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FluCTuATioNs et méandres

Un volume d’eau s’écoulant en ligne droite augmente sa vitesse lorsqu’il fait une courbe. Il provoque alors un ravinement des rives extérieures. Tout le long de l’histoire, la Garonne a façonné son paysage au rythme des déplacements de ses méandres. Ses eaux ont buté sur des terrasses, ont envahi des plaines, ont détourné et renforcé des talus. Face au village ancien de Fenouillet installé en rue et en limite d’une terrasse d’environ 2m de haut, s’étend un territoire mouvant d’anciens bras du fleuve. Les projets de complexe nautique s’installent délibérément dans ce territoire, en vis-à-vis du village, utilisent le site et les modelés de terrain pour se rapprocher du fleuve, voire utiliser son eau filtrée pour une baignade dans un méandre recomposé ou une gravière détournée.

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Contrepoints

Une archéologie le long de Garonne,

Christian Darles

De l’eau, de l’homme, de la nature et de la Ville,

Noël Jouenne

Aperçus du Territoire Garonne

Bulle Chauliac

Les temporalités des paysages fluviaux urbains : approche géohistorique.

Philippe Valette, Jean-Michel Carozza

Habiter le fleuve

Figures anthropologiques d’un imaginaire urbain

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« Comme Toulouse, beaucoup de villes françaises trouvent leur origine à l’époque romaine et certaines ancrent mêmes leurs racines jusqu’à l’époque gauloise, la Ville rose présente une rare originalité : la ville gauloise citée par Cicéron (voir Documents) devant le sénat romain dans les années 70 avant notre ère a conservé son nom inchangé au fil des siècles : Tolôssa elle fut, Toulouse elle demeure ! »1. L’histoire urbaine de Toulouse offre d’autres caractéristiques originales qui

compliquent la compréhension de sa genèse et ont contribué à éroder la mémoire de ce passé prestigieux :

La ville d’aujourd’hui est centralisée même si elle s’étend très au delà de son centre historique enserré dans son rempart romain et médiéval, mais l’histoire de la ville dépasse encore plus largement ce noyau romain et médiéval visible car la ville gauloise est située au sud, déjà bicéphale avec son agglomération haute à Vielle Toulouse et son centre économique et commercial non loin de la Garonne, dans le quartier Saint-Roch, près de la caserne Niel. Au nord ouest, existe très tôt un centre monumental romain au lieu dit Ancely, en rive gauche au confluent du Touch et de la Garonne, comme les faubourgs de ville médiévale. La ville impériale, « Palladienne » selon Martial (voir Documents), est créée ex-nihilo sur la terrasse de la rive droite juste au-dessus du gué principal qui s’appellera plus tard le Bazacle. Sa superficie est de 90 hectares et son enceinte en brique célébrée par le poète Ausone (voir Documents) mesure trois kilomètres.

La topographie urbaine s’est construite dans un cadre géographique complexe associant : la Garonne, utilisée comme voie fluviale liée aux transports et aux commerces ; •

les gués, comme franchissements du fleuve et qui relient deux territoires agricoles riches : •

les collines de l’actuel Gers et les terreforts du Lauragais ;

les divers confluents (Ariège/Garonne en amont et Touch/Garonne en aval), lieux •

symboliques de la présence multi millénaires des hommes ;

la plaine, adossée aux Pyrénées et largement ouverte sur l’Aquitaine ; •

le débouché de la voie romaine qui en provenance de la Méditerranée relie la Garonne •

à la Méditerranée en créant le premier passage entre les deux mers à l’emplacement de l’isthme le plus étroit.

Cependant rien ne peut se comprendre sans cette volonté politique et culturelle à se positionner en tant que lieu permanent incontournable ; point de rupture de charge, Toulouse se situe à la rencontre d’une route terrestre et du fleuve Garonna qui relie tant bien que mal les Pyrénées et l’Océan. Ce lieu de commerce l’est à double titre, d’une part à Tolosa arrivent les céréales de ses territoires qui sont ensuite chargées soit sur des embarcations pour descendre jusqu’à Burdigala (Bordeaux) soit sur des charrois en direction de Narbo Martius (Narbonne), d’autre part les amphores de vin et d’huile en provenance de la Mare Nostrum par la « voie d’Aquitaine » étaient déchargées à l’emplacement du quartier Saint-Roch puis partiellement réembarquées sur la Garonne2. Si la ville gallo-romaine est

située dans la province Narbonnaise dès la fin du 2e siècle av. notre ère, c’est bien en considérant l’ample boucle de la Garonne où se situe la capitale des Volcae Tectosages (Volques Tectosages) comme une position géostratégique nécessaire au bon fonctionnement du commerce romain.

Mais Tolosa durant l’Antiquité et ce dès César est un haut lieu de la culture latine qui reçoit le titre envié de colonie dès l’époque augustéenne, est célèbre pour ses enseignements de droits, des lettres et des arts libéraux. Elle est aussi connue pour son urbanisme et ses monuments publics dont sont fiers la cité et ses habitants. Mais la notoriété reste fragile et subjective même si la ville « avait atteint un degré d’honorabilité qui découlait de la fierté d’être une cité régie selon les normes romaines » comme le signale P. Le Roux3.

Nous conclurons en évoquant un débat déjà ancien mais sans cesse renouvelé, celui des lacs sacrés de la ville. L’eau à Toulouse n’est pas uniquement celle de la Garonne, il y a l’Hers et de nombreux autres petits ruisseaux comme le Sauzat qui draine les zones humides du quartier du Busca. Il y a aussi les nombreux puits, un chapelet de sources qui ponctuent les hauteurs du Calvinet en rive droite et les flancs de la terrasse de Lardenne en rive gauche. Captées, leurs eaux alimenteront les fontaines et les thermes de la ville intra muros. Enfin, il y a ses étendues d’eau que l’on retrouve tout autour de la ville tant au nord vers Borderouge que vers le sud au Saouzelong. Est-ce dans ces

1. M. Vaginay, 27e journées du Patrimoine, DRAC Midi-Pyrénées, septembre 2010

2. La société « Archeodunum » en charge des fouilles préventives effectuées à l’emplacement de l’ancienne caserne Niel a mis au jour plus de cinquante tonnes de tessons d’amphores italiques.

3. Le Roux, P., « Sur Toulouse et les Toulousains sous l’Empire Romain », in Ab Aquitaniam in Hispaniam, Mélanges

d’histoire et d’archéologie offerts à Pierre Sillières, Pallas, 82, Toulouse, 2010, p. 133

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