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3.4 Applications du modèle aux données

3.4.3 Correction en énergie

3.4.3.1 Energie Ionisation

On s’intéresse, dans un premier temps, à l’étude des voies ionisation (B et D) chargées de la collecte pour les événements fiduciels. Rappelons que le modèle analytique stipule une dépendance quasi linéaire de la profondeur du dépôt avec (Eia− Eic)/Er pour des

événe-ments de quenching unité. On prendra par la suite Eid comme estimateur de Er car il s’agit de celui qui offre la meilleure résolution. Toutefois, les résultats qui vont être présentés se-raient inchangés par l’utilisation d’un autre estimateur tel que EFID ou Eib. On observe, en figure 3.23, sur les graphiques du haut, une forte dépendance des énergies Eib et Eid avec la profondeur du dépôt d’énergie. Cette dépendance est clairement visible via la corrélation de l’énergie de la raie à 356 keV avec (Eia− Eic)/Eid. On constate que cette dépendance

est d’autant plus importante pour l’anode fiducielle B (qui collecte les électrons). Il ne s’agit pas d’un effet spécifique au détecteur FID845, mais d’un effet observé sur l’ensemble des détecteurs, et souvent même davantage marqué. Cette constatation met en évidence un pié-geage de charges plus important pour les électrons que pour les trous dans l’ensemble des détecteurs étudiés et explique le fait que la résolution de la cathode D (∼ 10 keV) soit

systé-matiquement meilleure que celle de l’anode B (plusieurs dizaines de keV, très variable d’un détecteur à l’autre).

Cette dépendance étant vérifiée, nous allons voir que nous sommes en mesure d’effectuer une correction de la mesure en énergie de manière extrêmement simple via l’utilisation des signaux lus par les électrodes vétos. Pour la description de la méthode employée pour cette correction, on se référera aux graphiques de gauche de la figure 3.23 qui synthétisent la procédure de la correction en énergie de la voie B (les graphiques de droite référant à la correction en énergie de la voie D via la même méthode).

On subdivise, dans un premier temps, les données selon différentes plages de valeurs en (Eia− Eic)/Eid, ici 9 plages de valeurs comprises dans l’intervalle [-0.05,0.03].

Pour chacun de ces jeux de données correspondant à des profondeurs de dépôts différentes, on détermine la position du pic à 356 keV. On procède ensuite à un ajustement de la fonction f(Z) (cf. éq. 3.33) où Z=(Eia− Eic)/Eid de manière à décrire le mieux expérimentalement la

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Figure 3.23: Principe de la correction de la mesure en énergie des voies individuelles. Les

graphiques de gauche (resp. de droite) se réfèrent à la correction apportée à la voie B (resp. la voie D). Les graphiques du haut montrent la corrélation qui existe entre l’énergie mesurée et la profondeur du dépôt via l’estimateur de Z dans les données : (Eia-Eic)/Eid. Les graphiques du bas montrent comment cette dépendance est supprimée via l’application de la correction en énergie. Les graphiques du milieu montrent la dépendance de la position du pic à 356 keV avec Z et l’ajustement de la fonction f(Z) qui est utilisée pour la correction en énergie.

dépendance de la position du pic avec la profondeur du dépôt d’énergie. Il n’y a pas de jus-tification théorique particulière à l’emploi préférentiel de cette fonction plutôt qu’une autre. Il s’agit de celle, parmi les nombreuses testées, qui présentait empiriquement les meilleurs résultats. En effet, bien que la dépendance en Z soit très variable d’un détecteur et d’une voie à l’autre, celle-ci tend à suivre deux dépendances linéaires pour les valeurs extrêmes de Z démarquées par une transition sensiblement indépendante de Z. Ce type de comportement est bien décrit par la fonction f(Z) définie par :

f (Z) = p0+ p1Z +p4+ p5Z− (p0+ p1Z)

1 + exp p2−Z

p3

 (3.33)

Enfin, la correction en énergie est simplement effectuée via l’application d’un gain correctif à la voie étudiée de la manière suivante :

Eibcorrige = 356

f (Z) × Eib (3.34)

Les deux graphiques du bas montrent qu’après correction, les énergies en ionisation Eib et Eid ne présentent plus de dépendance en Z avec une raie bien centrée à 356 keV indépen-damment de la profondeur du dépôt d’énergie. L’amélioration des résolutions à haute énergie apportée par ce type de correction est assez remarquable, particulièrement pour l’anode B qui est la plus impactée par le piégeage de charges. On peut voir, sur la figure 3.24, le spectre en énergie avant et après correction. On observe que la correction pour le détecteur FID845 permet de passer de 20 keV (FWHM) de résolution à 356 keV à environ 9 keV de résolution soit une amélioration de l’ordre de 50%. Bien que moins impressionante pour la voie D, cette correction permet tout de même d’améliorer d’environ 20% la résolution. On note également qu’après correction, les résolutions en énergie des voies B et D sont identiques.

