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3.2 L’assurance radiation

3.2.3 Etudes

Les activités menées en RHA regroupent des études qui fournissent un niveau de détail et de documentation suffisant pour identifier les risques, quantifier les probabilités d’occurrences de certains événements et apporter des mesures correctives lorsque cela est nécessaire. Les principales études qui sont détaillées dans la suite concernent l’analyse pire-cas, l’analyse des SEE et le calcul de blindage.

A. Analyse Pire-Cas

L'analyse pire-cas ou "Worst-Case Analysis" (WCA) vise à définir des conditions qui permettent de maximiser le stress du composant lors du test pour couvrir l'ensemble des modes de défaillance et garantir que les estimations obtenues sont conservatives par rapport aux mesures en vol. Pour cela il faut considérer les paramètres qui peuvent avoir le plus d'effets sur le composant. La

température, la polarisation, le nombre de cycles de fonctionnement et la source de test sont autant de paramètres qui peuvent être combinées pour mettre en place une condition pire-cas. Celle-ci n'est pas immuable et dépendra du contexte et des effets considérés. Par exemple, un pire cas en SEL fera intervenir des niveaux de tensions d'alimentation et des températures élevés tandis que pour les SEU des niveaux de tension bas seront considérés [70]. Ces conditions proviennent des mécanismes physiques qui entrent en jeu pour un effet : la marge de manœuvre est plus limitée à faible tension pour la détection d'un niveau logique tandis que des tensions plus élevées aident à mettre en conduction les structures parasites.

Une estimation des conditions de fonctionnement en fin de mission est aussi envisageable pour cette étude et ainsi garantir que l'impact des radiations sur les composants sera acceptable tout au long de la vie du système étudié. Les aspects thermiques, électriques et de vieillissement sont considérés pour estimer ces conditions.

B. Analyse des SEE

L'analyse de criticité des SEE (SEECA : SEE Criticality Analysis) a pour but d'identifier l'impact des effets singuliers sur le système. Leur criticité pour la mission et leur probabilité d'occurrence sont étudiées pour mettre en place une matrice de risque telle que celle illustrée en Figure 3.6. Sur cette matrice, les différents événements possibles sont listés pour chaque colonne et les probabilités s’échelonnent sur chaque ligne. Les cas acceptables sont marqués en vert, les cas à rejeter sont en rouge et les cas intermédiaires qui peuvent nécessiter des mesures correctives sont en jaune.

Figure 3.6 : Schématisation d’une matrice de risque d’après l’ESA [71].

Selon la mission, il est possible d'accepter un composant qui présente des effets à risques qui s'avèrent particulièrement rares. En revanches des événements qui ne sont pas critiques mais extrêmement fréquents peuvent empêcher la mission d'arriver à son terme. Cela peut être le cas de

redémarrages intempestifs pour un CubeSat : le redémarrage en lui-même n'est pas critique et peut causer la perte de données non sauvegardées, mais si chaque orbite présente un redémarrage la mission ne pourra surement pas aboutir aux résultats attendus.

Cette étude souligne également le fait que des équipements qui ne sont utilisés que pendant les premières minutes de vie du satellite, ou pour des tâches annexes qui ne sont pas primordiales, peuvent accepter plus de fautes que le reste du système.

C. Calcul du blindage

L'étude et la définition du blindage forment un processus itératif lors du développement d'un satellite. Si le design est nouveau, les premiers calculs de l'étude radiation sont faits avec une épaisseur standard de 3,705 mm d'aluminium (soit 1 g/cm2). Au cours du développement du satellite, le blindage est recalculé et les épaisseurs des faces ainsi que la disposition des équipements sont ajustés. Les équipements sensibles sont placés aux zones les plus protégées, généralement proche du centre de masse, pour profiter des épaisseurs supplémentaires de matériaux apportées par le reste des composants.

Des calculs utilisant l'analyse sectorielle ou des codes Monte-Carlo sont utilisés pour déterminer et ajuster plus finement le blindage. La modélisation en trois dimensions permet de prendre en compte des géométries complexes et d'intégrer les systèmes et les composants dans les calculs. Cela nécessite une connaissance avancée du schéma électrique mais aide à réduire globalement les marges prises sur les niveaux de radiations en réduisant les TIDL.

En complément du blindage global, le blindage local a l'avantage de limiter les dépenses en réduisant les matériaux nécessaires et donc la masse en concentrant les efforts sur les zones sensibles et non l'ensemble du système. En plus de demander moins de ressources matérielles, les répercussions sur les coûts de lancement sont donc moindres que des solutions de blindage général du système. Des outils tels que FASTRAD [72] permettent d'étudier ces solutions de blindage au niveau local. Pour cela, l'utilisateur modélise le système en prenant en compte la géométrie et les matériaux puis lance le calcul des niveaux de dose que verra chaque composant qui l'intéresse dans le cas d'une mission donnée. La courbe de dose précisée dans la définition de l’environnement est utilisée comme entrée et le logiciel se charge de calculer les épaisseurs de matériaux traversées par une méthode sectorielle ou Monte-Carlo. Les zones les plus exposées sont mises en évidence pour chaque cible étudiée ce qui permet d’ajuster le positionnement des composants ou l’ajout de blindage.

La Figure 3.7 présente un résultat obtenu pour une structure de CubeSat 1U modélisé en 3D pour une mission de 5 ans en orbite elliptique. Le volume réduit d’un CubeSat limite également les écarts de valeurs entre les niveaux de dose prévus, ceux-ci s’échelonnent de 5 à 12krad dans notre cas. Dans le cadre d’une mission scientifique d’étude des effets des radiations sur les composants, il peut être nécessaire d’amincir une des faces du satellite pour exposer volontairement des composants. Le calcul prévisionnel permet ainsi d’optimiser les dimensions de la fenêtre affinée sans pour autant exposer les composants de la structure qui ne sont pas sous test. Un exemple avec une telle fenêtre peut être observé sur la Figure 3.7, où la zone rouge sur la gauche de la figure qui correspond aux doses les plus fortes, est obtenue sous la fenêtre où des composants sont volontairement exposés à des doses plus fortes.

Figure 3.7 : Résultats graphiques d'une analyse sectorielle réalisée sous FASTRAD pour un CubeSat servant à tester des composants en environnement spatial. Les doses les plus importantes sous obtenues

sous la fenêtre amincie.

Pour des missions de nanosatellites, il reste difficile d’ajouter de la matière en raison des contraintes de masse et d’encombrement. Le blindage à considérer est alors la structure en elle-même. Des missions spécifiques ou en environnements les plus contraignants peuvent s’appuyer sur de la modélisation pour optimiser des solutions de blindage local une fois la sensibilité des composants déterminée.