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Chapitre 3. L’impact des extractions de granulat sur l’évolution verticale du plancher

2. Evolution des profils des lignes d’eau d’étiage : analyse et mise en relation avec le mode

2.1 Evolution des profils des lignes d’eau sur la période 1978 2011

a. Evolution du profil en long entre 1978 et 1988

L’analyse des résultats tableau 14 montre une tendance d’évolution caractérisée par une prédominance des secteurs concernés par l’abaissement de la ligne d’eau. Ce tronçon représente 226,9 km, soit 65,1 % du linéaire étudié. La valeur moyenne de l’abaissement est de 13,03 cm, soit un rythme annuel de 1,3 cm.

Les secteurs de rehaussement de la ligne d’eau représentant seulement 25,7 Km, soit 7,37 % du linéaire étudié. Le taux moyen du rehaussement est de 19,87cm, soit un rythme annuel de 1,98 cm

On relève sur le profil, la présence de nombreux secteurs (inférieur à 15 km) caractérisés par une alternance de zone d’abaissement et de rehaussement de la ligne d’eau. Ces derniers représentent au total 95,9 Km soit 27,51 %. Ils se caractérisés par une rupture

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bien marquée de la pente du profil en long. Cela reflète une modification topographique du plancher alluvial et une forte remobilisation de la charge solide (par érosion régressive).

On note par ailleurs, un important rehaussement au niveau du pont Wilson à Tours (1,15 m). Cet exhaussement peut être dû à la restauration du pont après son effondrement en 1978 (effet local).

On constate d’après ces résultats une tendance générale d’abaissement de la ligne d’eau. Les valeurs d’abaissement du profil suivent un gradient croissant de l’amont vers l’aval jusqu’à Tours.

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Figure 86. Évolution verticale du profil en long de la surface de l’eau entre Cours-les- Barres et Saumur pour la période 1978 – 1988 (source des données : DREAL Centre).

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Evolution du profil en long entre 1978 et 2005

La comparaison des profils de la ligne d’eau de 1978 et 2005 renseigne sur l’évolution du fond du chenal principal à moyen terme, elle met en évidence les modalités d’ajustement du profil en long 10 années après l’arrêt des extractions de granulat.

Le résultat obtenu de la superposition de ces profils a permet d’apporter plus d’informations concernant l’évolution morpho-sédimentaire du plancher alluvial. On

constate une extension des secteurs concernés par l’abaissement de la ligne d’eau, un

adoucissement de la pente du profil en long et une augmentation des valeurs moyennes d’abaissement. Le linéaire concerné par l’abaissement est passé de 226,9 km (1988) à 318,3 km (2005), soit 91,2 % du tronçon étudié. Le taux moyen annuel d’abaissement est passe de 1,3 cm (1988) à 1,5 cm (2005). Le secteur de rehaussement est d’environ 31 km, soit 8,8 % et un rythme annuel moyen de 0,52 cm. On remarque par ailleurs, que les zones d’accumulations formées en 1988 en amont d’Orléans et à Tours ont été effacées probablement par une érosion progressive. Ce constat confirme encore la tendance générale à l’abaissement du chenal principal de la Loire, les secteurs en exhaussement ne traduisant que des ajustements locaux. Cette évolution exprime clairement le contexte de déficit sédimentaire dans lequel évolue le fleuve.

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Figure 87. Évolution verticale da la ligne d’eau entre Cours-les-Barres et Saumur pour la

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Les résultats de la comparaison des profils des lignes d’eau effectuée pour la période 1978- 2005 se résument en deux principaux modes d’évolutions :

- une alternance de phases de rehaussement et d’incision (de différentes intensités), ce

mode d’évolution concerne les secteurs localisés entre Gien et Saint-Père-sur-Loire, entre Orléans et Avaray et en aval de Tours. Certains de ces secteurs ont connus une courte phase de rehaussement entre 1978 et 1988 (augmentation de la pente des biefs) et une seconde phase d’abaissement entre 1988 et 2005. Il en résulte de cette évolution un adoucissement de la pente et un déplacement des zones de sédimentation vers l’aval (en retrouve plus de zone de sédimentation en amont d’Orléans en 2005).

