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Les sphères bleues foncées indiquent la position de la double liaison C=O dans chaque sucre. Les sphères jaunes illustrent la position du groupement phosphate. Les différentes enzymes sont nommées dans les rectangles gris.

Gap2) et CP12 (un régulateur de l’enzyme qui sera décrit en détails dans ce chapitre). Il permet à GapB de s’autoréguler en fonction de l’état redox du chloroplaste. La GAPDH des cyanobactéries est soluble mais serait, comme PRK, proche des thylakoïdes in vivo [125].

Lorsqu’elle est purifiée, Gap2 est une enzyme bidirectionnelle qui convertit le BPGA en G3P (et inversement) en utilisant soit du NADP(H) soit du NAD(H) [144]. Elle est cependant favorisée dans le sens anabolique in vivo (Figure 13) par association à un petit inhibiteur de faible poids moléculaire [147].

d. Régénération du ribulose-5-phosphate (Ru5P)

Après carboxylation du RuBP et production de G3P par Gap2, le substrat du cycle (Ru5P) doit être régénéré. Cette étape implique des réarrangements de sucres les uns avec les autres via des enzymes fonctionnant en série. Lorsque 3 molécules de RuBP sont carboxylées par la RuBisCO, le cycle produit 6 molécules de G3P dont une correspond au gain net de carbone organique (Figure 14). Les 5 restantes sont utilisées pour régénérer le Ru5P.

Tout d’abord, 2 d’entre elles sont isomérisées par la triose-phosphate isomérase (Tpi) en dihydroxyacétone phosphate (DHAP). Ces 2 molécules de DHAP ainsi que 2 autres G3P sont ensuite consommés par la fructose-1,6-bisphosphate aldolase (aldolase) pour produire 2 molécules de fructose-1,6-bisphosphate (FBP). Ces 2 hexoses sont ensuite déphosphorylés par la fructose-1,6-bisphosphatase (FBPase) pour produire du fructose-6-phosphate (F6P). Un F6P et le dernier G3P subissent alors une transcétolisation opérée par la transcétolase (Tkt) et produisent de l’érythrose-4-phosphate (E4P) et du xylulose-5-phosphate (X5P). L’E4P et le F6P restant sont alors utilisés par la transaldolase (Tal) pour produire du sédoheptulose-7-phosphate (S7P) et du G3P. La transcétolase Tkt prend à nouveau ces substrats en charge pour synthétiser du ribose-5-phosphate (R5P) et une seconde molécule de X5P. Enfin, ces pentoses sont respectivement isomérisés en Ru5P par la R5P isomérase (Rpi) et la Ru5P épimérase (Rpe). Ainsi, cette étape complexe permet de boucler le cycle de Calvin en évitant la perte de carbone incorporé par la RuBisCO (régénération de 3 pentoses à partir de 5 trioses). Les caractéristiques des enzymes de cette étape sont présentées dans le tableau 1.

Figure 14 (suite) : Les sucres du cycle de Calvin et de la phase de régénération du Ru5P

Ru5P = Ribulose-5-phosphate; RuBP = Ribulose-1,5-bisphosphate; 3-PGA = 3-phosphoglycérate; BPGA = Bisphosphoglycérate; G3P = Glycéraldéhyde-3-phosphate; DHAP = Dihydroxyacétone phosphate; FBP = Fructose-1,6-bisphosphate; F6P = Fructose-6-phosphate; X5P = Xylulose-5-phosphate; E4P = Erythrose-4-phosphate; S7P = Sedoheptulose-7-Erythrose-4-phosphate; R5P = Ribose-5-Erythrose-4-phosphate; Pgk = Phosphoglycérate kinase; TPI = Triose phosphate isomérase; FBPase = Fructose-1,6-bisphosphatase; Tkt = Transcétolase; Tal = Transaldolase; Rpi = Ribose-5-phosphate isomérase; Rpe = Ribulose-5-phosphate épimérase

Tableau 1 : Caractéristiques des enzymes impliquées dans la régénération du Ru5P.

