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1.4 Résultats expérimentaux

1.4.1 Echantillon de rhénium épitaxié

Nous présentons tout d’abord des résultats obtenus à basse température sur un échan- tillon de rhénium épitaxié préparé par B.Gilles11. La figure 1.14 montre une image de la

surface de 500 × 500 nm2 obtenue à 45 mK pour une tension de polarisation V

b = 1 mV.

Une représentation tri-dimensionnelle permet de mieux discerner les détails de la topogra- phie. On distingue nettement plusieurs monticules dont les flancs sont composés de terrasses

Figure 1.14 Image de la

surface du rhénium obtenue à 45 mK et où ont été effec- tuées les CITS présentées

figure 1.17.

mono-atomiques. La bonne qualité d’image prouve que la surface est conductrice et n’a pas été oxydée lors de son exposition à l’air.

10. Disponible sur l’électronique Matrix d’Omicron Nanotechnology.

Les mesures de spectroscopie tunnel ont révélé un état supraconducteur quasi-uniforme à la surface de l’échantillon. Nous présentons figure1.15, à gauche, l’évolution de la conduc- tance tunnel mesurée à une position donnée en fonction de la température. Pour toute la gamme de température entre 45 mK et Tc = 1.6 K (également mesurée en transport), la

forme de la densité d’états est bien décrite par la théorie BCS (lignes rouges). De même, la suppression progressive du gap supraconducteur jusqu’à Tc correspond à celle attendue

pour un supraconducteur conventionnel (figure 1.15, partie droite).

−10 −0.5 0 0.5 1 0.5 1 1.5 2 V b [mV] G [normalisée] 0 0.5 1 1.5 0 50 100 150 200 250 T [K] [µeV] (T=0) = 1.87 ´ kbTc

Figure 1.15 A gauche, évolution en température de la DOS entre 45 mK et Tc = 1.6 K mesurée

par spectroscopie tunnel (◦) et ajustements théoriques BCS (lignes rouges). À droite, évolution du gap en fonction de la température. La ligne rouge correspond à une fermeture de gap de type BCS

utilisant un ratio ∆(T =0)kBTc 6= 1.76.

Résolution énergétique L’ajustement théorique de la courbe la plus froide reproduit les

données expérimentales pour une température effective Tef f = 235 mK12 plus élevée que la

température du porte-échantillon indiquée par le thermomètre . Ceci traduit notre limite de résolution énergétique qui peut être définie par la largeur à mi-hauteur de la dérivée de la distribution de Fermi-Dirac (voir équation 1.8), soit 2 ln(3 + 2√2) kBTef f ' 3.5 kBTef f.

La température effective mesurée par spectroscopie tunnel de supraconducteurs constitue une mesure précise de la température du gaz d’électrons de la pointe [62]. L’écart avec la température du thermomètre peut traduire un problème de thermalisation électronique. En effet, à basse température, la thermalisation par les phonons est peu efficace rendant le gaz d’électrons particulièrement sensible au rayonnement thermique des parties chaudes du cryostat. D’autre part, l’écart entre la température effective et la température du thermo- mètre pourrait aussi résulter d’un bruit en tension aux bornes de la jonction réduisant la résolution énergétique, et produisant artificiellement l’effet d’un échauffement.

12. Pour comparaison, les températures effectives des STM en dilution développés par H. Courtois [96] et P. Joyez [85] sont de l’ordre de 150 mK et 45 mK respectivement.

Résultats expérimentaux

Imagerie de vortex L’association de la spectroscopie tunnel à basse température et du

mode balayage permet d’observer l’agencement des lignes de flux magnétiques induites par un champ magnétique appliqué à un supraconducteur. H.F. Hess et al. réalise en 1989, la première observation du réseau de vortex d’Abrikosov [2] dans la phase mixte d’un supra- conducteur de type II, NbSe2 [71].

