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2. ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE SUR LA COMBUSTION DES ESTERS

2.2. Etudes sur les esters à longue chaîne carbonée

Herbinet et al. (2008) ont développé un mécanisme détaillé de l’oxydation du décanoate de méthyle en se basant sur les mécanismes cinétiques d’oxydation du n-heptane et de l’iso- octane proposés par Curran et al. (1998, 2002) et du butanoate de méthyle proposé par Fisher et al. (2000). Ce modèle comprend 3036 espèces impliquées dans 8555 réactions. En l’absence de données expérimentales sur l’oxydation de cet ester, les auteurs ont comparé les résultats simulés aux données obtenues lors des études sur l'oxydation des esters méthyliques d'huile de colza (RME) en réacteur auto-agité (Dagaut et al. (2007)), du n- décane en tube à choc (Davidson et al. (2001)) et du décanoate de méthyle en condition moteur CFR (Szybist et al. (2007)). En réacteur auto-agité, le modèle prédit de manière satisfaisante la majorité des espèces détectées et la formation précoce du CO et du CO2

observée expérimentalement par Dagaut et al. (2007). L'analyse des voies réactionnelles a montré que la formation précoce de ces deux espèces est due à la présence de la fonction ester. Un bon accord a été obtenu en comparant les résultats issus du modèle et les délais d'auto-inflammation obtenus en tube à choc lors de l'oxydation du n-décane. Herbinet et al. (2008) en concluent que l'oxydation des esters et des alcanes peut être considérée comme similaire à condition qu'ils aient le même nombre de carbone sur la chaîne alkyle, en accord avec les observations de Dagaut et al. (2007). En condition moteur, la taille du mécanisme ne permet pas de faire des calculs quantitatifs mais un accord qualitatif satisfaisant a pu être observé. Seshradi et al. (2009) ont réduit le mécanisme proposé par Herbinet et al. (2008) à 125 espèces et 713 réactions élémentaires pour simuler les limites d'extinction dans une flamme de diffusion de décanoate de méthyle sur un brûleur à contre-courant. Sarathy et al. (2011) ont également étudié l’oxydation du décanoate de méthyle en flamme de diffusion atmosphérique dans un brûleur à contre-courant. Ce modèle s’appuie sur les mécanismes de Herbinet et al. (2008) et Seshadri et al. (2009) et comprend 648 espèces impliquées dans 2998 réactions. Gerasimov et al. (2015) ont étudié l’oxydation du décanoate de méthyle dans une flamme de pré-mélange atmosphérique. Ils ont comparé leurs résultats expérimentaux à ceux issus de la simulation en considérant deux mécanismes (Sarathy et al. (2011) et Diévart et al. (2012)).

Herbinet et al. (2010) ont développé deux mécanismes permettant de rendre compte de l'oxydation de deux esters insaturés, le 5-décénoate de méthyle et le 9-décénoate de méthyle par analogie avec leur mécanisme du décanoate de méthyle et en y ajoutant la chimie d'oxydation des espèces insaturées. Les auteurs ont examiné l'influence et la position de la double liaison sur la chaîne alkyle pour les trois esters en comparant les délais d'auto- inflammation calculés dans les mêmes conditions (P = 1 atm,  = 1). Les résultats montrent que le 9-décénoate de méthyle est plus réactif que le décanoate de méthyle et le 5- décénoate de méthyle. La différence de réactivité entre les deux esters insaturés s'explique par la position de la double liaison sur la chaine alkylée. Avec le 9-décénoate de méthyle, la position de la double liaison se trouvant en bout de chaine, les réactions de ramifications à basse température sont plus aisées que dans le cas du 5-décénoate de méthyle.

Zhang et al. (2009) ont étudié en condition moteur quatre esters (comportant une chaîne alkyle à 8 atomes de carbone) avec différents degrés d'insaturation : le nonanoate de méthyle, le nonanoate d’éthyle, le non-2-énoate de méthyle et le non-3-énoate de méthyle. Ils montrent que les esters insaturés sont moins réactifs que les esters saturés à basse température. Ils expliquent que cette faible réactivité est due à la présence de la double liaison. Ils remarquent également que cet effet inhibiteur est plus ou moins important selon la position de la double liaison sur la chaîne alkyle.

