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L'étude des systèmes d’élevage constitue une étape essentielle préalable à la mise en place d’un programme de sélection (Groen, 2000). Les atouts et les contraintes de ceux-ci doivent être bien identifiés car ils vont conditionner l’orientation de la sélection. Dans les années 1950 à 1990, les outils développés visaient à placer les animaux contrôlés dans des situations de milieu très favorables, notamment sur le plan nutritionnel, afin de gommer les différences d’adaptation des animaux à des contraintes environnementales et de maximiser la production. Les animaux étaient donc essentiellement sélectionnés sur des caractères de production dans des environnements bien maîtrisés. De nos jours, dans une perspective de durabilité de l’élevage et de robustesse des animaux, l’adaptation des animaux à leur environnement est favorisée (Olesen et al., 2000)

Etat des lieux 55 Avant tout programme de sélection, il convient de choisir sur quelle(s) race(s) va se porter la sélection (races locales ou importées), et si la sélection se fera en race pure ou en croisement (Groen, 2000). Dans tous les cas, il faut veiller à la conservation des races locales qui ne sont pas utilisées pour la sélection. Car si une race particulière est sélectionnée et mise en avant, d'autres, moins "compétitives", risquent d'être délaissées par les éleveurs et de disparaître. Dans les pays tropicaux, les races locales ont rarement été caractérisées de façon scientifique, ce qui a conduit à la sous-estimation de leur valeur (Baker et Gray, 2004). Ces races sont vues comme peu productives, car de petite taille et de faible croissance, alors qu'elles présentent des caractéristiques d'adaptation et de reproduction très intéressantes. Avant tout choix de races, pour une sélection en race pure ou en croisement, il convient de comparer leurs performances dans le même milieu (Wiener et Rouvier, 2009). Les résultats escomptés sont surestimés si on prend en compte la production d’une race exotique dans son milieu d’origine (par exemple tempéré) au lieu de prendre en compte la production de cette race dans le milieu où on veut l’utiliser, par exemple en milieu tropical (Simm et al., 1996).

1) Race pure

En race pure, les reproducteurs proviennent de la même population. Ces races sont souvent les plus à même de produire en milieu difficile, du fait de leur adaptation de longue date à ces milieux. La sélection en race pure entraîne un progrès génétique régulier et cumulatif, visible sur le long terme. N’impliquant qu’une seule race, cette sélection est souvent plus facile à organiser que les systèmes de croisement. Néanmoins, l’amélioration simultanée de nombreux caractères différents peut être longue et difficile, et la sélection en race pure peut conduire à une forte augmentation de la consanguinité dans les populations de taille réduite, provoquant de nombreux effets délétères : dépression de consanguinité à court terme, anomalies génétiques et diminution de la variabilité génétique à plus long terme (Verrier et al., 2005).

2) Croisement et effet d’hétérosis

Les systèmes de croisement consistent à exploiter la variabilité génétique entre races pour bénéficier à la fois de la complémentarité des aptitudes de chacune des races et de l’effet d’hétérosis sur certains caractères. Le croisement permet une amélioration notable visible dès la première génération. C’est la méthode la plus rapide pour obtenir un changement génétique

Etat des lieux 56 (Wiener et Rouvier, 2009). On valorise par exemple la complémentarité des races en utilisant une race paternelle aux aptitudes bouchères bien développées et une race maternelle aux bonnes qualités maternelles et de reproduction. Très souvent, les femelles d’une race locale sont croisées avec des mâles importés pour introduire les performances de production de cette race importée.