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Figure 3.24: Distributions en énergie des voies individuelles B et D avant et après correction

de la mesure. Les spectres avant correction sont représentés en orange. Le spectre après correction de la voie ionisation B (resp. D) est représenté en violet (resp. bleu clair).

3.4. APPLICATIONS DU MODÈLE AUX DONNÉES 111 Notons toutefois que cette correction n’est pas viable à basse énergie. En effet, celle-ci est basée sur le fait que Z = (Eia− Eic)/Eid est un estimateur de la profondeur du dépôt

d’énergie. A basse énergie, la valeur de Z tend à devenir aléatoire car elle est davantage dé-terminée par le bruit de l’électronique que par les signaux induits par le piégeage de charges. Cet effet est visible en figure 3.25 où on observe bien qu’en dessous de∼ 50 keV, Z tend

rapi-dement à diverger. C’est pourquoi on détermine Zmin(resp. Zmax) tel que si Z < Zmin(resp.

Z > Zmax), alors f (Z) = f (Zmin) (resp. f (Z) = f (Zmax)). De cette manière, les événements de basse énergie à haute valeur de |Z| qui auraient subi une forte correction injustifiée se

voient simplement subir une faible correction. Il s’agit là d’une méthode visant davantage à ne pas dégrader la résolution à basse énergie plutôt qu’à l’améliorer. La correction est de toute évidence dédiée à des énergies supérieures à une cinquantaine de keV.

Si la correction était appliquée exclusivement aux événements fiduciels de la région cen-trale, nous aurions à ce stade épuisé l’ensemble de l’information utile contenue dans les signaux vétos pour ce type d’application. Toutefois, on cherche ici à corriger la mesure en énergie pour l’ensemble des événements fiduciels. Nous avons vu, en figure 3.18, que pour une valeur de (Eia− Eic)/Eid donnée, on constatait une dispersion en (Eia + Eic)/Eid. Bien

qu’il n’y ait pas une simple relation de dépendance de (Eia + Eic)/Eid avec la position en R dans le détecteur, on s’attend à ce que des événements monoénergétiques de même valeur de Z = (Eia− Eic)/Eid mais de valeur différente en (Eia + Eic)/Eid ne donnent pas lieu

à la même mesure en énergie. Nous allons voir qu’il est ainsi possible d’améliorer encore davantage la précision de la mesure via l’utilisation du restant d’information sur le piégeage contenu dans (Eia + Eic)/Eid qui est la variable orthogonale à (Eia− Eic)/Eid.

On se propose de détailler la procédure de cette seconde correction en s’appuyant sur les graphiques de la figure 3.25. qui décrivent les différentes étapes de la méthode appliquée ici à la cathode fiducielle D. Comme précédemment, on subdivise les données en différentes plages de valeurs en Z. Pour chaque sous-jeu de données, on cherche la proportion α de signal en (Eia + Eic)/Eid qui additionnée à l’énergie Eid donne lieu à la meilleure résolution du pic à 356 keV. Le graphique en haut à gauche de la figure montre par exemple que pour le sous-jeu de données correspondant à −3, 3.10−3 < Z < 6, 1.10−3, Eid− 0.9 × (Eia + Eic)/Eid × Eid

permet d’obtenir une résolution de 7 keV là ou la simple utilisation de l’estimateur Eid donnerait lieu à une résolution de 9.5 keV. En procédant ainsi pour l’ensemble des j plages en Z, on obtient un jeu de valeurs (αj, Zj) que l’on ajuste via un polynôme gα(Z) d’ordre 2 tel qu’indiqué sur le graphique en haut à droite. On dispose, à ce stade, d’une variable temporaire tempEid, définie telle que :

tempEid = Eid + gα(Z)Eid (3.35)

Cet estimateur présente ainsi pour une valeur quelconque de Z donnée une meilleure résolu-tion que le simple estimateur Eid. Toutefois, la résolurésolu-tion se retrouve dégradée d’une manière générale pour le jeu de données dans son ensemble, car la largeur du pic est optimisée sans préserver sa position moyenne à 356 keV.

