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Evolution et complication

Dans le document Diagnostic microbiologique des parodontites (Page 165-174)

X- Evolution et complication :

Les parodontites, bien qu’étant des infections localisées, ont des effets systémiques. En effet,

les tissus du parodonte sont exposés continuellement à une charge bactérienne. Dans le cas d’un parodonte sain, la barrière épithélioconjonctive intacte et les molécules de la réponse immuno-inflammatoire inhibent la dissémination des bactéries dans la circulation sanguine. L’approfondissement du sulcus observé lors d’une parodontite s’accompagne d’une prolifération des bactéries dont le nombre peut atteindre 109 à 1010 dans une seule poche parodontale.

L’épithélium ulcéré le long du parodonte enflammé chez un sujet atteint d’une parodontite généralisée est équivalent au moins à la surface de la paume d’une main. Cette surface constitue une porte d’entrée des bactéries, de LPS et d’autres structures antigéniques qui induisent une réponse locale et systémique.

Des bactéries parodontopathogènes peuvent envahir les tissus du parodonte et/ou coloniser des sites à distance et être à l’origine d’infections systémiques. En présence de parodontite, des bactériémies transitoires ou endotoxinémies peuvent se produire même lors du brossage et/ou de la mastication, et induire une réponse de l’hôte. En réponse à la bactériémie et aux antigènes dispersés, les leucocytes circulants et d’autres cellules (hépatocytes) produisent des médiateurs immuno-inflammatoires ( IL1b, TNFa, IL6) dans le sang et qui peuvent agir à distance [25].

Figure 34: Effets systémiques des parodontites : modèle hypothétique [25].

Des bactéries dans la circulation peuvent enclencher une réponse de l’hôte directe et/ou indirecte. Des cytokines produites localement peuvent entrer dans la circulation, stimuler la synthèse par des cellules hépatiques des protéines de la phase aiguë de l’inflammation, et contribuer à l’étiologie et la pathogénie des affections systémiques.

L’inflammation systémique résultant de la parodontite peut être objectivée par une augmentation du nombre de leucocytes et du taux de certaines cytokines (IL1b, IL2, IL6 et IL8) et de protéines de la phase aiguë de l’inflammation du sang périphérique (CRP, fibrinogène) [25].

1- En cas de maladies cardiovasculaires :

Le mécanisme qui relie l’infection parodontale à la survenue de l’athérosclérose et ses

complications n’est pas connu. En effet, les bactériémies transitoires d’origine parodontale sont susceptibles d’agir sur la physiologie vasculaire. Des bactéries dans la circulation peuvent enclencher une réponse de l’hôte directe et/ou indirecte, via des médiateurs d’inflammation et agir sur la physiologie vasculaire. Le modèle biologique hypothétique [158] implique :

 Des effets directs des bactéries sur les plaquettes : P.gingivalis exprime des facteurs de virulence qui induisent l’agrégation plaquettaire in vitro.

 Une réponse auto-immune : des anticorps dirigés contre une HSP (protéine de protection contre le stress) bactérienne peuvent aussi être actifs contre une HSP humaine des cellules artérielles et via ce croisement enclencher une réponse auto-immune.

 L’invasion des cellules endothéliales et des macrophages par les bactéries : T.

forsythia, P.gingivalis et A. actinomycetemcomitans étaient localisés dans des

plaques d’athérome.

 Des médiateurs pro-inflammatoires : des médiateurs associés à l’inflammation systémique des parodontites (en particulier IL6, CRP, fibrinogène) sont aussi considérés comme facteurs de risque des maladies cardiovasculaires.

2- En cas de diabète :

La susceptibilité des diabétiques aux maladies parodontales est expliquée par des

mécanismes physiopathologiques similaires à ceux qui sont impliqués dans les autres complications chroniques du diabète. L’altération de la réponse de l’hôte est liée au dysfonctionnement des neutrophiles et/ou à une hyperproduction des cytokines pro-inflammatoires qui aboutit à une réaction inflammatoire exagérée [159]. Les effets des infections parodontales sur la glycémie s’expliqueraient par la bactériémie induite qui accroîtrait l’hyperlipidémie et le taux des cytokines sériques pro-inflammatoires. Les diabétiques risquent alors un état inflammatoire systémique prononcé et l’insulino-résistance.

Figure 35: Mécanismes pouvant expliquer l’association entre

le diabète et la parodontite.

L’hyperglycémie, qui caractérise le diabète, déclenche une cascade d’événements inter reliés dont l’activation de produits de glycosylation avancés, l’augmentation de la production de stress oxydatif et le déclenchement de mécanismes de l’inflammation. Ceci résulte en une destruction parodontale accélérée qui peut être observée chez un patient diabétique [160].

