• Aucun résultat trouvé

L’expression de protéines anti-apoptotiques a) Les inhibiteurs de l’apoptose (IAPs)

Dans le document en fr (Page 49-54)

II- Développement de tolérances et résistance tumorale

3. L’expression de protéines anti-apoptotiques a) Les inhibiteurs de l’apoptose (IAPs)

Les IAPs ont d’abord été découverts chez les virus comme le baculovirus qui se servent de ces molécules pour inhiber l’apoptose de leurs cellules hôtes. Des homologues de ces

inhibiteurs de caspases, ont été retrouvés chez l’Homme (Deveraux and Reed 1999 ; Fesik and Shi 2001). Il s’agit de protéines mises en évidence pour leur capacité à empêcher le clivage des caspases nécessaire à leur activation. Les membres de cette famille sont : XIAP (X-linked IAP), cIAP1 (cellular IAP1), cIAP2 (cellular IAP2), Survivin, Livin ou ML-IAP (Melanoma IAP), Ts-IAP (Testis-specific IAP), NAIP (Neuronal Apoptosis Inhibitory Protein) et BRUCE/Apollon (Fig. 13A). Cette famille se caractérise par la présence d’un motif peptidique conservé appelé BIR (Baculovirus IAP Repeats) qui peut être répété plusieurs fois et qui est nécessaire à la liaison et à l’inhibition des caspases (Fesik and Shi 2001).

Plusieurs études du laboratoire du Dr John C Reed ont montré que les IAPs non seulement inhibent l’activité des caspases initiatrices et celle des caspases effectrices (Fig.13B) mais présentent également des spécificités d’inhibition pour certaines caspases qui sont propres à chaque IAP (Deveraux, Takahashi et al. 1997; Roy, Deveraux et al. 1997; Huang, Deveraux et al. 2000; Suzuki, Nakabayashi et al. 2001). Les IAPs sont eux-mêmes contrôlés par les protéines mitochondriales Smac/DIABLO et Omi/HtrA2 qui sont libérées dans le cytosol au cours de l’exécution de la voie intrinsèque de l’apoptose, se lient aux IAP et les inhibent (Vaux and Silke 2003).

En 2006, l’équipe du Pr Guy S. Salvesen publie deux articles qui suggèrent que seul XIAP serait en réalité capable d’inhiber directement les caspases. Les autres IAPs interagiraient avec les caspases sans les inhiber directement. Les études de c-IAP 1 et 2, plus proches analogues de XIAP, démontrant une inhibition directe des caspases, seraient un artefact de l’utilisation des étiquettes glutathione-s-transférase (tags GST). Les c-IAPs inactivent les caspases en induisant des dégradations protéiques via le système ubiquitine-protéasome (Eckelman and Salvesen 2006; Eckelman, Salvesen et al. 2006). Ils déclenchent en effet l’ubiquitination de protéines des complexes en aval du TNFR (RIP1 et TRADD) qui participent à l’activation de la caspase 8 (Gyrd-Hansen and Meier 2010). Sur la base d’études structurales, il semble que deux séquences présentes au sein du BIR de XIAP sont nécessaires pour inhiber les caspases. Il s’agit d’une séquence d’interaction IBM (IAP binding motif) et d’une séquence inhibitrice. Les autres IAPs, ne contenant pas ces séquences spécifiques, sont peu susceptibles d’inhiber directement les caspases (Eckelman, Salvesen et al. 2006).

Tous les IAPs ont un rôle anti-apoptotique, cependant leurs mécanismes d’action ne sont pas totalement élucidés. Certains IAPs (Survivin, XIAP, ML-IAP) ont été trouvés surexprimés dans des lignées cancéreuses et aussi dans des tumeurs où ils sont associés à un mauvais pronostic et une chimio-résistance.

Figure 13A : La famille des inhibiteurs d’apoptose (IAPs)

Les IAPs présentent au moins un domaine BIR (baculovirus IAP repeat). Le domaine RING (really interesting new gene) code une E3 ligase et permet l’élimination des cibles par le système ubiquitine-protéasome. Le domaine CARD (Caspase-recruitment domain) intervient dans l’interaction avec les caspases. Le domaine UBC (ubiquitin-conjugation) de Bruce est retrouvé dans les enzymes de conjugaison à l’ubiquitine. NAIP présente un domaine NACHT qui ressemble au domaine d’oligomérisation de nucléotides des NTPases AAA+ et un domaine LRR (leucine-rich repeats) qui fonctionne comme « sensor » des pathogènes pour les TLRs (Toll-like receptors).

(D’après Eckelman, Salvesen & Scott, EMBO J, 2006)

Figure 13B : Schéma de l’intéraction de XIAP avec les caspases 3 et 9

Les antagonistes des IAPs inhibent les IAPs via leurs domaines IBM (IAP-binding motif). Ils sont directement en compétition avec la fixation de la caspase 9 sur le BIR3 et avec la fixation des caspases 3 et 7 au BIR2 de XIAP.

