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On observe une EVA similaire entre les deux groupes de posologie, et une abondance des saignements similaire également. Cependant, on note que les patientes ayant reçu 400µg de misoprostol présentent plus de caillots que les patientes ayant reçu 800µg.

400µg (n=47) 800µg (n=136) p-value EVA 3,57 3,04 0,251 PRESENCE DE CAILLOTS 31 (75,6%) 68 (50,7%) 0,009 SAIGNEMENTS absence 4 (8,51%) 7 (5,15%) 0,811 légers 13(27,7%) 39 (28,7%) moyens 24 (51,1%) 74 (54,4%) importants 6 (12,8%) 16 (11,8%)

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D.

Recherche d’un facteur de risque d’échec d’IVG

La deuxième analyse a été utilisée.

Les variables IMC, nombre de cigarettes par jour, et nombre de GEU n’ont pas pu être testées devant l’absence de ces informations dans plus de 50% cas.

Toutes les autres variables ont été testées en analyse univariée :

ODDS RATIO IC 95 p-value

POSOLOGIE 800 1,36 0,81-2,29 0,249 AGE 1,04 1,00-1,08 0,039 TERME 1,05 0,98-1,11 0,154 GESTITE 1,20 1,06-1,37 0,00491 PARITE 1,39 1,13-1,7 0,00144 AVB 1,46 1,17-1,81 0,00017 CESARIENNE 1,57 0,78-3,17 0,205 FAUSSES COUCHES 1,31 0,69-2,47 0,408

ATCD IVG MEDICAL 1,00 0,36-2,78 0,996

ATCD IVG CHIRURGICAL 0,79 0,22-2,81 0,710

ATCD IVG MEDICAL+CHIRURGICAL 1,78 0,88-3,59 0,107

NOMBRE IVG 1,35 0,96-1,89 0,083

TABAGISME 0,67 0,38-1,18 0,164

LIEU DOMICILE 1,20 0,71-2,03 0,497

Toutes les variables significatives à 20% en analyse univariée ont été incluses dans le modèle multivarié :

ODDS RATIO IC 95 p-value

POSOLOGIE 800 1,61 0,92-2,82 0,09326

AVB 1,52 1,22-1,91 0,00026

La présence d’un antécédent d’accouchement voie basse est la seule variable qui reste significative en analyse multivariée. L’antécédent d’accouchement voie basse est donc un facteur de risque d’échec d’IVG.

Ce risque d’échec est log linéaire, il augmente avec le nombre d’AVB. Pour un nombre « x » d’ AVB, l’odds ratio est de 1,52 multiplié par le nombre « x » d’AVB.

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V.

DISCUSSION

Les forces de cette étude sont le nombre de patientes recrutées: 391 patientes ont été incluses.

D’autre part, c’est une étude bicentrique dans deux grandes villes des Hauts de France.

Cependant, il s’agit d’une étude rétrospective, le recueil a donc été fait en fonction de la complétude des dossiers.

A.

Etude de l’efficacité des deux protocoles :

1. Explication des résultats obtenus :

La voie d’administration utilisée à Lens et Lille est la voie sublinguale.

En effet, les études pharmacologiques ont montré que le délai d’action était plus court, le pic de concentration plasmatique plus haut, et la biodisponibilité plus grande lors de l’utilisation de la voie sublinguale(26).

Une étude américaine de 2008 retrouve une équivalence d’efficacité de 400µg de misoprostol par voie sublinguale par rapport à 600µg par voie orale dans le traitement des FCS précoces(27).

Une étude de 2019 prouve que la voie sublinguale est plus efficace que la voie orale dans les IVG médicamenteuses(28).

Ces résultats incitent à privilégier la voie sublinguale pour l’administration du misoprostol.

Nous avons inclus uniquement les patientes n’ayant pas été perdues de vue à la consultation post-IVG, ce qui induit un biais de sélection. On estime le taux d’absentéisme en

consultation post-IVG médicamenteuse à environ 20%. En effet, les patientes n’ayant pas de symptômes inquiétants, et un dosage très faible d’hCG, sont plus amenées à être absentes en consultation de contrôle. Et à l’inverse, une patiente ayant des symptômes d’échec, et un taux élevé d’hCG, sera plus inquiète et se présentera à la consultation post-IVG. Ce biais pourrait donc être à l’origine d’une surestimation du taux d’échec d’IVG.

D’autre part, le taux d’échec d’IVG est un critère qui dépend de plusieurs facteurs : - du moment du contrôle de l’efficacité de la méthode,

- de la technique de contrôle (examen clinique avec dosage de l’hCG ou échographie pelvienne),

- et de l’expérience des médecins, en particulier en matière d’interprétation d’images échographiques post-IVG. Cela implique la nécessité d’une formation optimale des médecins dans ce domaine afin d’éviter les interventions chirurgicales inutiles en cas de grossesses incomplètement expulsées(19).

C’est un critère de jugement composite, et il dépend de l’expérience du médecin.

