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IV. « En ma fin est mon commencement » 10

En synthèse, le chapitre précédent est l’exposé du cheminement scientifique que j’ai suivi à la suite de ma thèse, après avoir été recruté comme ATER à la Faculté de Sciences du Sport de Marseille. J’ai été intégré au Laboratoire d’Aérodynamique et de Biomécanique du Mouvement dans un contexte dynamique de structuration d’une équipe de recherche en biomécanique du mouvement sous la responsabilité d’Eric Berton. Dans cette situation, j’ai eu une première expérience d’animation et de direction de recherche avec le co-encadrement de la thèse de Guillaume Rao (Rao, 2006), enrichie par ma participation active au travail de thèse d’Hugo Centomo (Centomo, 2006) dans le cadre d’une collaboration internationale avec le Département de kinésiologie de l’Université de Montréal. Ma démarche a été de poursuivre mes travaux sur la modélisation EMG-assistée du système musculo-squelettique dans les deux directions suivantes :

• D’une part, reformuler le modèle d’estimation des efforts agoniste et antagoniste développé au cours de ma thèse (Amarantini & Martin, 2004) pour en simplifier la procédure expérimentale de calibration des données EMG, afin d’en généraliser l’application dans une perspective d’analyse de la coordination multi-musculaire lors de mouvements pluri-articulaires complexes (Centomo et al., 2007 ; Rao et al., 2009) y compris en situation de fatigue (Rao et al., 2010).

• D’autre part, contribuer à lever le verrou méthodologique relatif à l’estimation des forces musculaires individuelles, en proposant une solution qui prenne directement en compte le niveau de co-contraction agoniste/antagoniste (Amarantini et al., 2010).

Ces travaux ont apporté une meilleure compréhension du rôle fonctionnel de la co-contraction agoniste/antagoniste en matière de stabilité articulaire et de coordination motrice chez le sujet sain et l’enfant amputé trans-tibial. Ils ont également contribué à identifier la co-contraction agoniste/antagoniste comme i) un facteur important de

10 Devise que Marie Stuart, incontournable et fascinante figure de la Renaissance, alors reine déchue, avait brodée en ses années de captivité : « En ma fin est mon commencement ». Reprise, plus récemment, par Catwoman dans le film éponyme (Pitof, de son vrai nom Jean-Christophe Comar, 2004) contournable, lui.

Amarantini, D. Habilitation à Diriger des Recherches | « En ma fin est mon commencement »

l’apparition de certaines pathologies ostéo-articulaires chez des individus présentant une altération de la fonction motrice (Centomo et al., 2007), et ii) un marqueur d’une forme d’optimisation du contrôle moteur chez des individus experts présentant une plasticité neuro-musculaire consécutivement à un entrainement en force (Amarantini & Bru, 2015).

Mon parcours scientifique a été marqué par deux autres évènements qui ont déterminé l’orientation thématique et disciplinaire des projets de recherche que j’ai développés jusqu’à aujourd’hui et auxquels je souhaite donner priorité à l’avenir.

Le premier de ces évènements a été mon recrutement comme maître de conférences à l’UFR STAPS de Toulouse au sein du Laboratoire Adaptation Perceptivo-Motrice et Apprentissage. En lien direct avec mes travaux sur la redondance musculaire, ma collaboration avec Marieke Longcamp, chercheure spécialiste en neurosciences cognitives, a fait émerger de nouveaux questionnements relatifs aux mécanismes centraux nerveux de contrôle de l’activité musculaire volontaire et involontaire lors de contractions produites ou imaginées. L’ouverture à ces nouvelles problématiques correspond en tous points à la nécessité réciproque d’étudier les mécanismes nerveux sous-jacents la modulation de l’activité musculaire pour comprendre le fonctionnement biomécanique du système musculo-squelettique (Latash, 2016). Le travail réflexif qui en a découlé a rapidement pointé les limites de l’approche biomécanique – pourtant géniale – pour étudier de manière approfondie l’implication de certains processus d’origine corticale, et tout particulièrement du couplage cortico-musculaire (Hari et Salenius, 1999 ; Mima et Hallett, 1999 ; Salenius et Hari, 2003), dans le contrôle de la co-contraction agoniste/antagoniste. En la fin de ma démarche biomécanique est le commencement de ma démarche neuro-biomécanique. Cette totale remise en question de ma démarche scientifique a été une réelle prise de risque, que j’ai pu assumer grâce à la complicité de Marieke Longcamp et le soutien d’Eric Berton. La conversion thématique qui a suivi, que j’ai qualifiée d’« extension thématique » en Introduction, m’a amené à développer une nouvelle approche méthodologique novatrice pour étudier le contrôle de la redondance musculaire en combinant l’enregistrement du signal électroencéphalographique (EEG) à celui du signal électromyographique (EMG) et de l’effort musculaire résultant lors de contractions musculaires à un fort pourcentage de la force maximale volontaire. Le projet « Neuro-Biomécanique de la cohérence cortico-musculaire » (NeuroBiomeCo), co-porté avec Marieke Longcamp auprès de l’Université Paul Sabatier Toulouse 3 dans le cadre du 1er appel d’offre du Conseil Scientifique « opérations scientifiques 2006-2008 » a été

