• Aucun résultat trouvé

5.3 Eléments de gestion des étangs

5.3.2 Fiche technique 1. Gestion de l’étang

Fiche technique 1.

Gestion locale des étangs du Canton. Les variables régulant la biodiversité.

Il n’existe pas de gestion généralisable à tous les étangs. Les choix de gestion dépendent des caractéristiques propres de l'étang ainsi que des objectifs visés (groupes biologiques que l'on souhaite conserver ou favoriser). Nous ne proposons donc ici que des conseils généraux de gestion à prendre en compte. Les gestionnaires peuvent également se référer aux conseils de gestion déjà présentés par Auderset et al. (1992) et Oertli et al. (2000).

L’altitude

Quoique l’altitude soit un facteur clé de la régulation de la biodiversité des étangs, elle n’est pas modulable par la gestion. De toute manière, les différences d’altitude sont relativement faibles dans le Canton de Genève (n’excèdent pas 150 m).

La surface

Doubler la surface d'un étang permet de gagner relativement peu d’espèces. En revanche, en la décuplant, le gain devient très appréciable. Toutefois, les résultats de l'étude PLOCH ont montré que la création d'un nouveau plan d'eau dans l'environnement d’un étang existant avait un impact beaucoup plus favorable sur la diversité biologique que son agrandissement.

La profondeur moyenne

La richesse (en particulier en espèces menacées) en Coléoptères et en Batraciens est favorisée par une faible profondeur moyenne (0.5 m). La valeur de conservation en espèces menacées d’Odonates est en revanche favorisée dans un étang de profondeur moyenne (3 m) importante.

Il est donc bénéfique, dans un même étang, de favoriser à la fois la présence de zones de fortes (>2 m) et de faibles ( 0.5m) profondeurs. Une autre alternative est de favoriser la présence de 2 types d’étangs différents sur un même site.

Développement des rives

Un important développement des rives est favorable à la diversité en plantes aquatiques, en Coléoptères et en Gastéropodes.

Pour augmenter le développement des rives des plans d’eau, une solution possible est de créer des anses, presqu’îles et îles.

Age

La diversité en Odonates augmente avec l’âge de l’étang. Pour la favoriser, il faudrait donc laisser évoluer les étangs existants et en créer de nouveaux, plutôt que de les rajeunir. Les étangs jeunes sont favorables à la colonisation du milieu par des espèces pionnières.

Conductibilité

La conductibilité semble influencer les diversités en plantes et en Coléoptères. Elle aurait moins d’influence sur les Gastéropodes, les Odonates et les Batraciens.

Dans un plan d’eau non pollué, la conductibilité est en grande partie influencée par l’origine de l’eau et la nature géologique du bassin versant. Dans ce cas, il est difficile d'intervenir. Lorsque le plan d’eau est situé sur un sol imperméable, il est possible de détourner les eaux de ruissellement du bassin versant chargées de nutriments vers l’aval de l’étang (par création d’un fossé ou d’une butte) et d’assurer ainsi une alimentation exclusive par les eaux de pluie.

Des conductibilités très importantes (>1000 microS/cm) traduisent généralement des apports de pollution d’origine agricole, industrielle ou autre. Il est alors important de rechercher et maîtriser les sources de pollution.

Transparence

Une transparence de l’eau élevée est propice à la diversité de plusieurs groupes taxinomiques, (notamment en plantes, en Gastéropodes et en Coléoptères).

La transparence de l’eau est influencée par la présence de particules minérales ou organiques en suspension. Par temps pluvieux notamment, de petits ruisselets peuvent se former et entraîner de grandes quantités de particules minérales provenant de l’érosion du bassin versant. Des particules organiques peuvent aussi être produites directement dans le milieu. Il s’agit d'algues phytoplanctoniques vivantes ou mortes, dont l’eutrophisation favorise un développement excessif, qui participent à l'altération de la transparence des eaux.

La présence en quantité excessive de poissons ou de canards agit défavorablement sur la transparence : elle est généralement la cause d'apports de nutriments favorisant le développement algal et de mouvements d’eau importants provoquant la remise en suspension des sédiments favorisant la turbidité des eaux.

