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3. Pratique observée!

3.5. Expérimentation!

La phase d’expérimentation s’est déroulée sur huit semaines d’école, du 6 février au 5 avril 2012. Chacun des trois élèves observés a produit un petit conte par semaine à l’ordinateur tout en étant filmé. Dans l’ensemble, tout s’est passé comme je l’avais prévu et j’ai pu réunir le corpus de traces voulu sans rencontrer trop de difficultés.

Au moment de débuter cette pratique observée, un point me causait quelques inquiétudes. Il s’agissait de la motivation, sur le long terme, des élèves, à effectuer la tâche relativement coûteuse en efforts que j’allais leur demander. Il s’est avéré que cela n’a pas posé de problèmes. Bien évidemment, la motivation et l’investissement des élèves ont varié au cours des deux mois d’observation, mais pas de manière significative et pas, comme je l’avais craint, en diminution constante au point de devenir problématiques.

Les aspects techniques de la récolte de traces m’inquiétaient également. J’ai effectivement dû faire face à quelques imprévus, que j’ai pu régler à chaque fois avant qu’ils ne mettent en péril tout le processus expérimental. Lors d’une des premières prises, par stress sans doute, j’ai oublié de lancer l’enregistrement et il me manque donc une séquence de trente minutes. Cela ne s’est heureusement plus reproduit. Quelques semaines plus tard, la caméra appartenant à l’école que j’utilisais pour les prises vidéos est tombée en panne, il n’était plus possible de décharger les séquences sur l’ordinateur. Heureusement, le support étant des cassettes mini dv, j’ai pu emprunter une caméra à une connaissance, ce qui m’a permis dans un premier temps de décharger les images en cours, puis de poursuivre mon travail pour la suite. J’ai malgré tout perdu une séquence de trente minutes lors de toutes ces manipulations. Il m’a ensuite fallu trouver une caméra pour poursuivre les prises de vues en classe, c’est une de mes collègues qui m’a prêté la sienne. Je n’ai par la suite plus rencontré de difficultés majeures. Le logiciel WordQ et le traitement de texte Pages ont fonctionné le plus souvent de manière optimale. J’ai parfois dû redémarrer l’ordinateur pour pallier à un bogue du logiciel WordQ qui n’affichait pas les prédictions de mots. Cela n’a jamais causé plus de problèmes que quelques minutes de retard. Il est également arrivé qu’un élève en tentant de faire une manipulation sur les cadres d’écriture du traitement de texte fasse «planter» l’ordinateur au point qu’il faille l’éteindre. Le travail n’avait pas été enregistré et a été perdu, mais il était heureusement enregistré sur les bandes vidéos. J’ai donc dû visionner la bande lors d’une pause afin de réécrire pour l’élève le début de son texte, pour qu’il puisse poursuivre ensuite. Enfin, la plus grande difficulté que j’ai rencontrée a été la somme de travail et le temps à consacrer à l’analyse des vidéos et à la création du compte-rendu écrit de chaque séquence de trente minutes. Il me fallait le faire au fur et à mesure pour ne pas laisser le travail s’accumuler et cela me demandait une vingtaine d’heures par semaine. Il s’agit vraiment d’un travail très lourd et l’assumer en plus de toutes les autres tâches a été spécialement compliqué et pénible. J’ai réussi à «tenir le rythme» et je pense que cela est positif, j’ai pu ensuite me consacrer aux résultats assez rapidement.

Concernant les élèves, enfin, ils ont été très collaborants, plus ou moins enthousiastes selon les semaines, mais toujours motivés à aller travailler à l’ordinateur. Je n’avais malheureusement pas la possibilité (ni en locaux, ni en ressources humaines) de leur proposer de travailler en individuel au calme, ils ont rédigé leurs textes au fond de la classe avec les autres élèves qui travaillaient et l’enseignante qui parlait à quelques mètres. Cet impératif de place et la présence des autres élèves a eu une conséquence sur la récolte de données. J’avais prévu de demander expressément à l’élève qui rédigeait son conte de verbaliser, à haute voix ce qu’il voulait écrire, dans l’idée d’avoir l’information, via les bandes vidéos, sur les idées de l’élève et l’éventuelle influence des propositions du logiciel WordQ. Je me suis rendu compte très vite que les élèves ne le faisaient pas spontanément et j’ai décidé de ne pas le leur demander parce que j’estimais que je leur imposais déjà passablement de choses (les moments fixes pour écrire, la caméra, la présence des camarades,...). Au final, je ne peux pas vraiment dire que ce soit une perte d’information que de ne pas avoir cet apport verbal des élèves, le contexte et l’observation permettent aisément de remarquer si l’élève a été influencé par le logiciel dans ses idées. J’ai donc relevé relativement peu de paroles des élèves, mais j’y vois un avantage par contre, c’est qu’il s’agit vraiment de messages verbaux très spontanés, qui fournissent des renseignements riches sur l’état d’esprit de l’élève.

Les trois élèves que j’avais décidé d’observer n’ont heureusement pas été trop souvent absents durant la période d’observation, ce qui aurait pu s’avérer problématique. Seul un élève, Raphaël, a été malade trois jours lors de la dernière semaine, avant les vacances de Pâques. J’ai décidé de ne pas «rattraper» cela par la suite. En effet, il me fallait passer à autre chose, que ce soit au niveau de l’avancée de ce travail ou dans les activités en classe avec les élèves. J’ai estimé que les observations sur sept semaines que j’avais réunies pour cet élève seraient suffisantes.

Pour ma récolte de traces, l’activité de l’élève se devait d’être autonome ou quasiment autonome et l’observation se limitait au premier jet de l’histoire. Par la suite et autant que le temps à disposition le permettait, j’ai proposé aux élèves de corriger les erreurs qui restaient dans les histoires terminées, tâche que j’ai effectuée avec eux à l’ordinateur mais sans WordQ. Puis l’élève avait la possibilité de travailler la mise en page de son conte et de l’imprimer. Les élèves qui n’étaient pas concernés par l’observation ont également produit des histoires avec WordQ, le plus souvent avec l’aide partielle de l’adulte, ils ont également pu mettre leur texte en page et l’imprimer. Parfois, des illustrations ont été réalisées sous forme de dessins. J’ai organisé ensuite plusieurs moments de lectures des contes des élèves. Chacun avait d’abord la

possibilité d’accepter ou pas que son conte soit lu (personne n’a jamais refusé), puis je lisais le conte et je montrais les éventuels dessins. J’avais simplement donné comme consigne que les commentaires devraient être positifs ou constructifs afin de ne pas décourager l’auteur de poursuivre sa création. Lors du premier moment, les élèves ont spontanément eu la réaction d’applaudir à la fin de la lecture, ce qui est devenu une habitude et une grande motivation pour les écrivains en herbe. Au mois de mars, une première lettre est enfin arrivée du Burkina Faso, après que nous en avons envoyé quatre, avec à chaque fois les contes écrits par les élèves. Nos correspondants nous faisaient parvenir une demi-douzaine de contes écrits par leurs soins, inventés ou issus de la tradition orale burkinabée. Ces contes ont été lus ou ont fait l’objet d’une activité autour de la compréhension en lecture après retranscription dactylographiée. Ils ont également fait l’objet de discussions avec les élèves. C’est lors de ces moments que s’est imposée l’idée de réunir certains textes des élèves et des enfants de Ouagadougou dans un livre «qu’on pourrait vendre à des gens». Le projet est en cours et un petit livre11 devrait être imprimé et vendu d’ici l’été, au bénéfice du centre Beog Neeré bien sûr.

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