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Effets physiopathologiques du NO : rôle du péroxynitrite

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Ainsi, le NO est un messager intercellulaire omniprésent au niveau pulmonaire, impliqué dans de nombreux processus physiologiques. Quoique le NO ait souvent été décrit comme étant très réactif et toxique, ce n‘est pas le cas. L‘inhalation de NO est recommandée pour traiter l‘hypertension pulmonaire persistante chez les nouveaux nés. De même, le NO peut être produit pendant 80 ans par les neurones dans le cerveau humain sans induire aucune toxicité. Paradoxalement, la production de la même molécule peut devenir hautement délétère pour les mêmes neurones en quelques minutes lors de situation pathologiques survenant après une ischémie. Comment cela est-il possible ? La réaction du NO avec l‘anion superoxide (O2-)

conduisant à la production de péroxynitrite (ONOO-) est un élément clé pour comprendre ces rôles contrastés du NO en physiologie et pathologie. Ce mécanisme semble particulièrement important au cours des pathologies respiratoires.

4.4.1. Définitions

Nitration : réaction chimique qui permet d‘introduire un ou plusieurs groupements nitro –NO2 dans une molécule. Ainsi la nitration de la tyrosine est une modification covalente de la protéine correspondant à l‘addition d‘un groupement –NO2 à proximité du groupe hydroxyl sur l‘anneau

aromatique des résidus tyrosine. La nitration de la tyrosine induit une modification de la structure et de sa fonction de la protéine.

Nitrosylation : modification protéique au cours de laquelle un groupe nitrosyl (R-N=O) est ajouté post-translationnellement à la protéine. La S-nitrosylation est une réaction biologique importante du NO ; elle correspond à la conversion d‘un groupe thiol, incluant les résidus cystéines des protéines, pour former du S-nitrosothiols (RSNOs).

4.4.2. Toxicité du NO

A forte concentration, le NO produit par iNOS possède une activité cytotoxique. L‘exemple le plus représentatif en conditions physiologiques de cette activité cytotoxicique est l‘implication du NO dans le killing des pathogènes par les macrophages (285) mais celle-ci participe également à de nombreuses situations pathologiques aiguës et chroniques. De même, il a été montré l‘importance de cette voie sur la dysfonction diaphragmatique au cours du sepsis dans un modèle animal (286) et chez l‘homme (287).

L‘implication des NOS et du NO a été démontrée dans plusieurs maladies chroniques dégénératives. On peut citer l‘insuffisance cardiaque, l‘athérosclérose, la maladie d‘Alzheimer, la sclérose latérale amyotrophique, la maladie de Parkinson (243).

4.4.2.1. Mécanisme de la cytotoxicité du NO : le péroxynitrite

La réaction du NO avec l‘anion superoxide (O2-) pour former le péroxynitrite (ONOO-), un très

puissant oxydant, est l‘élément clé pour comprendre le rôle contrasté du NO en physiologie et en pathologie (figure 5).

Ni l‘anion superoxide ni le NO ne sont particulièrement toxiques in vivo puisqu‘il existe des moyens efficaces pour réduire leur accumulation. L‘anion superoxide est rapidement dégradé par les superoxides dismutases (SOD) qui sont présentes dans les mitochondries, le cytoplasme et le compartiment extra-cellulaire. Le NO est évacué par une diffusion passive vers les globules rouges où il est converti en nitrate par sa réaction avec l‘oxyhémoglobine.

Quand le NO et l‘anion superoxide sont produits à proximité, une augmentation modeste de NO et d‘anion superoxide d‘environ 10 fois chacun multiplie par 100 la formation de péroxynitrite. Dans les situations inflammatoires, une augmentation d‘un facteur 100 de la production d‘anion superoxide et de NO peut être observée, d‘où des productions très importantes de péroxynitrite (243). Le NO amplifie de plus cette réaction en inhibant la chaîne respiratoire mitochondriale ce

oxydase (Cox1), avant leur transfert à l‘O2 comme accepteur final. Cela aboutit à une production accrue d‘anion superoxide et de fait de péroxynitrites (288).