On applique alors le même type de procédure que pour la première correction décrite. On détermine la position des pics à 356 keV de l’estimateur tempEid pour les différentes

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Figure 3.25: Principe de la correction de la mesure en énergie utilisant l’intégralité de

l’information contenue dans les signaux vétos. La méthode est ici appliquée à la voie D. Voir texte pour les explications détaillées.

3.4. APPLICATIONS DU MODÈLE AUX DONNÉES 113 plages de Z et on procède à un ajustement de leur distribution via la fonction f (Z) (eq 3.33). L’énergie corrigée via cette nouvelle procédure est alors donnée par :

Eidcorrected2 = 356

f (Z) × tempEid (3.36)

On peut voir, sur les deux graphiques du bas, à la fois que ce nouvel estimateur de l’énergie ne présente plus de dépendance en Z et qu’il permet de passer d’une résolution de 11.2 keV à non pas 8.9 keV mais 7.3 keV (soit∼ 35% d’amélioration). L’application de cette nouvelle

correction à l’anode fiducielle B permet également d’obtenir une meilleure résolution et de passer ainsi de ∼ 20 keV à 7.1 keV (soit ∼ 65% d’amélioration).

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Figure 3.26: Spectres en énergies corrigées en exploitant l’intégralité de l’information

conte-nue dans les signaux vétos. Les distributions des voies B et D corrigées sont respectivement représentées en bleu clair et violet. La distribution obtenue via la moyenne des deux distri-butions individuelles est représentée en orange. Les trois spectres sont à ce point identiques qu’il est presque impossible de les distinguer.

Lors de l’analyse des données pour la recherche de WIMPs, l’estimateur EFID= 0.5(Eib + Eid) a toujours été privilégié car les signaux des deux voies individuelles sont sommés tandis que le bruit de l’électronique est additionné de manière quadratique (en l’absence de bruit corrélé entre les deux voies). Cet estimateur permet ainsi de gagner généralement un facteur2 en résolution ligne de base. On est tenté de définir EFIDcorrected2= 0.5(Eibcorrected2+ Eidcorrected2) pour voir le gain potentiel en résolution associé à ce nouvel estimateur à haute énergie. Pour cela, on représente en figure 3.26 les spectres en énergies corrigées des voies individuelles ainsi que de la moyenne des deux : EFIDcorrected2. On constate que les résolutions obtenues sont toutes quasi strictement identiques. Il s’agit là d’un effet dû à la conservation de la charge. Comme nous l’avons évoqué au début de ce chapitre, les 4 mesures en ionisation étant reliées par la relation de conservation de la charge, on dispose de seulement 3 mesures

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Figure 3.27: Spectres en énergie de la cathode fiducielle D avant et après correction, obtenus

avec les données du Run308 de recherche de WIMPs. Les pics clairement identifiés sont indiqués sur la figure du bas.

3.4. APPLICATIONS DU MODÈLE AUX DONNÉES 115 indépendantes. L’énergie corrigée étant une combinaison d’une voie fiducielle et de deux voies vétos, l’intégralité de l’information est contenue dans cet estimateur. Il n’y a donc pas à proprement parler deux mesures de l’énergie corrigée individuelles mais simplement une mesure de l’énergie corrigée qui peut être obtenue indifféremment via l’application de la correction à la voie B ou D.

La correction de la mesure n’améliore véritablement la résolution qu’à relativement haute énergie. Il est difficile de donner une valeur précise de l’énergie à partir de laquelle cette correction offre un gain notable car sa détermination nécessite des pics visibles pour lesquels comparer les résolutions avant et après correction. On note que la correction tend davantage à dégrader légèrement la résolution des pics cosmogéniques aux alentours de 10 keV tandis que le pic caractéristique du 212Pb à 239 keV est clairement plus visible après application de la correction comme il est possible de le voir sur la figure 3.27. On visualise, sur cette dernière, les spectres en énergie de la cathode fiducielle D avant et après correction pour les données de recherche de WIMPs. On constate que les pics caractéristiques des éléments de la chaine de l’238U et du 232Th sont bien plus visibles, à tel point qu’en l’absence de correc-tion, il était impossible d’affirmer la présence d’un pic à 336 keV caractéristique de l’228Ac. Cette amélioration visible de la résolution à de hautes énergies confirme également que la procédure de correction conserve bien la linéarité de la mesure.