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Evolution du modèle libéral vers un modèle commercial

La démarche libérale est la démarche de base de l’exercice du pharmacien. L’évolution actuelle fait que la démarche libérale évolue vers une démarche plus commerciale à cause du développement des pharmacies commerciales. La majorité des intervenants de la profession prônent un développement de type commercial basé sur une offre produit destinée à augmenter les volumes de ventes.

« Les écarts se creusent et ceux qui essaient de bien faire leur métier sans céder aux sirènes d’un commercialisme à outrance s’en sortent relativement mal » (Biblio (26) BESSET

Philippe). « Notre marge n’est tout simplement plus adaptée à la structure du marché » (Biblio (30) BESSET Philippe)

La profession s’oriente délibérément vers un développement axé sur les consommateurs, caractérisé par un phénomène assez récent en forte croissance : les enseignes en pharmacie. Au lieu d’axer le développement de leur chiffre d’affaires comme un professionnel libéral, beaucoup de pharmaciens se développent en augmentant leur offre produits. La notoriété va reposer sur la communication, les enseignes en pharmacie ont toujours communiqué via leur identité visuelle et les messages véhiculés en vitrine. Aujourd’hui la publicité grand public s’impose pour assurer leur notoriété (Biblio (31)

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« Nous avons voulu nous adresser aux consommateurs qui rentrent dans nos officines avec un message experts en pharmacie et en vie moins chère. Ce n’est pas parce que nous sommes pharmaciens que nous devons augmenter les prix ! » (Biblio (31) CARDIN).

L’amélioration de la performance économique des officines nécessite que les pharmaciens se réorganisent tout en élargissant leur champ d’activité. Augmenter les chiffres d’affaires en dynamisant les ventes des médicaments non remboursables et développer les ventes du « hors médicaments » font partie des initiatives préconisées par J.M Peny dans une présentation au Sénat en mars 2006 (Biblio (32) PENY).

« Une pharmacie est un commerce comme un autre qui ne vit que par son chiffre d’affaires et les marges qu’elle réalise » (Biblio (33) Midi Libre)

La politique des groupements a poussé un nombre importants de pharmaciens vers un exercice plus commercial. L’aboutissement de cette politique est l’apparition de nombreuses enseignes, signes d’un exercice devenu plus commercial que libéral avec l’apparition du concept de « patients consommateurs ». Tous les groupements, mêmes les plus éthiques, ont basé leur développement sur des stratégies commerciales.

« Une politique d’enseigne avancée pour préserver votre indépendance et vous permettre de profiter pleinement de tous les avantages d’une enseigne nationale. » « Parce que les besoins des consommateurs évoluent en permanence et que leurs attentes s’orientent vers un espace commercial agréable, une qualité de service et des prix avantageux…. » « Parce que nous souhaitons développer notre notoriété, gagner des clients et les fidéliser en toute indépendance » « augmentation de la rentabilité de notre espace de vente grâce à des règles éprouvées dans tous les circuits de distribution. » « Parce que l’enseigne est devenue un élément stratégique incontournable, parce que le consommateur a besoin de se repérer dans un paysage commercial disparate, parce qu’il est prouvé et reconnu qu’une politique d’enseigne permet une croissance deux fois plus rapide que celle du commerce de détail traditionnel. » « Renforcement de l’image et de sa notoriété par le biais de moyen de communication grand public (télévision, presse, internet…). » « Nous, Giphar, avons décidé de profiter de notre représentativité nationale pour devenir la première enseigne pharmaceutique en France. » (Biblio (34) GIPHAR).

« Global Pharmacie dope les ventes en parapharmacie. » « Ces petites pharmacies de proximité réalisent en moyenne entre 1 et 3% de leur C.A sur le rayon para, et l’objectif est d’atteindre 12%164. Global Pharmacie leur offre une solution clé en main » (

Biblio (35)

MARTIN) (Biblio (36) GLOBAL PHARMACIE).

« Conserver ou récupérer une clientèle « nomade », capitaliser sur une clientèle plus jeune, proposer une offre produits et des prix attractifs… C’est là le grand défi pour beaucoup d’officines de petite taille… » (Biblio (37) ALBAN).