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fondateur de cette nouvelle approche neuro-biomécanique de la redondance musculaire, qui n’amine aujourd’hui et qui est au cœur de mes perspectives de recherche. Ce projet a bénéficié d’une allocation doctorale présidentielle pour le travail de thèse de Fabien Dal Maso (Dal Maso, 2012), que j’ai co-dirigé avec Marieke Longcamp sur la modulation des oscillations corticales et des interactions cortico-musculaires chez des participants entrainés en force ou en endurance (Dal Maso et al., 2012, 2017), et d’un soutien financier significatif pour l’achat d’un système EEG 64 canaux, contribuant du point de vue matériel au développement de ces travaux précurseurs avec une grande autonomie. Il a initié la collaboration avec Jérémie Bigot, actuellement Professeur des Universités à l’Institut de Mathématiques de Bordeaux, qui a permis d’une part de lever les verrous associés au calcul et à la quantification de la cohérence dans le domaine temps-fréquence et, d’autre part, de mettre à disposition en accès libre pour la communauté scientifique un package de fonctions MATLAB (MathWorks Inc., Natick, MA, USA) particulièrement approprié pour ce type d’analyse (Bigot et al., 2011). Il a été, finalement, la première pierre des thèses de Sylvain Cremoux (Cremoux, 2013) et de Camille Charissou (Charissou, 2018) dont les contributions les plus significatives sont présentées dans le chapitre suivant.

Le second évènement a été mon intégration en septembre 2013 à l’Unité Inserm 825 « Imagerie cérébrale et handicaps neurologiques » (UMR 825 Inserm/UPS) devenue « Toulouse Neuro Imaging Center » (ToNIC, UMR 1214 Inserm/UPS) » au 1 janvier 2016. Sans doute porté par l’esprit de l’énigmatique Prof. Glloq, dont mon directeur de DEA avait souligné l’influence sur son parcours, ce changement de laboratoire a contribué à faire décoller mes travaux 11 relatifs à la redondance musculaire chez des patients présentant une altération de la fonction motrice. Plus sérieusement, à la suite de la thèse de David Gasq que j’ai co-dirigée sur l’application de l’analyse temps-fréquence à l’évaluation de l’instabilité posturale chez le patient neurologique (Gasq, 2015), ce nouveau rattachement a enrichi mes travaux de recherche fondamentale en me permettant d’étudier les plasticités centrales et périphériques associées à l’altération de la co-contraction agoniste/antagoniste chez des patients cérébro-lésés. Il a également permis de donner une perspective clinique et translationnelle à mes travaux, en étroite collaboration avec les services des Explorations Fonctionnelles Physiologiques (ch. de serv. : Ivan Tack) et de Médecine Physique et de Réadaptation à l’hôpital Rangueil (ch. de serv. : Philippe Marque) du CHU de Toulouse.

11 « Un brin d’humour ne fait jamais de mal », comme le rappelle de manière convaincante Michel, alias Didier Bourdon, dans Youpi Matin, sketch parodique de l’émission Télématin présenté par William Leymergie (Les Inconnus, 1991).

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