Pour maintenir une transparence élevée, il faut :

- maîtriser l’eutrophisation des eaux en diminuant les apports de nutriments (voir les mesures proposées dans ce chapitre),

- éviter les apports de sédiments en provenance du bassin versant (lutte contre l'érosion des sols, détournement des apports d’eaux de ruissellement par création de fossés ou de buttes),

- limiter la densité en canards et en poissons peuplant le plan d’eau et ses berges,

- proscrire les activités pouvant conduire à la remise en suspension des sédiments (baignades, activités nautiques, piétinement des rives par l’homme ou les animaux (chiens, chevaux, bétail,...).

L’eutrophisation

Le stade hypertrophe est défavorable à la diversité de plusieurs groupes taxinomiques, notamment en plantes, Coléoptères et Odonates. Il en est de même pour le stade oligotrophe, rare en plaine et absent dans le canton de Genève. En revanche, un niveau trophique moyen (mésotrophe), voire élevé (eutrophe) n’influence pas défavorablement la richesse spécifique de ces groupes. D’autres groupes (notamment les Batraciens et les Gastéropodes) semblent peu influencés par ce paramètre.

Pour éviter l’eutrophisation excessive d’un étang, il est nécessaire de réduire les apports de nutriments. Les mesures suivantes sont à mettre en oeuvre :

- limiter la densité d’animaux fréquentant le plan d’eau (oies, canards),

- supprimer les apports de nourriture destinés aux oiseaux d’eau ou aux poissons,

- dévier les arrivées d’eau chargées de nutriments vers l’aval de l’étang (par la création de fossés ou de buttes). Voir également les mesures proposées dans les points « transparence » et « proportion du bassin versant occupé par l’agriculture ».

La proportion du bassin versant occupé par l’agriculture

La proportion du bassin versant occupée par l’agriculture influencerait de manière variable les diversités biologiques en termes de richesse spécifique et de valeur de conservation. Il apparaît que les Gastéropodes, Coléoptères et Odonates sont affectés par ce paramètre, mais pas la flore, ni les Amphibiens.

Plus la proportion du bassin versant occupée par l’agriculture est importante, plus la richesse en Odonates sera affectée. L’influence de ce facteur vis-à-vis de la diversité en Gastéropodes et en Coléoptères est différente: si un bassin versant totalement agricole est défavorable à la diversité, l’absence totale d’agriculture l’est aussi. La situation la plus favorable est obtenue par l’exploitation de 50% des terres du bassin versant.

Si l’étang est situé sur un substrat imperméable et qu'il est alimenté par les eaux de ruissellement superficielles, il est possible de diminuer l’influence du bassin versant agricole en déviant les arrivées d’eau vers l’aval de l’étang (par la création de fossé ou de butte).. Une autre mesure consiste à réduire les épandages d'engrais dans le bassin versant et à aménager une zone tampon.

Végétation submergée

Un fort recouvrement des fonds de l'étang par la végétation submergée est favorable à la diversité en Gastéropodes, Coléoptères et Odonates. Les Batraciens semblent peu sensibles à ce facteur.

Pour favoriser la présence de végétation aquatique submergée, les mesures suivantes peuvent être préconisées :

- limiter la présence d’herbivores : oiseaux (canards, cygnes, oies) ou poissons, - limiter l’ombrage du plan d’eau : élaguer ou couper quelques arbres,

- favoriser une bonne transparence de l’eau : voir les mesures proposées sous le point

« transparence ».

Végétation à feuilles flottantes

La végétation à feuilles flottantes exerce une très forte influence sur la diversité en Gastéropodes.

Pour favoriser la présence de végétation aquatique à feuilles flottantes, deux des mesures déjà proposées pour favoriser la colonisation du plan d’eau par la végétation submergée sont recommandées soit :

- limiter la présence d’herbivores : oiseaux (canards, cygnes, oies) ou poissons, - limiter l’ombrage du plan d’eau : élaguer ou couper quelques arbres.

Poissons

La présence de poissons est néfaste à la richesse de certains groupes tout particulièrement en ce qui concerne les Coléoptères et les Amphibiens. En revanche, les richesses des plantes, Gastéropodes et Odonates semblent insensibles à leur présence (en des quantités raisonnables).

Pour éliminer les poissons d’un étang, des pêches peuvent être réalisées (au filet, électrique), mais l’efficacité de ces méthodes est relativement faible. La vidange (ou la mise à sec ?) du plan d’eau constitue un moyen radical (si toutefois la manœuvre est physiquement réalisable) pour éliminer les poissons mais il faut préalablement évaluer la capacité du plan d’eau et des valeurs biotiques qu’il abrite à supporter une telle perturbation.

