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Etre un individu dans le métro

La personne individuelle dans le métro

D’après ce que nous avons vu précédemment on peut affirmer que le métro dépend de l’homme et qu’inversement l’homme dépend du métro. D’une part, comme le métro est dédié au transport de l’homme, il a été conçu à son échelle : dimension des sièges, des portes, des ouvertures,…etc. D’autre part, l’expérience humaine du voyage dans le métro est toujours influencée par le fonctionnement de ce dernier, ainsi quand on décide de prendre le métro pour nos déplacements, il aura une influence importante sur les horaires, la vitesse et la direction du trajet. Ajouté à cela, l’évolution du monde souterrain se fait avec celle de l’homme et la société ; le monde souterrain ne cesse d’évoluer pour répondre aux dysfonctionnements liés aux comportements des usagers et à l’évolution de la fréquentation on peut citer l’installation des ascenseurs, des escalators et des plans pour se repérer.

La majorité des parcours dans le métro sont individuels, c'est-à-dire qu’un individu voyage seul au milieu d’autres personnes qui effectuent eux aussi des trajets individuels ou au milieu de groupes de voyageurs avec lesquels on partage les mêmes règles, les mêmes mouvements. Ce parcours métropolitain constitue un ensemble de rites rattachés aux lois du monde souterrain, la première étape des ces rites consiste à franchir la frontière entre la ville et le souterrain par l’entrée du métro, il existe d’autres étapes et comportements nécessaires pour parcourir cet espace souterrain conçu par l’homme et pensé à son échelle et qui évolue en fonction de l’évolution des habitudes de la société.

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Dans le métro, y a aussi les autres, comme Marc Augé l’a énoncé dans son livre un

ethnologue dans le métro, « Tous ceux que j’y rencontre sont des autres, au sens plein du terme : il y a fort à parier qu’une partie notable de mes compagnons d’occasion ont des croyances ou des opinions dont je n’entends même pas le langage (les statistiques et les sondages pourraient me permettre de préciser cette constatation), et je ne parle évidemment pas là des étrangers et de tous ceux dont la couleur de peau peut faire augurer qu’ils appartiennent à d’autres milieux culturels que moi » (Augé, 1986, p.24). Ainsi, dans le

métro on est confronté à ces autres, à leurs regards et parfois même au contact physique avec ces inconnus auxquels on ne veut pas dévoiler une certaine intimité (son corps, ses attitudes, ses lectures, son odeur, etc.), et si les voyageurs du métro trouvent toujours une échappatoire au regard de l’autre en interposant les téléphones, les livres et d’autres objets de distractions, le contact physique est parfois inévitable surtout aux heures de pointe.

Le métro un lieu pratiqué

Le trajet en métro suppose d’aller d’un point A à un point B, et quand il y a déplacement y a forcément traversée d’espaces et de lieux. Michel De Certeau (1990), qui apporté des précisions sur les notions de lieu et d’espace, il considère le lieu comme un endroit ou toute chose est organisée quant à l’espace il est toujours en transformation, c’est « un lieu pratiqué » en mouvement, il suit des directions et des trajectoires, dans le sens de ces notions on peut présenter l’espace du métro comme un lieu pratiqué pour les usagers qui l’utilisent.

Au cours d’une même journée plusieurs variables peuvent varier dans ce lieu pratiqué, y a le flux des voyageurs qui n’est pas le même aux différents moments de la journée, la vitesse des voyageurs et des rames qui ne sera pas la même. Ces variables peuvent varier aussi en fonction des usages ce qui nous amène à nous poser des questions : comment ces usages changent-ils avec le temps ? Comment l’aménagement de l’espace du métro a t-il été modifié avec l’évolution de la société, des pratiques et des attentes des voyageurs ?

Si on regarde le temps que les usagers passent aujourd’hui dans le métro, on peut affirmer que ce dernier n’est pas un simple moyen de transport mais entre dans la

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composition de l’univers quotidien des usagers. Selon Jean-Charles Depaule et Philippe Tastevin le métro est comme une parenthèse « poreuse », ils énoncent que « La perméabilité des sphères quotidiennes, ou plutôt, dans ce cas, les transferts d’usages et de

codes de la sphère domestique (l’habitation et le voisinage) à celle d’un transport public ne sont pas seulement imputables au fait que, par définition, le métro met matériellement en relation à travers l’espace de l’agglomération différents lieux et moments […] » (Depaule et

Tastevin, 2008, p.29). C’est le paradoxe du métro selon les deux auteurs, il est d’une certaine manière « parenthèse mobile (nous insistons sur ce caractère) dans l’espace urbain

et dans l’emploi du temps de chaque voyageur » et selon eux on ne peut pas analyser les

usages du métro sans prendre en compte les pratiques des voyageurs dans d’autres environnements, c’est la raison pour laquelle on peut trouver dans le métro des « savoirs vivre » commun partagés dans d’autres lieux comme l’habitat, ce que Jean- Charles Depaule et Philippe Tastevin expliquent par un prolongement des usages et leurs projections dans l’espace mobile du métro, ce qui nous amène à dépasser l’approche fonctionnelle du métro pour penser à sa dimension sociale.

Les règles de l’usage du métro

Pour acquérir le droit d’accéder au métro, le voyageur doit prendre en charge son trajet par l’achat d’un titre de transport car l’accès au métro est contractuel entre l’usager et le transporteur, comme dans d’autres lieux ou l’accès est limité à celui qui consomme. Le métro recèle des règles qui se transforment avec l’évolution de la société et de la technologie, ainsi le voyageur qui veut incarner le rôle d’un usager doit adopter des comportements attendu par les autres voyageurs, Depaule et Tastevin énoncent « Comme le café où il est difficilement concevable qu’il ne soit pas

consommateur , le métro est un terrain ou l’observateur est nécessairement engagé dans la situation qu’il doit décrire. Sa place, le terme est à entendre ici littéralement, place assise ou debout, il n’est donc pas en soi inconfortable puisqu’il est un usager, qui a acquis le droit d’être là en achetant son titre de transport. Toutefois, s’il est étranger, il est un voyageur d’un genre un peu inhabituel : il est l’objet d’attentions particulières, qui relèvent du registre de l’hospitalité, et d’un traitement spécial, généralement bienveillant, si son comportement n’est pas conforme aux codes partagés, comme tout utilisateur du métro, il a dû en faire tôt ou tard

46 l’apprentissage en intériorisant des comportements dont la maitrise le désigne aujourd’hui comme familier » ( Depaule & Tastevin, 2008, p.24).

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