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CHAPITRE I : Introduction générale

6. Le facteur de transcription OTP

Le facteur de transcription à homéodomaine Orthopedia (OTP) a été identifié simultanément chez la souris et la drosophile (Simeone, A. et al. 1994). Chez ces deux espèces, son expression est retrouvée au sein du SNC. Chez la souris, son expression est principalement localisée au niveau du diencéphale, du métencéphale et de la moelle épinière (Simeone, A. et al. 1994). Le gène Otp ainsi que son profil d’expression au niveau du SNC ont été relativement bien conservés au cours de l’évolution. Plusieurs orthologues ont été identifiés dans différentes espèces telles que le poisson-zèbre (Del, Giacco L. et al. 2006), le vers plat (Dugesia japonica)(Umesono, Y. et al. 1997) et les mollusques (P.vulgata.) (Nederbragt, A. J. et al. 2002). Finalement, Otp a aussi été

identifié chez les échinodermes où il joue un rôle dans la croissance du squelette (Amore, G. et al. 2003; Di, Bernardo M. et al. 1999).

6.1 Implication d’OTP au cours du développement de l’hypothalamus.

Chez la souris, au neuvième jour embryonnaire (E9.5), Otp est principalement exprimé au sein de la moelle épinière, du métencéphale et dans des domaines précis du prosencéphale. A partir de E12.5, l’expression d’Otp se trouve localisée au sein de l’hypothalamus antérieur et des régions supraoptique, paraventriculaire et rétrochiasmatique (Avantaggiato, V. et al. 1995; Simeone, A. et al. 1994) qui donneront naissance à l’aPV, au PVN, au SON et à l’ARC (Puelles, L. and Rubenstein, J. L. 1993).

Tout comme les souris Sim1-/-, les souris homozygotes pour un allèle nul d’Otp meurent précocement après la naissance et ne développent pas les lignées neuroendocriniennes caractérisées par l’expression de OT, AVP, TRH, CRH et SS (Acampora, D. et al. 1999; Wang, W. and Lufkin, T. 2000). Par ailleurs, ces souris présentent également des défauts au niveau de la prolifération cellulaire, sans effet apoptotique, et une migration anormale des cellules exprimant normalement Otp et devant former le PVN et le SON (Acampora, D. et al. 1999; Wang, W. and Lufkin, T. 2000). Otp joue donc un rôle dans la survie, la migration et la différenciation de ces lignées cellulaires. Par ailleurs, l’expression de Sim1 n’est pas affectée chez ces souris tout comme l’expression d’Otp n’est pas modifiée chez les souris Sim1-/- laissant penser que ces deux gènes agissent en parallèle pour le développement du PVN, SON et de l’aPV (Acampora, D. et al. 1999).

A la différence de Sim1, Otp est également exprimé au sein de l’ARC. L’ARC est impliqué dans la régulation de processus physiologiques critiques incluant le contrôle de la sécrétion hypophysaire et fait partie d’un circuit de régulation de l’appétit comme présenté auparavant (Fig. 14). L’ARC est situé dans la partie médio-tubérale de l’hypothalamus (Fig. 1) et est composé de types cellulaires distincts caractérisables par l’expression de Ghrh, Somatostatine, Tyrosine hydroxylase (un marqueur des neurones dopaminergiques), Neuropeptide Y et Propiomélanocortine (Dickson, S. L. and

Luckman, S. M. 1997). Les souris qui sont déficientes pour OTP présentent un développement anormal des cellules SS au sein de ce noyau (Acampora, D. et al. 1999; Wang, W. and Lufkin, T. 2000). Plus spécifiquement, OTP a été identifié comme faisant partie d’une cascade de facteurs de transcription qui est essentielle au développement des différentes lignées cellulaires qui composent l’ARC (Fig. 15). Au sein de cette cascade, Otp se situe en aval de Nkx2.1. En fait, les souris homozygotes pour un allèle nul de Nkx2.1 n’ont pas de noyau arqué (Kimura, S. et al. 1996).

Figure 15. Cascade de facteurs de transcription requise pour la différenciation cellulaire

au sein du noyau arqué. OTP est essentiel à la différenciation terminale des cellules sécrétant la somatostatine au sein de ce noyau.