Enzyme Gène PM

(kDa)

Etat

oligomérique Substrat(s) Produit(s) Références

Tpi slr0783 26,2 ND G3P/DHAP DHAP/G3P [148]

Aldolase

(classe I)* slr0943 33 Dimérique DHAP + G3P FBP [149] Aldolase

(classe II)* sll0018 39 Octamérique DHAP + G3P FBP [149] FBPase

(classe I)* slr2094 38,3 Tétramérique FBP/SBP F6P/S7P [150-152] FBPase (classe II)* slr0952 29 ND FBP/SBP F6P/S7P [150] Tal slr1793 43,1 ND E4P + F6P S7P + G3P [153,154] Tkt sll1070 71,7 ND F6P + G3P S7P + G3P E4P + X5P R5P + X5P [155]

Rpi slr0194 24,8 Dimérique R5P Ru5P [155,156]

Rpe sll0807 25 Hexamérique X5P Ru5P [157]

* Chez les cyanobactéries, l’aldolase et la FBPase ont un spectre de substrat plus large que leurs homologues des organismes hétérotrophes. Ainsi, l’aldolase de Synechocystis peut combiner la DHAP avec du E4P pour produire du sédoheptulose-1,7-bisphosphate (SBP) qui peut être déphosphorylé par la FBP/SBPase pour produire du S7P (voir Figure 19).

2. Régulation générale du cycle de Calvin

Le cycle de Calvin occupe une place primordiale dans le métabolisme central et en est probablement la voie la plus active chez Synechocystis. Son fonctionnement repose sur un approvisionnement adéquat de ses substrats (CO2, pouvoir réducteur et ATP) et est donc fortement dépendant de l’activité photosynthétique et de l’import de CO2 dans la cellule puis dans le carboxysome. Réciproquement, lorsque le métabolisme est perturbé, son activité est rapidement ajustée soit pour empêcher l’épuisement des substrats énergétiques soit au contraire pour favoriser leur recyclage. Typiquement, lorsque les cellules subissent un stress oxydant, il devient un acteur déterminant pour évacuer les électrons de la chaîne de transport photosynthétique.

Figure 15 : Les mécanismes de concentration du CO

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et leur régulation chez Synechocystis.

(Extrait de Orf et al., 2016, Plant Cell Physiol [165])

Le carbone inorganique (Ci) est importé dans le cytoplasme par différents transporteurs et est incorporé aux squelettes carbonés dans le carboxysome. Lorsque son abondance diminue, différents métabolites comme l’oxoglutarate (2-OG), le phosphoglycolate (2-PG, photorespiration) et le ribulose-1,5-bisphosphate (RuBP) s’accumulent. Ils se fixent à des facteurs de transcriptions comme NdhR ou CmpR et active l’expression de gènes impliqués notamment dans l’import du Ci.

Par conséquent, la régulation du cycle de Calvin ne peut pas être simplement circonscrite aux enzymes qui le composent et aux gènes qui les codent. Elle s’apparente davantage à un réseau complexe qui couvre plusieurs processus métaboliques interdépendants. Ainsi, la photosynthèse et les mécanismes de concentration du carbone (CCM) conditionnent l’activité du cycle qui, en retour, contribue à leur bon fonctionnement. Ces régulations peuvent être transcriptionnelles, post-traductionnelles ou allostériques et assurent une coordination optimale du métabolisme photoautotrophe.

Au niveau de la photosynthèse, lorsque la fixation du CO2 est altérée (mutagénèse, limitation en CO2…), la chaîne de transport des électrons est rapidement saturée. Les mécanismes de photoprotection et de détoxification des ROS décrits dans le chapitre II sont alors activés. Ils protègent les photosystèmes et les protéines de l’oxydation et permettent ainsi de restaurer rapidement les flux métaboliques lorsque le stress prend fin.

