4.2 Mod`ele isotopique de lac (MoIsoLac)
4.2.4 R´esultats de la calibration du MoIsoLac et fonctionnement hydro-isotopique
La figure 4.3 pr´esente les r´esultats des simulations de la composition isotopique de l’eau des lacs en surface et au fond. Le mod`ele arrive `a reproduire le cycle annuel du δ de l’´epilimnion
et de l’hypolimnion avec : l’enrichissement isotopique en ´et´e dˆu `a l’´evaporation en surface, l’homog´en´eisation isotopique de la colonne d’eau synchrone `a l’homog´en´eisation thermique.
Lac d’Annecy
L’´etude des r´esultats des simulations (figure 4.3, s´eries 1 et 2) permet de distinguer cinq phases annuelles :
1. jusqu’`a la mi-D´ecembre sur la figure, la densit´e des apports (ρR) est interm´ediaire entre celle de l’´epilimnion (ρE) et celle de l’hypolimnion (ρH). Les rivi`eres se m´elangent au milieu de la colonne d’eau par des courants dits interm´ediaires.
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Date (Months) −9.8 −9.6 −9.4 −9.2 −9 −8.8 −8.6 −8.4 δ 18 O (% o )
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Oct.
Surface water observations Bottom water observations Surface water simulations Bottom water simulations
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Oct.
Date (Months)
JJ=48 JJ=78 JJ=108
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Oct.
4 8 12 16 20 24 Temperature ( o C) a) b) 45m 50m 55m 40m d) c) JJ=48 JJ=78 JJ=108 JJ=78 Pmax=45m JJ=78 Runoff temperature
(a) Lac d’Annecy
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Oct. Months −9.8 −9.6 −9.4 −9.2 −9 δ 18 O (% o )
Oct. Dec. Febr. April June Aug. Oct.
Surface water observations Bottom water observations Surface water simulations Bottom water simulations
a) b) JJ=168 JJ=138 JJ=108 JJ=48 JJ=168 JJ=138 JJ=48 JJ=48 JJ=78 JJ=108 JJ=138 JJ=168 (b) Ammersee
Figure 4.2: Illustration de la sensibilit´e du δ de l’eau profonde `a la profondeur maximale de
m´elange (Pmax) d´ependante des contraintes bathym´etriques dans le cas du lac d’Annecy.
2. au mois de D´ecembre, ρR devient sup´erieure `a ρH entraˆınant la formation de courants profonds dont la zone de m´elange est contrainte par la topographie. Dans le cas du lac d’Annecy, j’ai dans un premier temps fix´e la profondeur maximale de m´elange (Pmax) `a 45 m car, d’apr`es Benedetti-Crouzet [1972], environ 50% des apports arrivent au lac par le Petit Lac qui est s´epar´e du Grand Lac par un haut fond `a 45 m`etres de la surface. Je montrerai dans le paragraphe suivant une ´etude de sensibilit´e duδH `a la valeur dePmax.
3. la colonne d’eau s’homog´en´eise thermiquement (figure 4.3, s´erie 1) et donc, isotopique- ment (figure 4.3 s´erie 2), les apports, ici plus denses puis moins dense, sont int´egr´es dans toute la colonne d’eau lorsque l’homog´en´eisation est efficace.
4. la stratification se remet en place etρRest sup´erieure `aρS. Les apports se m´elangent avec l’´epilimnion dont leδ ´evolue vers ls δ des apports (ici δA' −10, 5h).
5. la diminution plus rapide de ρE par rapport `a ρR induit le plongement des apports en- dessous de l’´epilimnion. L’enrichissement isotopique de l’´epilimnion par ´evaporation est alors favoris´e entraˆınantδE vers des valeurs plus ´elev´ees.
6. d´ebut de la phase 1 : `a la fin de l’´et´e, la destruction de la thermocline (voir § 2.2.1)
implique le m´elange d’eau profondes plus appauvries et donc la diminution duδE (ρE >
ρR> ρH).
Oct. Dec. Feb. April June Aug. Oct. Date (Months) −11.0 −10.5 −10.0 −9.5 δ 18 O (% o )
Observed watershed signal Simulated watershed signal
−9.6 −9.2 −8.8 −8.4 δ 18 O (% o ) 4 8 12 16 20 24 Temperature ( o C) 1) 2) 3) ∆Σ=1.1 1 2 3 4 5 1
(a) Lac d’Annecy (δO=-9,12).
Oct. Dec. Feb. April June Aug. Oct.
Date (Months) −11 −10 −9 δ 18 O (% o )
Observed watershed signal Simulated watershed signal
−9.8 −9.6 −9.4 −9.2 −9 δ 18 O (% o ) 0 4 8 12 16 20 Temperature ( o C)
Surface water observations Bottom water observations Surface water simulations Bottom water simulations Input from the watershed
4)
5)
6)
∆Σ=1.35
(b) Ammersee (δO=-9,47).