Ombrage étang

L’ombrage de l’étang est un facteur très important. Un fort ombrage est notamment préjudiciable à la diversité en plantes, en Odonates et en Amphibiens.

L’absence totale d’ombrage n’est toutefois pas toujours bénéfique ; en effet, d'après nos résultats, les Amphibiens par exemple, présenteraient une diversité optimale sous un léger ombrage (1 à 5%).

Les étangs totalement ombragés sont toujours de petits plans d’eau qui dans le Canton de Genève sont tous de surface inférieure à 1200 m2. Il ne serait toutefois pas judicieux de tous les « dégager » de leur ombrage. Il est en effet nécessaire de maintenir une diversité importante de conditions écosystémiques à l’échelle régionale. On ne procédera donc à des coupes d’arbres, prioritairement sur la rive Sud, que dans les régions riches en étangs ombragés et pauvres en étangs ensoleillés (comme par exemple dans les forêts), .

Les grands plans d’eau sont inévitablement dégagés sur une partie de leur surface, mais leurs rives peuvent être totalement ombragées. Dans ces cas aussi, il est intéressant d’abattre quelques arbres sur la rive Sud.

La proportion de l’environnement immédiat (à 50 m) occupée par la forêt

La proportion de l’environnement immédiat (à 50 m) occupée par la forêt peut affecter la diversité de certains groupes (par exemple de la flore et des Coléoptères). Par ailleurs, les étangs forestiers hébergeraient moins d’espèces menacées que les étangs situés en dehors des forêts. Notons qu’il est difficile d’intervenir sur ce paramètre, si ce n’est lors du choix de l’emplacement d’un nouvel étang (voir fiche technique N°2).

Le contexte (urbain, non-urbain)

Un contexte urbain n’est pas favorable à la diversité de la flore, ni probablement à celle de la faune.

Là aussi, il est difficile d’intervenir sur le paramètre considéré, si ce n’est lors du choix de l’emplacement d’un nouvel étang (voir fiche technique N°2).

L’introduction d’espèces

Il est indéniable que les introductions de plantes augmentent la richesse floristique. Il n'est toutefois pas forcément souhaitable de procéder à de telles interventions.

Quoique difficiles à appréhender, les impacts potentiels de l’introduction de plantes exotiques, de variétés horticoles et de plantes indigènes sauvages doivent être distingués. Il en est de même pour les animaux exotiques et indigènes.

Ainsi, l’introduction d’espèces exotiques (plantes, écrevisses, reptiles, poissons, etc.) est–elle interdite et tout doit en principe être mis en œuvre pour les éradiquer lorsqu’elles ont été introduites. Quant à l’introduction de plantes horticoles, elle devrait être limitée aux étangs d’agréments. En ce qui concerne les espèces indigènes, les choix sont plus délicats : tout d’abord, ces organismes font potentiellement partie de la biocénose d’un plan d’eau et, par leur présence, ils participent à l’équilibre écologique de l’écosystème. Toutefois, leur introduction peut constituer une concurrence inopportune pour les espèces

des groupes taxinomiques en place. Mais, dans d’autres cas, la réintroduction de certaines espèces1 peut aussi constituer une aide à la conservation de la biodiversité, surtout s’il s’agit d’espèces menacées.

L’opération, si elle réussit, permet à l’espèce considérée de voir son aire de distribution s’étendre. De telles opérations restent toutefois délicates et doivent respecter des règles bien précises (notamment en matière de diversité génétique). Elles sont soumises à autorisation préalable des services d’Etat responsables de la conservation de la nature. Les lignes directrices mises au point par l’UICN2 doivent orienter les gestionnaires sur les choix des méthodes à appliquer dans le cadre des programmes de réintroduction.

La connectivité

Les mesures de gestion à appliquer pour favoriser la connectivité sont à considérer à l’échelle régionale. Ainsi, la politique de création et de restauration de plans d’eau devrait-elle être orientée vers des actions visant une optimisation de la connectivité pour la conservation d’espèces phares (espèces menacées, comme par exemple la Rainette) et de leurs sites de reproduction à l'échelle des écosystèmes (par types d’étangs).

1Réintroduction d’espèce : essai d’implantation d’une espèce dans une région qu’elle occupait autrefois, mais d’où elle a été éliminée ou d’où elle a disparu (définition d’après l’UICN)

2« Lignes directrices relatives aux réintroductions », approuvées par la 41e réunion du Conseil de l'UICN, mai 1995

Documents relatifs