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Effets verticaux s’agissant du marché de la publicité télévisée

C. Effets verticaux

3. Effets verticaux s’agissant du marché de la publicité télévisée

357. Sur le marché de la publicité télévisée, GCP est présent par l’intermédiaire de sa filiale Canal+ Régie qui commercialise les espaces publicitaires de l’ensemble de ses chaînes. Les espaces publicitaires des chaînes Direct 8 et Direct Star sont pour leur part commercialisés par la société Bolloré Intermedia. A l’issue de l’opération notifiée, l’activité de cette dernière sera intégrée dans le périmètre de Canal+ Régie. La part de marché qui sera ainsi détenue par la nouvelle entité est présentée dans le tableau suivant :

Part d'audience Investissements Publicitaires bruts

Valeur (K€) PDM

Groupe TF1 29,4 % 4 103 346 46,4 %

Groupe M6 13,4 % 1 952 606 22,1 %

Groupe France

Télévision 31,6 % 666 460 7,5 %

GCP 3,8 % 451 763 5,1 %

Direct 8 2 % 191 392 2,2 %

Direct Star 1 % 34 032 0,4 %

Total GCP 6,8 % 677 187 7,7 %

358. A l’issue de la concentration, la position de GCP sur le marché de la publicité restera relativement faible (7,7 %), sans commune mesure avec celle des groupes TF1 (46,4 %) et M6 (22,1 %).

359. Toutefois, certains opérateurs interrogés dans le cadre du test de marché se sont inquiétés de la possibilité que pourrait avoir la nouvelle entité de bénéficier d’un accès privilégié à la ressource publicitaire compte tenu des liens capitalistiques qui existeront entre Vivendi et Bolloré à l’issue de l’opération. TF1 relève ainsi que « Bolloré Intermedia dispose (…) d’un avantage concurrentiel dans la mesure où le groupe Bolloré contrôle Havas et qu’il est l’actionnaire de référence de Aegis (dont il détient 27 % du capital)200, deux des plus importantes agences médias actives en France. Ces agences ont un rôle de prescripteur auprès des annonceurs en ce sens qu’elles recommandent aux annonceurs d’investir sur une chaîne plutôt qu’une autre. A l’issue de l’opération, le groupe Bolloré deviendra un actionnaire de référence de Vivendi. Il sera alors incité à faire bénéficier GCP de ses relations privilégiées avec Havas et Aegis pour favoriser la vente d’espaces publicitaires sur Direct 8 et Direct Star ainsi que sur les autres chaînes de GCP, ceci au détriment des chaînes concurrentes. A noter également qu’à la connaissance de TF1, Vivendi recourt déjà exclusivement à l’agence Havas pour l’achat de ses espaces publicitaires »201.

360. Ces inquiétudes sont partagées par les autres opérateurs de chaînes en clair. France Télévisions observe notamment qu’« en 2010, les chaînes Direct 8 et Direct Star appartenant au groupe Bolloré semblent avoir été surinvesties par le groupe Havas Média par rapport aux autres chaînes. En 2010, alors que Direct 8 pesait 10 % du marché publicitaire des chaînes de la TNT, cette part de marché s’élevait à 20,2 % en ne tenant compte que des investissements réalisés par Havas Média. Pour les cinq premiers mois de 2011, ces chiffres monteraient, respectivement, à 10,7 % et 17,4 %. Environ 36,8 % des investissements bruts sur Direct 8 provenaient en 2010 de MPG, l’agence principale d’Havas Média, alors que MPG n’achetait sur la même période que 15,4 % des investissements totaux des chaînes de la TNT. Par conséquent, à l’issue de l’opération, l’ensemble des chaînes éditées par GCP bénéficieront de cet avantage »202.

200 Il convient cependant de noter que le groupe Bolloré a récemment annoncé la cession de sa participation dans Aegis.

201 Réponse au test de marché, question n° 56.

202 Réponse du groupe France Télévisions au test de marché, question n° 61.

361. En effet, sur le marché de la publicité télévisée, la quasi-totalité des annonceurs ont recours aux services des agences médias pour leur relation avec les régies. Les agences médias appartiennent à de grands groupes de communication internationaux, comprenant souvent également des agences de publicité et de relations publiques. Parmi ces acteurs figure le groupe Bolloré qui, avec Havas Médias représente une part du marché de la publicité télévisée de l’ordre de 16 %203.

362. Cependant, compte tenu de la position occupée par les groupes TF1, M6 et France Télévisions en termes d’audience et d’investissements publicitaires, il semble peu probable que les agences liées au groupe Bolloré soient incitées à exclure ces chaînes historiques du périmètre de leur activité publicitaire au profit des chaînes de GCP, au motif que le groupe Bolloré se retrouvera actionnaire minoritaire de Vivendi à l’issue de la concentration. Le test de marché mené au cours de l’instruction confirme par ailleurs que les chaînes gratuites historiques demeurent aujourd’hui incontournables sur le marché de la publicité pour les annonceurs.

363. Il convient également d’ajouter que, comme le relèvent certaines réponses du test de marché notamment de la part de centrales d’achats, l’arbitrage entre différentes régies publicitaires s’effectue pour un annonceur en fonction de la catégorie de public ciblé. Or l’objectif de GCP serait de faire de Direct 8 une chaîne destinée spécifiquement à la cible dite « CSP+ », contrairement aux chaînes historiques qui visent un public plus large et moins différencié. Par conséquent, un large report des achats d’espaces publicitaires par les agences média dans lesquelles le groupe Bolloré détient des participations vers Direct 8 risquerait de se heurter à la cohérence de la politique marketing des annonceurs que ces agences représentent204. 364. Par ailleurs, les agences média dans lesquelles le groupe Bolloré détient des participations

jouent un rôle d’intermédiaire entre, d’une part, leurs clients annonceurs et d’autre part les régies publicitaires. Dès lors, une stratégie qui consisterait pour ces agences à acheter de manière disproportionnée des espaces publicitaires sur les chaînes Direct 8 et Direct Star, dont les audiences sont très inférieures à celles de la plupart des chaînes en clair, paraît peu vraisemblable. Une telle stratégie serait en effet incompatible avec les intérêts des clients annonceurs qui risqueraient alors de se détourner des agences concernées. Il apparaît improbable que ces agences encourent un tel risque vis-à-vis de leurs clients pour favoriser le groupe Vivendi.

365. Enfin, il convient de rappeler que, alors que le groupe Bolloré détenait le contrôle exclusif des chaînes Direct 8 et Direct Star avant la concentration, celle-ci réduira sa participation dans les chaînes cibles à une portion minoritaire. En l’absence d’autres éléments susceptibles d’influer sur les décisions stratégiques du groupe Bolloré, il est donc improbable que la concentration renforce ses incitations à surinvestir Direct 8 et Direct Star.

366. Compte tenu de ce qui précède, l’opération notifiée ne serait pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la publicité par le biais d’effets verticaux.

203 Voir la décision n° 10-DCC-11 précitée, §411.

204 Le même raisonnement est applicable à Direct Star, dans la mesure où GCP souhaite focaliser la chaîne sur un public dont la tranche d’âge correspondrait aux « 15-35 ans » (voir procès verbal d’audition de M. Belmer du 10 mai 2012).