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Extension de la méthode à l’emploi d’organomagnésiens

composés organométalliques

B. Généralisation et optimisation de la réaction domino d’ouverture / addition nucléophile

II. Extension de la méthode à l’emploi d’organomagnésiens

Les résultats précédents nous ont amené à considérer l’action d’organomagnésiens dont beaucoup de représentants sont commercialement disponibles. Nous avons d’abord vérifié la faisabilité de la réaction avec le magnésien allylique avant de l’optimiser et de l’étendre à d’autres réactifs.

Chapitre III : Réactions des halogénofuranosides avec des composés organométalliques.

Dans un premier temps, la réaction a été tentée avec 2,8 équivalents de bromure d’allylmagnésium commercial, dans l’éther anhydre (Schéma III.14). Les résultats expérimentaux sont détaillés dans le Tableau III.4. Bien que ne permettant que de faibles taux de conversion (44 %) et rendement (33 %), cette expérience montre la faisabilité de la réaction domino : ouverture / addition nucléophile en présence d’organomagnésiens. L’emploi d’organomagnésiens devrait donc nous permettre d’augmenter la variété de groupements R potentiels. Cette réaction a été de nouveau tentée mais cette fois-ci avec 4 équivalents (Tableau III.4) sans obtenir un taux de conversion total.

Ce dernier a pu être optimisé en utilisant 5,5 équivalents. Comme dans le cas des lithiens, cette réaction nécessite donc un excès significatif de réactif organométallique. Le rapport en diastéréoisomères 6 / 1 reste constant.

Schéma III.14 : Ouverture de I.26a par des organomagnésiens commerciaux.

O

BnO I

O O

I.26a

OH BnO

OH Ether anhydre

0°C MgBr

III.14

Tableau III.4 : Influence du nombre d’équivalents d’organomagnésien sur la conversion et le rendement de la réaction d’ouverture/addition nucléophile de I.26a par le bromure d’allylmagnésium.

Nombre d’équivalents de

bromure d’allyl magnésium Conversion Rendement Rapport en diastéréoisomères

2,8 44 % 33 %

4 78 % 69 %

5,5 98 % 91 %

6 / 1

Après optimisation, cette réaction d’ouverture / addition nucléophile a été étendue à l’emploi d’autres organomagnésiens commerciaux. Les résultats sont énumérés dans le Tableau III.5.

Les taux de conversion sont presque totaux et les rendements vont de 87 à 92 %. Les rapports en diastéréoisomères sont identiques à ceux obtenus par réactions avec les organolithiens dans le cas des produits III.10 et III.11.

Tableau III.5 : Conversion, rendement et rapport diastéréoisomérique obtenus lors de la réaction d’ouverture/addition nucléophile de I.26a par 5,5 équivalents d’organomagnésiens commerciaux.

Rapport en diastéréoisomères R Rendements Conversions Produits

Me 88 % 94 % III.10 4 / 1

Ph 87 % 95 % III.11 6 / 1

92 % 96 % III.15 4 / 1

Il est intéressant de noter que le diastéréoisomère majoritaire reste le même que l’on forme les produits d’ouverture / addition III.11 par action du Phényllithium ou du bromure de Phénylmagnésium sur l’iodure I.26a (déterminé par HPLC et en RMN 1H). On peut donc encore supposer une diastéréosélectivité favorisant le composé R.

Nous sommes parvenus à isoler par, une méthode HPLC préparative, le diastéréoisomère majoritaire des produits d’ouverture / addition nucléophile III.15. Afin de vérifier sa configuration nous avons formé son dérivé III.16 dont les deux hydroxyles libres sont estérifiés par du chlorure de paranitrobenzoyle.(Schéma III.15)

Schéma III.15

BnO OPNB PNBO

BnO OH HO

O Cl O2N

III.16 diastéréoisomère majoritaire

2 équiv.

Pyridine, t. amb.

Rdt = quant.

Les paranitrobenzoates recristallisent assez facilement. Les cristaux obtenus sont en cours d’analyse par Rayon X afin de déterminer la configuration de la molécule.

III. Organozinciques ?

Une réaction « one pot » ouverture / allylation d’un iodo-pentofuranose en présence de poussière de zinc activé et de bromure d’allyle, dans un mélange THF/H2O, sous ultrasons, a déjà été décrite par Hyldtoft et Madsen 2b), 2c), 60 (Schéma III.16).

