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Du fait de l’analyse de nombreuses séquences de GST mises en relation avec les données biochimiques et structurales disponibles, Carla Frova a proposé en 2006 un schéma évolutif pour les GST et qui est actuellement admis (Frova 2006). Tandis que certains points sont à éclaircir, le schéma proposé semble cohérent au vu des avancées scientifiques. Le raisonnement part du fait que toutes les GST connues ont dans leur structure un motif thioredoxine dont l’architecture tridimensionnelle est hautement conservée. De même, d’autres protéines possèdent ce domaine, telles que les glutarédoxines (Grx), les DsbA et les thioredoxines elles mêmes, toutes capables de catalyser des réactions de type thiol-transférase alors que les peroxydases dépendantes du glutathion et les peroxyredoxines sont plutôt des peroxydes réductases (Martin 1995; Copley 2004). Il semble donc que l’ancêtre commun soit fortement lié à la présence de ce motif.

Le schéma évolutif peut ainsi se subdiviser en deux phases principales (Frova 2006). Lors de la première phase, l’insertion d’un domaine a eu lieu et concerne une partie des protéines de la famille thioredoxine (dont les GST), donnant naissance à la structure tridimensionnelle des GST actuellement connues. Puis la deuxième phase correspondrait à la diversification fonctionnelle et structurale des GST qui donnent naissance aux différentes classes actuellement reconnues (Figure 36).

72 GST Kappa Motif βαβN-ter Hélice α2de liaison Addition de domaine C-terminal Insertion interne de domaine Motif ββαC-ter (Hélical) GST cytosolique Grx2 (E. coli) CLIC eF1Bγ(domaine I) (Hélical) GST Kappa DsbA HCCA isomérase

Cys Ser Ser Tyr Dimérisation

CLIC Lambda

DHAR Beta Theta

Zeta Phi

Tau Sigma Alpha Mu

Omega eF1Bγ Delta Pi

Phase I Phase II GST Kappa Motif βαβN-ter Hélice α2de liaison Addition de domaine C-terminal Insertion interne de domaine Motif ββαC-ter (Hélical) GST cytosolique Grx2 (E. coli) CLIC eF1Bγ(domaine I) (Hélical) GST Kappa DsbA HCCA isomérase

Cys Ser Ser Tyr Dimérisation

CLIC Lambda

DHAR Beta Theta

Zeta Phi

Tau Sigma Alpha Mu

Omega eF1Bγ Delta Pi

Cys Ser Ser Tyr Dimérisation

CLIC Lambda

DHAR Beta Theta

Zeta Phi

Tau Sigma Alpha Mu

Omega eF1Bγ Delta Pi

Phase I Phase II

Ainsi, au cours de la première phase, le domaine thioredoxine de structure secondaire

βαβαββα aurait acquis un domaine supplémentaire constitué principalement d’hélices α. Ce domaine, lorsqu’il est en position C-terminale, donne naissance à une structure de type Grx à partir de laquelle auraient évolué les GST cytosoliques ainsi que d’autres protéines, telles que les CLIC, ou encore les EF1Bγ. Lorsque ce domaine hélicoïdal est inséré au sein du repliement thioredoxine entre le feuillet β2 et α3, la structure obtenue est de type DsbA (une protéine isomérase de pont disulfide) et correspond à celle trouvée chez les protéines HCCA (hydroxychromene carboxylate isomérase), DsbA et chez les GST kappa (Figure 36). Dans ce cas, si ce domaine n’est pas complètement hélicoïdal, la structure peut s’apparenter à celle de glutathion peroxydases et peroxyrédoxines. Ce schéma fait écho à ce que Ladner et Robinson avaient émis comme hypothèse, c'est-à-dire que les GST cytosoliques et les GST kappa auraient évolué indépendamment par des voies parallèles (Figure 36) (Ladner 2004; Robinson 2004) contrairement à ce qu’avaient pensé Armstrong et Sheehan (Armstrong 1997; Sheehan 2001).

Lors de la deuxième phase, l’hypothèse proposant ce schéma d’évolution s’appuie sur la structure quaternaire des GST, sur les acides aminés catalytiques et sur la répartition d’une classe donnée dans le domaine du vivant. Aussi, le schéma n’est pas encore clair au sujet de la classe GST kappa puisque la structure quaternaire (dimère) et l’acide aminé catalytique (sérine) ne sont pas les mêmes que pour la protéine DsbA (monomère, cystéine). La protéine HCCA pourrait être un intermédiaire lors de leur évolution (Robinson 2004) mais la structure n’étant pas encore résolue, il est difficile de conclure à ce sujet. Concernant les GST cytosoliques, il y aurait d’abord une structure monomérique à partir de l’architecture de type Grx qui aurait donné les classes CLIC, Lambda et DHAR. Puis une première étape importante de dimérisation conduisant à la différenciation des GST Beta et Omega. Dans ces cas, une cystéine catalytique, impliquée dans la fixation du GSH, est responsable plutôt d’une activité thiol transférase que de glutathion transférase (sauf les CLIC qui ne forment que des canaux ioniques). Une seconde étape consiste en la mutation de la cystéine catalytique en sérine et concerne les classes Theta, Zeta et eEF1Bγ que l’on retrouve chez tous les eucaryotes, la classe Theta étant supposée être un ancêtre commun du fait de sa présence chez les procaryotes (Pemble 1996). Les classes Phi, Tau et Delta, uniquement retrouvées chez les plantes et insectes, seraient donc apparues plus tard. Puis, lors d’une troisième étape, la sérine catalytique est mutée en tyrosine que l’on retrouve dans les classes Alpha, Mu, Pi et Sigma de mammifères. La classe Sigma aurait divergé plus tôt puisqu’elle est également retrouvée chez

les invertébrés. Ces changements structuraux et d’acides aminés catalytiques ont donc contribué à la diversification d’activité et de spécificité des GST.

Le schéma évolutif a été récemment complété par une voie parallèle intégrant les GHR (glutathionyl hydroquinone réductase), qui présentent un mode de dimérisation atypique dû à la présence d’une boucle supplémentaire (présente aussi chez les GHR bactériennes) ce qui a amené à la définition d’une nouvelle classe structurale appelée Xi (Meux 2011; Green 2012) (Figure 37).

Figure 37 : Proposition d’évolution de la voie des GHR par Meux 2012 (thèse) intégrée dans le schéma d’évolution proposé par Frova

Les GST représentant une famille riche et diversifiée autant d’un point de vue structural, catalytique que fonctionnel, leur classification est sans cesse remise en cause en fonction du nombre croissant de données structurales et fonctionnelles.