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fonction de cohérence entre une chambre à fission et des accéléromètres placés sur chacune des barres de commande [152].

1.4

Le bruit neutronique, un enjeu majeur pour la sûreté

Après avoir détaillé les codes actuels dédiés au bruit neutronique, nous évoquerons dans cette section les enjeux de l’étude du bruit neutronique pour la sûreté des réacteurs d’aujourd’hui et de demain.

1.4.1

Les simulateurs actuels de bruit neutronique

Il existe actuellement deux codes déterministes spécialement dédiés au bruit neutronique : CORE SIM et NOISIM. Ces deux codes peuvent résoudre les équations du bruit neutronique en théorie de la diffusion à une, deux ou trois dimensions. Deux méthodes de résolution stochastique des équations du bruit neutronique ont récemment été testées, l’une avec le code Monte Carlo MCNP4C [162] et l’autre avec le code MCNP5 [130], mais il ne s’agit que de premiers tests et non de véritables simulateurs de bruit neutronique (nous y reviendrons en détail au chapitre4).

CORE SIM

La Chalmers University of Technology (Göteborg, Suède) est l’une des plus grandes universités de Suède. Nous devons à sa division de l’ingénierie nucléaire de très nombreux travaux sur la théorie du bruit neutronique et le premier code déterministe spécialement dédié à la simulation du bruit neutronique [44,45,48,50]. Ce code, nommé CORE SIM, est développé sous Matlabrdepuis les années 2000. CORE SIM résout, par des méthodes basées sur la méthode des différences finies, l’équation de Boltzmann stationnaire et les équations du bruit neutronique en théorie de la diffusion à une, deux ou trois dimensions ainsi que les équations adjointes en stationnaire et en bruit. Il peut en outre déterminer les valeurs propres et les vecteurs propres d’ordres supérieurs de l’équation stationnaire. Initialement développé pour mener à bien des études de bruit sur des réacteurs à eau en théorie de la diffusion à seulement deux groupes d’énergie, une extension à trente-trois groupes et une prise en charge des géométries hexagonales a été mise en place par la suite pour l’étude des réacteurs rapides [154,167]. Un solveur thermohydraulique traitant des problèmes bi

22 CHAPITRE 1. ANALYSE ET DÉTECTION DU BRUIT NEUTRONIQUE

ou monophasique a aussi été développé et couplé au solveur neutronique [46,85]. Tout comme le solveur neutronique résout les équations stationnaires et perturbées de la neutronique, ce solveur résout les équations stationnaires et perturbées de la thermohydraulique. Le couplage séquentiel entre les deux solveurs s’effectue via les sections efficaces et les taux de fission.

NOISIM

La Sharif University of Technology (Téhéran, Iran) est un acteur très récent dans le domaine du bruit neutronique. C’est en 2010 que l’article [103] présente un code déterministe, basé sur la méthode des différences finies, résolvant les équations du bruit neutronique en théorie de la diffusion à deux groupes d’énergie et à deux dimensions pour les géométries hexagonales des réacteurs VVER12. Ce code a été par la suite amélioré pour aboutir au code de bruit neu-

tronique NOISIM résolvant les équations stationnaires et les équations du bruit neutronique en théorie de la diffusion à deux groupes d’énergie et à trois dimension [100,101,102]. Tout comme CORE SIM, ce code intègre un solveur neutronique (nommé TRYDIN-3) et un solveur thermohydraulique (nommé SHC-Noise) couplés par un couplage séquentiel. NOISIM est aussi adapté aux géométries rectangulaires et triangulaires.

Précisons que le code présenté dans [1] peut être vu comme une « variante » de celui présenté dans [103]. Cette variante emploie une discrétisation spatiale basée sur l’approximation linéaire de la méthode des éléments finis de Galerkin utilisant des éléments triangulaires non structurés.

1.4.2

Les enjeux pour la sûreté des réacteurs d’aujourd’hui et de demain

Nous l’avons vu au fil des différentes sections précédentes, l’étude approfondie du bruit neutronique peut être un atout majeur pour la sûreté des réacteurs nucléaires toutes technologies et toutes filières confondues. Les codes déterministes dédiés au bruit neutronique que nous venons de détailler peuvent traiter des problèmes de bruit pour plusieurs types de réacteurs. Néanmoins, ces codes universitaires n’offrent que la possibilité de mener des études en théorie de la diffusion à peu de groupes (deux pour les réacteurs à eau et éventuellement trente-trois pour les réacteurs rapides avec CORE SIM). Or, les sources de bruit sont souvent des perturbations locales de faibles amplitudes (une vibration par exemple) et traiter ce type de problème en théorie de la diffusion peut parfois s’avérer trop imprécis et approximatif, notamment si l’objectif est de simuler précisément les réponses des détecteurs de flux. Avoir la possibilité de mener des études de bruit en théorie du transport via des codes déterministes et/ou Monte Carlo est l’un des principaux défis des années à venir.

Le développement de simulateurs de bruit neutronique directement intégrés aux grands codes neutroniques indus- triels et multi-filières comme APOLLO3r[64,143] ou TRIPOLI-4r[31,32] sera d’une aide précieuse pour compléter et optimiser les études de sûreté des réacteurs d’aujourd’hui et de demain. Comme cela est fait dans CORE SIM et NOISIM, un couplage entre la neutronique et la thermohydraulique devra être aussi intégré à ces simulateurs de bruit neutronique. Développer des solveurs numériques dédiés au bruit neutronique dans des grands codes industriels per- mettra ainsi de disposer de solides bases pour mettre en place des méthodes complètes et robustes de diagnostic en temps réel du bruit neutronique dont un exemple est brièvement schématisé en Fig.1.17. Pour cela, le but est, à terme, d’être capable de correctement résoudre en temps réel le problème inverse, c’est-à-dire de remonter à la source de bruit connaissant simplement le bruit via les signaux des détecteurs13. Cela permettra en outre de compléter et d’améliorer les études de sûreté effectuées en amont et en aval. Nous pouvons citer par exemple l’étude des meilleures configura- tions possibles des divers détecteurs de flux lors du design des futurs réacteurs de 4èmegénération, ou encore l’analyse a posteriori d’une anomalie qui aurait été détectée en cours de fonctionnement du réacteur mais à laquelle les opérateurs n’auraient pas trouvé d’explication (les problèmes de bruit survenus il y a peu dans certains des pré-konvois allemands en sont le parfait exemple [144]).

12. Les réacteurs russes VVER ont en effet la particularité notable d’avoir des assemblages de forme hexagonale. L’unique centrale nucléaire iranienne, la centrale nucléaire de Bouchehr, est un réacteur de type VVER 1000 de dernière génération dont la mise en service n’a eu lieu qu’en 2011.

13. En guise d’illustration, nous pouvons citer l’article [145], très connu dans son domaine, qui montre comment le bruit sismique peut être exploité pour résoudre un problème inverse dans le but de déterminer les propriétés du sous-sol. Pour plus de détails sur la théorie générale des problèmes inverses, le lecteur intéressé pourra se référer à [66,76].

1.4. LE BRUIT NEUTRONIQUE, UN ENJEU MAJEUR POUR LA SÛRETÉ 23