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Facteurs du risque du cancer du poumon et modifications

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C- Les modifications épigénétiques

6- Facteurs du risque du cancer du poumon et modifications

Le tabagisme est le principal facteur de risque du cancer du poumon. Un fumeur a 10 à 15 fois plus de risque de développer un cancer qu’un non fumeur (Hubaux et al., 2012), Dans 80 à 90% des cas de cancer du poumon la fumée de tabac est incriminée (Rish et plass 2008). La méthylation de l’ADN est la modification épigénétique la plus étudiée dans le cancer du poumon lié au tabagisme. La méthylation de divers gènes a été

décrite. L’hyperméthylation du promoteur de P16 (INK4a) ainsi que des mutations de P53 sont 2 événements fréquemment détectés chez des fumeurs chroniques non atteints de cancer du poumon. Ceci suggère que l’hypeméthylation de P16 ainsi que les mutations de P53 représentent des marqueurs prédictifs du cancer du poumon tabac dépendant (Kersting et al., 2000).

Une autre étude montre que la méthylation d’ECAD et DAPK représente un marqueur précoce du cancer du poumon et que la méthylation de P16 et MGMT représente un marqueur tardif de la progression de la tumeur (Russo et al., 2005).

Les méthylations de MGMT, p16INK4a, RASSF1A, DAPK, et RAR-b, ont aussi été détectées dans le cancer du poumon. Ces méthylations sont âge et tabac-dépendant. Le tableau ci-dessous représente la relation entre la méthylation de ces gènes, l’âge ainsi que le statut des patients fumeurs/ non fumeurs (Fujiwara et al., 2005).

Corrélation entre les caractéristiques cliniques et la méthylation des différents gènes

Une autre étude encore montre que les promoteurs de RASSF1A et MTHFR sont hyperméthylés dans le cancer du poumon (Vaissière et al., 2009).

Les modifications des histones sont très rarement étudiées dans le cancer du poumon lié au tabac. Une hyperacetylation de H4K5/H4K8, une hypoacetylation de H4K12/H4K16, et une perte de la triméthylation H4K20 ont été décrites chez des patients atteints de cancer du poumon sans distinction entre fumeurs et non fumeurs (Van den Broeck et al., 2008)

Plusieurs études s’intéressent aujourd’hui aux risques non liées au tabagisme, vu que le nombre des non fumeurs atteints du cancer du poumon augmente chaque année. Les non fumeurs qui ont un cancer du poumon représentent 10 à 25% des personnes qui ont un cancer du poumon (Hubaux et al., 2012).

Plusieurs autres facteurs sont reconnus comme facteurs de risques environnementaux du cancer du poumon : le tabagisme passif, l’exposition à l’amiante, aux rayons X et

gamma, au radon, à des gaz d’échappement diesel, ainsi que l’exposition à différentes substances : silice cristalline, cadmium, chrome, hexavalent, composé de nickel, arsenic, béryllium, et benzo (a) pyrène. D’autres facteurs de risques environnementaux sont toujours débattus : exposition aux fibres minérales artificielles, à la pollution atmosphérique, à diverses particules fines, à des pesticides et les métiers de la viande. Une exposition en milieu professionnel serait impliquée dans 15 à 30% des cancers du poumon.

L’arsenic, l’amiante et le radon sont les 3 facteurs de risque principaux, et les plus étudiés, du cancer du poumon non lié au tabagisme. L’exposition à ces agents induit des altérations génétiques (mutations de certains gènes) et épigénétiques (méthylation de l’ADN des promoteurs des gènes suppresseurs de tumeur, modifications des histones et dérégulation de l’expression des microRNAs). Les mécanismes moléculaires liés à ces facteurs sont différents de ceux liés au tabagisme. L’exposition chronique à ces facteurs représente un grand problème de santé publique. (Hubaux et al., 2012).

L’arsenic est un élément semi-métallique, classé comme cancérogène, non mutagène. L’exposition à l’arsenic se fait principalement à partir d’une contamination de l’eau de boisson particulièrement dans certaines régions ou l’eau souterraine entre en contact avec des minéraux contenant de l’arsenic. Elle peut être occasionnée aussi par une alimentation (le riz) contaminée ou la pollution de l’air résultant de la fonte de minerais ou de la proximité de centrales électriques au charbon. L’augmentation de la quantité de l’arsenic dans l’eau est associée avec une augmentation de l’incidence du cancer du poumon surtout le cancer du poumon à cellules squameuses et à petites cellules (Hubaux et al., 2012). L’effet de l’arsenic est dose et durée dépendants (Zhou et al., 2008). Le mécanisme carcinogène de l’arsenic consiste en un processus de biotransformation. Plusieurs réactions ont lieu comme la réduction, l’oxydation et la méthylation. Actuellement, Les recherches s’intéressent aux modifications épigénétiques causées par l’arsenic. Une étude effectuée chez les souris montre que l’arsenic induit une hyperméthylation et par conséquent l’inactivation des gènes suppresseurs des tumeurs comme P53, CDKN2A et RASSF1A. L’exposition chronique à l’arsenic induit une réduction de l’expression des miR-200 dans les cellules épithéliales bronchiales humaines (HBECs). Une ré-expression des miR-200 est capable de s’opposer aux effets indésirables de l’arsenic. (Hubaux et al., 2012).

