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HIstORIquE DEs INstALLAtIONs

En 2015, le nombre d’unités installées est encore faible : 4 centrales ERD publiques à gazéificateur, 1 centrale ERD chaudière à vapeur, 2 centrales industrielles à gazéificateurs.

Tableau 2 : Les caractéristiques principales des sites installés

Unité Technologie Etat 2013 Localité Région

Centrale électrique ERD de Bejofo (opérateur

BE2) Gazéificateur + moteur dual mode Hors service Bejofo Alaotra-Mangoro Centrale électrique ERD d’Ambatondrazaka

(opérateur BE2) Gazéificateur + moteur dual mode Hors service Ambatondrazaka Alaotra-Mangoro Centrale électrique ERD de Boriziny Gazéificateur + moteur 100 % gaz Hors service Port-Berger Sofia Centrale électrique ERD d’Anjiajia

(opérateur CASIELEC) Gazéificateur + moteur dual mode En service Anjiajia Boeny Centrale électrique d’Andaingo

(opérateur BETC) Chaudière + moteur vapeur En service Andaingo Alaotra-Mangoro Unité industrielle de BIONEXX Gazéificateur + chaudière En service Fianarantsoa Haute Matsiatra Unité industrielle de Le Relais Madagascar Gazéificateur + moteur dual mode En service Isorana Haute Matsiatra

LEs FORCEs DEs INstALLAtIONs ERD à BIOMAssE ACtuELLEs Des alternatives à la dépendance aux énergies fossiles

A Madagascar, pour l’heure l’électrification rurale à partir de la biomasse constitue un secteur en phase de démarrage. Bien que l’utilisation des énergies fossiles, en l’occurrence le diesel, domine encore largement – de l’ordre de 68 % selon l’ADER en 2012 (WWF, 2012) - le parc de production d’électricité en milieu rural, les installations ERD à biomasse commencent à émerger. Si en 2012, seuls deux opérateurs se sont lancés dans l’exploitation de centrales thermiques à biomasse parmi les 27 opérateurs privés opérant dans le secteur de l’électrification rurale, trois autres installations ERD à biomasse sont actuellement en cours d’installation dans les régions Boeny et Alaotra Mangoro. La valorisation des ressources renouvelables permet de :

(1) substituer jusqu’à 62 % les besoins en gasoil d’une centrale thermique utilisant un gazogène en mode dual fuel, et (2) d’économiser plus de 10 000 litres de gasoil par an dans le cas d’une centrale à vapeur.

Le développement de chaînes de valeur locales

Au-delà de la production d’électricité qui constitue un facteur de développement en aval, l’installation d’une centrale à biomasse suppose la mise en place de filières d’approvisionnement en biomasse bois, déchets ou balle de riz, qui sont sources de richesse en amont. Ce double facteur de richesse est propre à l’ERD biomasse et n’existe pas pour les systèmes hydrauliques, éoliens ou solaires (GESFORCOM, 2012). À cet égard les centrales à vapeur sont certainement sources de développement amont plus important que les gazogènes. Dans les site visités, l’approvisionnement en bois nécessite une contractualisation avec des exploitants forestiers parce que le combustible bois est acheté et non pas fourni gratuitement. Pour la balle de riz, les opérateurs n’ont pas encore su réellement développer de chaîne d’approvisionnement. Ils s’approvisionnent de préférence gratuitement et sans contractualisation auprès des dépailleurs. Cette absence de normalisation se traduit par une forte instabilité avec parfois des ruptures en cours d’année.

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Une durée de vie souple

Théoriquement, les installations ERD à biomasse que ce soit un gazogène ou une chaudière à bois durent de 10 à 20 ans pour un fonctionnement normal. Bien que le gazogène s’exploite pendant une période de 10 ans, son utilisation reste flexible comparée à une centrale thermique en centre rural africain dont la durée de vie varie de 5 à 8 ans (Saclier, 2000). Cependant, cette étude montre que faute de formation sur ce type d’installation et de pièces de rechange disponibles, la durée de vie des installations peut être considérablement diminuée.

Des combustibles à moindre coût

Les avantages de l’utilisation de combustibles renouvelables tels que la biomasse résident dans le fait que leur coût est minime : de l’ordre de 7 à 50 Ar/kWh (gazogène avec moteur dual fuel) et de 91 Ar/kWh (chaudière à bois avec moteur à vapeur) selon nos études de cas, contre 369 Ar/kWh à 499 Ar/kWh pour le gasoil (gazogène dual fuel). Ces coûts minimes sont en partie liés à la disponibilité de la biomasse dans un rayon d’approvisionnement raisonnable. À contrario, les coûts de transport du gasoil en zone rurale, peuvent représenter jusqu’à 19 % du coût d’achat du combustible.

