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Expression des gènes impliqués dans la voie de signalisation de l’acide abscissique au cours

Chapitre III. Résultats et Discussion

III. Etude de la voie des hormones

III.4 Expression des gènes impliqués dans la voie de signalisation de l’acide abscissique au cours

Pour mieux comprendre la dynamique d’ABA au cours de la dormance, l’expression de gènes impliqués dans le métabolisme de l’ABA a été étudiée depuis juillet jusqu’à la floraison chez deux variétés contrastées pour leur besoins en froid : faibles besoins (‘Cristobalina’) et forts besoins (‘Regina’) (Figure 33). Au cours de la dormance, trois gènes NCED, dans la biosynthèse de l’ABA, sont différentiellement exprimés avec des profils très différents.

NCED5 est fortement exprimé entre septembre et décembre, en accord avec la quantité

d’ABA observée en endodormance, et qui confirmerait le rôle de l’ABA dans l’entrée et le maintien de la dormance. Toutefois, la diminution de l’expression de NCED5 est synchronisée pour les deux variétés en décembre, ce qui suggère plutôt un déterminisme environnemental. L’expression du gène NCED3 est très intéressante puisqu’elle est relativement constitutive jusqu’à la levée de dormance lorsqu’elle diminue de façon drastique. On peut donc faire l’hypothèse que NCED5 est impliqué dans la production d’ABA pour le contrôle de l’entrée en dormance tandis que NCED3 induit une production d’ABA nécessaire au maintien de la dormance. De façon générale, on observe une réponse globale à l’ABA vers décembre, avec une augmentation marquée de l’expression de PYL8, qui est un récepteur d’ABA, du gène ABF2, qui est activé par l’ABA, et de CYP707A2, qui est impliqué dans la dégradation de l’ABA. En fin d’écodormance, l’expression des trois gènes NCED augmente chez ‘Cristobalina’, ce qui pourrait conduire à une hausse marquée de la quantité d’ABA, telle qu’observé pour l’écodormance (Figure 32c, sous-groupes P6 et P7).

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Figure 33 : Profil d’expression de gènes impliqués dans le métabolisme de l’ABA.

Les niveaux d’expression ont été quantifiés par RNA-seq à partir de bourgeons floraux de cerisiers depuis juillet 2015 jusqu’à la floraison 2016 chez 2 variétés contrastées pour leurs besoins en froid : très faibles (‘Cristobalina’) et forts besoins en froid (‘Regina’). Les valeurs sont centrées réduites et la catégorie à laquelle appartiennent les gènes est indiquée dans le cadre à droite dégradation (CYP707A)/ récepteur (PYL8)/ réponse (ABF)/ synthèse (NCED). La date ou l’intervalle de la levée de dormance est indiqué par les lignes verticales pointillées.

Les résultats confirment le rôle de l’ABA dans l’induction et le maintien de la dormance. La cinétique de la quantité d’ABA en fonction de la profondeur de dormance semble cohérente avec les résultats de dosage d’ABA au cours de la dormance obtenus chez la variété ‘Summit’ (Götz et al., 2014). Ces travaux mettent en évidence un pic de la quantité d’ABA correspondant à l’entrée en dormance puis une chute, et un deuxième pic précédant la floraison. Ainsi dans ces conditions l’ABA semble synthétisé principalement pendant la dormance et également pendant l’écodormance, avec une chute correspondant à la levée de l’endodormance. Une forte quantité d’ABA est corrélée à toutes les périodes sans croissance

120 ni développement. Le gène NCED5 semble avoir un rôle prépondérant dans ce contrôle avec

une expression fortement activée en endodormance (Figure 33 : Profil d’expression de gènes

impliqués dans le métabolisme de l’ABA.), de façon similaire à ce qui a déjà été observé chez la vigne et le pêcher (Fennell et al., 2015 ; Wang et al., 2015). On peut penser que la diminution de l’ABA est un signal de levée de l’endodormance, comme le suggère la croissance accélérée observée après application de fluridone sur les rameaux floraux. Le rôle de l’ABA est cependant complexe d’autant plus que sa concentration peut avoir différents effets. En effet, chez la graine d’Arabiodopsis, des quantités élevées d’ABA inhibent la biosynthèse de GA, qui sont des hormones promotrices de croissance (Liu et al., 2010). Ainsi, cette chute brutale aurait des conséquences non pas sur une croissance visible mais sur une activation de la production de GA, qui semble confirmé par les profils d’expression des gènes impliqués dans la biosynthèse des GA (Figure 30). Le modèle d’un rapport ABA/GA orientant soit vers la dormance soit vers la germination, décrit chez la graine, pourrait donc être appliqué aux bourgeons floraux de cerisiers (Finkelstein et al., 2008 ; Koornneef et al., 2002). Dans ce cas, la resynthèse d’ABA lors de l’écodormance peut s’expliquer par la nécessité de conserver un rapport ABA/GA défavorable à la croissance afin de ne pas exposer les bourgeons à des températures encore trop faibles durant la nuit. Ainsi, les risques de dégâts de gel sur des bourgeons en croissance seraient limités. Il semble probable que le contrôle de ce ratio soit environnemental, avec des températures chaudes favorables à la synthèse de GA et à la dégradation d’ABA, tandis que les températures faibles favoriseraient la synthèse d’ABA et la dégradation des GA. Au cours de l’écodormance, l’alternance de températures chaudes (jour) et de températures froides (nuit) entraine des variations du rapport ABA/GA. Afin de vérifier l’effet de ce rapport sur la capacité de réponse aux températures chaudes, des prélèvements de rameaux pourraient être réalisés la nuit aux heures les plus froides et le jour pendant les heures les plus chaudes. Cette hypothèse (effet du rapport ABA/GA) semble cohérente avec les résultats obtenus après traitement à l’ABA et à la fluridone (inhibiteur de la synthèse d’ABA) (Figure 31). En effet on observe un retard dans le débourrement des bourgeons traités avec l’ABA comparé à ceux traités à la fluridone. Ainsi, on peut penser qu’en effet le ratio ABA/GA est un facteur qui contrôle la croissance, mais pas la capacité de croissance, et donc pas l’endodormance. Ces interactions d’hormones résulteraient de mécanismes mis en œuvre au préalable. Ces derniers pourraient être liés à un stress oxydatif intervenant dans de nombreux mécanismes, notamment sur les hormones, la réponse au stress, la réponse aux pathogènes, la germination etc. (Considine and Foyer, 2014 ; Diaz-Vivancos et al., 2013 ;

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