Chez le poisson zèbre, deux orthologues d’Otp ont été clonés : Otp1 (Otpb) et Otp2 (Otpa) (Del, Giacco L. et al. 2006). L’étude de leur fonction, en inhibant leur expression à l’aide de morpholinos ou par l’étude des mutants otpam866 (où Otp2 est muté) et mot (un mutant présentant une diminution du nombre de neurones dopaminergiques), a démontré que ces derniers sont également essentiels à la différenciation de nombreux neurones dopaminergiques situés au sein de l’hypothalamus dorsal (Del, Giacco L. et al. 2006; Del, Giacco L. et al. 2008; Ryu, S. et al. 2007). Plus précisément, Otp1 et Otp2 sont exprimés dans les précurseurs postmitotiques ainsi que

dans les neurones dopaminergiques matures de l’hypothalamus chez le poisson-zèbre. Leur fonction au sein de ces précurseurs serait de contribuer à leur spécification et à leur différenciation en neurones dopaminergiques matures (Ryu, S. et al. 2007). Cette fonction est également conservée chez la souris. En effet, les neurones dopaminergiques du groupe A11 retrouvés au sein de l’hypothalamus sont absents chez les souris Otp-/- (Ryu, S. et al. 2007). La fonction d’Otp dans la différenciation des neurones dopaminergiques semble donc être maintenue au cours de l’évolution, toutefois à une plus petite échelle chez les mammifères. En effet, à la différence du poissons-zèbre, chez la souris seule une portion des neurones dopaminergiques du diencéphale ventral requiert la fonction d’Otp pour leur différenciation.

6.2 Régulation d’OTP au cours du développement de l’hypothalamus.

Le poisson zèbre s’est révélé être un modèle précieux pour d’identifier des régulateurs de l’expression d’Otp au cours du développement de l’hypothalamus (revu dans Del, Giacco L. et al. 2008, Fig. 16). De manière intéressante, le profil d’expression d’Otp1 est situé à proximité de centres exprimant des facteurs impliqués dans le développement précoce de l’hypothalamus comme Shh, Nodal et Fgf8. Shh est un régulateur positif de l’expression d’Otp1 au niveau de l’hypothalamus antérieur. Sa perte d’expression chez le mutant sonic you est caractérisée par une diminution du profil d’expression d’Otp1 dans l’hypothalamus antérieur (Del, Giacco L. et al. 2006). A l’inverse, chez le mutant iguana, où dzip1 un répresseur de l’expression de Shh est absent, et chez des poissons zèbres où Shh est surexprimé il y a une expression ectopique d’Otp1 (Del, Giacco L. et al. 2006). L’expression d’Otp1 est également dépendante de Nodal. L’analyse de mutants Cyclop présentant des phénotypes moins sévères, où l’hypothalamus est réduit en taille mais non totalement absent, a permis de démontrer que l’expression d’Otp1 était indirectement dépendante de Nodal. En effet, Nodal permet l’expression de Shh dans l’hypothalamus antérieur. La diminution d’expression de Nodal cause donc une réduction de l’expression de Shh affectant ainsi Otp1 (Del, Giacco L. et al. 2006). L’expression d’Otp1 est aussi contrôlée par Fgf8. Chez le mutant acerebellar où Fgf8 est totalement aboli, l’expression d’Otp1 est

augmentée au niveau de l’hypothalamus antérieur. En revanche, la surexpression de Fgf8 chez des embryons de type sauvage provoque une répression de la transcription d’Otp1 (Del, Giacco L. et al. 2006). Ces mêmes gènes sont aussi impliqués dans la régulation de l’expression d’Otp1 dans la région postérieure de l’hypothalamus où naissent les neurones dopaminergiques (Del, Giacco L. et al. 2006). Récemment, deux autres gènes ont été identifiés comme jouant un rôle capital dans l’induction et la régulation d’Otp1, il s’agit de Fezl un facteur de transcription à doigts de zinc et Pac1, un récepteur couplé aux protéines G. L’étude du mutant too few a mis en lumière la fonction du gène Fezl qui est impliqué dans le développement des neurones à isotocine (équivalent de l’oxytocine chez le poisson zèbre) et des neurones dopaminergiques. Fezl régule l’expression d’Otp1 en modulant sa transcription (Blechman, J. et al. 2007). De manière similaire, l’inhibition de l’expression de Pac1 chez le poisson zèbre via des morpholinos résulte en une absence des mêmes types neuronaux. Toutefois, PAC1 ne régule pas la transcription d’Otp1 mais agit plutôt sur ses niveaux protéiques. En effet, PAC1 et son ligand PACAP sembleraient contrôler les niveaux de synthèse protéique d’Otp1 par un mécanisme post-transcriptionnel, non précisé par les auteurs de l’étude, sans toutefois affecter la stabilité de l’ARNm ou de la protéine (Blechman, J. et al. 2007). Sachant qu’OTP et SIM1 agissent en parallèle pour permettre le développement du PVN, il serait intéressant de vérifier si ces mêmes facteurs sont impliqués dans la régulation de l’expression de Sim1.

Figure 16. Régulateurs de l’expression d’Otp1 au cours du développement de

l’hypothalamus chez le poisson-zèbre. L’expression d’Otp1 est régulée au niveau transcriptionnel par Fgf8, Shh, Nodal et Fezl alors que Pac1 agit sur les niveaux protéiques d’Otp1.