parameter approach, Kendall et Doctor, 2004), nécessite un nombre de données plus important et un pas échantillonnage plus précis par rapport aux données présentées ici. Les données δD obtenues pour les rivières du bassin de la Moselle, bien que préliminaires, ont été confrontées aux données de flux obtenues par les études hydrologiques classiques. Ces résultats ont permis, dans un premier temps, de tester les potentialités du traçage isotopique pour identifier les trajets de l'eau et de proposer les premières interprétations. Ce travail a permis également de dégager des perspectives concernant la poursuite de cette étude et de définir la stratégie d'échantillonnage à venir (durée du suivi, pas de temps de prélèvement), l'objet à terme de cette démarche étant d'estimer quantitativement les temps de résidence de l'eau sur le bassin versant.

1. TRAJET ET TEMPS DE REPONSE DES EAUX DE SOL

Sous climat continental, les variations de la composition isotopique en deutérium et en oxygène des précipitations suivent un cycle saisonnier été-hiver. Lorsque ce signal se propage dans les horizons superficiels des sols, le délai de réponse de l'eau de sol à ces variations cycliques (si ce délai est significatif) est susceptible de tracer les mouvements de l'eau et de permettre d'estimer des temps de résidence moyen. La composition isotopique en H des eaux de sols, prélevées par deux techniques (drains et bougies poreuses) sur une même parcelle expérimentale ("La Justice", INRA Mirecourt) sont comparées à celle des eaux de pluie prélevées journalièrement à la station météorologique de Mirecourt du “Réseau France Agro-Clim” pour la période de octobre 2003 à septembre 2004. Les deux techniques de prélèvement sont couramment utilisées dans les études agronomiques concernant la qualité et la dynamique des eaux dans les sols et sont considérées comme équivalentes.

Les eaux collectées par drainage présentent des variations prononcées de leur composition isotopique en deutérium (≈25‰) qui suivent un cycle saisonnier. Cependant l'amplitude de ces variations est inférieure à l'amplitude annuelle des précipitations mensuelles à Mirecourt (≈80‰). L'eau de sols collectée par des bougies poreuses présente des variations isotopiques faibles (≈5‰). Ainsi, ces deux techniques de prélèvement d'eau de sol ne sont pas équivalentes et correspondent à des eaux ayant des dynamiques différentes : 1) une infiltration rapide selon des trajets préférentiels (fissures, fentes de dessiccation) dans les sols pour l'eau prélevée par drainage (temps de résidence court). 2) un temps de résidence plus long pour l'eau prélevée par bougies poreuses. Par ailleurs, le temps de résidence des eaux de sols collectées par drainage dépend de la période de l'année. Entre mars et mi-décembre, le renouvellement de l'eau dans les sols est limité et le temps de résidence de l'eau est probablement de quelques mois. Entre mi-décembre et février, lorsque la hauteur des précipitations est la plus importante, les eaux de sols colletées par drainage intègrent immédiatement les variations du signal entrant (hauteur et valeurs δD des précipitations). Entre février et mi-mars, le temps de résidence de l'eau dans les sols est un peu plus long, de 2 à 3 semaines. Quelque soit la période d'échantillonnage, les eaux de sols prélevées par drainage correspondent toujours à un mélange entre de l'eau nouvelle des précipitations et de l'eau plus ancienne déjà présente dans les sols.

Evidence of preferential flowpaths and time residence of soil

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