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Les autres exceptions concernant la reproduction et communication d’œuvres

C.- L’intégration de la liberté de panorama dans le droit d’auteur belge et français

1) Les autres exceptions concernant la reproduction et communication d’œuvres

Lors de son entrée en vigueur, les médias ont accueilli la nouvelle exception de panorama comme quelque chose d’innovant et d’inédit, comme mouvement libérateur de l’espace public253 Or, ceci est à relativiser dans la mesure où il existait déjà dans les droits belges et

une interprétation restrictive de la liberté de panorama comme ne comprenant pas les utilisations commerciales ou publicitaires de l’œuvre. Un litige semblable a eu lieu à propos de la reproduction de l’image de l’Atomium sur des tracts politiques lors de la préparation des élections 2019. L’ATOMIUM, « Droits d'auteur »https://atomium.be/copyright, s.d., consulté le 10 juin 2020. ; K. FADOUL, « Elections 2019 : l'image de l'Atomium utilisée sans autorisation », RTBF Info, disponible sur

https://www.rtbf.be/info/regions/detail_elections-2019-l-image-de-l-atomium-utilisee-sans-

autorisation?id=10233794, le 22 mai 2019 ; K. FADOUL, « L’Atomium va réclamer des droits d'auteur à

l'artiste français DJ Hamida pour son dernier clip vidéo », RTBF info, disponible sur

https://www.rtbf.be/info/regions/detail_l-atomium-va-reclamer-des-droits-d-auteur-a-l-artiste-francais-dj-

hamida-pour-son-dernier-clip-video?id=9734648, le 12 octobre 2017.

253 Deux illustrations dans les médias belges et français : C. VAN DIEVORT « la Belgique a (enfin) une liberté

de panorama », La Libre Belgique, disponible sur www.lalibre.be/lifestyle/magazine/la-liberte-de-

français d’autres exceptions permettant la reproduction d’œuvres exposées dans un lieu public sans l’autorisation de leurs auteurs.

En premier lieu, l’article X.190, 2° du C.D.E. consacre une exception pour les œuvres exposées dans un lieu public « si le but de la reproduction n’est pas l’œuvre elle-même ». Cette exception, était d’abord prétorienne puis a été insérée par le législateur dans la loi belge254. Elle constitue

également une exception facultative de la directive InfoSoc255. Concrètement, cette exception concerne les œuvres qui se trouvent dans les lieux publics. Comme précisé supra, il n’est pas certain que cette notion de lieux publics soit similaire à celle de l’exception voisine de liberté de panorama mais dans une logique systématique, il conviendrait d’en avoir la même compréhension256. Ensuite, la reproduction doit avoir un caractère incident, fortuit ou encore

accessoire. Ainsi, sont concernées les images représentant une œuvre architecturale en arrière- plan, représentée dans son habitat naturel ou encore dont la représentation n’est pas but premier de la représentation257.

Le droit d’auteur français connaît une exception similaire bien qu’elle ne soit pas ancrée explicitement dans le C.P.I. D’abord en 2005, la Cour de cassation française a consacré la « théorie de l’accessoire » ou « de l’arrière-plan » dans un célèbre arrêt concernant l’utilisation de l’image de la place des terreaux lyonnaise pour en confectionner des cartes postales258.

Malgré cela, un doute sur la persistance de cette exception prétorienne persistait puisque le législateur ne l’avait pas ancrée législativement à l’occasion d’une réforme de 2006 sur le droit d’auteur. Or, dans son arrêt « être et avoir » de 2011, la Cour consolide l’exception de l’arrière- plan en se fondant directement sur la directive InfoSoc259. Les faits concernaient l’apparition dans un film documentaire tourné dans une salle de classe d’une méthode de lecture. La Cour a jugé que l’œuvre litigieuse n’avait été balayée que furtivement par les caméras et se situait en arrière-plan. Ainsi, son inclusion dans le film n’était que fortuite et autorisée sans l’accord des auteurs260..

Les exceptions de panorama et d’inclusion fortuite se recoupent partiellement. La différence majeure se situe dans la notion d’accessoire, d’arrière-plan ou d’incidence qui sont soumises à l’appréciation du magistrat. Cependant dans toute une série de situations particulières, l’appartenance au champ d’application de l’une ou de l’autre exception est floue261.

L’apparition d’une œuvre architecturale sur une image panorama à 360 degrés relève-t-elle de

LANGLAIS, « France, libère ton panorama ! », L’Obs avec Rue 89, disponible sur

www.nouvelobs.com/rue89/rue89-parti-pris/20160115.RUE1920/france-libere-ton-panorama.html, le 21

novembre 2016.

254 Cass , 14 avril 1955 (Mardasson de Bastogne), Pas. 1955, I, p. 884 ; Cass., 25 mai 1972, RW, 1972-1973,

p. 1421.

255 Directive 2001/29/CE (InfoSoc), art.5 §3, i). 256 M.-C. JANSSEN, op. cit., p. 220‑221.

257 Ibid.

258 Cass. 1re civ., 15 mars 2005, CCE, n°5, 2005, comm. 78, note C. Caron. 259 Cass. 1re civ., 12 mai 2011, Bull. I, n° 87.

260 D. PIATEK, La crise des exceptions en droit d’auteur : étude paradigmatique, thèse de doctorat, Université

d’Orléans, 2016.p. 169-175.

la liberté de panorama ou de l’exception une inclusion fortuite ? Quant est-il de l’apparition d’œuvres protégées durant sur un life Facebook, d’un selfie devant l’Atomium, ou encore de la représentation d’une ville entière dans un jeu vidéo Open space ou d’œuvres architecturales représentées sur Google Street view ? Il convient dans chacun de ces cas particuliers de déterminer si l’œuvre est l’objet principal ou accessoire de la représentation. La distinction n’est pas toujours aisée et semble être déterminable au cas par cas.

En deuxième lieu, une série d’autres exceptions viennent s’ajouter à ce puzzle. Citons limitativement, l’exception de reproduction et de communication à des fins d’illustration de l’enseignement ou de recherche scientifique262, l’exception de comptes rendus d’événements

de l’actualité263 , la copie privée264 ou encore la communication ou reproduction d’une oeuvre

dans un but privé, autrement dit qui se limite au cercle de la famille265. Ces exceptions facilitent également la libre reproduction et la diffusion de l’image de l’œuvre en permettant des dérogations aux droits des auteurs, notamment à ceux des architectes.

En bref, l’exception de panorama n’apporte pas au droit d’auteur belge et français une solution complètement inédite face à la libre représentation d’œuvres architecturales situées en permanence dans l’espace public.

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