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TITRE I. L’ACCÈS AUX FONCTIONS DES DIRIGEANTS

TITRE 2. LA FIN DE FONCTIONS DES DIRIGEANTS

68. Les fonctions d'administrateur prennent normalement fin à l'expiration du mandat

social (Chapitre 1) ou à la suite d’une la révocation décidée par l’AG (Chapitre 2).

CHAPITRE 1. L’EXPIRATION DU MANDAT SOCIAL

69. Principe du mandat quinquennal.- De la combinaison des articles 150.1 et 157.2 de

la Loi sur les Entreprises 2014, il résulte que le mandat des administrateurs ne doit pas dépasser cinq ans et ils peuvent être rééligibles. Ainsi, cela implique que la fonction d’un administrateur est terminée lorsque son mandat quinquennal est expiré. Dans une certaine mesure, le terme du mandat semble un moyen efficace pour éteindre l’ambition des dirigeants sociaux utilisant la “stratégie d’enracinement” c’est-à-dire qu’ils cherchent à

maintenir leurs pouvoirs et augmenter leurs rémunérations111.

70. Pourtant, la loi ne prévoit pas comment se calcule la durée du mandat des

administrateurs. Cela a entrainé une ambiguïté dans l’interprétation du terme du mandat de 5 ans et suscite des disputes au sein des sociétés. À titre exemple, on peut citer l’affaire Natraco. En espèce, deux administrateurs révoqués de la société anonyme Natraco ont intenté une action d’annulation de la résolution de l’assemblée générale du 7 avril 2007 portant sur l’élection d’un nouveau CA pour le mandat 2007 - 2011. Le motif invoqué par les demandeurs est que la nomination du nouveau CA a violé l’article 109.1 de la Loi sur les Entreprises 2005 selon lequel « le mandat du conseil d'administration est de cinq

ans ». Les demandeurs prétendaient que leur mandat quinquennal n’atteignait que 4 ans et

8 mois au moment où l’AG se réunit pour élire les nouveaux administrateurs, c’est-à-dire que leur mandat n’arrivait pas au terme. Selon eux, tout CA élu avant la date de

l’expiration du mandat de 5 ans révolu doit être nul112.

71. La Cour Populaire Suprême a rejeté le pourvoi en statuant que « la détermination de

la durée du mandat de l’administrateur à 4 ans et 8 mois est la volonté de l’assemblée

111 Voir. PAQUEROT M., « stratégie d’enracinement des dirigeants, performance de la firme et structure de contrôle » dans

CHARREAUX G., Le gouvernement des entreprises, Corporate Governance, Théories et faits, éd. Economica, 1997, p. 177 ss.

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générale, si l’on compte le nombre de l’année, nous en sommes à 5 ans. Si l’on compte le nombre de mois, de l’avril 2007 à la fin de 2011, c’est l’équivalent de 4 ans et 8 mois. Ce n’est pas contraire à l’article 109.1 de la Loi sur les Entreprises 2005, puisque la loi ne prévoit pas que 5 ans est 60 mois révolus. Ainsi, elle suppose que le mandat du conseil n’excède pas 5 ans ».

72. Ainsi, pour éviter les ambiguïtés concernant le calcul du mandat, le statut peut prévoir

le mécanisme de calculer la durée des fonctions des administrateurs en précisant, néanmoins, qu'elle ne peut excéder 5 ans. Par exemple, la durée des fonctions se calcule à partir des données suivantes :

 la date de départ est celle du jour de l'assemblée générale ayant prononcé la

nomination ou du jour de l'immatriculation de la société lorsque l'administrateur est nommé au moment de la constitution ;

 la date d'arrivée du terme correspond au jour de la réunion de l'assemblée générale

ordinaire des actionnaires ayant statué sur les comptes de l'exercice écoulé et tenue

dans l'année au cours de laquelle expire le mandat de l'administrateur113.

73. Pour assurer la continuité de la gestion des affaires de la société lorsque le mandat des

administrateurs prend fin avant que l’AG ordinaire se réunisse pour statuer la nomination des nouveaux administrateurs, l’article 150.3 de la Loi sur les Entreprises 2014 précise que « lorsque le mandat de tous les administrateurs arrive à terme en même temps, les

administrateurs continuent à exercer leurs fonctions jusqu’à l’élection de nouveaux administrateurs, sauf disposition autrement du statut ».