On note qu’à Lens, le dosage du taux d’hCG était parfois réalisé plus tôt qu’à Jeanne de Flandre. En effet il était souvent réalisé à J14 - J15 de la prise de la mifépristone, alors qu’à Jeanne de Flandre il est réalisé entre J18 et J20. Les taux trop élevés d’hCG (>750 UI/L) réalisés avant J18 de la prise de mifépristone n’ont pas été considérés comme des échecs si l’échographie retrouvait une vacuité utérine.

De plus, à Lens les patientes recevaient principalement 400µg de misoprostol. Or on retrouve 9 échecs d’IVG dont la grossesse était évolutive sous 400µg à Lens (avec hCG très élevés

39 19489, 18396, et deux autres patientes ayant une grossesse évolutive qui n’avaient pas réalisé leur dosage d’hCG), contre 0 avec 800µg (à Lille).

Ces deux arguments expliquent que l’on retrouve un taux moyen d’hCG de contrôle plus élevé à l’hôpital de Lens (3538 UI/L) qu’à Jeanne de Flandre (884 UI/L) (p<0,001).

A Jeanne de Flandre, lors des IVG réalisées en hospitalisation, les infirmières ne donnent pas la deuxième prise de misoprostol 400µg à 12h si elles jugent que la patiente a déjà expulsé avec la première prise de 400µg à 9h. Ces patientes ayant une IVG jugée efficace par l’infirmière, la probabilité qu’elles appartiennent au groupe « absence d’échec » est élevée. Les patientes ayant reçu que 400µg de misoprostol à Lille sont au nombre de 40, et seulement 2 d’entres elles ont été des échecs d’IVG (rétention utérine), soit 5%. Or le pourcentage d’échec du groupe 400µg tous centres confondus est de 18,3%.

En effet, on explique ce faible échec chez les patientes ayant reçu 400µg à Lille par ce biais de sélection : le fait d’avoir été sélectionnées pour faire partie du groupe 400µg sur l’argument qu’une unique dose de misoprostol avait été efficace explique qu’on retrouve moins d’échec dans ce groupe.

Inversement, si on avait malgré tout donné une deuxième dose de misoprostol à ces 40 patientes, nous aurions évité ce biais de sélection, elles auraient fait partie du groupe 800µg de misoprostol, et il y aurait donc eu plus de patientes en «absence d’échec » dans le groupe 800µg.

Par ce biais de sélection, à Lille, on retrouve dans notre première analyse peu de patientes classées « échec » dans les 400µg et en contrepartie moins d’ « absence d’échec » dans les 800µg de Lille.

A Lens, uniquement 6 patientes ont reçu 800µg de misoprostol. Il était indiqué dans leurs dossiers qu’elles avaient reçu une 2e dose de 400µg car elles avaient présenté des épisodes de vomissements suite à la prise du médicament. Aucune information n’indiquait si elles avaient eu de nouveaux épisodes de vomissements après la 2e prise de misoprostol 400µg. Sur ces 6 patientes, 2 d’entres elles sont des échecs d’IVG, soit 33%. On peut incriminer un problème d’absorption du misoprostol qui serait à l’origine de ce taux d’échec important. En réalité, les patientes du groupe 800µg à Lens n’ont donc pas ingéré 800µg de misoprostol du fait des vomissements.

Dans l’analyse avec toutes les patientes inclues (391 patientes), on retrouve 16% d’échec dans le groupe 400µg, contre 23,8% d’échec dans le groupe 800µg (p<0,075).

Pour réduire au maximum les biais cités ci-dessus, nous avons décidé de refaire l’analyse en retirant les 6 patientes 800µg à Lens et les 40 patientes 400µg à Lille. Dans cette deuxième analyse (345 patientes), on retrouve 18,3% d’échec dans le groupe 400µg contre 23,4% d’échec dans le groupe 800µg (p=0,308). On remarque que le taux d’échec augmente dans le groupe 400µg et diminue dans le groupe 800µg par rapport à la première analyse. Cependant, le groupe 800µg de Lille reste privé de nombreux « absence d’échec » dont il aurait du bénéficié si toutes les patientes de Lille avait reçu 800µg.

Si on refaisait une analyse en éliminant les 6 patientes 800µg de Lens, et en classant les 40 patientes 400µg de Lille dans le groupe 800µg, on retrouverait alors un taux d’échec à 18,3% dans le groupe 400µg, contre 19,5% d’échec dans le nouveau groupe 800µg (non significatifs).

41 troisième analyse pour tenter d’éliminer ce biais de sélection, en comparant les 400µg de Lille qui avaient présenté des saignements classés « moyens » et « importants », aux 800µg de Lille ayant présenté les mêmes saignements. Cette analyse (120 patientes), retrouvait un taux d’échec à 16,7% dans le groupe 400µg (30 patientes), versus 14,4% d’échec dans le groupe 800µg (90 patientes) (p=0,772).

Toutes ces analyses nous permettent de dire qu’i n’y a pas de différence significative entre le groupe 400µg de misoprostol et le groupe 800µg de misoprostol. Le taux d’échec du centre hospitalier de Lens est comparable à celui de Jeanne de Flandre. Ces arguments encourage l’utilisation du protocole à 400µg de misoprostol, au vu des enjeux économiques engendrés par l’arrêt de la commercialisation du Cytotec®.