« Pour répondre à la problématique des petites officines nous avons mis en place un concept à même de leur apporter une offre produits pertinente en consacrant 70% de la surface de la pharmacie à l’espace de vente » (Biblio (36) GLOBAL PHARMACIE)

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« Les clients ont remarqué les changements opérés sur la visibilité extérieure de la pharmacie (offres, marques, cartes de fidélité, nouvelle enseigne….), ils ont pu apprécier la nouvelle offre produits avec 17 marques de dermocosmétique165 et l’apparition des rayons hommes, OTC libre service et vétérinaire, le tout agrémenté de prix concentrés…la carte de fidélité a été bien accueillie car dés 20 € d’achat, le client bénéficie de 10% de remise (Biblio

(36) GOBAL PHARMACIE).

« La pharmacie moyenne souffre sur le plan économique et en termes d’image, l’enseigne Proxipharma a été créée pour revaloriser la pharmacie de proximité en termes de choix de produits, de prix, d’accueil et de confiance….Depuis la mise en place de cette communication Proxipharma, nos affiliés ont enregistré une augmentation du nombre de clients , la récupération de ceux qui ne venaient plus depuis 2 ou 3 ans et l’arrivée d’une clientèle plus jeune, Proxipharma revendique directement son positionnement au consommateur via le nom de l’enseigne, les couleurs et un message clair : la proximité et le prix (Biblio (37) ALBAN).

« Force est de reconnaître que les études de pharmacie préparent peu les officinaux aux réalités économiques, marchandes et sociales, de l’officine. Les enseignes de pharmacie sont des concepts marchands qui sont supportés par une stratégie et des moyens importants en termes d’agencement, de merchandising, d’image, de communication, de positionnement, d’analyse de zone de chalandise…. autant de termes et de concepts ignorés par les facultés de pharmacie, mais qui deviennent des réalités quotidiennes. »Arnaud Cazalbou166 (Biblio (38) MAZIERE).

La totalité des concepts développés par les groupements sont des concepts marchands destinés à capter une clientèle de consommateurs et mis en place par des spécialistes du monde de la distribution. « On s’inspire des méthodes de la grande distribution » Daniel Buchinger, président de la société Univers Pharmacie (Biblio (39) CASSEL)

Ces concepts reposent tous sur une offre produits élargie pour lesquels l’équipe officinale doit démontrer ses compétences lors de la vente. Cela permet de développer les chiffres d’affaires par une augmentation des volumes de ventes, la concurrence s’établissant sur des critères de prix, de référencements, d’emplacement et de services.

Ainsi dans le cadre du développement de notre officine, nous avons eu beaucoup de mal à trouver un concept nous permettant d’avoir une image de professionnel de santé correspondant à la démarche qualité que nous avions mis en place.

C’est grâce à la modélisation de notre économie que nous avons fait nos choix d’agencement, cette modélisation permettant avant tout de prévoir l’évolution de son économie et de se fixer des objectifs cohérents.

En connaissant notre modèle économique et sa mécanique, nous avons pu appréhender quelles seraient les évolutions du chiffre d’affaires en fonction des transformations et des solutions proposées, qui reprennent en fait toujours les mêmes éléments de développement.

165 127 mètres linéaires sur 37 mètres carrés

166 Directeur général de Labo Pharma Conseils, société spécialisée dans l’accompagnement des

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Tous les concepts de développement actuels reposent sur les mêmes principes commerciaux, comme nous l’avons décrit précédemment, et ces principes influent fortement sur la mécanique économique comme l’analyse de nos résultats l’ont démontré.

A partir d’un concept marchand nous allons expliquer pourquoi le simple choix d’une enseigne développant un modèle commercial peut se révéler pénalisant économiquement en faisant évoluer le modèle libéral de base vers un modèle libéral commercial.

En prenant le parti de ne pas utiliser nos vitrines comme vecteurs de communication pour l’offre produit intérieure167, nous nous sommes par exemple volontairement passés d’un élément essentiel de la communication commerciale habituelle. Par contre en ouvrant notre espace d’accueil sur l’extérieur nous n’avons fait que reprendre les principes de communication d’une chaine de coiffeurs comme Jean-Louis David qui possède une image forte de professionnels.