Des coûts de revient théoriques du kWh moins chers que ceux des générateurs diesel

Selon les études menées au niveau des sites ERD à biomasse, le coût de revient prévisionnel du kWh, dans les conditions actuelles de fonctionnement des centrales serait de l’ordre de 800 Ar/kWh pour les gazogènes tandis qu’il serait de 1200 Ar/kWh pour la chaudière/moteur à vapeur. En comparaison, le coût de revient de l’énergie au kWh d’une centrale thermique diesel en zones rurales s’élève à 0,65 $ à 0,85 $ soit dans les 1495 et 1955 Ar (ADER, ORE, 2012 in WWF, 2012).

LEs vERROus Et pROBLèMEs ACtuELs

D’une manière générale l’analyse de l’existant montre des solutions encore fragiles et des technologies peu maitrisées que ce soit dans le domaine de l’ERD ou dans le milieu industriel. Il apparait clairement que l’installation et le fonctionnement de ces systèmes se heurtent à de réels verrous.

Un coût d’investissement élevé

Une des faiblesses des installations ayant recours aux énergies renouvelables est l’importance du coût d’investissement. Selon nos calculs, les coûts d’investissement s’élèvent environ à 1000 Euros/Kw installé pour un gazogène et 2 000 Euros/kw pour la centrale vapeur. De plus, les équipements et matériels liés aux installations ERD à biomasse ne sont pas produits localement, mais sont importés en totalité. Ces coûts sont 2 à 3 fois supérieurs que ceux d’une centrale thermique diesel (entre 500 et 800 Euros/kw). Les petits opérateurs locaux ayant peu de capacité d’investissement, l’installation de telles centrales nécessite systématiquement une aide publique. L’Agence de Développement de l’Electrification Rurale a subventionné à plus de 70 % les installations visitées, mais tout blocage de ces fonds représente un verrou majeur au développement de ces solutions, ce qui fut le cas entre 2009 et 2013. Par ailleurs la faible capacité d’investissement des opérateurs privés d’électricité freine considérablement les possibilités d’expansion des réseaux de distribution existants et rend ainsi les solutions non viables le long terme en raison d’une demande finale ne pouvant être satisfaite comme à Anjiajia.

Des technologies encore non maitrisées localement

Les technologies utilisées étant importées, les fabricants choisis (Ankur Scientific, Chongqing Fengyu Electric Equipment Co. Ltd, PSI) n’ont pas de représentants locaux et il est impossible pour les opérateurs de s’approvisionner en pièces détachées. Les exploitants s’adaptent et utilisent des pièces fabriquées localement et à des réparations peu fiables remettant en cause le rendement et la durée de vie des matériels.

Atouts et contraintes de l’électrification rurale décentralisée à partir de biomasse à Madagascar

Dans la conduite des installations à gazéificateur, le problème majeur est l’instabilité dans la qualité et la quantité des gaz produits. Le gazogène de Bejofo a explosé du fait d’une absence de maitrise de la combustion et des gaz produits, le moteur à gaz de l’installation d’Anjiajia a cassé pour des raisons similaires et n’a pu être réparé. Celui de Fianarantsoa a été abandonné car l’instabilité dans la qualité du gaz ne permettait pas d’assurer une production régulière de vapeur pour l’unité industrielle.

Dans la conduite de la centrale vapeur, il apparait que d’une part le moteur à vapeur actuel souffre de faiblesses matérielles patentes (piston, coussinets, etc.et d’autre part qu’un tel système de cogénération (chaleur industrielle pour une scierie + électricité) nécessite une maitrise technique que n’a pas encore l’opérateur.

Une inadéquation entre le service et la demande des consommateurs

La distribution d’électricité est marquée par le manque d’adéquation entre le service attendu par les consommateurs et le service pouvant être fourni par la technologie. Les cahiers des charges en termes de prix de vente, de durée et d’horaire de fourniture n’ont pratiquement jamais été respectés quelles que soient les installations. Les tensions entre opérateurs et consommateurs sont fortes ce qui n’incite pas les nouveaux abonnés et en particulier les artisans; la production annuelle actuelle représente en moyenne 20 % des prévisions.

Des ressources en pratique peu disponibles

Tous les gazogènes en service sont alimentés par un combustible unique : la balle de riz – coproduit du décorticage du riz paddy, produite localement dans un rayon allant de 1 km à 11 km autour des centrales. Le gazogène de la société Bionexx à Fianarantsoa a fonctionné un temps avec des morceaux de bois 5-7 cm de diamètre et d’une longueur égale à 10 cm. La disponibilité en balle de riz est variable selon la saison et selon la demande du principal marché concurrent : la fabrication de briques.

