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2. SYNTHÈSE DE LA LITTÉRATURE SUR LES TRAITÉS D’INVESTISSEMENT ET LES FLU

2.2. Les données utilisées

Afin d’évaluer l’impact des traités internationaux d’investissement, il est nécessaire d’accéder et d’exploiter des données qui varient selon plusieurs dimensions (compagnie/industrie/secteur, pays et temps). En général, deux sources principales de données sur les investissements directs étrangers sont habituellement identifiées :

(i) La balance de paiements. Celle-ci fournit des informations concernant les flux d’investissements directs étrangers entrants et sortants et les stocks d’investissements directs étrangers, i.e. issus de l’accumulation des flux d’investissements directs étrangers. De telles données sont disponibles au niveau des pays et elles varient dans le temps ;

35 (ii) Les opérations des compagnies multinationales dans leurs pays et à l’étranger. Le principal avantage de cette source est qu’elle permet la quantification de l’impact des traités d’investissement sur les investissements directs étrangers à un niveau désagrégé. Un exemple d’une telle base de données est la Micro-Database Direct Investment (MiDi), qui a été mise en place par la Deutsche Bundesbank, i.e. la Banque centrale allemande. Elle contient des informations concernant tous les investissements des ressortissants allemands – qu’ils soient des individus ou des compagnies – au-dessus d’un certain seuil (Egger et Merlo (2012)). Un autre exemple concerne les études liées aux opérations à l’étranger des compagnies multinationales suédoises, qui sont menées par le Research Institute of Industrial Economics11. Or ces

informations au niveau de l’entreprise restent rares et difficiles à obtenir. Une alternative à l’utilisation de données agrégées (pays) ou désagrégées (entreprise) est de prendre en considération les dimensions « industrie » ou « secteur ». Cela a été fait, par exemple, par Colen, Persyn et Guariso (2016). Ces auteurs étudient les investissements directs étrangers dans 13 pays de l’ancienne URSS et en Europe centrale et orientale, pour sept secteurs (agriculture, banque, immobilier, services, …) à partir de données recueillies par le Vienna Institute for International Economic Studies.

En général, la majorité des études empiriques exploite le premier type des données (pays), comme cela a été souligné dans un survey de la CNUCED (2014). Plusieurs institutions publient des données sur les flux d’investissements directs étrangers sur le fondement de la balance de paiements, comme par exemple le Fonds monétaire international (FMI), les Nations Unies (voir le World Investment Report publié annuellement par la CNUCED), ou encore l’OCDE. Des informations concernant les traités d’investissements, y compris l’accès aux textes des traités, sont disponibles notamment sur le International Investment Agreements Navigator de la CNUCED (nombre/types de traités, date de signature, date d’entrée en vigueur, date d’expiration, parties contractantes, et surtout les textes des accords). Selon les données disponibles sur l’International Investment Agreements Navigator, les traités bilatéraux d’investissements représentent depuis les années 1980 approximativement 90% de l’ensemble des traités d’investissement. Il en découle que la plupart des études appliquées se focalisent sur les traités bilatéraux d’investissements, et ne prennent pas en compte d’autres

36 traités avec dispositions ou chapitre sur les investissements. De plus, l’existence des traités bilatéraux d’investissement est habituellement prise en compte dans la modélisation grâce à une variable binaire 0-1 (1 si un traité bilatéral d’investissement existe entre deux pays, 0 dans le cas contraire), négligeant le contenu des traités, et la question de savoir si ce dernier peut affecter de manière significative les flux d’investissements directs étrangers. Comme cela a été mis en avant dans la section 1, les traités sont caractérisés par une hétérogénéité considérable dans leur contenu. Par exemple, certains traités d’investissement protègent les investissements prospectifs (« avant l’établissement ») pendant la phase d’« accès au marché », tandis que d’autres protègent seulement les investissements déjà admis dans un État d’accueil (« après l’établissement »). Jusqu’à maintenant, uniquement un petit nombre d’études a essayé de prendre en compte le contenu, ou certaines clauses « essentielles », des traités d’investissements.

Quelques problèmes doivent être résolus sur ce point. Le premier est comment traduire le contenu des traités d’investissement en variables, indicateurs quantifiables et opérationnels. Le second revient à s’interroger sur les protections des investissements qui présentent un intérêt pour la quantification. Lesher et Miroudot (2007) ont construit un indice lié aux dispositions sur les investissements dans des traités d’investissement régionaux, tandis que d’autres auteurs ont quantifié l’impact des traités en se focalisant sur un nombre limité de dispositions/clauses spécifiques. Par exemple, Berger et al. (2013) ont pris en compte la clause du traitement national. Auparavant, Berger et al. (2011) s’étaient focalisés sur les dispositions des traités bilatéraux d’investissement et l’accès à l’arbitrage investisseur-État. Plus récemment, Dixon et Haslam (2016) ont montré que la qualité de la protection d’investissement affectait les flux d’investissements directs étrangers en Amérique latine. Par ailleurs, certaines publications récentes ont montré que les traités de libre-échange avec chapitre sur les investissements ont un impact plus important sur les flux d’investissements directs étrangers que les traités bilatéraux d’investissements, voir notamment Dee et Gali (2005), Te Velde et Bezemer (2006) ou encore Medvedev (2012). Globalement, il est généralement admis que les traités qui affectent la gouvernance et les structures institutionnelles d’un État ont un impact important sur les flux d’investissements directs étrangers.

De plus, la plupart des études ne prennent pas en compte le statut du traité (signé, ratifié, entré en vigueur). En 2016, 79% des traités d’investissement étaient soit ratifiés, soit en

37 vigueur. Pour finir, deux éléments liés, et qui sont souvent ignorés, sont le nombre d’affaires en arbitrage investisseur-État et les motifs pour lesquels ces affaires sont portées au règlement des différends. La prégnance de cette relation pourrait avoir un impact sur la robustesse des traités d’investissement. Une exception notable est le papier de Skovgaard Poulsen et Aisbett (2013). Ces auteurs ont montré que la probabilité de signer de nouveaux traités bilatéraux d’investissement diminue de manière significative après l’initiation d’une requête contre un État donné. Il convient aussi de noter que l’impact d’un traité semble décroître dans le temps, voir Egger et Merlo (2007), Pinto (M.P.), Pinto (S.M.) and Stier-Moses (2010).

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