74. Outre l’arrivée à terme du mandat, la révocation de l’AG peut mettre fin aux fonctions

de l’administrateur.

CHAPITRE 2. LA RÉVOCATION DES ADMINISTRATEURS.

75. Il convient dans un premier temps d’aborder les circonstances dans lesquelles les

administrateurs peuvent être révoqués (Section 1) et, dans deuxième temps, la procédure de révocation d’un administrateur (Section 2).

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SECTION 1. LE PRINCIPE DE RÉVOCATION DES ADMINISTRATEURS.

76. La révocation est considérée comme une mesure de défiance de gestion prise contre un

administrateur114. En vertu des articles 156.1 et 156.2 de la Loi sur les Entreprises 2014,

un administrateur de société anonyme peut être révoqué lorsque l’AG trouve un motif à l’appui de sa décision (§1). Toutefois, l’AG a le droit de révoquer un administrateur sans aucun motif (§2).

§1. La révocation par justes motifs.

77. En vertu de l’article 156.1 de la Loi sur les Entreprises 2014, un administrateur peut se

voir révoquer dans les cas suivants: lorsqu’il n’a pas rempli les conditions d'éligibilité prévues par l'article 151 de la Loi sur les Entreprises 2014 (I), lorsqu’Il n'a pas participé aux activités du conseil d'administration pendant 6 mois consécutifs (II), lorsqu’il a démissionné (III).

I. La révocation pour violation des conditions d’éligibilité.

78. L’article 156.1(a) de la Loi sur les Entreprises 2014 prévoit qu’un administrateur se

voit révoquer s’il « ne remplit pas les conditions d'éligibilité prévues par l'article 151 de

la présente Loi ». L’analyse littérale de cet article suppose une double hypothèse. En

premier lieu, il s’agit de la violation des conditions d’éligibilité qui est commise

antérieurement à la date de nomination115. En deuxième lieu, la violation qui s’est

produite postérieurement à la date de nomination de l’administrateur en cause. Par exemple, un administrateur est devenu le fonctionnaire dans la fonction publique après la nomination au poste d’administrateur. Dans tous les cas, lorsque la société est en connaissance de cause, elle devrait révoquer l’administrateur qui ne remplit pas les conditions d’éligibilité.

114 Répertoire de droit des sociétés, n° 127

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79. En dehors de la situation de la violation de condition d’éligibilité, l’administrateur peut

être révoqué s’il se désintéresse aux affaires sociales.

II. La révocation pour l’abstention aux activités du CA.

80. L’article 156.1(b) de la Loi sur les Entreprises 2014 prévoit qu’un administrateur peut

être révoqué s’il « n'a pas participé aux activités du CA pendant 6 mois consécutifs, sauf le

cas de force majeur ». En principe, l’administrateur ne doit pas se désintéresser des affaires

de la société. Au contraire, le devoir de diligence l’oblige à surveiller la direction générale du DG et d’autres dirigeants pour détecter ou obtenir des renseignements qui mettent en cause la régularité des activités de la société ou la compétence du DG pour prendre des

mesures nécessaires 116. L’article 153.3 de la Loi sur les Entreprises 2014 prévoit que la

réunion du CA doit être organisée au moins une fois par trimestre. Par conséquent, si l’administrateur ne participe pas à deux réunions trimestrielles consécutives, il sera révoqué,

sous réserve de cas de force majeure117. Ainsi, le terme de six mois cours à partir de la

dernière réunion ordinaire du CA. La volonté de s’abstenir de participer aux réunions de l’administrateur en cause doit être prouvée par les autres administrateurs ou par les actionnaires qui veulent procéder à une révocation.

III. La révocation pour la démission.

81. Ambiguïté de l’effet de la démission. - L’article 156.1 (c) de la Loi sur les

Entreprises 2014 prévoit qu’un administrateur sera révoqué s’il donne sa démission. Cette règle semble influencée par la conception des législations civilistes qui considèrent traditionnellement l’administrateur comme un mandataire qui peut toujours donner sa

116 Pour le devoir de diligence, voir infra n° 362 ss.

117L’article 153.10 de la LE 2014 dispose que l’administrateur doit participer à toutes les réunions. L’administrateur peut déléguer la

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démission sans avoir à justifier des motifs qu’il peut avoir d’abandonner ses fonctions118.