Ce mode d’évolution topographique doit être rapproché de l’ajustement du plancher alluvial suite à des extractions de granulat : cette opération déclenche une érosion régressive (par augmentation de la pente) à l’amont de la zone d’extraction et engendre des accumulations à l’aval de cette zone (dans la fosse d’extraction), ces dernières vont disparaitre progressivement (par érosion progressive). Les processus de sédimentation et d’érosion s’estompent quand le cours d’eau ai atteint un nouveau profil. Il en résulte de cet ajustement un abaissement général du font du lit. Les tronçons concernés par ce mode d’ajustement se trouvent souvent dans les départements qui ont fait l’objet d’extractions massives de granulat (Loiret, l’Indre et Loire) (voir figure 90).

- une incision permanente, l’érosion progressive caractérise l’ensemble du tronçon. Elle engendre un « lissage » et un abaissement du fond du chenal (qu’on distingue clairement en 2005). Les pentes sont moins abruptes. L’abaissement de la ligne d’eau suit « un

gradient croissant de l’amont vers l’aval », la valeur d’abaissement s’accroit au fur et à

mesure que l’on se dirige vers l’aval. Cette tendance liée aux extractions de granulat dont le tonnage des matériaux extraits augmente au fur et à mesure que l’on se dirige vers l’aval. De ce fait, on constate l’influence des extractions de granulats sur l’évolution morpho-

sédimentaire du lit de la Loire : modification des processus d’ajustement du plancher

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Figure 88. Évolution des pentes des biefs reliant les échelles de mesures sur le tronçon allant de Cours-les-Barres à Saumur (période 1978 – 2005).

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Evolution des profils des lignes d’eau entre 2003 et 2011

On constate pour la période 2003 – 2011 la poursuite de l’enfoncement de la ligne d’eau

mais à un rythme moins important. Le taux annuel moyen de l’abaissement passe de 1,5 cm en 2005 à 1,28 cm en 2011.

Le chenal principal de la Loire n’a pas encore atteint le stade de stabilisation. L’arrêt des extractions semble réduire la vitesse d’incision du plancher alluviale mais il ne met pas fin à l’enfoncement du chenal principal. Les secteurs concernés par l’abaissement de la ligne d’eau représentent en 2011, au total un linéaire de 244,6, soit 70 % du secteur étudié. Les zones de rehaussement de la ligne d’eau représentent 105,1 km soit 30 %. Le taux moyen annuel du rehaussement est de l’ordre de 0,65 cm (les valeurs moyennes de l’abaissement sont dans la majorité des cas supérieurs à celles du rehaussement).

Ce constat confirme la tendance d’abaissement général de la ligne d’eau. Le croisement de ces résultats (pas de temps pluriannuel) avec ceux de la période 1978 – 2005 (analyse pluri- décennal), montrent que le chenal principal est passé à un autre stade d’ajustement. Ce dernier se caractérise par une disparition des secteurs d’alternance entre zones d’abaissement et de rehaussement c'est-à-dire les zones de rupture de pente (sur des distances inférieure à 15 km). Les zones de sédimentation sont relativement faibles (0,65 cm/an), ces secteurs d’accrétions sont probablement issus du remaniement du stock sédimentaire « sur place ».

Les processus d’érosion progressive engendrent le déplacement de la charge solide de l’amont vers l’aval. Le temps de stockage des ces sédiments dépond de l’intensité des processus d’érosion. L’accumulation des sédiments est donc momentané, car elle ne résulte pas d’un surplus de matériel granulaire susceptible de pallier l’incision du lit, c’est plutôt un dépôt de sédiments en transition (vers l’aval) et un ajustement de la topographie en fonction des variables de contrôle (débit liquide et la charge solide). Ce mode d’ajustement favorise l’incision du plancher alluvial à l’échelle du tronçon étudié.

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Figure 89. Évolution verticale des lignes d’eau entre Cours-les-Barres et Saumur pour la période 2003 – 2011 (source des données : DREAL Centre).

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Figure 90. Mise en relation de l’évolution des extractions de granulat et du mode d’ajustement du fond du chenal principal de la Loire entre Cours-les-Barres et Saumur. Les secteurs à rupture brutale de pente correspondent aux secteurs qui ont connus une forte exploitation du matériel alluvionnaire.

