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Chapitre I : Données bibliographiques

1. Généralité sur le paludisme

1.3. Epidémiologie du paludisme

1.3.1. Epidémiologie générale

Selon les dernières estimations de l’OMS, publiées en avril 201714, le paludisme a tué près de 429.000 personnes en 2015 : un enfant est mort du paludisme toutes les 2 minutes. Cette même année, le nombre de nouveaux cas de la maladie était estimé à 212 millions, majoritairement en Afrique. 75 % des décès imputables à cette maladie en 2015 ont concerné les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes. La co-infection par le VIH est évidemment un problème majeur.

Outre ces conséquences sanitaires, le paludisme a des conséquences socio-économiques majeures, liées à l’invalidité des sujets paludéens.

Le paludisme demeure un problème de santé publique majeur pour une majorité de pays d’Afrique. Cependant, les efforts menés par l’OMS en termes de prévention (voir plus loin) et l’amélioration de l’accès aux traitements (dont la mise en place de campagnes de chimioprophylaxie en zone endémique), avec l’initiative « Roll Back Malaria »15 associant des efforts du secteur pharmaceutique, a permis d’améliorer cette situation. Ainsi, durant ces seize dernières années, plusieurs pays progressent vers l’élimination de la maladie. Entre 2010 et 2015, l’incidence du paludisme a ainsi baissé de 21 % au niveau mondial tandis que le taux de mortalité a reculé de 29 % à 31 % toutes tranches d’âge confondues et de 35 % chez les enfants de moins de 5 ans. En Afrique subsaharienne, l’incidence du paludisme et le taux de mortalité dus à ce fléau ont diminué de 21 % et de 31 %, respectivement, au cours des cinq dernières années. La région européenne, où subsistaient des zones à risque, a été déclarée exempte de paludisme en 2015. Dans les autres régions touchées par la maladie, on note des avancées notables, comme le montre le tableau 1.14 La pathologie demeure cependant une préoccupation sanitaire majeure.

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OMS, Rapport sur le paludisme dans le monde 2015: résumé, 2016

15 http://www.who.int/malaria/news/2015/governing-board-disbands-rbm-secretariat/en/ ; publié le 25/08/2015.

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Tableau 1 Estimation de l’incidence (nouveaux cas) du paludisme et du nombre de décès, de 2010 à 2015 (source, OMS 2017). 14

1.3.2. Répartition géographique

Aujourd'hui, le paludisme est considéré endémique dans 91 pays (Figure 2). Le niveau d’endémicité varie d’une région à une autre :16

- Comme cela a déjà été précisé, l'Afrique reste le continent le plus touché : en 2016, 88 % des cas ont été enregistrés dans cette région, avec 46 pays endémiques dont 38 sous contrôle et 8 en cours d’élimination de la maladie. Le danger est quasi nul en Afrique du Nord, mais majeur en Afrique de l'Est, en Afrique subsaharienne et en Afrique équatoriale, dont le Gabon ;

- Onze pays sont endémiques en Asie du Sud-Est. Le paludisme y est cependant absent des grandes villes ;

- En Amérique du Sud et en Amérique centrale 35 pays sont des zones endémiques. Dans les Antilles, le paludisme sévit à Haïti et en République Dominicaine. En Amérique du Sud, le risque est faible dans les grandes villes, mais réel dans les zones rurales en Bolivie, en Colombie, en Équateur, au Pérou et au Venezuela, et est majeur dans toute la zone amazonienne ; En Amérique centrale, le risque est relativement faible.10

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- Enfin, le Moyen-Orient et l’Eurasie comptent 17 pays endémiques tendant à être sous contrôle. Trois pays (le Pakistan, l'Afghanistan et le Yémen) comptabilisent plus de 99 % des décès de la région. 17

Figure 2. Répartition du paludisme dans le monde en 2016 (source: OMS, 2017)14

1.3.3. Le paludisme au Gabon

Le Gabon est un pays d’Afrique centrale où la transmission du paludisme est importante et quasi continue tout au long de l’année. Comme dans toute zone équatoriale, le Gabon est ainsi considéré comme une zone d’hyperendémie palustre. Le paludisme y est l’une des premières causes de mortalité.14 Le maintien de l’endémie palustre résulte de la conjonction de multiples facteurs :

 un écosystème réunissant toutes les conditions nécessaires au développement des anophèles vectrices, donc à la transmission du paludisme ;

 des conditions socio-économiques défavorables ainsi qu’en témoignent la faiblesse des ressources financières des familles, l’inadéquation de la couverture sanitaire (surtout dans les zones rurales), le chômage et l’urbanisation anarchique favorisée par l’afflux des populations rurales vivant dans des quartiers marécageux, créant ainsi des conditions propices au développement des anophèles et à une charge parasitaire importante dans un réservoir humain dense ;