2b) Poulsen, C. S., Madsen, R. J. Org. Chem., 2002, 67, 4441.

2c) Hyldtoft, L., Madsen, R. J. Am. Chem. Soc., 2000, 122, 8444

Chapitre III : Réactions des halogénofuranosides avec des composés organométalliques.

Schéma III.16.

O OCH3

TESO OTES I

10 équiv. Zn dust activé

3 équiv. Br

THF/H2O ultrasons

HO

HO OH

III.17 III.18

O

TESO OTES

déprotection

D’après les auteurs, le zinc activé permet, dans un premier temps, l’ouverture de l’iodo-furanoside et donc la formation de l’aldéhyde. Dans un second temps, il forme avec le bromure d’allyle un organozincique qui réagit avec l’aldéhyde néo-formé pour donner les diènes correspondants avec d’excellents presque quantitatifs.

Au vue de nos résultats d’ouverture du cycle furanosique I.26a / addition nucléophile par action des organolithiens et des organomagnésiens, on peut se demander si, contrairement à l’interprétation de Madsen, l’ouverture de l’iodosucre ne serait, en réalité, pas due à un échange Halogène-Métal par action du bromure d’allylzinc et non à l’ouverture réductrice grâce au zinc métallique. Par ailleurs, le substrat I.26a, se prêtant très bien à l’ouverture du cycle furanosique par échange Halogène-Métal par les organomagnésiens et les organolithiens et s’étant révélé tout à fait inerte vis à vis du zinc dans les conditions de l’expérience décrite ci-dessus, il nous a donc paru pertinent de reconsidérer la réactivité de ce dernier en présence de zinc et de bromure d’allyle.

Nous avons donc traité l’acétonide iodé I.26a avec trois équivalents de bromure d’allyle et 10 équivalents de zinc. Contrairement aux expériences précédentes, nous n’avons pas effectuer d’activation préalable du zinc, la formation du bromure d’allylzinc ne l’exigeant pas.68 Cette nuance dans les conditions expérimentales était susceptible de nous apporter des informations sur la possibilité d’ouverture directe du substrat I.26a par l’organozincique.

Après deux heures de réaction, le produit de départ a entièrement disparu. Comme dans le cas des organolithiens, le brut réactionnel est alors soumis à l’action de la benzyloxyamine hydrochlorée afin de convertir l’aldéhyde II.68 en oxime II.71 (Schéma 17).

68 Knochel, P., Johnes, P. Organozinc Reagents Harwood, L. M., Moody, C.J. Eds, The Practical Approach in Chemistry series, Oxford University Press Inc., New York 1999

Schéma III.17

La réaction a été effectuée avec 3 puis avec 1,5 équivalents de bromure d’allyle dans un mélange THF/H2O 4/1 (Tableau III.6). Quel que soit le nombre d’équivalents de bromure d’allyle introduit les taux de conversion sont bons.

Contrairement à ce que nous avions décrit lors de l’utilisation du n-butyllithium, les produits majoritairement obtenus lors de cette réaction ne sont pas les produits d’ouverture / addition nucléophile mais l’oxime II.71 (et donc l’aldéhyde). Pour mémoire, lors de la réaction avec 2,5 équivalents de n-butyllithium, le rapport produit d’addition / oxime était de 81 / 19 alors qu’avec « 3 équivalents d’organozinciques », ce rapport est de 38 / 62 avec un rendement global de 90 %. (Il faut considérer que la totalité de l’aldéhyde n’est pas forcément transformée en oxime ce qui implique que les rapports produits d’addition / oxime sont peut être sous estimés.)

Le bromure d’allylzinc formé est, comme attendu, beaucoup moins réactif que les lithiens et les magnésiens vis à vis d’une addition nucléophile sur la fonction carbonyle néo-formée.

Au vu de ce résultat, nous avons tenté la réaction avec 1,5 équivalent de bromure d’allyle dans le but d’obtenir sélectivement l’aldéhyde sans produit d’addition. Dans ce cas, le taux de conversion est légèrement moins bon même après sept heures d’ultrasons. Cependant, nous assistons à une diminution du rendement en produit d’addition nucléophile alors que celui de l’oxime reste constant (de l’ordre de 60 %). Le rapport produit d’addition / oxime est de 27 / 73 respectivement.

