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1.2 Traitement de grenaillage

1.2.4 Evolution de la microstructure et des contraintes résiduelles introduites

par le grenaillage

1.2.4.1 Effet de la température et du maintien isotherme

De nombreuses études portent sur l’évolution des contraintes résiduelles et des micro

-contraintes à l’issue de maintiens isothermes afin d’en définir leur domaine de stabilité en

tem-pérature et de prédire leurs relaxations (alliages Astroloy [11], RR1000 [68], Inconel 718 [14,79],

Udimet 720Li [80]).

Les contraintes résiduelles relaxent fortement en surface et en proche surface avec des niveaux

de relaxation qui dépendent de la température et de la durée de maintien. Caoet al.ont montré

qu’une grande partie de cette relaxation est effective pendant la première heure des maintiens

iso-thermes à 550◦C et à 650◦C avec une faible relaxation pour des durées plus importantes (alliage

Astroloy [11]). Kim et al. ont étudié l’évolution des contraintes résiduelles pour des maintiens

isothermes entre 350◦C et 725◦C pour des temps variant entre 3 heures et 500 heures dans le

cas de l’alliage Udimet 720Li [80]. L’amplitude de relaxation est d’autant plus importante que la

température est élevée. Par exemple, la contrainte en surface et la contrainte maximale relaxent

respectivement de 16 % et de 8 % à 350◦C et de 91 % et 58 % à 720◦C après 10 heures de

maintien isotherme. D’un point de vue cinétique, le profil de contraintes résiduelles à 350◦C reste

similaire pour des temps de maintien de 10h et de 100h. A l’inverse, les contraintes résiduelles

continuent à relaxer après 500h à 550◦C et après 10h à 700◦C même si cette relaxation est moins

importante que pendant les premières heures du maintien (respectivement 10h et 3h).

En comparaison des macro-contraintes, la relaxation des micro-contraintes est moindre lors d’un

maintien isotherme. Pour l’alliage Astroloy, la contribution de la largeur à mi-hauteur

asso-ciée aux micro-contraintes évolue peu après un maintien isotherme de 1h et 100h à 550◦C et

650◦C [11]. Ce constat est similaire à l’issue de maintiens isothermes à 350◦C et 550◦C pour

l’alliage Udimet 720Li [80]. En revanche, pour des températures entre 650◦C et 725◦C, la largeur

à mi-hauteur en surface diminue respectivement de 14 % et de 21 %. Fosset al.ont déterminé des

niveaux de relaxation et des profondeurs affectées par l’écrouissage différents en fonction de la

technique de caractérisation utilisée [68]. Ainsi, les profils de dureté et de largeur à mi-hauteur des

pics de diffraction suggèrent que la profondeur affectée par l’écrouissage reste inchangée après un

maintien isotherme à 700◦C dans le cas de l’alliage RR1000 alors que le profil de désorientation

cristallographique obtenu par EBSD montre une réduction de cette profondeur. Les auteurs

at-tribuent cette différence à la difficulté d’indexation des grains fortement déformés proche du bord

grenaillé. Ces grains ne contribuent donc pas au calcul de la désorientation cristallographique

moyenne, qui est plus faible que ce qu’elle devrait être.

Ces relaxations de contraintes résiduelles et des micro-contraintes sont la conséquence de

changements microstructuraux au cours du maintien isotherme. La figure1.15illustre les

change-ments de la microstructure en fonction de la température [81]. Pour des températures T < 0,5 Tm,

avec Tm la température de fusion du matériau, la relaxation des contraintes résiduelles est liée

aux mouvements des dislocations contrôlés par diffusion volumique des espèces chimiques ou par

diffusion au coeur des lignes de dislocations pour des températures très basses. Ces mouvements

entraînent une relaxation des contraintes résiduelles alors que la relaxation des micro-contraintes

requiert une diminution du nombre de défauts cristallins (annihilation des dislocations, montée

des dislocations, formation des sous joints des grains (polygonisation), etc.). Ceci est à

l’ori-gine d’une faible diminution des micro-contraintes en comparaison à la réduction rapide des

contraintes résiduelles au cours d’un maintien isotherme. Viereck et al. ont identifié ces

méca-nismes à 400◦C et 600◦C pour l’alliage NiCo22Cr12Mo9 [64]. Ils ont montré que la relaxation

des contraintes résiduelles pour des temps de maintien courts est due aux glissements de

dislo-cations activées thermiquement et interagissant avec les obstacles à courte portée. Dans le cas

des temps de maintien longs, le glissement des dislocations est freiné par des atomes de soluté

entraînant la faible relaxation des contraintes. Malgré le mouvement des dislocations, le taux

d’annihilation des dislocations est négligeable. C’est pourquoi les micro-contraintes relaxent très

peu en comparaison aux macro-contraintes. C’est par exemple le cas pour des états grenaillés de

l’alliage NiCo22Cr12Mo9 suivis d’un maintien isotherme à 400◦C pendant 3, 90, 2000 ou 20000

minutes [64] (Figure1.16).