Photo n°9

Dans le cadre des concepts marchands les vitrines sont systématiquement utilisées comme vecteurs principaux de la communication commerciale par l’ensemble des pharmaciens, permettant théoriquement une différenciation entre pharmacies. Le résultat va plutôt dans le sens d’une uniformisation de l’image commerciale des pharmacies. Ce sont les premiers éléments d’une stratégie visant à faire rentrer prioritairement des consommateurs.

167 Voir Photo n°2

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En limitant et en clarifiant l’offre produit168, notre choix était d’en réduire l’attractivité et de limiter ainsi les ventes simples au profit d’une augmentation du nombre d’ordonnances et des ventes associées à l’ordonnance.

Photo n°10

En augmentant les référencements on augmente les volumes de ventes. Plus cette offre est attractive plus la fréquentation augmente, c’est le principe de base du fonctionnement actuel de l’économie de la plupart des officines et leitmotiv de la plupart des groupements.

En sur dimensionnant les linéaires169, les clients ont à leur disposition un choix de produits dynamisant les achats. Dans l’exemple choisi, le concept revendique s’inspirer de la grande distribution en instituant un sens de circulation obligatoire (Biblio (40) SAUREL)

168 Voir Photo n°3, Photo n°6

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Photo n°11

L’offre produit proposée par les enseignes est généralement très complète avec des espaces clairement signalés. Le nombre de marques est souvent prolifique.

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Photo n°12

Dés l’entrée des éléments de mobilier obligent les consommateurs à circuler dans les différents espaces avant d’accéder aux comptoirs.

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Photo n°13

Les comptoirs ne sont généralement pas visibles de l’entrée et la concentration du mobilier ne permet pas de ménager des espaces permettant un minimum de confidentialité. En décidant de laisser libre plus de 50% de notre espace au sol, rendant ainsi nos comptoirs très visibles et immédiatement accessibles170, nous sommes allés à l’encontre des préconisations de l’ensemble des spécialistes de la distribution mais nous avons créé un espace de confidentialité naturel, correspondant à la nature de notre démarche.

L’importance donnée à l’image commerciale par les concepts marchands fait que cette image influence très fortement la mécanique économique comme nous l’avons décrit en analysant nos résultats.

L’augmentation de chiffre d’affaires est beaucoup plus importante dans les premiers mois d’exploitation post transformations pour les concepts marchands, que pour le type de transformations que nous avons réalisé.

Dans l’exemple choisi l’augmentation de chiffre d’affaires pour l’officine transformée est de 15% pour les premiers mois d’exploitation, alors que le chiffre d’affaires stagnait auparavant (Biblio (37) ALBAN).

170 Voir Photo n°2

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Dans notre cas cette augmentation n’a été que de 9%, mais était consécutive à une augmentation de prés de 7% avant les transformations.

Le problème essentiel d’une augmentation obtenue par l’application d’une démarche commerciale s’appuyant sur un concept marchand est qu’elle est obtenue essentiellement par une augmentation des volumes de ventes simples et qu’elle fait rentrer le pharmacien titulaire dans une logique de concurrence qui nuit à son indépendance de libéral, puisqu’il devient dépendant de la démarche commerciale de son environnement.

Dans l’exemple pris ci-dessus l’augmentation de chiffre d’affaires est de 15% pour une augmentation des ventes de 35% (Biblio (36) GLOBAL PHARMACIE).

Le rapport ordonnances/ventes se dégrade. La baisse du rapport entraine une baisse structurelle de la valeur de la marge. Avec une même valeur de marge à l’ordonnance et à la vente hors ordonnance171 le passage d’un rapport 62/38 à un rapport 58/42 provoque une perte automatique de 3,33% de la valeur ajoutée avec un nombre égal de ventes.

La modélisation permet d’interpréter les évolutions de chiffres en tenant compte des objectifs affichés par la démarche. La volonté des concepteurs d’enseigne est avant tout d’augmenter le trafic par une augmentation de l’offre produit. Le fait d’avoir une augmentation de chiffre d’affaires de 15% pour une augmentation de 35% des ventes, montre que le Panier Moyen

Client est en baisse, car s’il était seulement maintenu l’augmentation de C.A serait du même

niveau en pourcentage. On voit bien, à travers les résultats obtenus, l’effet de la mécanique économique. Nous allons étudier les effets de ces stratégies sur l’évolution du modèle économique.

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C. Conséquence d’une stratégie commerciale sur l’économie d’une