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Effets anti-tumoraux in vivo

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PARTIE II. INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE

3. BISPHOSPHONATES ET TRAITEMENT DES METASTASES OSSEUSES

3.2. Les Bisphosphonates

3.2.4. Effets anti-tumoraux des BPs

3.2.4.2. Effets anti-tumoraux in vivo

Du fait de l’efficacité anti-tumorale des BPs in vitro, de nombreuses études ont été réalisées chez les animaux pour évaluer leur activité anti-métastatique et anti-tumorale in vivo (Clézardin et al., 2005; Stresing et al., 2007).

3.2.4.2.1. Effets dans les modèles animaux de métastases osseuses

De nombreuses études montrent que les bisphosphonates sont efficaces dans le traitement des métastases osseuses induites par différentes lignées humaines de myélome multiple, de cancers du sein, de la prostate, ou des poumons, et par les neuroblastomes (Tableau 4).

L’analyse histomorphométrique des métastases osseuses après traitement des animaux aux bisphosphonates montre une importante diminution du nombre d’ostéoclastes au voisinage des métastases osseuses et la présence d’ostéoclastes apoptotiques, indiquant donc que cette inhibition de la formation des métastases osseuses est la conséquence d’une inhibition de la résorption osseuse par les bisphosphonates. Toutefois, on peut observer que cette inhibition de la résorption osseuse s’accompagne d’une réduction significative de la masse tumorale présente au site métastatique (Hiraga et al., 2001; Peyruchaud et al., 2001; Sasaki et al., 1995). Cette activité anti-tumorale a alors été attribuée à la capacité des BPs à inhiber les ostéoclastes, et donc à réduire la libération de facteurs de croissance (à activité mitogène et/ou chimiotactique) de la matrice osseuse résorbée qui sont nécessaires au développement tumoral (Brown et al., 2004; Mundy et al., 2001). Les patients atteints de métastases ostéocondensantes présentant une élévation de marqueurs de la destruction osseuse (CTX urinaires et CTX sérique) en plus d’une élévation des marqueurs de la formation (phosphatase alcaline, propeptide C-terminal du collagène 1) (Garnero et al., 2000), il a été supposé que ce type de métastases est précédé d’une phase ostéolytique. Ainsi, en induisant une diminution du nombre d’ostéoclastes, le zolédronate et le minodronate sont aussi capables d’affecter le développement des métastases ostéocondensantes (Corey et al., 2003; Miwa et al., 2005). Par ailleurs, une étude sur 5 patients ayant un cancer de la prostate avec des métastases osseuses montre qu’une perfusion de 4 mg de zolédronate diminue de 22 à 53% les taux circulant de PSA ; cette diminution du développement tumoral est probablement la conséquence d’une inhibition de la résorption osseuse (Santini et al., 2003a; Santini et al., 2003b).

Toutefois, ces observations n’excluent pas la possibilité que les BPs agissent aussi directement sur les cellules tumorales au site osseux une fois qu’ils sont libérés de la matrice osseuse, puisque comme nous l’avons vu, ils ont la capacité d’inhiber la prolifération,

Tableau 4. Etudes de différents BPs dans des modèles murins de métastases osseuses.

a

Prév.: traitement préventif, Pall.: traitement palliatif. b

Les doses utilisées sont exprimées en µg ou mg/kg, en estimant le poids moyen des souris à 20g.

3.2.4.2.2. Effets dans les modèles animaux de tumorigenèse et de métastases dans les tissus mous

De nombreuses autres études expérimentales in vivo ont été réalisées afin de juger de l’activité anti-tumorale des BPs dans les tissus non minéralisés (Tableau 5) (Stresing et al., 2007).

