3. Contaminants organiques et biologiques étudiés
3.1. Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAPs)
3.1.4. Effets toxiques chez les organismes aquatiques
3.1.3. Contamination des organismes vivants et des réseaux trophiques
L’accumulation de composés hydrophobes tels que les HAPs varie selon leur coefficient de
partage octanol/eau et leur masse moléculaire. L’accumulation des HAPs est également gouvernée
par la position des organismes dans la colonne d’eau. Les organismes au contact du sédiment ont
tendance à accumuler des HAPs de masse moléculaire élevée. Les processus de biotransformation
jouent également un rôle primordial dans l’accumulation de ces composés. Il apparaît notamment
que les moules accumulent des composés de haute masse moléculaire contrairement aux poissons
qui possèdent des capacités de biotransformation bien supérieures. Enfin, la position des espèces
dans la chaîne trophique joue également un rôle non négligeable. En effet, des études ont
démontré que le crabe accumule des HAPs de masses molaires plus faibles que les mysides ou
encore les euphausiides (Baumard et al, 1998).
3.1.4. Effets toxiques chez les organismes aquatiques
La toxicité des HAPs en milieu aquatique dépend de leur biodisponibilité et de leur facteur
de bioaccumulation ou de bioconcentration au sein des organismes. Les effets biologiques des
HAPs peuvent également varier selon l’isomère considéré.
Toxicité aiguë
La toxicité aiguë des HAPs est principalement due à leur effet narcotique. Les HAPs sont
parmi les contaminants les plus toxiques dans l’environnement aquatique, notamment par leurs
propriétés mutagènes et carcinogènes (Shaw & Connell, 1994). Des CL
50ont été enregistrées chez
plusieurs espèces de vertébrés et d’invertébrés pour différents composés et figurent dans le tableau
6. Des CL
50, 48 heures ont été obtenues pour différentes espèces exposées à des HAPs
comprenant entre 2 et 5 cycles aromatiques. Chez les vertébrés, des CL
50de 0,241 et 0,071 mg.L
-1ont été enregistrées chez le poisson de lait Chanos chanos lors d’exposition respectivement à
l’anthracène et au benzo(a)pyrène (Palanikumar et al, 2012). Chez les invertébrés, des CL50, 48
heures ont été obtenues chez les Daphnies, Daphnia magna et Daphnia pulex. Dans le cadre
d’exposition de Daphnia magna à l’acénaphtène, une CL
50, 48 heures de 41000 µg.L
-1a été
enregistrée (Leblanc, 1980). Des CL
50, 48 heures de 4100, 2160, 3400 et 4663 µg.L
-1ont été
également obtenues lors d’exposition de Daphnia pulex au naphtalène (Crider et al, 1983 ;
Milleman et al, 1984 ; Geiger & Buikema, 1981 ; Smith et al, 1988). En parallèle, une CL
50, 48
heures de 10 µg.L
-1a été observée dans le cadre d’une exposition de Daphnia pulex au naphtalène
(Trucco et al, 1983). Enfin, des expérimentations ont également portées sur les copépodes.
Notamment, des CL
50, 48 heures de 0,422 et 0,89 mg.L
-1ont été obtenues respectivement pour
Acartia tonsa et Robertsiona propinqua lors d’exposition au phénanthrène (Bellas & Thor, 2007 ;
Stringer et al, 2012) et à 25,3 µg.L
-1pour Eurytemora affinis lors d’une exposition au B(a)P
(Forget-Leray et al, 2013).
Toxicité chronique
La toxicité chronique dépend essentiellement de la structure du composé et de sa
métabolisation. Deux voies de métabolisation des HAPs ont été mises en évidence chez les
vertébrés i.e. la mono-oxygénation et l’oxydation mono-électronique via des mono-oxygénases à
cytochrome P450. Les capacités de biotransformation des HAPs par les invertébrés sont, quant à
elles, très variables d’un taxon à l’autre, et d’une espèce à l’autre, de faibles pour les mollusques à
élevées pour certains crustacés (Jorgensen, 2010). Le potentiel immunotoxique et génotoxique (via
la formation d’adduits à l’ADN) des HAPs a été identifié à la fois chez les poissons et chez les
mollusques (Reynaud & Deschaux, 2006 ; Wootton et al, 2003). Les HAPs sont également connus
pour induire des effets sur la reproduction, notamment, démontré chez les poissons comme le
choquemort Fundulus heteroclitus (Wassenberg et al, 2002). De nombreux effets sub-létaux des
HAPs sur divers organismes ont été mis en évidence. Chez les poissons, notamment chez la perche
de mer Sebastes Schlegeli (Hilgendorf) et le bar Lateolabrax japonicus, le BaP induit un effet sur la
durée de développement (Jifa et al, 2006 ; Kim et al, 2008).
Chapitre 1
Tableau 6 : CL50 relevées dans la littérature chez différents organismes aquatiques lors d’exposition aux HAPs. (a 24 h, b 48 h, c 72 h, d 96 h).
Nom Commun Espèce CL50 (mg.L-1) HAPs Références Vertébrés
Poisson lait Chanos chanos 0,633 a Anthracène Palanikumar et al, 2012
0,088 a Benzo(a)pyrène Palanikumar et al, 2012
0,241b
Anthracène Palanikumar et al, 2012
0,071b Benzo(a)pyrène Palanikumar et al, 2012
0,031d Anthracène Palanikumar et al, 2012
0,014d Benzo(a)pyrène Palanikumar et al, 2012
Truite Salmo trutta 580 d (µg.L-1) Acenaphtène Holcombe et al, 1983
Tête de boule Pimephales promelas 1730 d (µg.L-1) Acenaphtène Geiger et al, 1985
Invertébrés
Copépodes (adultes) Acartia tonsa 0,422 b Phenanthrène Bellas & Thor, 2007
Robersiona propinqua 0,89 b Phenanthrène Stringer et al, 2012
Quinquelaophontes sp 0,75 c Phenanthrène Stringer et al, 2012
Oithona clavisae 0,522 b Phenanthrène Barata et al, 2005
Palaemonetes pugio 0,36 c Phenanthrène Unger et al, 2007
Eurytemora affinis 0,025b Benzo(a)pyrène Forget-Leray et al, 2013
Copépodes (nauplii) Nitrocra lacustri 71 d (µg.g-1) Phenanthrène Lotufo & Fleeger, 1997
Shizopera knabeni 84 d (µg.g-1) Phenanthrène Lotufo & Fleeger, 1997
Eurytemora affinis 0,045d Benzo(a)pyrène Forget-Leray et al, 2005
Mysides Americamysis bahia 545 b (µg.L-1) Acenaphtène Thursby et al, 1989
Daphnie Daphnia magna 41000 b (µg.L-1) Acenaphtène Leblanc, 1980
1000 d (µg.L-1) Naphtalène Trucco et al, 1983
Daphnia pulex 10 b (µg.L-1) Benzo(a)anthracène Trucco et al, 1983 4100 b
(µg.L-1
) Naphtalène Crider et al, 1983
2160 b (µg.L-1) Naphtalène Milleman et al, 1984
5 d (µg.L-1) Benzo(a)pyrène Trucco et al, 1983
9 d
(µg.L-1
) Benzo(a)pyrène Kagan et al, 1985; 1987
3400 b (µg.L-1) Naphtalène Geiger et Buikema, 1981