Pour les températures T > 0,5 Tm, la recristallisation c’est-à-dire la « formation de nouveaux

grains », a lieu (Figure1.15). Ce processus est à l’origine de la relaxation complète des contraintes

résiduelles et d’une grande partie des contraintes. Les raisons pour lesquelles des

micro-contraintes subsistent, est la présence de défauts cristallins comme les dislocations et la différence

de coefficient de dilatation entre les différentes phases de l’alliage. Par exemple, Viereck et al.

ont observé une recristallisation en surface avec une faible densité de dislocation pour un état

grenaillé suivi d’un maintien isotherme à 850◦C pendant 90 minutes (Figure 1.17) [64]. Jilai et

al.ont montré que la fraction volumique de phaseγ0dans l’alliage René 95 passe de 45 % à 25 %

après grenaillage. La fraction volumique avant grenaillage est retrouvée après un maintien de 3h

à 900◦C, température pour laquelle la contrainte en surface devient aussi identique à celle avant

grenaillage [72].

Figure1.15 – Influence de la température de recuit sur les mécanismes contrôlant le changement de la

microstructure : 1 = mouvement des dislocations contrôlé par diffusion au coeur des lignes de dislocations, 2

= mouvement des dislocations contrôlé par diffusion en volume des espèces chimiques, 3 = recristallisation

[81].

Figure 1.16 – (a) Evolution des contraintes résiduelles et (b) de la largeur à mi-hauteur associée aux

micro-contraintes pour 3, 90, 2000 et 20000 minutes de maintien isotherme à 400◦C dans le cas de l’alliage

NiCo22Cr12Mo9[64].

1.2.4.2 Effet d’un essai de fatigue en température

Des études comparables ont porté sur la stabilité des contraintes résiduelles et des

micro-contraintes introduites par le grenaillage au cours d’une sollicitation en fatigue à chaud. Le taux

de relaxation des contraintes résiduelles et des micro-contraintes dépend des conditions de

char-gement appliqué et de la résistance mécanique du matériau. Vohringer définit quatre domaines

de chargement appliqué pour lesquels la relaxation des contraintes résiduelles en surface se

com-porte différemment [82] (Figure 1.18). Au premier cycle (N = 1), les contraintes résiduelles en

surface ne varient pas lorsque la contrainte appliquée (σa) est inférieure à la limite d’élasticité

monotone (Re) (cas 1 et 2 de la figure 1.18). Pour les cycles N > 1, les contraintes résiduelles

en surface ne varient pas lorsque la contrainte appliquée reste inférieure à la limite d’élasticité

cyclique (Re cycle) (cas 1 et 3). Dans le cas contraire, la relaxation des contraintes résiduelles est

due à la déformation plastique introduite à chaque cycle (cas 2 et 4). C’est par exemple le cas

des superalliages Astroloy [11], IN100 [13], Udimet 720Li [15,80], Inconel 718 [83] et de l’acier

perlitique [84] où les auteurs remarquent une forte relaxation des contraintes au premier cycle

de fatigue puis une décroissance logarithmique en fonction du nombre de cycles. Ce mécanisme

est appelé « elastic shakedown » visant à réduire le désaccord plastique entre la zone fortement

déformée et le centre non déformé du matériau.

Figure1.17 – Profil de largeur à mi-hauteur et de la microstructure de dislocations obtenus par diffraction

des rayons X et microscopie électronique en transmission après 90 minutes de maintien isotherme à 850◦C

dans le cas de l’alliage NiCo22Cr12Mo9 [64].

Figure 1.18 – Evolution des contraintes résiduelles normalisées en surface en fonction du nombre de

cycles de fatigue : 1 = σa <Re et σa <Re cycle, 2 = Re cycle < σa <Re, 3 = Re < σa <Re cycle, 4 =

Re < σa etRe cycle < σa [82].

Les études portant sur les superalliages à base de nickel ont montré que la largeur à

mi-hauteur reste similaire après un essai de fatigue pour les températures comprises entre 350◦C et

750◦C, ce qui suppose que les micro-contraintes relaxent faiblement [15,80]. Le profil de largeur

à mi-hauteur reste similaire pour des niveaux de déformations appliquées de 0,6 % et 1,2 % pour

l’alliage Udimet 720Li [80]. Dans le cas de l’alliage Astroloy, la largeur à mi-hauteur diminue

faiblement lorsqu’une amplitude de contrainte appliquée est proche de la limite d’élasticité du

matériau à 650◦C [11].

Messé et al. ont montré qu’après un essai de fatigue interrompu à 52000 cycles à 300◦C en

contrainte imposée, la déformation plastique, associée à la désorientation des grains ainsi que

la microstructure de dislocations restent quasiment identiques dans l’alliage RR1000 [67]. Même

si les contraintes résiduelles introduites par le grenaillage relaxent après un essai de fatigue, la

déformation plastique persiste dans le matériau contribuant à l’effet bénéfique du grenaillage.