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Conclusion

L’exploitation du matériel granulaire dans le lit de la Loire est de loin la plus importante à l’échelle du bassin versant, elle représente 93,9 % des sédiments extraits dans les lits mineurs et 44,86 % des sédiments extraits dans les lits majeurs dans cours d’eau du bassin versant. Environ 225 millions de tonnes de sédiment ont été extraits dans le lit mineur entre 1949 et 1995, soit un rythme annuel d’environ 4,9 millions de tonne par an. Cette valeur dépasse largement le 1 millions de tonne de sédiment transporté par la Loire (estimer par Babonaux, 1970). Il en résulte sans doute de cette forte exploitation une aggravation du déficit sédimentaire au sein du lit la Loire. Ces extractions sont considérés comme un facteur aggravant le phénomène d’abaissement du plancher alluvial (Gasowski 1994 ; Grivel 2008). Elles ont un impact direct sur le lit, mais aussi des conséquences indirectes sur la plaine alluviale : abaissement de la nappe, assèchement des zones humides et peuvent également compromettre la stabilité des ouvrages d’art.

Les résultat de l’analyse des profils des lignes d’eau réalisée à un pas de temps pluriannuel et pluri-décennal (ajustement des méso-formes) nous a permis de distinguer les différentes phases de l’ajustement du profil en long du chenal principal et de déduire la tendance de l’évolution verticale du plancher alluvial sur la période d’étude (33 ans). Disposant d’un profil en long réalisé en 1988, soit 9 ans après le pic des extractions enregistré en 1979 et de deux profils réalisés en 2005 et 2011, soit respectivement 10 et 16 ans après l’arrêt des extractions en 1995, nous avons pu mettre en évidence l’influence des extractions de granulat sur l’évolution verticale du plancher alluvial.

On constate d’après ces résultats une poursuite de l’incision du plancher alluvial en 2011, le rythme de cet abaissement est plus faible que le rythme enregistré sur la période 1978 - 2005. L’exploitation du matériel granulat dans le lit mineur favorise l’accélération du rythme d’incision du chenal principal. L’arrêt des extractions de sédiments dans le lit mineur (mis en application en 1995) est indispensable pour préserver le stock sédimentaire mais ne mais pas fin à l’incision du chenal principal pour l’instant.

Il est important de rappeler que les extractions de granulat ne sont pas les seules responsables de l’abaissement du lit de la Loire. Le phénomène de « chenalisation »

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soutenu par les ouvrages de navigation (épis, chevrette et digue), favorise l’incision du lit à travers la concentration des eaux dans le bras principal. La création d'un chenal navigable

sur la Loire Moyenne vers le milieu du 19ème siècle et sur la Basse Loire au début du 20ème

siècle, a contribué de façon considérable à l'abaissement du niveau des basses eaux. A Orléans par exemple, la construction de "dhuit" ou digue longitudinale, a provoqué un abaissement de la ligne d’eau d’étiage de 84 cm pour la période allant de 1847 et 1868 (Gasowski ,1994), soit un rythme de 4 cm par an.

Sur le secteur de la Réserve Naturelle du Val de Loire, Grivel (2008), met en évidence une phase d’enfoncement notée entre 1930 et 1970 (en moyenne 1,5 à 2 m). D’après cet auteur, l’incision du plancher alluvial correspond à une période caractérisée par une accélération de l’abandon de la bande active et du rythme de formation des îles.

L’incision du lit de la Loire est antérieure à la période des extractions de granulats. Les

prélèvements du matériel granulaire effectués dans le lit mineur ont aggravé l’équilibre

morpho-sédimentaire du lit de la Loire déjà affecté, au début du 20ème siècle, d’une

incision. Cette incision pourrait être liée à la construction des levées (18ème-19ème) et des

chevrettes.

Nous abordons dans le chapitre suivant l’évolution des formes en plans et du couvert

végétal au sein de nos sites ateliers. Nous allons tenter de mettre évidence l’influence des évènements hydrologiques, des aménagements fluviaux et des extractions de granulat sur l’évolution spatial des unités fluvial (bras principal, chenaux secondaires îles…).

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Deuxième Partie

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Deuxième Partie

Chapitre 4. Evolution morphodynamique, impact du forçage