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Flexibilité dans le secteur forestier

Dans le document la flexibilité défensive (Page 52-57)

CHAPITRE II. INNOVATION: LEVIER POUR L'AVENIR DU FORESTIER

2.3 Flexibilité dans le secteur forestier

Bien que beaucoup reconnaissent l'importance d'innover au sein de l'industrie forestière, peu de travaux scientifiques ont touché spécifiquement l'innovation dans le secteur de la forêt et l'apport pour le développement des régions. Comme nous l'avons

termes de flexibilité pour les entreprises forestières. Pour lui, « l'impartition flexible » est un modèle de développement caractérisé par deux grandes composantes défini comme suit

D'une part, l'impartition, c'est-à-dire la multiplication des pratiques d'externalisation du travail, depuis l'essor de la sous-traitance jusqu'aux formes contemporaines de délocalisation des entreprises et de restructuration des dernières en réseaux. D'autre part, une dynamique de quête de flexibilité tous azimuts, particulièrement au chapitre des flexibilités technique, fonctionnelle, financière, salariale et numérique. (Mercure, 1996, p.134)

Selon cet auteur, l'impartition flexible s'avère être le scénario de sortie de crise du fordisme des entreprises forestières. Par contre, cette nouvelle stratégie de développement nécessite une transformation des systèmes de production. La mécanisation de leurs opérations ne permet pas une production flexible. Une flexibilité de la production favoriserait l'adaptation des entreprises face aux nouvelles exigences du marché. La recherche de nouvelles formes de flexibilité s'impose devant la concurrence internationale de plus en plus vive. L'impartition flexible augmenterait la performance des entreprises. Ces dernières seraient plus rentables. La vitalité économique des régions serait ravivée (Mercure, 2001). Toutefois, la flexibilité que documente Mercure est une flexibilité défensive puisqu'elle implique l'essor de la sous-traitance, une réduction du volume de main-d'oeuvre et l'informatisation de la production (Mercure, 1996).

L'article publié par Gingras et Carrier (2006) se distingue parmi les études restreintes sur l'importance indéniable de l'industrie forestière dans le développement.

Ces auteurs ont analysé le rôle socio-économique joué par les coopératives forestières du Québec selon la diversification de leurs activités en soulignant leur caractère parfois

novateur. Pour ces auteurs, l'innovation est associée à de nouveaux produits plutôt qu'à d'autres formes d'innovation possible. L'article de Gingras et Carrier classifie les coopératives forestières du Québec selon leur niveau d'innovation, c'est-à-dire l'ajout de valeur ajoutée à leur production. Dans ce contexte, la transformation de la matière ligneuse et non ligneuse qui reste disponible, pour en augmenter la valeur ajoutée, devient un option capitale pour maintenir les niveaux de profits et d'emplois dans les entreprises forestières (Gingras et Carrier, 2006). Selon leur regroupement, une coopérative forestière traditionnelle n'effectue aucune activité de transformation. Elle se concentre alors dans l'extraction brute de la matière ligneuse. Les coopératives spécialisées seulement dans la première transformation sont considérées comme étant moyennement innovante. Celles qui ont des activités de deuxième et de troisième transformation sont quant à elles des coopératives innovantes

(Mid).

Reprenons cette façon de voir l'innovation en associant l'innovation avec le développement de produits de deuxième et troisième transformation. Ainsi, une entreprise qui développe et met sur pied un produit en bois à valeur ajoutée, donc un produit de deuxième ou troisième transformation, réalise une activité innovatrice. Par ailleurs, une entreprise qui exploite la forêt et fabrique des produits forestiers à faible valeur ajoutée, un produit de première transformation, réalise quant à elle une activité traditionnelle. La perspective de Gingras et Carrier, qui associe les activités de seconde et troisième transformation comme étant des activités innovatrices, vient compléter celle de Lipietz et Leborgne (1992), qui affirme que la flexibilité offensive privilégie, entre autres, le savoir et les savoir-faire des travailleurs ainsi que le développement de nouveaux produits et procédés en fonction de perspective de nouveaux marchés. II est

ainsi possible d'établir un lien entre la flexibilité offensive et les activités de seconde et troisième transformation. Ce lien est approximatif dans la mesure où il ne tient compte que de l'innovation au niveau de la fabrication des produits sans tenir compte des autres formes d'innovation possibles. Toutefois, cette association est partagée par plusieurs, notamment par Gingras et Carrier.

Par le passé, l'industrie forestière a innové principalement sur le plan technologique, en recourant aux meilleures technologies possibles pour l'extraction et la fabrication, sans nécessairement s'attarder à la fabrication de nouveaux produits à valeur ajoutée ou à tisser des liens avec les collectivités (ou dans la dynamique locale).

Le défi pour les industries forestières canadiennes est de remédier à cette situation en développant des produits de plus en plus diversifiés et transformés, et en établissant des liens avec les institutions et les acteurs du développement régional. En bref, les entreprises d'aujourd'hui évoluent dans un contexte difficile. La mondialisation transforme l'offre et la demande devant la concurrence des pays qui produisent à moindre coût. Aujourd'hui, l'innovation est considérée comme l'un des principaux leviers à la croissance et une voie à suivre pour faire face à cette période de mutations sectorielles que traverse le Canada. Le modèle de développement se retrouve transformé. Il est dorénavant basé sur de nouveaux rapports de production tels que la flexibilité et l'innovation continue. Cette approche préconise l'exploitation et la mise en valeur durable des ressources naturelles ainsi que l'invention de nouveaux produits et procédés afin de donner un nouveau souffle aux ressources. L'innovation serait ainsi un levier à la croissance économique, elle-même étant un moyen de parvenir au développement.

La rigidité de la stratégie défensive entraîne une incapacité d'adaptation des entreprises face aux changements qui surviennent dans la nouvelle structure économique mondiale. De ce fait, la stratégie offensive élaborée par Lipietz et Leborgne semble mieux adaptée que sa consoeur défensive dans le contexte actuel du post-fordisme. La stratégie offensive offre une souplesse nécessaire pour l'adaptation rapide de la production face aux changements de la demande (diversification des produits).

Mais présentement, quelle place occupent les activités forestières innovatrices dans ce contexte de crise? À l'instar de Lipietz et Leborgne, nous avançons l'hypothèse que les activités forestières qui s'inscrivent dans la stratégie de flexibilité offensive résistent mieux à la crise et aux défis que posent le post-fordisme. Nous nous attendons à voir une diminution plus marquée des activités forestières rattachées à la stratégie défensive comparativement aux activités forestières liées à la stratégie offensive. Nous allons tenter de vérifier cette hypothèse dans ce mémoire, notamment par la collecte de données auprès de quatre provinces canadiennes, soit le Québec, l'Ontario, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick. La comparaison entre ces informations récoltées nous permettra de voir si les trajectoires diffèrent ou non entre ces grandes régions forestières canadiennes. Mais avant tout, nous allons décrire notre démarche méthodologique pour la collecte de données et surtout pour la distinction des activités forestières offensives des activités forestières défensives. Enfin nous allons exposer les résultats de notre cueillette afin d'obtenir une réponse empirique à notre hypothèse initiale.

Dans le document la flexibilité défensive (Page 52-57)