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 un recours tardif aux structures sanitaires lié à l’automédication souvent mal maitrisée et à d’autres pratiques thérapeutiques aggravant l’impact de cette maladie en termes de mortalité et de morbidité.18

L’incidence du paludisme au Gabon était ainsi de 24.892 pour 100.000 en 2012 et le taux de mortalité est de 67 pour 100.000, d’après l’OMS. Une étude publiée en 2016 dans la revue

Parasite fait état d’une baisse de la prévalence de 2005 à 2008 (31,2 % à 18,3 %), puis d’une

recrudescence (24,1 %) en 2011 à Libreville, et d’une chute à Franceville de 69 % en 2004 à 19,5% en 2009. Elle n’a ensuite plus baissé dans cette ville de 2009 à 2012. Dans ce travail, portant sur plus de 900 enfants fébriles en 2011 et 2012, le paludisme était la seconde cause de fièvre, après les infections respiratoires.19

L’OMS rapporte pour le Gabon, dans son rapport sur le paludisme de 2016, les chiffres de mortalité présentés dans la table 2, pour un nombre de cas estimé entre 140.000 et 710.000 (médiane : 400.000 cas).

Tableau 2. Décès dus au paludisme rapportés pour le Gabon (source : OMS, 2017)14.

Traduction : présumé et confirmé ; examen microscopique ; confirmé par microscopie ; examiné par test diagnostic rapide ; confirmé par test diagnostic rapide ; cas importés

P. falciparum représente l’espèce plasmodiale la plus répandue au Gabon : selon les études,

sa fréquence oscille entre 93 et 100 % des infections par le genre, en fonction de la saison20 (97,5 % des cas relevés à Franceville chez l’enfant dans l’étude citée précédemment)20. Les niveaux de résistance aux antipaludiques conventionnels sont très élevés.21 La résistance à la chloroquine est estimée à 100 %;17 celles à l’amodiaquine et à l’association sulfadoxine-pyriméthamine atteignaient respectivement 34 % et 14 % en 2000.22,23

En 2003, les combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (CTA / ATC, voir plus loin)

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D. P. Mawili-Mboumba, et al., Cahiers d'études et de recherches francophones/Santé 2012, 21, 127-131.

19 S. Maghendji-Nzondo, et al., Parasite 2016, 23,

20

M. K. Bouyou-Akotet, et al., Malaria J. 2009, 8, 300.

21

A. Aubouy, et al., Antimicrob. Agents. Chemother. 2003, 47, 231-237.

22 J. M. M. Ndong, et al., Tropical Medicine & International Health 2003, 8, 25-29.

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ont été adoptées par le pays à travers le programme national de lutte contre le paludisme (PNLP). Il était prévu que le traitement de première ligne soit l’artésunate-amodiaquine et celui de seconde intention, l’artéméther-luméfantrine.24 Ce n’est qu’en 2005 que les ACT ont été largement distribués. Le traitement présomptif chez la femme enceinte (sulfadoxine-pyriméthamine ; voir plus loin) a été également mis en place. Globalement, l’accès aux traitements est non satisfaisant25. Aujourd’hui, les résistances contre les ACT n’ont pas encore été clairement démontrées, mais la probabilité de leur apparition n’est pas nulle. En effet, des échecs thérapeutiques après traitement aux ACT ont été observés en Afrique sub-saharienne, dont le Gabon (Pr. M. Kombila, communication personnelle). La résistance aux dérivés de l’artémisinine, essentiellement dans le sud-est asiatique, sera présentée plus loin. Dans le même temps, des campagnes de distribution de moustiquaires imprégnées d’insecticides ont été menées. En conséquence, on a observé une baisse de la prévalence du paludisme chez les enfants fébriles ces dix dernières années.24

Le problème de la contrefaçon des médicaments antipaludiques, important en Afrique subsaharienne,26 ne semble pas majeur dans le circuit pharmaceutique gabonais.12