Dayma et al. (2009) ont développé un modèle cinétique détaillé de l’heptanoate de méthyle s’appuyant sur leur mécanisme validé avec l’oxydation de l’hexanoate de méthyle en réacteur auto-agité et à haute pression (P = 10 atm). Ce modèle cinétique détaillé comporte 1087 espèces dans 4592 réactions réversibles. Dayma et al. (2008) ont fait une étude expérimentale et de modélisation sur l’oxydation de l’hexanoate de méthyle. Les résultats expérimentaux sont obtenus en réacteur auto-agité à haute pression (P = 10 atm) à un temps de séjour de 1 s, dans un domaine de température compris entre 500 et 1000 K et la richesse variant de 0,5 à 1. Le modèle cinétique détaillé de l’hexanoate de méthyle développé comprend 435 espèces et 1875 réactions réversibles. Les auteurs ont trouvé un bon accord entre les résultats expérimentaux et ceux simulés. L'analyse des voies réactionnelles a montré que l'oxydation du hexanoate de méthyle est principalement contrôlée par la faible liaison C-H du carbone en position alpha () par rapport à la fonction

ester. Ce résultat confirme les travaux d’Osmont et al. (2007) qui ont évalué les énergies de liaison C-H et C-C de plusieurs esters méthyliques à l'aide de méthodes quantiques. Osmont et al. (2007) montrent que l'abstraction d'un atome H sur le carbone en position  par rapport à la fonction ester est plus favorable que celui situé en position béta (). Dayma et al. (2008) ont également observé le phénomène de flamme froide lors de l’oxydation des deux esters. Ainsi, ils concluent que les esters possédant une longue chaine carbonée avec 6 atomes de carbones ou plus peuvent représenter le comportement cinétique des EMHV réels à basse température. Zhang et al. (2010) ont étudié expérimentalement l’oxydation basse température (T = 428 K) de l'heptanoate de méthyle et de l'hexanoate d'éthyle en condition moteur à une richesse de 0,25. Les résultats montrent que l'oxydation de ces deux esters présente le phénomène de flamme froide et que l'heptanoate de méthyle possède une réactivité plus élevée que l'hexanoate d'éthyle à basse température. Ils supposent que cela est dû à la longueur de la chaîne alkyle des esters. Ils observent également l'existence de réactions à six centres lors de l'oxydation à basse température de l'hexanoate d'éthyle conduisant à la formation de l’acide hexanoïque et l’éthylène. Glaude et al. (2010) ont amélioré le logiciel EXGAS afin qu'il puisse générer des schémas cinétiques d'oxydation des esters méthyliques. Ils ont alors pu mettre au point des mécanismes thermocinétiques d'oxydation de l'hexanoate de méthyle (401 espèces impliquées dans 2440 réactions), de l'heptanoate de méthyle (531 espèces impliquées dans 3236 réactions) et du décanoate de méthyle (1251 espèces impliquées dans 7171 réactions). Ils ont également étudié expérimentalement l'oxydation du décanoate de méthyle en réacteur auto-agité à basse température (T = 500 - 1100 K), à pression constante (P = 0,98 atm) et pour un temps de séjour de 1,5 s. Les auteurs ont comparé leurs résultats de modélisation avec les profils d'espèces obtenus par Dayma et al. (2008, 2009) sur l'oxydation du l'hexanoate de méthyle et de l'heptanoate de méthyle en réacteur auto-agité. Un accord assez satisfaisant a été observé entre les résultats expérimentaux et calculés.

HadjAli et al. (2009) ont mesuré des délais d’auto-inflammation d’une série d’esters méthyliques allant du butanoate de méthyle à l’heptanoate de méthyle en machine à compression rapide pour des pressions comprises entre 4 et 20 atm et des températures variant de 650 à 850 K. Ils observent que le délai d'auto-inflammation diminue lorsque la longueur de chaîne du groupement alkyle de l'ester augmente. Les auteurs ont également

examiné la réactivité de l'hexanoate de méthyle et l'ont comparé à plusieurs alcanes (n- butane, n-pentane et n-heptane) pour montrer l’impact de la fonction ester sur la réactivité de la chaîne alkyle. Ils en déduisent que l'hexanoate de méthyle et le n-heptane ont une réactivité similaire dans des conditions expérimentales identiques. Ils indiquent que le butanoate de méthyle est le plus résistant à l’auto-inflammation (parmi les esters qu'ils ont étudiés). Il ne s’auto-enflamme pas à une température inférieure à 800 K et se caractérise par une inflammation en un stade à une température supérieure à 800 K (absence de NTC).

Ces travaux mettent montrent que la taille des modèles pour l’étude d'esters méthyliques à longue chaîne carbonée est toujours assez conséquente. Les mécanismes d'oxydation des esters méthyliques sont ainsi plus volumineux que ceux des n-alcanes pour un nombre de carbones équivalent. Par exemple, le modèle généré par EXGAS pour le décanoate de méthyle (C11H22O2) comporte 1247 espèces et 7775 réactions contre 655

espèces et 4435 réactions pour le n-undécane (C11H24) (Herbinet et al. (2011)). De plus, le

domaine de validation des modèles des esters méthyliques à longue chaîne carbonée reste restreint du fait du manque de données expérimentales disponibles dans la littérature. Ainsi, il semble nécessaire de s’orienter sur les molécules modèles à plus courte chaîne carbonée.