Les composants du CCM sont également régulés par différents éléments (Figure 15). Chez Synechocystis, on dénombre 3 régulateurs transcriptionnels dont l’activité est contrôlée par allostérie (CmpR, NdhR et RbcR). Leurs effecteurs sont des signaux métaboliques qui traduisent en temps réel l’activité du cycle de Calvin (pour revue [158]). Brièvement, CmpR est un activateur transcriptionnel de l’opéron cmpABCD codant pour un transporteur actif de bicarbonate HCO3- [159]. Son activité est stimulée par le 2-PG et le RuBP, susceptibles de s’accumuler lorsque le CO2 se raréfie [160]. NdhR est quant à lui un répresseur transcriptionnel de gènes dispersés sur le chromosome de Synechocystis codant notamment pour des symporteurs Na+/HCO3- et un transporteur de CO2 à haute affinité [161,162]. Il possède deux co-répresseurs, le NADP+ (produit par le cycle de Calvin) et l’α-cétoglutarate (α-KG) qui est temporairement épuisé lorsque la teneur en CO2 diminue [163]. Enfin, RbcR est un activateur transcriptionnel de l’opéron rbc encodant entre autres les sous-unités de la RuBisCO et est encore peu étudié car essentiel à la croissance en photoautotrophie [161]. Chez certaines algues rouges, son activité est stimulée par le RuBP, le 3-PGA et peut être également par le NADPH [164]. Il existe d’autres régulateurs impliqués dans le CCM comme AbrB2 [165] ou encore LexA, un régulateur essentiel à la viabilité cellulaire en photoautotrophie mais dont la fonction est indépendante du métabolisme de l’ADN [166]. De manière générale, la croissance des mutants de délétion du CCM est altérée en présence de fortes intensités lumineuses ou lorsque le CO2 est peu abondant [161,167].

3. CP12, régulateur majeur de l’activité du cycle

Le cycle de Calvin est davantage régulé aux niveaux métabolique et post-traductionnel que transcriptionnel [168]. La régulation métabolique du cycle a déjà été évoquée à travers l’action des différents effecteurs allostériques qui contrôlent par exemple les activités PRK et RuBisCO. Les enzymes du cycle disposent néanmoins d’un niveau de régulation supplémentaire basé sur les cystéines. Lorsque l’état redox intracellulaire varie, les thiols oxydés deviennent les cibles de modifications post-traductionnelles [169]. Elles peuvent typiquement être glutathionylées [99] ou former des ponts disulfure intra- et intermoléculaires. La réactivité des thiols offre un mode de régulation dynamique et réversible qui connecte en permanence les enzymes au métabolisme. Chez les organismes réalisant la photosynthèse oxygénique, cette coordination est notamment assurée par une petite protéine à 4 cystéines (CP12) qui peut piéger et inhiber plusieurs enzymes (PRK et Gap2) en les agrégeant au sein d’un large complexe supramoléculaire.

a. Caractéristiques

Chez les plantes, l’existence de complexes supramoléculaires comprenant à la fois la GAPDH et la PRK a été reportée en 1991 [130,170]. Plus tard, un troisième partenaire indispensable à la formation du complexe a été identifié chez le pois [171] et correspond à une protéine chloroplastique nommée CP12 (12 kDa Chloroplastic Protein). Rapidement, il apparaît que le gène cp12 possède de nombreux homologues dans d’autres organismes photosynthétiques et notamment les cyanobactéries [172].

De récentes analyses phylogénétiques ont montré que ce gène était présent dans la quasi-totalité des cyanobactéries [173] à l’exception de UCYN-A, un endosymbiote cyanobactérien [174]. Certaines espèces possèdent même jusqu’à 5 copies du gène dans leur génome ce qui est aussi fréquemment le cas chez les plantes terrestres [175].

CP12 est une petite protéine dont la longueur est généralement comprise entre 70 et 80 acides aminés pour un poids moléculaire d’environ 8,3 kDa. Elle présente un profil de migration électrophorétique anormal (poids apparent de 12 ou 17 kDa sur gel SDS-PAGE si la protéine est oxydée ou réduite respectivement). Ceci s’explique par la présence de nombreux résidus chargés qui interagissent avec le maillage des gels de polyacryamide et ralentissent la migration. Ce biais est caractéristique des protéines intrinsèquement désordonnées ou IDP [176]. In vivo, cette hydrophilie empêche effectivement CP12 d’acquérir des structures secondaires (point isoélectrique = 4,13 ; charge nette = -12,7).