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Effet de l’interaction des dislocations sur l’écrouissage et l’activation des systèmes de glissement dans l’UO 2

Interactions des dislocations

4.5. Effet de l’interaction des dislocations sur l’écrouissage et l’activation des systèmes de glissement dans l’UO 2

4.5.1. Intégration dans le modèle _________________________________________________ 117 4.5.2. Simulations EF avec écrouissage _____________________________________________ 121 4.5.3. Conclusions et discussions _________________________________________________ 134

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4.1.

Motivation

Nous avons introduit dans le chapitre 3 un modèle de plasticité cristalline basé sur le glissement des dislocations dans l’UO2. Dans ce type de modèle se pose naturellement la question des interactions entre systèmes de glissement et donc entre dislocations. Il est alors préférable d’adopter une variable interne plus caractéristique de la microstructure que le glissement, et d’opter pour la densité de dislocations. En effet, les interactions entre dislocations gouvernent l’écrouissage et l’on peut utiliser le modèle de la forêt pour réaliser la transition d’échelle (équation (4.1)) des dislocations à l’écrouissage [Taylor (1934), Saada (1960)]. Ce modèle relie la contrainte d’écoulement τf à la densité

de dislocations ρf :

𝜏𝑓 = 𝛼𝜇𝑏√𝜌𝑓 (4.1)

avec μ le module de cisaillement du matériau et b la norme du vecteur de Burgers.

Le modèle de la forêt est valable pour les métaux cubiques à faces centrées (CFC) ou plus généralement quand l’effet de la contrainte de Peierls est faible. Le paramètre de couplage du modèle est le coefficient α qui donne la contrainte moyenne sous la résistance des jonctions. Les jonctions, crées par fusion de deux dislocations en une seule lorsqu’elles interagissent, entravent leur glissement. On peut obtenir  à l’aide de simulations de la Dynamique des Dislocations (DD) [Madec et al. (2002a)] qui donnent des résultats en bon accord avec l’expérience [Basinski et Basinski (1979)].

Bien que cette loi en racine carrée de la densité de dislocations soit exclusivement utilisable dans le régime athermique (voir section 0 page 27), elle est assez couramment utilisée dans le régime thermiquement activé proche de la température de transition (Ta) pour les cubiques centrés (CC) [Hoc et al. (2003)]) et pour les hexagonaux (HCP)

[Knezevic et al. (2013)]. Pour ces derniers, les systèmes du plan de base présentent une faible contrainte de Peierls effective comme les matériaux CFC tandis que celle des systèmes pyramidaux est dix fois plus forte. Dans ce cas, proche de Ta, une loi de

comportement athermique intégrant le modèle de la forêt est utilisée. Pour traduire des effets résiduels de l’activation thermique dans le modèle, une contrainte, qui dépend de la température, est ajoutée à l’équation du modèle de la forêt. Dès que cette contrainte n’est pas négligeable devant la contribution de la contrainte de la forêt, utiliser le modèle en question constitue une approximation assez forte.

En effet, l’écrouissage résulte des interactions entre dislocations, mais sa nature est différente suivant le régime considéré et la forme même de la loi d’échelle peut être modifiée [Rauch (1994), Tang et al. (1999)]. Pour autant, comme déjà indiqué, la forme en racine carrée est souvent utilisée hors de son strict domaine de validité (régime athermique) en raison de sa simplicité et si l’approche pour le matériau considéré reste

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très largement phénoménologique. Dans ce cas, le modèle est au moins partiellement ajusté sur l’expérience. Il faut alors veiller à ne pas trop s’écarter de la zone ayant servi à l’ajustement, sa capacité prédictive s’altère rapidement et d’autant plus vite que la contribution de l’activation thermique devient importante.

Dans le cadre de notre étude on cherche à incorporer des paramètres dont l’origine physique est clairement établie et à les calibrer de la façon la plus précise possible. Mais d’un autre côté en l’absence de certitude absolue concernant la mobilité des dislocations et avec la quasi absence d’informations concernant le glissement dans le cas des systèmes de mode {111}, il est malaisé voire impossible de construire un modèle d’écrouissage matriciel capable d’assurer la transition entre les différents régimes. Ce type de modèle reste encore un sujet d’étude pour des matériaux plus documentés comme la ferrite [Monnet et al. (2013)]. Ainsi, nous gardons la forme d’écrouissage la plus courante et simple possible afin d’essayer de calibrer les paramètres associés par DD quand cela est possible. Le modèle sera ensuite confronté aux résultats expérimentaux disponibles ce qui permettra d’évaluer a minima l’impact de l’approximation faite sur l’écrouissage. En effet, les données expérimentales sur monocristaux à 1600 K se situent dans le régime thermiquement activé cependant les systèmes ½<110>{100} sont proches de la température athermique de 1750 K. Notons que nous attachons une attention particulière à l’activation des différents systèmes qui, comme nous l’avons vu précédemment, est difficile à restituer parfaitement sur la base d’un simple modèle de glissement (voir chapitre 3).

Des données expérimentales à plus hautes températures sont disponibles pour des polycristaux. L’écrouissage est alors très proche de celui du régime athermique (en tout cas pour les systèmes ½<110>{100}), tandis que la présence des joints de grain et les accumulations de dislocations induites, renforcent l’importance de l’effet de la densité de dislocations. Concernant l’UO2, Sauter [Sauter (2001), Sauter et Leclercq (2003)] puis Pacull (2011) furent les premiers à intégrer les interactions des dislocations de plasticité dans des modèles cristallins appliqués aux polycristaux avec un couplage entre dislocations mobiles et obstacles. Leurs formulations visaient à restituer les pics de compression observés lors de compression sur pastille en ajustant les paramètres du modèle afin de décrire ce qu’ils pensaient être des avalanches de dislocations. Pour cela, ils ont ajusté le modèle pour qu’il y ait une augmentation de densité de dislocations mobile en début d’essais de compression. Par la suite, Soulacroix [Soulacroix (2014), Soulacroix et al. (2014)] a montré que ces pics de compression n’étaient pas liés aux avalanches de dislocations mais à un blocage des dislocations par migration de défauts ponctuels. D’autre part, il intégra ces interactions de dislocations en utilisant des coefficients d’interaction issus du cuivre, cependant son étude ne lui permis pas d’aller jusqu’à la description de l’effet Hall-Petch dans les polycristaux.

Notre étude est la première à porter sur l’effet des interactions entre dislocations à l’échelle du grain/monocristal d’UO2 en identifiant via une approche multi-échelle la

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force de ces interactions. Pour cela nous présentons dans un premier temps, ce qu’induisent les interactions entre dislocations en matière de durcissement. Nous introduisons, dans un deuxième temps, la méthode de simulation de la DD qui est utilisée pour calculer les coefficients de la matrice d’interaction comme cela est détaillé dans la troisième partie. En dernier lieu, ces coefficients sont intégrés dans le modèle de plasticité cristalline pour identifier leurs effets sur la réponse mécanique des monocristaux.