3- En cas de grossesse :

Le parodonte infecté peut représenter un réservoir de bactéries anaérobies à Gram négatif

susceptibles de contaminer l’unité maternofœtale. Les bactéries ou les produits bactériens peuvent agir directement et/ou indirectement via des produits bactériens à travers le placenta [161]ou par l’intermédiaire de médiateurs pro-inflammatoires. Actuellement, il n’est pas établi clairement si et comment les bactéries de la cavité buccale peuvent coloniser les tissus chorioamniotiques et le fluide amniotique. Certaines études rapportent des associations entre le risque d’accouchement prématuré et les taux élevés de prostaglandine E2 et de TNFa dans le cordon ombilical ou des taux élevés de prostaglandine E2, d’IL1bet d’IL8 dans le fluide gingival , mais les résultats restent contradictoires [162].

L’existence d’une réponse immuno-materno-fœtale inefficace aux bactéries parodontopathogènes a aussi été évoquée ; les naissances prématurées ont été associées à un manque d’immunoglobulines G maternelles protectrices et à la présence d’immunoglobulines M fœtales [163].

4- En cas de maladies respiratoires :

Des bactéries comme A.actinomycetemcomitans et P. intermedia ont été isolées dans des

abcès pulmonaires et retrouvées dans des prélèvements transtrachéaux. La présence de

P.gingivalis dans la salive est associée à la pneumonie (OR = 4,2) [164]. De possibles

mécanismes évoqués pour expliquer la présence des bactéries de la plaque dentaire dans la pathogenèse des maladies respiratoires impliqueraient [165]:

• Des bactéries du système respiratoire colonisatrices de la plaque dentaire qui serviraient secondairement de réservoir pour des pneumonies d’aspiration, chez des patients à haut risque;

Figure 36: Implication des bactéries orales dans la physiopathologie

des maladies respiratoires [166].

5- Accident vasculaire cérébral :

La première hypothèse implique les nombreux facteurs de virulence de ces bactéries (gingipaïnes, LPS, fimbriae, etc.). Localisées aux sites des lésions, elles pourraient fragiliser la plaque amenant à une rupture précoce et limiter sa cicatrisation, aboutissant à des complications cliniques.

Cette supposition s’envisage d’autant mieux si les bactéries sont encore vivantes après leur passage dans la circulation sanguine et au moment de leur arrivée sur site. Seule une équipe est parvenue à le démontrer à ce jour.

La deuxième hypothèse suppose un mécanisme indirect aboutissant à l’activation de la réponse immune innée par élévation plasmatique et locale des molécules pro-inflammatoires. Tout comme au niveau de la plaque d’athérome, le rôle des polynucléaires neutrophiles (PNN) au niveau de la destruction de l’attache épithélio-conjonctive de la gencive sur la dent est primordial. Ainsi, les cytokines pro-inflammatoires et autres médiateurs produits

localement au niveau des poches parodontales en réponse aux bactéries parodontopathogènes vont pouvoir se retrouver dans la circulation sanguine.

Cette augmentation chronique de l’inflammation systémique pourrait conduire à la mise en place d’un état prothrombotique de l’endothélium vasculaire favorisant l’initiation et l’accélération du développement des lésions athéromateuses.

La troisième hypothèse suggère que l’arrivée des bactéries (intactes, sous forme de débris ou transportées par des leucocytes) au niveau de la plaque d’athérome et du thrombus entraîne une réponse immunitaire innée locale disproportionnée (dégranulation des PNN avec libération d’enzymes) fragilisant la plaque.

La dernière hypothèse s’intéresse aux anticorps spécifiques produits en réponse à la présence de bactéries circulantes et tissulaires. Ce phénomène caractérisé par un “mimétisme moléculaire” est appelé réactivité croisée. Certains de ces anticorps pourraient favoriser ou influencer les réponses inflammatoires et systémiques au sein des lésions athéromateuses en reconnaissant le soi comme pathogène [167].

6- Polyarthrite rhumatoïde:

P.gingivalis est la seule bactérie qui possède une enzyme peptidyl arginine deiminase

(PPAD) qui est une enzyme permettant la citrullination des peptides. De plus, elle exprime α -enolase bactérienne qui possède une forte homologie avec l’énolase humaine. Lors d’une étude, pour déterminer le rôle majeur de P. gingivalis il a été démontré que pour induire l’arthrite, il est nécessaire d’avoir P.gingivalis vivant et possédant une PAD fonctionnelle.

Donc P.gingivalis facilite le développement et la progression de la polyarthrite rhumatoïde à travers PAD [168, 169].

Figure 37: Schéma représentant le lien entre parodontite et polyarthrite rhumatoïde [170].(a) Pathogenèse de la parodontite et effets favorisés par les LPS présents chez les

parodontopathogènes. (b) L'implication de facteurs génétiques et environnementaux dans le développement de la polyarthrite rhumatoïde. (c) Mécanismes possibles expliquant la relation

7- Cancers :

Dans le document Diagnostic microbiologique des parodontites (Page 165-174)