• Aucun résultat trouvé

ESTIME DE SOI ET SENTIMENT D’EFFICACITE PERSONNELLE

Attachement Sécure

ESTIME DE SOI ET SENTIMENT D’EFFICACITE PERSONNELLE

Un certain nombre d’études longitudinales ont montrées un lien entre une faible estime de soi et le risque de développer un trouble mental ou des conduites addictives.

Fairburn et al. (1999) recueille l’autoévaluation rétrospective dans l’enfance faite par les femmes souffrant d’anorexie mentale, celle-ci montre une estime de soi plus négative que celle des femmes en population générale.

Button et al. (1996) dans une étude portant sur 594 filles âgées de 11 et 12 ans suivies pendant 4 ans, montre que celles qui présentaient une faible estime de soi présentaient le plus haut risque de développer les symptômes alimentaires les plus sévères à l’âge de 15-16 ans mais aussi des difficultés psychologiques.

Geller et al. (2000) et Serpell et al., (2002) affirment que les individus souffrant d’anorexie mentale fondent classiquement leur estime de soi sur leur perception de leur corps et de leur poids. La restriction alimentaire vient renforcer une estime de soi faible par le contrôle d’un comportement spécifique. La maîtrise de son poids est un comportement social valorisé dans notre société. Au départ, maintenir ce comportement sera renforcé à la fois par le regard extérieur et par un sentiment de compétence intérieur retrouvé. L’estime de soi s’en voit ainsi augmenté ce qui renforcera le recours à cette stratégie de coping.

Doba et al. (2014) dans une étude sur un échantillon de femmes françaises montrent qu’il existe chez les adolescentes anorexiques ainsi que chez leurs parents une faible estime de soi sociale. Une faible estime de soi notamment sociale est souvent présente chez les mères de patientes anorexiques, posant ainsi la question de la transmission de ce sentiment de faible compétence sociale comme un facteur de vulnérabilité (Donovan et al., 1990); (Spielman et Taubman, 2009).

Le sentiment d’efficacité personnelle est un concept développé par A. Bandura dans les années 1980 décrivant le sentiment de pouvoir agir sur sa vie et de pouvoir produire des effets sur son environnement. C’est le sentiment d’être acteur de sa vie. Il s’acquiert dans l’enfance dans les interactions avec les parents puis tout au long de la vie par le biais d’interaction avec l’environnement. Le sentiment d’efficacité personnelle suppose de pouvoir repérer correctement ce que l’on veut et d’en tenir compte, de se fixer des objectifs réalistes, de s’affirmer auprès des autres et de mettre en œuvre ce que l’on veut faire. C’est bien là tout le problème des patientes souffrant d’anorexie.

La difficulté à repérer les désirs singuliers résulte d’un processus de séparation-individuation défectueux. L’angoisse d’abandon liée à une relation précoce insécure conduit l’enfant à se calquer sur les désirs de ses parents pour ne pas perdre leur amour. Il va ainsi très tôt apprendre à repérer les désirs des autres plutôt que les siens. L’emprise parentale lorsqu’elle est forte, trop d’interdits et l’absence de choix participe de cette difficulté à repérer ses propres désirs. L’enfant peut aussi mettre ses désirs entre parenthèse s’il sent que l’un de ses parents est en difficultés. Chez les patientes anorexiques le désir est ressentis comme un besoin, elles ont peur d’être dépendante de leur désir, de faire du désir un besoin qu’elles ne peuvent contrôler. Le désir est placé à l’extérieur du moi car non maîtrisable et dangereux, c’est un mécanisme de défense par le clivage. La difficulté de faire des choix procède d’une intolérance à la perte de ce qu’elles n’ont pas choisi et d’une

Auto-évaluation - + Expériences vécues Qualité des relations familiales Stratégies de coping Sentiment de compétence familial

pensée en tout ou rien. Le vide et l’absence de choix laissent ouvert toutes les possibilités et les soustraient à l’angoisse de la perte.

La capacité à se fixer des objectifs réalistes découle d’une capacité à accepter ses limites et d’un sentiment d’amour inconditionnel qui permet d’échouer sans se mettre en danger psychiquement. Les patientes anorexiques développent un perfectionnisme qui a pour origine un amour conditionnel dans l’enfance. Deux facteurs favorisent ce perfectionnisme, d’une part une exigence parentale importante, dispensant un « amour au mérite », et le fait qu’un membre de la famille, parent ou fratrie, soient vulnérables. L’enfant essayera d’être le plus parfait possible pour ne pas alourdir la souffrance des parents dans ce cas de figure. Le perfectionnisme devient à force une identité. Accepter c’est accueillir les choses telles qu’elles sont et non pas telles qu’on voudrait qu’elles soient. Accepter c’est être en mesure de faire certains deuils pour laisser la place à autre chose. Les personnes souffrant d’anorexie mentale ont de grandes difficultés à accepter et vivent l’acceptation comme une soumission ou quelque chose qu’elles doivent subir.

S’affirmer, c’est exprimer clairement ses désirs à l’autre tout en préservant une bonne relation. Du fait de leur angoisses d’abandon, les patientes anorexiques ont de grandes difficultés à s’affirmer par peur du rejet. Elles vivent le désaccord comme une potentiel perte d’amour. Elles culpabilisent de dire non par projection de leurs propres angoisses sur l’autre et exprime peu de demande par peur de recevoir un « non » vécu comme un rejet. Dès lors, elles auront tendance à se conformer à ce qu’elles perçoivent qu’on attend d’elles.

La capacité de mettre en place des stratégies efficaces pour réponde à ses désirs se développe dans l’enfance très précocement. L’imprévisibilité des parents dans la satisfaction des besoins de l’enfant va conduire à un sentiment d’impuissance face à son environnement. Ce sentiment d’insécurité et d’inefficacité sera d’autant plus marqué si l’enfant subit des traumatismes (séparation, agression sexuelle, mort d’un proche, maltraitances…) Certaines situations plus tardive au moment de la puberté ou au début de l’âge adulte peuvent renvoyer les patientes à des situations infantiles précoces d’impuissance et déclencher les troubles du comportement alimentaire (puberté précoce, croissance rapide qui les rend différents des autres, séparation avec l’entourage, agression sexuelle, rupture amoureuse ou décès d’un proche).

Ce sentiment d’impuissance ou d’inefficacité personnelle peut conduire à une réaction d’hypercontrôle pour lutter contre l’effondrement dépressif, il arrive aussi que les patientes s’effondrent et s’engage dans une attitude de renoncement qui s’auto-entretien.

Il est donc indispensable de travailler la dimension estime de soi et affirmation de soi chez les patients souffrant d’anorexie afin de pouvoir leur donner un sentiment d’efficacité personnel, l’accès à l’expérimentation, au choix, un amour de soi inconditionnel laissant ouvert la possibilité d’échouer et d’apprendre pour se construire une identité propre.