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2. CRITERE MULTIAXIAL DE FATIGUE PRENANT EN COMPTE LA TAILLE,

2.1. B IBLIOGRAPHIE

2.1.2. Effet de taille de fissure

Les travaux de Kitagawa et Takahashi [Kitagawa et al.,1976] ont permis de préciser le rôle des fissures sur la limite d’endurance d’un matériau. Les expériences suivantes ont été réalisées. Ces auteurs ont créé des défauts artificiels dans des éprouvettes en perçant des trous de diamètres et de profondeurs contrôlés à la surface de celles-ci (Figure 2-3.a). Chaque lot d’éprouvettes est ensuite soumis à une campagne d’essais de fatigue, afin d’établir une courbe de Wöhler pour chaque type de défaut artificiel (Figure 2-3.b). Le diagramme de Kitagawa-Takahashi est une représentation dans un diagramme log-log de la limite de fatigue en fonction de la taille du défaut initial. (Figure 2-3.c).

Figure 2-3 : Mise en évidence de l’effet de taille de défaut sur la limite de fatigue [Kitagawa, 1976] (a) : Eprouvette contenant un défaut de taille ai. (b) : Courbe de Wöhler et limite d’endurance σσσσi obtenue

pour cette éprouvette. (c) : Diagramme de Kitagawa : limite de fatigue σσσσi en fonction de la taille ai du défaut initial.

Lorsque le défaut artificiel est grand, la limite d’endurance mesurée évolue comme l’inverse de la racine carrée de la dimension caractéristique du défaut artificiel. En assimilant le défaut artificiel à une fissure, on montre alors qu’un critère de non-propagation pour K<KS, fondé sur la mécanique linéaire de la rupture permet de déterminer la limite d’endurance – KS étant

identifie un critère en contrainte (σ = σD) sur le matériau sain et que l’on tente de l’utiliser dans le domaine des grands défauts, on surestime alors fortement la limite d’endurance.

Ces observations ont été reproduites depuis par de nombreux auteurs, sur des matériaux métalliques variés et montrent que ce résultat est très général. Des expériences analogues ont notamment été reproduites pour des chargements biaxiaux [McEvily et al.,2005]. Des défauts artificiels surfaciques de tailles différentes ont été créés sur des éprouvettes en acier soumises à des chargements de traction, torsion et des chargements combinés. Un modèle de prévision de la limite d’endurance et de la durée de vie en fatigue en fonction de la taille de défaut est mis en œuvre. Il s’appuie sur la mécanique de la rupture avec une prise en compte du comportement élastoplastique, de la propagation des fissures courtes et de l’effet de fermeture de fissure. On constate que l’allure de la courbe représentant l’amplitude de la limite de fatigue en fonction de la taille de défaut correspond qualitativement à celle du diagramme de Kitagawa-Takahashi (Figure 2-4). On visualise bien un plateau pour les petits défauts qui correspond à une indépendance de la limite de fatigue à la taille de défaut dans ce domaine. La position de ce plateau est fonction du taux de biaxialité σ2/σ1 (σ1 et σ2 étant les composantes principales du tenseur des contraintes appliquées).

Figure 2-4 : Comparaison des limites de fatigues expérimentales et prédites par le modèle en fonction de la taille de défaut pour l’acier S35C [McEvily et al., 2005].

En plus d’un effet de taille, Billaudeau et col. [Billaudeau,2004] ont également montré que la forme des défauts avait son importance. Des défauts artificiels de taille et de géométrie variées (Figure 2-5) ont été créés à la surface d’éprouvettes en acier à basse teneur en carbone (C36). Afin de pouvoir comparer l’effet de ces différents défauts sur la limite de fatigue, leur taille est caractérisée par le paramètre area introduit par Murakami [Murakami,1986]. Des essais de traction et de torsion ont permis en premier lieu de mettre en évidence un effet de taille : en dessous d’une taille seuil (de 100µm en traction et 150µm en torsion), la limite de fatigue est indépendante de la taille de défaut et tend vers celle du matériau sain. Les défauts entraînent une localisation de l’endommagement et on peut donc calculer pour chaque géométrie de défaut un facteur de concentration de contrainte qui lui est propre. Les essais de traction mettent en évidence une influence de la forme du défaut sur la limite de fatigue lorsque ce facteur de concentration de contrainte est inférieur à 2 (Figure 2-5). Dans le cas contraire, dès que le Kt est supérieur à deux, la limite de fatigue est indépendante de la géométrie du défaut et dépend uniquement de sa taille.

Figure 2-5 : Evolution de la limite de fatigue en fonction du facteur de concentration des contraintes calculé pour différentes géométries de défauts, pour deux tailles différentes [Billaudeau et al.,2004].

Par ailleurs, les auteurs ont aussi comparé les mécanismes d’amorçage sur défaut à ceux observés sur matériau sain par microplasticité. Dans les deux cas, l’amorçage s’effectue pour le système de glissement où la contrainte de cisaillement est maximum. Après une brève propagation en stade I, la fissure bifurque rapidement pour se propager en stade II.

Les travaux de Brown [Brown,1986] permettent d’analyser l’effet de la taille de défaut sur la vitesse et sur le mode de propagation des fissures (Figure 2-6). L’amplitude des contraintes à iso-vitesse de propagation des fissures est tracée en fonction de la dimension des fissures dans un diagramme de Kitagawa-Takahashi. La droite seuil de non-propagation des grands défauts sur le diagramme de Kitagawa-Takahashi correspond ici à une vitesse de propagation des fissures proche de zéro (0,1 nm/cycle). La pente de cette droite dans le diagramme de Kitagawa-Takahashi est de -1/2. Lorsque la plasticité à l’extrémité de la fissure devient plus conséquente (EPFM), la pente de cette droite diminue jusqu’à obtenir une amplitude de contrainte à iso-vitesse de propagation quasiment indépendante de la dimension des fissures.

A l’autre extrémité du diagramme, pour les petites tailles de défauts, on constate que Brown propose des seuils différents de la limite de fatigue du matériau sain. Les travaux de Miller [Miller,1987] expliquent ce phénomène à partir des différentes barrières microstructurales qu’une fissure courte est amenée à franchir et qui peuvent stopper sa propagation. Ainsi pour les défauts microstructuralement petits, on peut avoir propagation de fissure pour des niveaux de contraintes inférieurs à la limite de fatigue, mais les fissures s’arrêteront sur des barrières microstructurales (joints de grain…) et il faudra augmenter le niveau de contrainte pour avoir de nouveau propagation. Avec de telles considérations, on peut définir la limite de fatigue

Figure 2-6 : Vitesses de propagation et modes de rupture dans un diagramme de Kitagawa [Brown,1986]

Synthèse sur l’effet de taille de défaut :

L’influence de la taille de défaut sur la limite de fatigue est un phénomène largement démontré. En fonction de la dimension des défauts, on distingue deux domaines pour la modélisation :

- Le domaine des très petits défauts, dans lequel prévalent les modèles en contrainte.

- Le domaine des grands défauts dans lequel prévalent les modèles fondés sur la mécanique de la rupture.

La plasticité au voisinage du défaut permet d’expliquer la transition entre ces deux domaines.