De nouvelles molécules appelées « Smac-mimetics » ont ainsi été développées pour inhiber la résistance induite par les IAPs. Ces molécules sont actuellement en cours de tests cliniques de Phase I (Gyrd-Hansen and Meier 2010).

b) Les membres anti-apoptotiques de la famille Bcl-2

Les membres de la famille Bcl-2 constituent les principaux régulateurs de l’apoptose. Comme nous l’avons vu précédemment (cf Fig.7), cette famille peut être divisée en deux groupes en fonction de leur activité : les protéines possédant une activité anti-apoptotique et les protéines possédant une activité pro-apoptotique. Ces régulateurs de l’apoptose participent à la décision d’entrée en apoptose ou de survie et ceci tout particulièrement au cours de l’activation de la voie mitochondriale de l’apoptose. En effet, il a été montré que Bcl-2 et Bcl-xL inhibent la

PMM dans des protéoliposomes, des mitochondries isolées et des cellules. Dans ces mêmes systèmes, Bax et Bid favorisent l’ouverture du PTP. La PMM et la transduction des signaux de mort sont sous le contrôle direct des membres de la famille Bcl-2. (Marzo, Brenner et al. 1998; Zamzami, El Hamel et al. 2000; Brenner, Le Bras et al. 2003) Nous avons également vu qu’ils contrôlent la mort induite après un stress du RE et le relargage de Ca2+ (Oakes, Opferman et al. 2003). Plus récemment, divers travaux ont mis en avant le rôle de Bcl-2 dans la régulation du statut redox des cellules tumorales (Chen and Pervaiz 2009; Susnow, Zeng et al. 2009). Ces études font état d’une résistance au stress oxydant induit par traitement sur des cellules qui surexpriment Bcl-2. Il semble en effet que Bcl-2 augmente le niveau cellulaire de GSH et cela par une interaction directe (Amstad, Liu et al. 2001; Zimmermann, Loucks et al. 2007).

Ces rôles de Bcl-2 lui permettent, au sein de cellules cancéreuses, d’inhiber la PMM, le stress du RE et le stress oxydant induits par des agents thérapeutiques. Le déséquilibre du ratio Bax/Bcl-2 en faveur de Bcl-2 est d’ailleurs depuis plusieurs années associé à une chimio- résistance tumorale (Reed 1994; Reed 1996). Il est donc intéressant de cibler les membres anti-apoptotiques de la famille Bcl-2 pour contrer la chimio-résistance. Dans ce sens plusieurs molécules ont été développées et sont actuellement en cours de tests cliniques ou pré- cliniques (Tableau 1).

Tableau 1 : Les inhibiteurs de Bcl-2

Molécules Protéines cibles Sponsors Stade

Apogossypol Bcl-2, Bcl-XL, Mcl-1 Burnham (NCI) préclinique

HA-14 Bcl-2 Maybridge Chem préclinique

BH3 Inhibitors Bcl-XL Harvard U préclinique

Oblimersen (G3139) Bcl-2 Genta phase III

Gossypol (AT-101) Bcl-2, Bcl-XL, Bcl-w, Mcl-1 Ascenta (NCI) phase I/II

ABT-737 (ABT-263) Bcl-2, Bcl-XL, Bcl-w Abbott phase I

Obatoclax (GX15-070) Bcl-2, Bcl-XL, Bcl-w, Mcl-1 Gemin X phase I

Abbréviations : NCI : National Cancer Institute, Maybridge Chem : Maybridge Chemicals Co. Ltd., U : University (D’après Kang & Reynolds 2009, Clin Cancer Res)

Le premier de ces agents, l’Oblimersen développé par Genta (Tableau 1) a été conçu pour cibler spécifiquement Bcl-2 au niveau de l’ARNm. Il s’agit d’un oligomère de 18 paires de bases, en antisens de la séquence codante de l’ARNm de Bcl-2 et qui conduit à la dégradation de celui-ci. Les molécules les plus récentes ciblent les protéines et sont appelées « BH3- mimetics ». Leur mode d’action imite celui des « BH3-only » en se fixant et en inhibant certaines protéines anti-apoptotiques et également en induisant la PMM par oligomérisation avec Bax ou Bak. Toutes ces molécules ont déjà montré des résultats prometteurs sur des modèles de lignées cellulaires cancéreuses et en xénogreffes sur souris. (Kang and Reynolds 2009)

De nombreuses protéines anti-apoptotiques sont susceptibles de contrer les effets des agents thérapeutiques. Il est donc important de déterminer leur niveau en vue de traitements combinatoires avec des molécules ciblées (anti-Bcl-2 ou anti-IAP).

Nous avons vu dans cette 1ère partie que la mort cellulaire apoptotique et nécrotique constitue une arme dans l’élimination des cellules cancéreuses. Il est donc intéressant d’identifier des molécules capables d’induire l’une ou l’autre de ces deux morts.

De nombreuses molécules ont pour cible la mitochondrie et la protéine mitochondriale ANT est une cible prometteuse pour l’élaboration de nouvelles thérapies.

Les cellules cancéreuses développent des mécanismes de tolérance aux stress et expriment des protéines anti-apoptotiques responsables de la chimiorésistance. Il est donc nécessaire d’étudier les mécanismes impliqués dans ce processus pour déterminer l’efficacité d’agents thérapeutiques putatifs.

Dans le document en fr (Page 49-54)