Le risédronate, l’alendronate, l’ibandronate, et le zolédronate n’inhibent pas la croissance tumorale lorsque les cellules humaines de carcinome mammaire ou prostatique sont injectées en sous-cutané ou en orthotopique chez des animaux immunodéficients (Clézardin et al., 2003; Corey et al., 2003; Green, 2003). Le zolédronate ou l’ibandronate n’inhibent pas non plus la croissance des tumeurs mammaires dans le modèle orthotopique syngénique 4T1/luc (Hiraga et al., 2004; Michigami et al., 2002). Par ailleurs, le traitement

avec des BPs ne semble pas non plus diminuer le développement des métastases viscérales. Par exemple, l’ibandronate n’inhibe pas la formation des métastases pulmonaires induites par les cellules de carcinome mammaire 4T1 alors que dans les mêmes conditions expérimentales, la formation des métastases osseuses est inhibée (Hiraga et al., 2001). De plus, dans un modèle de métastases multiples, après injection i.v. de cellules de cancer de la prostate PC-3 ML, un prétraitement à l’alendronate avant l’injection des cellules induit une diminution de la formation des métastases osseuses alors qu’il y a une augmentation des métastases dans le péritoine et autres tissus mous (Stearns and Wang, 1996). L’absence d’efficacité anti-tumorale aux sites non osseux pourrait s’expliquer par la faible biodisponibilité de ces agents pharmacologiques au niveau des tissus non minéralisés, suite à leur accumulation rapide dans l’os. On observe ainsi chez les patients qu’après une administration de 4 mg de zolédronate (perfusion de 15 min), la concentration maximale plasmatique atteinte à la fin de la perfusion s’élève à environ 1 µM, puis diminue très rapidement. De plus, comme nous l’avons vu précédemment, in vitro cette concentration est compatible avec un effet sur l’adhésion ou l’invasion cependant, elle ne l’est pas avec un effet sur la prolifération ou la survie.

Toutefois, certaines études montrent au contraire que les BPs peuvent être efficaces dans le traitement des tumeurs ou des métastases dans des organes non calcifiés. Par exemple, Giraudo et coll. (2004) ont observé dans un modèle de souris transgénique de cancer du col de l’utérus que le zolédronate (100µg/kg/jour, s.c., pendant 6 semaines) réduit la progression des tumeurs, du fait d’une inhibition de l’angiogenèse tumorale. Cet effet serait dû à une diminution de la sécrétion et de l’activation de MMP-9 par le zolédronate au niveau des infiltrations macrophagiques (Giraudo et al., 2004). La MMP-9 libère le VEGF de la matrice extracellulaire et le zolédronate bloque donc la mobilisation de ce facteur pro-angiogénique. Il s’ensuit une augmentation de l’apoptose dans les cellules endothéliales au niveau des lésions tumorales, et dans les cellules tumorales (Giraudo et al., 2004). De même, le minodronate (5µg/souris/jour/i.p., pendant 40 jours) inhibe la tumorigenèse sous-cutanée de cellules de mélanome G361 chez la souris, en inhibant l’angiogenèse tumorale et l’infiltration des macrophages (Yamagishi et al., 2004). Par ailleurs, dans le modèle syngénique 4T1, l’injection répétée de fortes doses de zolédronate (25 ou 250 µg/kg, 1 ou 5 fois, en i.v.) réduit la formation des métastases spontanées dans les organes viscéraux (poumons et foie) et prolongent la survie des animaux (Hiraga et al., 2004). Au contraire, ces métastases aux poumons et au foie ne sont pas affectées quand une seule injection de zolédronate est utilisée. Ces observations suggèrent qu’un traitement plus fréquent est probablement nécessaire pour obtenir un effet anti-tumoral avec les BPs.

Tableau 5. Effets des BPs dans les modèles animaux de tumorigénèse et de formation des métastases dans les tissus non minéralisés.

Abréviations:

Iba, ibandronate ; Alen, Alendronate ; Min, minodronate ; Pam, pamidronate ; Ris, risédronate ; Zol, zolédronate.

a

toutes les doses sont calculées par souris, en estimant le poids moyen des souris à 20g. b

uniquement en protocole préventif c

Tous ces résultats montrent que l’activité anti-tumorale varie énormément en fonction du type de tumeur, du BP utilisé et des régimes d’administration utilisés. De plus, il semblerait qu’une administration plus fréquente des BPs permette une exposition plus longue des tissus mous à ces drogues, palliant ainsi aux faibles concentrations circulantes, et permettant un effet direct sur les cellules tumorales.

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