La réaction du NO avec l‘oxygène produit les composés N2O3 et N2O4 dégradés

secondairement en nitrates et en nitrites. La réaction du NO avec l‘anion superoxide pour produire du péroxynitrite serait prioritaire par rapport à la réaction du NO avec l‘oxygène (289).

Figure 5: Nitric oxide (NO) et ses dérivés. iNOS = NO synthase inductible.

Les cibles moléculaires du péroxynitrite sont les lipides, les acides nucléiques et les protéines. La péroxidation des lipides a surtout une importance au niveau des membranes biologiques dont elle augmente la perméabilité (243). Au niveau de l‘ADN, la réaction de la guanine avec les péroxynitrites produit la 8 oxo-guanine impliquée dans les processus de mutagénèse et de carcinogénèse (290).

L‘interaction du péroxynitrite avec les protéines a été la plus étudiée. La dégradation du péroxynitrite donne le radical hydroxyl (OH) et le dioxyde d‘azote (NO2) qui réagit avec les résidus tyrosine des protéines pour produire de la 3-nitrotyrosine. La nitration de la tyrosine modifie la structure et la fonction de la protéine. Par exemple, la nitration du résidu tyrosine de la Mn-SOD mitochondriale induit une inactivation complète de cette enzyme (291), diminuant la dégradation de l‘anion superoxide et favorisant encore la génération de péroxynitrites dans les mitochondries (figure x). NO ONOO- (péroxynitrite) 3-nitrotyrosine N O2- (nitrite) NO3- (nitrate)

iNOS

L-arginine L-citrulline Oxidation de l’ADN Péroxidation des lipides O2- (anion superoxide) Formule du péroxynitrite

4.4.2.2. Conséquences de la nitration des protéines

Une implication de la nitration des protéines dans l‘inflammation, la dégradation de la matrice extracellulaire et la mort cellulaire a été démontrée in vitro, chacun de ces processus étant impliqués dans le développement l‘emphysème.

L‘effet pro-inflammatoire de la nitration des protéines passe par l‘activation de NFκB, un facteur de transcription crucial dans l‘activation des gènes de l‘inflammation. Matata et al. rapportent une activation de NFκB dans des cellules mononuclées exposées à de faibles doses de péroxynitrites, suivie de la production de TNF-α et d‘IL-6. La nitration de la tyrosine-42 sur IκB pourrait augmenter sa dégradation et libérer ainsi NFκBn (292).

La nitration des MMP induit l‘activation de MMP-9 dans les neurones (293) et de MMP-2 dans les cellules musculaires lisses vasculaires (294). Ainsi, la toxicité des péroxynitrites sur le myocarde implique l‘activation de MMP-2 (295). De même, comme les radicaux libres de l‘oxygène, la nitration de la tropoélastine empêche l‘assemblage des fibres élastiques (95). La nitration des protéines a aussi été impliquée dans les phénomènes de mort cellulaire programmée et d‘apoptose. La nitrosylation du cytochrome c entraînerait sa libération des mitochondries vers le cytosol, activant la voie intrinsèque de l‘apoptose. Cependant, le rôle de la nitrosylation protéique est controversé dans l‘apoptose, la nitrosylation des caspases pouvant avoir des effets pro- ou anti-apoptotiques (296).

Synthèse 6 : Le NO produit par les NOS est un messager intercellulaire omniprésent au niveau pulmonaire, impliqué dans de nombreux processus physiologiques. Il régule notamment le développement pulmonaire, la circulation pulmonaire, le tonus musculaire lisse bronchique et module la sécrétion de mucus. Cependant, il est aussi consommé dans la réaction conduisant la formation de peroxynitrites à partir de l‘anion superoxyde et du NO. La nitration des protéines secondaire à la formation de peroxynitrite participe à de nombreux processus pathologiques et elle pourrait participer au déséquilibre de la balance protéase/antiprotéase, à l‘excès d‘inflammation et d‘apoptose induite par la fumée de cigarette et participant au développement de l‘emphysème. Il semble donc difficile de prédire le rôle des NOS et du NO lors de situation pathologique comme l‘emphysème.

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