Chapitre III : Réactions des halogénofuranosides avec des composés organométalliques.

Le rapport diastéréoisomérique des adduits d’ouverture / allylation obtenus lors de ces réactions est de 2 / 3. La sélectivité de cette réaction est faible et le diastéréoisomère majoritairement obtenu n’est plus le (R) mais le (S) supposé. Cette différence de stéréochimie peut être expliquée par la présence d’eau dans le milieu réactionnel. En effet, l’eau en solvatant le cation métallique, empêche la chélation par l'oxygène de la fonction aldéhyde. Le modèle d’état de transition envisageable pour expliquer la sélectivité n’est donc plus de type Cram-chélaté mais Felkin-Ahn (Schéma III.18).

Schéma III.18 : Modèle Felkin-Ahn

R

L eau présente dans le milieu réactionnel est, d’après les travaux de Madsen, utile lors de la réaction d’ouverture de l’iodopentofuranose par le zinc réducteur. Dans notre cas, l’ouverture du cycle furanosique du composé I.26a ne s’est jusqu’à présent pas produite par action du zinc réducteur (Chapitre II). L’eau ne semble donc pas utile à notre réaction. Nous avons donc réitéré ces réactions dans les mêmes conditions mais cette fois dans du THF anhydre. Ces réactions ont été effectuées avec 3 équivalents puis 1 équivalent de bromure d’allyle (Tableau III.7).

Tableau III.7

En présence de trois équivalents de bromure d’allyle et 10 équivalents de zinc, les taux de conversion sont excellents. Si on compare ces résultats avec ceux obtenus en présence d’eau, on remarque que le rendement en oxime a diminué (41 %). Ceci peut être expliqué par le fait que la présence d’eau diminue la quantité de bromure d’allylzinc en solution ce qui implique une diminution de l’addition nucléophile sur le carbonyle néo-formé.

La même réaction avec uniquement 1 équivalent de bromure d’allyle n’a pas permis un taux de conversion total (79 %). Le rendement en oxime est tout de même de 52 % et le rapport produit d’addition sur oxime reste intéressant (24 / 76).

Le rapport diastéréoisomérique n’est que de 2 / 1 mais cette fois, le carbone asymétrique néo-formé du diastéréoisomère majoritaire est de configuration R . Comme dans le cas de l’ouverture / allylation par le bromure d’allylmagnesium (le modèle suivi est celui de Cram-chélaté).

A ce stade, nos expériences nous indiquent que, dans les conditions où I.26a est réputé inerte vis à vis du zinc (pas d’activation du métal, milieu anhydre), la réaction d’ouverture se produit, avec l’alkylation partielle de l’aldéhyde formé. Ces résultats semblent contredire l’interprétation de Madsen et conforter l’idée d’une réaction d’échange Halogène-Métal préalable mettant en jeu l’organozincique. Pour le vérifier, nous avons examiné la réactivité de I.26a en absence totale de zinc. Le bromure d’allylzinc est tout d’abord formé par réaction entre le zinc métallique et le bromure d’allyle, puis les résidus de zinc ont été filtrés et le zincique formé a été dosé. Exactement 1,5 équivalent d’allylzinc est alors additionné sur le substrat I.26a, en milieu anhydre sous agitation magnétique, à 45 °C. Après sept heures d’agitation, aucun produit d’ouverture n’est retrouvé en solution. Le substrat reste inerte.

Les enseignements que nous pouvons tirer de ces différentes expériences sont :

• Le substrat I.26a restant inerte vis à vis du bromure d’allylzinc, l’hypothèse de Madsen évoquant une ouverture réductrice de l’halogénosucre par le zinc métallique suivie d’une addition nucléophile du bromure d’allylzinc est finalement validée.

Chapitre III : Réactions des halogénofuranosides avec des composés organométalliques.

• L’activation du zinc n’est pas nécessaire car le bromure d’allylzinc qui se forme à la surface du métal semble suffire à son activation. Son rôle, et la façon dont cette activation se produit reste cependant à déterminer.

• Bien qu’incomplète, une certaine sélectivité pour la formation de l’aldéhyde a pu être atteinte dans ces conditions.