Cependant, lorsque l’on regarde les résultats échographiques des échecs d’IVG en consultation post-IVG, on remarque une différence significative (p<0,001): 26% des échecs d’IVG dans le groupe 400µg de misoprostol sont des grossesses évolutives, soit 4,7% des patientes, contre 0% dans le groupe 800µg de misoprostol. Ce taux de grossesses évolutives ne doit pas être négligé car il traduit une poursuite de la grossesse, qui conduit à une interruption chirurgicale secondaire, possible jusqu’à 14 SA(19). Ces chiffres sont donc à prendre en considération étant donné le taux d’absentéisme important en consultation post-IVG (environ 20% d’absentéisme).

Ces résultats ont justifié la mise en circulation, à Jeanne de Flandre, d’un document que les patientes doivent lire et signer. Ce document prévient les patientes d’une potentielle inefficacité totale de la méthode, afin d’insister sur l’importance de la consultation post IVG. (ANNEXE 4) En effet, en plus des conséquences psychologiques non négligeables engendrées chez la patiente pour qui la grossesse évolue contre son grès, il faut également prendre en compte le

risque tératogène du misoprostol. Les études ont révélé les malformations suivantes (de l’ordre de 2%):

- des anomalies des noyaux des paires crâniennes : syndrome de Moebius (paralysie le plus souvent bilatérale, des 6ème et 7ème nerf crâniens avec parfois atteinte d’autres paires crâniennes), trismus sévère avec rétrognathie.

- des anomalies de membres : arthrogrypose, pieds bots, anomalies réductionnelles distales, « anneaux de constriction », syndactylies ou camptodactylies.

- quelques cas d’hydrocéphalie associée aux anomalies précédentes(29). La question de l’acceptabilité de ces grossesses évolutives est donc à discuter.

2. Comparaison avec la littérature :

L’étude AMAYA ne retrouvait pas de différence significative dans sa comparaison entre nos deux protocoles : 7% d’échec avec 400µg de misoprostol versus 5,6% d’échec avec 800µg. Elle ne retrouvait pas non plus de différence significative entre le protocole 200mg de mifépristone puis 800µg de misoprostol, et le protocole 600mg de mifépristone puis 800µg de misoprostol (5,6% d’échec versus 5,9%). Dans cette étude, les échecs étaient définis par la nécessité d’un geste chirurgical complémentaire.

Dans notre étude, 18% des patientes ayant reçu 800µg de misoprostol et 7% des patientes ayant reçu 400µg de misoprostol avaient été reprises au bloc en aspiration.

Aucune information complémentaire sur le taux de grossesses évolutives n’était précisée dans l’étude AMAYA(18).

Coyaji K. et al. comparaient les deux protocoles de notre étude sur des grossesses dont le terme allait jusque 56JA. Ils observaient de la même façon que nous, de manière significative, une augmentation du nombre de grossesses évolutives dans le groupe 400µg de

43 De plus, leur taux de succès était de 86% dans le groupe 400µg de misoprostol, versus 92% dans le groupe 800µg de misoprostol. Cette différence n’était pas significative.

Leur critère de jugement était l’absence de reprise au bloc opératoire, ce qui implique que leur taux d’échec est plus faible que le nôtre(24).

En 2012, Hennebicque C. retrouvait un taux d’échec total de 34% en dessous de 50 JA, avec 600mg de mifépristone suivi de 800µg de misoprostol 48heures après. Aucune grossesse évolutive n’était retrouvée pour des termes <50JA. Les critères de jugement étaient les mêmes que ceux de notre étude. Cependant, le dosage de l’hCG était réalisé entre J10 et J13 de l’IVG, et la consultation de contrôle avait lieu 14 jours après l’IVG. Or aujourd’hui nous savons qu’un dosage trop précoce augmenterait le nombre de reprise chirurgicale des IVG médicamenteuses, donc le taux d’échec. Ceci explique le taux supérieur d’échec dans cette étude, malgré une dose plus importante de mifépristone(25).

En 2013, Levasseur C. comparait 200mg à 600mg de mifépristone suivie de 800µg de misoprostol en dessous de 50JA. Aucune grossesse évolutive n’était retrouvée pour les deux groupes. Le taux d’échec était de 11,3% avec la dose de 200mg de mifépristone, et de 7,8% avec la dose de 600mg de mifépristone (p-value=0,302). Il est important de préciser que dans cette étude, l’échec était défini par une nouvelle cure de misoprostol ou une reprise au bloc opératoire par méthode instrumentale. Notre étude, quant à elle, inclut dans les échecs les patientes chez qui une rétention utérine >15mm était retrouvée, même si celle-ci engendre uniquement une poursuite de la surveillance, sans nécessairement une nouvelle reprise chirurgicale ou une nouvelle cure de misoprostol. Cette différence de critère de jugement explique pourquoi notre taux d’échec est supérieur pour le même protocole utilisé (200mg de mifépristone puis 800µg de misoprostol)(30).

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