Figure 4.3: R´esultats de la calibration climatologique du mod`ele isotopique de lac forc´e par les observations hydro-isotopiques des bassin-versants. Lac d’Annecy : R2=0,66 ; Ammersee : R2=0,84
Ammersee
Dans le cas de Ammersee, si les simulations isotopiques de l’eau profonde sont en d ´esaccord avec les observations apr`es l’homog´en´eisation (figure 4.3(b), s´erie 5) cela tient au fait que les observations isotopiques sont aussi en d´esaccord avec les observations thermiques reproduites, elles, fid`element par le MoIsoLac (figure 4.3(b), s´erie 4). En effet, lorsque le lac est thermi- quement homog`ene (dans les observations et dans la simulation) pendant les mois de Janvier `a Mars, les observations pr´esentent une stratification isotopique pendant le mois de F´evrier. Ceci s’explique par le fait que les observations climatologiques de la temp ´erature sont issues des moyennes mensuelles des ann´ees 1993 `a 1999 alors que les moyennes mensuelles des donn´ees isotopiques ont ´et´e calcul´ees `a partir de deux ann´ees d’observations, entre 1992 et 1994.
Par cons´equent, leδ simul´e de l’eau profonde par le MoIsoLac est en accord avec la simu-
lation thermique suivant les cinq phases d´ecrites auparavant.
La variabilit´e moyenne observ´ee duδH pourrait ˆetre reproduite grˆace `a une meilleure con- naissance de la variabilit´e de la temp´erature des apports comme montr´e dans le cas du lac d’Annecy.
Temp´erature des apports et fenˆetre de passage
L’enchaˆınement de ces cinq phases montre que, d’un point de vue isotopique, le ph ´enom`ene de passage estival (ou ’summer bypass effect’ en anglais) se limite principalement `a la phase 4 sur la figure 4.3 et ne dure ici que 3 mois, de Mars `a Mai ; ph´enom`ene que j’appellerai ici “fenˆetre de passage” pouvant se g´en´eraliser `a des situations pendant lesquelles la densit´e des apports est inf´erieure `a celle de l’´epilimion et pour lesquelles le lac est stratifi´e thermiquement. Les apports du bassin versant transitent alors directement vers l’exutoire par l’ ´epilimnion. Par cons´equent, l’influence deδRdans le bilan isotopique du lac et en particulier de l’eau profonde (lieu de vie des ostracodes benthiques) sera amortie durant cette p´eriode.
La figure 4.2(b) montre que, dans le cas de Ammersee, lorsque JJR=168, la fenˆetre de passage correspond aux mois de Novembre `a Janvier alors que lorsqueJJR=48, elle correspond aux mois de Mai `a Juin. Dans le premier cas, les apports au lac sont isotopiquement plus enrichis que dans le second cas (d’environ 0,5h, voir s´erie 6 sur figure 4.3(b)). Par cons´equent, le δ
moyen du lac diminue lorsque leδ des apports synchrones `a la fenˆetre de passage est sup´erieur
`a la moyenne (e.g. lorsqueJJR=168) et inversement (e.g. lorsqueJJR=48).
4.2.5
Conclusions
En accord avec les observations, le mod`ele reproduit correctement le cycle saisonnier de la teneur isotopique de l’´epilimnion ainsi que l’homog´en´eisation isotopique dans le contexte cli- matique actuel utilis´e pour le forc¸age. La qualit´e des ces simulations est meilleure lorsque le mod`ele peut ˆetre cal´e par rapport `a une grand nombre d’observations : R2=0,84 dans le cas de Ammersee par rapport `a R2=0,66 dans le cas du lac d’Annecy. Ceci peut ´egalement s’expliquer par le fait que, dans le cas de Ammersee, la signature isotopique du forc¸age hydrologique est repr´esentative de 80% des apports au lac alors que pour le lac d’Annecy, elle n’est repr ´esentative que de 42% des apports. chapitre pr´ec´edent).
Pour le lac d’Annecy, grˆace au mod`ele empirique de temp´erature des apports, le mod`ele reproduit aussi les variations observ´ees du δ18O de l’eau profonde dans le contexte clima- tique actuel utilis´e pour le forc¸age. De plus, le δ moyen simul´e de la colonne d’eau, lors
2). Si dans le cas de Ammersee, les fluctuations observ´ees de la teneur isotopique de l’eau profonde ne sont pas parfaitement simul´ees, le δ moyen simul´e de la colonne d’eau, lors de
l’homog´en´eisation, est en accord avec les observations (en Janvier sur la figure 4.3, s ´erie 5). Par cons´equent, dans son ´etat actuel, le MoIsoLac est suffisamment adapt´e pour des ´etudes de l’impact de changements hydro-isotopiques sur le δO, `a l’´etat stationnaire dans le contexte climatique actuel dans les deux lacs. Mais, si dans le lac d’Annecy, la valeur absolue deδO est correctement estim´ee, des ´etudes compl´ementaires du fonctionnement thermo-hydro-isotopique de Ammersee et de ses apports sont n´ecessaires. Pour ce faire, d’une part, les donn´ees dispo- nibles des profils thermiques et isotopiques de Ammersee doivent ˆetre confront´es `a un mod`ele adapt´e de la temp´erature des apports et, d’autre part, la n´egligence des effets des mati`eres en suspension sur la densit´e des apports `a l’´echelle mensuelle doit ˆetre v´erifi´ee.
Apr`es la pr´esentation et la calibration ind´ependante du MoHydIsoBV dans le paragraphe suivant, je pr´esenterai deux exemples d’application de ce MoIsoLac `a l’´etude de l’impact des changements hydrologiques sur leδO dans le paragraphe 4.4.