Dans l’environnement, l’arsenic est présent sous forme d’arsénate et d’arsénite qui sont deux formes bioréactives. Le métabolisme de l’arsénite nécessite la s-adénosyl méthionine pour transformer l’arsénite en des métabolites mono ou diméthylés. Zhou et al 2008 ont travaillé sur l’exposition des cellules d’adénocarcinome de poumon A549 à l’arsenic. Ils ont remarqué une augmentation du niveau de H3K9me2 qui est une marque répressive et de H3K4me3 qui est une marque activatrice et une diminution de la marque répressive H3K27me3. H3K9me2 constitue un signal de recrutement d’enzymes qui méthylent l’ADN. Elle est corrélée avec une perte de l’expression des gènes (Jackson et al., 2004). L’augmentation continue de H3K9me2 suite à l’exposition à l’arsenic induit une méthylation de l’ADN. Cette methylation induit une inhibition de l’expression des gènes suppresseurs de tumeurs. Cette notion est en accord avec des résultats retrouvés dans les cellules A549 et qui montrent que l’exposition à l’arsenic induit une hyperméthylation du promoteur de P53 (Mass et al., 1997).

Une faible quantité d’arsenic est suffisante pour induire une inhibition de l’expression des gènes médiée par les récepteurs nucléaires. Une étude effectuée en 2009 montre qu’une exposition chronique à l’arsenic induit une inhibition de l’expression de CARM1 mais sans évoquer une corrélation avec le cancer du poumon (Barr et al., 2009).

L’amiante est une fibre minérale, présente dans les roches profondes. Aujourd’hui, elle est très utilisée dans les usines sous plusieurs formes. Les personnes qui risquent de développer une asbestose sont les tôlierschaudronniers, les soudeurs, les ajusteurs, les carrossiers, les plombiers, les charpentiers, les électriciens sont des professions “à risques” et les métiers du bâtiment. D’autres professionnels ont subi des expositions importantes et prolongées : les ouvriers des chantiers navals, les dockers, les techniciens de laboratoires, les peintres, les décorateurs, les bijoutiers, les cheminots (site de la ligue contre le cancer)

L’effet de l’amiante sur les poumons est dose dépendant. L’exposition à l’amiante a plusieurs impacts sur l’organisme. Elle constitue un facteur de risque du cancer du poumon. Elle induit des altérations épigénétiques comme l’inactivation des gènes suppresseurs de tumeurs tels que RASSF1A et CDKN2A. Une dérégulation de l’expression des miRNA a été observée aussi: les miR-148b, miR-374a, miR-24-1*, let- 7d, Let-7e, miR-199b-5p, miR-331-3p, and miR-96, sont surexprimés, cependant, les miR-939, miR-671-5p, miR-605, miR-1224-5p et miR-202 sont sous exprimés. (Hubaux et al., 2012).

Le radon est un gaz radioactif qui résulte de la dégradation de l’uranium. L’exposition au radon est associée à 20,000 cas du cancer du poumon aux états unis. Ce ne sont pas seulement les mineurs qui sont exposés au radon, les habitants à côté des mines ou des usines le sont aussi. Une exposition à long terme au radon induit une méthylation des promoteurs de CDKN2A et MGMT et par la suite leur inactivation (Hubaux et al., 2012).

Tableau: les modifications épigénétiques observées dans le cancer du poumon associé avec

l’exposition à l’arsenic, amiante et radon (Hubaux et al., 2012).

D’autres facteurs sont impliqués aussi dans le cancer du poumon mais qui ne sont pas beaucoup étudiés dans la littérature. Les radiations ionisantes sont liées à une augmentation du risque d’adénocarcinome du poumon médiée par la méthylation des promoteurs des gènes suppresseurs de tumeur comme P16 et CDKN2A. (Hubaux et al., 2012). L’exposition chronique aux rayons UV induit une hypométhylation globale chez les souris. Le nickel induit une augmentation de la méthylation de l’ADN et une diminution

globale de l’acétylation des histones H3 et H4 et une augmentation de H3K9me2 (yan et al., 2003). Le cadminum est un inhibiteur enzymatique, il inhibe l’ADN méthyltransférase induisant une hypométhylation (Vaissière et al., 2008).

De nombreuses études montrent que des polymorphismes (SNP : Single Nucleotide Polymorphisms) dans les enzymes qui modifient les histones sont associées avec le risque de cancer bronchique (Yoon et al., 2007 ; Yoon et al., 2010). Certains variants génétiques augmentent le risque de cancer du poumon alors que d’autres le diminuent. Des SNP identifiés notamment dans SUV39H2, EZH2 et RIZ (3 histones méthyltransférases) sont candidats à constituer des marqueurs prédictifs du cancer du poumon. Des études supplémentaires sont nécessaires pour corréler ces polymorphismes au type histologique. De même, il est important de déterminer si ces variants génétiques induisent des modifications aberrantes des histones et s’ils sont préférentiellement associés à des facteurs de risque particuliers du cancer du poumon.

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