Pourtant, le texte ne précise pas quand la démission de l’administrateur produit ses effets.

82. En vertu de l’article 135.2 (c) de la Loi sur les Entreprises 2014, l’AG est le seul

organe compétent de nommer ou de révoquer l’administrateur. De plus, l’analyse littérale de l’article 156.1 (c) résulte que la démission de l’administrateur doit être subordonnée à une décision de révocation de l’AG pour pouvoir produire son effet. Cela fait perdre du temps et peut également créer des ennuis pour l’administrateur qui ne veut plus poursuivre la gestion sociale bona fide. En effet, tant que sa démission ne prend pas effet, il n’est pas libéré de la gestion des affaires de la société.

83. Dans les entreprises étatiques, la procédure de démission d’un administrateur est

prévue dans la partie II.3 de Circulaire no 01/2008/TT-BNV du 15 janvier 2008 selon

laquelle si un administrateur de l’entreprise étatique veut démissionner, il peut envoyer la démission au CA et le CA peut accepter cette démission ou en demander l’acceptation auprès de l’organisme supérieur. Ainsi, il suppose que la démission de l’administrateur en cause prend effet après l’acceptation du CA.

84. En l’absence de la loi, la plupart des sociétés anonymes adoptent la même solution

donnée par des entreprises étatiques119. Pour protéger l’intérêt de la société, il serait

préférable que les actionnaires puissent prévoient dans les statuts un délai de préavis de démission pour les administrateurs et que la démission prenne effet seulement après l’approbation de l’AG.

85. Approche française. - En droit français120, l’administrateur peut également donner la

démission à tout moment sauf dans les circonstances fautives121. La démission produit ses

effets dès qu’elle est portée à la connaissance de la société122. L’administrateur

démissionnaire peut également prévoir le moment précisé auquel sa démission prend

118 Voir en droit français, RIPERT G. et ROBLOT R., Traité de Droit des Affaires, Tome 2, les Sociétés commerciales, (sous la

direction de Michel Germain), 20ème édition, Paris, L.J.D.G, 2011, no 1652.

119 Voir par exemple, NGUYEN Minh, « FPT chấp thuận đơn từ chức của 2 thành viên Hội đồng quản trị » (FPT accepte la démission

de deux administrateurs), bizlive.vn, 1/07/2014 disponible en ligne à: http://bizlive.vn/doanh-nghiep/fpt-chap-thuan-don-tu-chuc-cua-2- thanh-vien-hoi-dong-quan-tri-257067.html

120 Voir notamment. RIPERT G. et ROBLOT R., (sous la direction de. M. GERMAIN), op.cit., no 1652. 121 Cass. Com., 6 mai 1982, Rev.soc. 1982, 523, note LE CANNU.

122 Cass. Com., 22 févr. 2005, no 03-12902, JCP E 2005, 1046, obs. CAUSSAIN, DEBOISSY et WICKER, Rev.soc. 2005, 625, note

DAIGRE, Bull.Joly 2005, 862, note SAINTOURENS. La démission ne peut donc faire l’objet d’une rétractation : Cass.com., 7 avr. 2009, no 07-14626, Dr.des.soc.2009, obs. MORTIER.

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effet123. Les statuts sociaux peuvent prévoir un délai de préavis124. Il faut noter que

l’administrateur démissionnaire reste responsable toujours des conséquences des fautes

qu’il a commises alors qu’il était en fonctions125.

§ 2. La révocation ad nutum.

86. L’article 156.2 de la Loi sur les Entreprises 2014 prévoit que « les membres du conseil

d'administration peuvent être révoqués par la décision de l'assemblée générale ». Cette

règle implique que l’AG peut révoquer les administrateurs à tout moment sans qu’il ne

soit nécessaire de fournir un juste motif126. La faculté de révocation ad nutum est

consacrée depuis la Loi sur les Entreprises 1999127. En réalité, cette dernière faculté est

influencée par la conception contractuelle continue dans le droit civil selon lequel le

mandataire est révocable128.

87. L’abus de la révocation ad nutum. - Cette conception de droit commun ne semble

pas idéale pour le droit des sociétés. En effet, la révocation ad nutum devient une mesure efficace utilisée par les actionnaires majoritaires pour faire la pression sur les administrateurs. En d’autres termes, la révocation ad nutum permet aux actionnaires majoritaires de contraindre les administrateurs à prendre des décisions en leur faveur. En réalité, il suffit aux actionnaires de détenir 51% des actions pour révoquer les

administrateurs à tout moment129.