La vigueur hybride ou effet d’hétérosis est le fait que la performance moyenne d’un ensemble d’animaux croisés soit supérieure à la moyenne des performances des deux races parentales. Cet effet résulte principalement de la dominance qui se manifeste au niveau des loci hétérozygotes, plus nombreux chez les animaux croisés que chez les animaux de race pure (Wiener et Rouvier, 2009). Cet effet peut être particulièrement intéressant quand il élève la performance des animaux croisé au dessus de celle de la meilleure race parentale. L’hétérosis est maximum en première génération de croisement (F1) et a un effet plus marqué sur les caractères de reproduction et les aptitudes maternelles que sur les caractères de production. Pour cette raison, la production de lignées maternelles croisées est particulièrement intéressante, les mères croisées faisant bénéficier leurs petits de leurs meilleures performances maternelles (Minvielle, 1990).

Cependant, les croisements doivent être extrêmement bien organisés pour atteindre l’objectif voulu et maintenir un nombre suffisant d’animaux garantissant le renouvellement des troupeaux de race pure.

Il existe différents types de croisements, succinctement décrits ci-dessous :

• Croisement terminal

Il fait intervenir deux à quatre lignées différentes, produisant une génération terminale d’animaux croisés tous abattus. Ces croisements permettent de bénéficier de la complémentarité entre races et de l’hétérosis s’exprimant avant l’abattage de la dernière génération. Les organisations les plus complexes, à double étage (à 3 voies, à 4 voies, en retour, Figure 5) permettent aussi de bénéficier de l’hétérosis maternel (Wiener et Rouvier, 2009).

Les croisements terminaux les plus simples, à 2 voies, ont majoritairement été développés chez les ovins et bovins. Les lignées maternelles, de races locales, sont croisées avec des races paternelles aux meilleures aptitudes bouchères Dans ces schémas, il faut en particulier éviter que toutes les femelles produisent des animaux croisés pour garantir le renouvellement des femelles en race pure (Verrier et al., 2005).

Etat des lieux 57 Les croisements à double étage (3, 4 voies retour) sont les systèmes prédominants dans les productions porcines et avicoles. Du fait de leur complexité, ils demandent une très bonne maitrise technique, avec le maintien et le renouvellement de plusieurs lignées en races pures.

Figure 5 : Principaux systèmes de croisement terminal (d’après A. Bouquet, 2009)

Carrés = mâles, ronds = femelles.

• Croisement alternatif ou rotatif

Ces croisements ont pour but l’entretien d’une population de femelles croisées, bénéficiant des effets d’hétérosis (Wiener et Rouvier, 2009). Une population de femelles est croisée alternativement avec des mâles de différentes races pures (2 races de mâles dans les cas les plus simples). Les femelles issues de ces croisements sont conservées pour la reproduction et à leur tour accouplées alternativement avec des mâles de chaque race (Figure 6). Ces types de croisements sont utilisés chez les ruminants élevés en condition très extensive, de type ranching (Verrier et al., 2005).

• Croisement d’amélioration

Il s’agit d’un croisement discontinu, qui a pour but d’introgresser certaines caractéristiques d’une race dans la race à améliorer (Verrier et al., 2005). C’est donc un apport ponctuel d’animaux d’une race extérieure.

• Création de lignées synthétiques ou composites

L’objet des croisements de 2 races ou plus est de créer une nouvelle lignée homogène, présentant les qualités provenant des races d’origine. La façon la plus simple de procéder est

Etat des lieux 58 d’accoupler des représentants des deux races d’origine, et ensuite d’accoupler leurs descendants entre eux sur plusieurs générations successives (Figure 6).

• Croisement d’absorption

Ce croisement consiste à changer de race progressivement, sans avoir besoin d’introduire une nouvelle population de mâles et femelles. Généralement, les femelles de race locale sont accouplées ou inséminées avec des mâles de la race exotique absorbante. A chaque génération, les femelles croisées sont accouplées à des mâles de la race absorbante (Figure 6). Ce type de croisement permet de passer progressivement d’une race à une autre, sans que l’éleveur n’ait à changer brutalement son troupeau, et permet aussi de profiter de l’effet d’hétérosis lors des premières générations de croisements (Wiener et Rouvier, 2009).

Figure 6 : Différents types de croisements (d’après E.Verrier, 2005)

Carrés = mâles, ronds = femelles.