La méthode d’imagerie du réseau de vortex s’appuie sur les propriétés spectrales particu- lières des vortex. En première approximation, le coeur d’un vortex est une zone métallique non supraconductrice autour de laquelle circule un supercourant permettant d’écranter le champ magnétique traversant le coeur. Du point de vue spectral, la DOS du coeur est celle d’un métal13, c’est-à-dire constante quelque soit l’énergie, alors qu’entre les vortex, la DOS

est celle d’un supraconducteur (voir figure 1.16).

Figure 1.16 Illustration de la mé-

thode d’imagerie du réseau de vor- tex par STM : (a) jonction SIN mesurant une DOS BCS lorsque la pointe tunnel est entre les vortex. (b) jonction NIN localisée au coeur d’un vortex. Le pic de cohérence est ici absent et la DOS est constante, indépendante de l’énergie. D’après [53].

Deux méthodes d’imagerie sont possibles. La première consiste à effectuer une CITS (cf. §1.3.2) afin d’obtenir une cartographie complète de la densité d’états (voir figure 1.17). La seconde méthode consiste à acquérir une image topographique standard en polarisant la jonction à une tension voisine du pic de cohérence de la DOS supraconductrice (eVb &∆).

C’est la détection de ce pic de cohérence, absent au coeur des vortex, qui permet d’obtenir un contraste révélant la présence de vortex sous la pointe. En enregistrant simultanément la topographie et la conductance différentielle mesurée par la détection synchrone, on obtient ainsi une seconde image donnant la hauteur relative du pic de cohérence (voir figure 1.18). En pratique, on utilise d’abord la seconde méthode, plus rapide, afin de visualiser l’agen- cement spatial des vortex. Ensuite, après le repérage précis de la position d’un vortex unique, on effectue une cartographie complète de la densité d’états qui permet d’obtenir des infor- mations sur les propriétés électroniques au niveau du coeur de vortex.

Nous présentons maintenant quelques exemples de mesures de spectroscopie tunnel ef- fectuées sous champ magnétique. Nous montrons ainsi sur la figure 1.17 (partie supérieure) des données issues de trois CITS, comportant chacune environ 5 000 spectres, et obtenues sur la même zone de 500 × 500 nm2 (voir topographie figure 1.14). Les valeurs de champ

magnétique perpendiculaire sont respectivement de 0 Oe (à gauche), 50 Oe (au centre) et 125 Oe (à droite).

Le code de couleur représente la valeur du rapport de conductance G(EF)/G(eV = ∆)

13. Cette approximation est valable dans les supraconducteurs en limite sale, i.e. ξ >> leoù leest le libre

parcours moyen élastique ou à des températures ne permettant pas de résoudre d’éventuels états de coeur de vortex [113].

qui est supérieur à un pour les zones supraconductrices ayant une densité d’états de type BCS et vaut un pour un régime métallique de densité d’états plate.

Figure 1.17 Panneau supérieur : cartographies du rapport de conductance G(Ef)/G(eV = ∆)

pour différents champs magnétiques. Panneau inférieur : spectres moyennés spatialement sur des couronnes circulaires de rayon croissant (cercles noirs).

A champ nul, l’échantillon présente une surface supraconductrice homogène, comme en témoigne la cartographie et les spectres représentés sur la figure 1.17, partie gauche14. La

supraconductivité est cependant affaiblie (zones rouges) à proximité d’impuretés présentes en surface et identifiables sur l’image topographique présentée en figure 1.14.

Pour H = 50 Oe, un vortex est détecté dans le secteur inférieur gauche de la zone étudiée (figure1.17, partie centrale). Les spectres moyennés spatialement sur des couronnes circulaires de rayon croissant et centrées sur le coeur du vortex montrent que la densité d’états évoluent continument depuis une densité d’états plate (au coeur) vers une densité d’états caractéristique d’un état supraconducteur affaibli (loin du coeur).

Pour H⊥ = 125 Oe, un second vortex est détecté dans le secteur supérieur droit de

la zone étudiée (figure 1.17, partie droite). En dehors des vortex, l’état supraconducteur est fortement affaibli. Les spectres correspondant aux couronnes circulaires centrées sur le deuxième vortex ont été décalés d’une valeur constante de 0.5 pour une meilleure visibilité, toutefois, l’échelle verticale totale est conservée.

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