L’abus du droit de révocation crée des dommages non seulement pour la société mais encore pour l’administrateur. L’affaire de Nguyen Duc Kien montre que les

123 CA Amiens, 10 mars 1977, RTD.com. 1977, 528, obs.HOUIN.

124 Cass.com., 1er févr. 2011, no 10-20953, Dr.des.soc.2011, no65, obs.COQUELET. Aj. GIBIRILA, RJDA 2011; 267. 125 Cass.com., 1er juill. 1975, Bull.cass. 1975, 4, no 189.

126 En droit français, le principe de révocation ad nutum est consacré par la jurisprudence. Voir. Rennes, 25 févr. 1972, JCP

1972.2.17220, note SYNVET, RTD. Com 1972, 921, obs. HOUIN ; Paris 15 mars 1990, DS 1992, Somm. comm.180, 1re esp., obs.

BOUSQUET ; Cass.com., 26 oct. 1959, JCP 1960.2.11696 ; 3 janv.1985, Defrénois 1987, 620, note HONORAT J.

127 LE 1999.art.84.2. La LE 1999 ne prévoit qu’implicitement dans son article 83.2 selon lequel « l’administrateur est révoqué par la

décision de l’AG ».

128 C. civ. 2005. art. 588

129 En vertu de l’article 144.2 de la Loi sur les Entreprises 2014, une décision de révocation d’un administrateur prise sous forme de

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administrateurs sont toujours préoccupés par la peur d’être révoquée par la révocation ad

nutum. Par conséquent, dans certaines circonstances, ils doivent poursuivre les activités

contre leur gré130. En réalité Nguyen Duc Kien a menacé les administrateurs par une

simple phrase « je ne suis pas administrateur, je dis n’importe quoi, vous l’écoutez ou

non, ça m’est égal. Mais, il faut rappeler que je peux convoquer l’AG et vous révoquer à tout moment »131. Par conséquent, les administrateurs de la banque ACB ont pris des

décisions violant la loi et ils ont été condamnés par le droit pénal.

En outre, la révocation sans juste motif peut porter atteinte à l’honneur des administrateurs. En effet, la culture vietnamienne est influencée par le Confucianisme qui met en valeur la réputation personnelle ou la notion de « garder la face ». Une révocation sans juste motif peut faire perdre « la face » à un administrateur et elle peut créer les rumeurs dans le monde des affaires à tel point que l’administrateur aurait du mal à trouver une position de dirigeant dans une autre société.

88. Afin de protéger les administrateurs contre la révocation abusive, les statuts de la

société peuvent prévoir que les dirigeants peuvent réclamer à la société des dommages et intérêts lorsqu’ils sont en mesure de démontrer que l’abus de révocation sans juste motif a porté atteinte à son honneur ou à sa réputation.

SECTION 2. LA PROCEDURE DE RÉVOCATION D’UN ADMINISTRATEUR.

89. Principe.- En vertu de l’article 135.2 (c) de la Loi sur les Entreprises 2014, la

révocation d’un administrateur doit faire l’objet d’un vote de l’AG ordinaire ou extraordinaire, qu’il s’agisse d’une révocation par juste motif ou ad nutum. Pourtant, la loi ne spécifie pas si une révocation d’un administrateur doit être inscrite dans l’ordre du jour de l’AG. Il apparaît que la révocation par les justes motifs doit faire l’objet d’une discussion inscrite à l’ordre du jour de l’AG comme un sujet de discussion, alors que la

130 Arrêt Nguyen Duc Kien.op.cit.p.65

131 Voir. PetroTimes « Bầu Kiên 'dọa' ông Trần Xuân Giá thế nào? » (comment Bau Kien « menace » Tran Xuan Gia ?), Petrotimes.vn,

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révocation ad nutum est un pouvoir discrétionnaire de l’AG. À cet effet, il implique que

l’AG peut décider la révocation ad nutum sans préavis, sans motif132.

90. La majorité.- En vertu de l’article 144.2 de la Loi sur les Entreprises 2014, une

décision de révocation d’un administrateur prise sous forme de vote sur place doit réunir au moins 51% du nombre total des voix des actionnaires présents pour être valable, sous réserve d’une autre majorité prévue par le statut social.

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