La centrale à vapeur, quant à elle, est alimentée uniquement à partir de bois de plantation d’Eucalyptus et de résidus de scierie (dosse de pin). Là aussi la concurrence avec le marché du bois de chauffe et du charbon de bois rend l’approvisionnement peu sûr. Il ne peut se faire qu’à partir de plantations ou de zones de gestion certifiées durables par l’administration forestière. Dans le cas de la centrale d’Andaingo, l’absence de plantations communales, oblige l’opérateur à s’approvisionner auprès de fournisseurs privés dont la disponibilité mais également l’éligibilité restent aléatoires.

Du coté des fournisseurs, les motivations à entrer dans la chaîne d’approvisionnement dépendent des offres qui se présentent dans le marché. Aussi, la possibilité d’asseoir une convention formelle de fourniture de biomasse afin de garantir l’approvisionnement reste encore limitée.

Les coûts de production

Tous ces verrous : investissement lourd, problèmes d’approvisionnement, casses et absence de pièces détachées, faible consommation se répercutent lourdement sur les coûts de revient de l’exploitation et au final sur le coût de production et de vente de l’électricité. Tous les coûts de production relevés sont supérieurs aux coûts prévisionnels.

Les centrales à gazéificateur ont un coût de production de 1,25 à 1,35 fois supérieur au coût prévisionnel. Ces coûts restent néanmoins inférieurs aux coûts équivalents avec un moteur diesel. La centrale d’Andaingo révèle un coût de revient du kWh, 3 fois supérieur à la prévision initiale, du fait des pannes du moteur à vapeur. Les frais de maintenance du moteur à vapeur surpassent largement les prévisions alors que les coûts fixes sont déjà 4 fois supérieurs à ceux du gazogène.

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Les coûts de production calculés pour tous les sites étudiés sont synthétisés dans le tableau ci-dessous : Tableau 3 : Les coûts de production des différents types d’installations

Coût de production Andaingo Anjiajia Bejofo Le Relais Référence

Type d’installation moteur vapeurChaudière + Gazéficateur + moteur dual mode Gazéficateur + moteur dual mode moteur dual modeGazéficateur + Groupe électrogène diesel Puissance installée (kW) 70 70 120 135 70 Coût d’investissement (Ar/kW) 6 867 359 3 549 439 2 099 857 n.c. 2 000 000 Production annuelle (kWh) 20 068 80 371 48 930 P1F

Coûts de production (Ar) 65 388 284 78 843 41 52 160 806 Nombre d’abonnés actuels 83 217 100

Coût de revient actuel du kWh 3 258 981 1 066 n.c 1600 Production prévisionnelle (kWh) 113 088 200 312 679 349

Nombre d’abonnés prévisionnel 144 567 571 Coût de revient prévisionnel du

kWh (AR/Kwh) 1 199 726 852 n.c  1500

Conclusion

Madagascar dispose d’atouts certains pour le développement de l’électrification décentralisée à partir de biomasse : une politique ambitieuse d’accès à l’énergie, une ambition de développement des énergies renouvelables, une planification fonction des ressources énergétiques locales, une ressource biomasse abondante dans de nombreuses régions.

Cependant, face à ce potentiel important, les expériences sont encore peu nombreuses et souffrent de leur jeunesse : les technologies nécessitent encore d’être éprouvées dans les conditions de fonctionnement des localités malgaches ; elles sont toutes importées et ne disposent pas de relais techniques permettant leur maintenance à faible coût ; elles sont encore mal maitrisées par les opérateurs locaux. Comme pour toute innovation, une phase de coadaptation est nécessaire pour une diffusion à grande échelle. Cette phase est malheureusement rendue difficile par des coûts d’investissement importants qui freinent le développement de nouvelles expériences, les économies d’échelle et les apprentissages indispensables. Malgré ces difficultés, les premiers résultats montrent que ces technologies biomasse sont à même de produire une électricité à des coûts inférieurs aux groupes électrogènes, offrant ainsi un service énergétique de meilleure qualité en termes de durée quotidienne de fourniture et de puissance disponible. Ils montrent également dans le cas des gazéificateurs à moteur dual que ces technologies sont complémentaires des générateurs diesel existants et que ce double approvisionnement permet de moduler en fonction de la disponibilité en biomasse sans perte de service aux consommateurs.

Par ailleurs, il apparait que la disponibilité en biomasse peut être limitée par les usages concurrents : briqueteries pour la balle de riz, bois de feu domestique pour les plantations forestières. Cette concurrence accroit nécessairement la valeur de la biomasse qui risque d’augmenter au cours du temps et qu’il est nécessaire de prendre en compte dans les calculs économiques à long terme.

Mais loin d’être un verrou, ce coût potentiel de la biomasse est également un des intérêts de ce type de dispositif de production qui participe à une économie locale en amont, au service de l’amélioration des conditions de vie d’un grand nombre de ménages.

Bibliographie

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Caractéristiques du moteur à vapeur