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5. Critiques et limites de l’étude

5.1 Les données de notre population : une population à risque ?

5.1.1 Les données maternelles

Voici en quelques mots la comparaison des données maternelles de notre population totale à celle de la population générale :

Si l’âge moyen des mères de notre population (évalué à 31 ans) est comparable à celui de la population française (30.1ans selon le bilan démographique de l’INSEE (105)), leurs gestité et parité à l’inverse, ne le sont pas du tout. En effet, si, dans les dernières études épidémiologiques, la littérature fait état d’une gestité moyenne en France de 1.8 et d’une parité de 2.9 (G1,8 P2,9) notre étude, quant à elle, et parmi notre population de 270 patientes, retrouve une gestité à 2.2 mais une parité moindre : à 0.7 (G2 ,2 P0,7). Il est donc à noter que notre échantillon semble avoir plus de

difficulté à mener une grossesse à bien et à voir naître un enfant viable par rapport à la population générale.

Concernant les antécédents maternels, selon les dernières données de l’assurance maladie, les fausses couches spontanées (FCS) concernent environ 15% des grossesses dans la population française, contre 46.3% dans la population de notre étude.(106) Il en est de même pour le taux de MFIU, 10,2 fois plus important dans notre population (9.2%) que dans la population française (0.9%) (107), et pour la consanguinité parentale (estimée à 16.7% dans la population étudiée contre 1 à 4% en France). Il est d’ailleurs établi qu’il existe un risque de maladie génétique réel chez les enfants nés d’une union entre membres apparentés (108) (109)

Témoin d’une probable infertilité plus prononcée dans notre population, 4.9% des grossesses en France ont été obtenues par procréation médicalement assistée (induction de l’ovulation, fécondation in vitro, insémination artificielle etc.) contre 6.7% dans notre population(110)

De même, le taux d’IMG dans la population française est estimé à 0.8% (6700 interruptions sur 820 000 naissances en France) soit 11.5 fois moins que dans notre population. (111)

Ainsi notre échantillon de population est constitué de mères d’âge moyen similaire mais aux antécédents plus lourds que dans la population de notre pays.

Alors que déduire de ces faits ? Il est évident que notre échantillon de population constitue un réel groupe à risque par rapport à la population française. Une population plus à risque de difficulté à l’obtention, au bon déroulement d’une grossesse, mais également à risque d’anomalie fœtale. Si notre étude semble plutôt rassurante quant au devenir néonatal des fœtus fémurs courts dans notre population dite « à risque », elle nous permet d’être encore plus optimiste quant à leur devenir dans une population dite « tout venant » de parents sans antécédents et de grossesses sans particularité, et donc lors de notre prise en charge en pratique courante.

En définitive les résultats obtenus dans cette étude sont à nuancer et à modérer d’autant plus en cas de prise en charge de grossesse d’évolution normale.

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5.1.2 Les données obstétricales et fœtales

Alors qu’en France, le taux d’amniocentèse national moyen est estimé à 10.8% (et jusqu’à 15% en fonction des centres)(112), parmi nos 270 patientes, 30% avaient bénéficié d’imagerie complémentaire (IRM ou TDM fœtale) et 59.1% d’une amniocentèse. Le pourcentage d’amniocentèses et d’examens complémentaires est donc nettement plus élevé que dans la population générale, car sur l’ensemble des grossesses à risque discutée collégialement au CPDPN, environ 1 sur 2 bénéficiera d’une amniocentèse et 1 sur trois d’une imagerie complémentaire. Il existe donc une réelle médicalisation des grossesses de notre population totale, rappelons-le, non sans danger pour la grossesse en cours.

En effet, si le risque malformatif fœtal dépend du terme de la grossesse et de la dose de rayonnement ionisant, il reste néanmoins réel, surtout entre le 9ème jour et la 9e semaine post- conception. Durant cette période, le risque malformatif est alors majeur, résultant de l’arrêt partiel ou total du développement d’un organe ou d’un membre faisant suite à la mort d’un groupe de cellules. Il n’est donc pas négligeable, et toute indication d’imagerie ionisante complémentaire doit être mesurée (113).

En France le taux d’induction du travail est évalué à 22.7% selon une enquête périnatale datant de 2010. Ce taux est largement inférieur à celui de notre population totale, qui atteint 62.2% des naissances. (114) Or, il est établi qu’il existe de réelles complications relatives à l’induction du travail (celui-ci est plus long, plus douloureux, on note une augmentation du taux de césariennes par échec de déclenchement, d’extractions instrumentales, de prolapsus du cordon, ruptures utérines, risque hémorragique, CIVD, HRP). Le taux élevé de déclenchement dans notre population totale est très certainement expliqué par la part plus importante de malformations fœtales, mais aussi d’IMG et de MFIU.

Enfin, c’est avec étonnement que nous avons constaté que le taux de césarienne dans notre population totale n’était que très légèrement moins importante que dans la population générale (19.6% contre 21%). Cela reste un chiffre élevé compte tenu du nombre élevé de MFIU, et d’IVG dans notre population.

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5.1.3 Les données néonatales

Le terme moyen de naissance dans notre population totale est estimé à 31,8SA. La plupart des nouveau-nés de l’étude sont donc nés prématurément. Néanmoins, dans ces données ont été comptabilisés les termes des IMG et des MFIU. Donc ces résultats sont à nuancer, et à interpréter avec recul.

A noter que le phénomène des nouveau-nés sans anomalie échographique anténatale naissant en moyenne au terme de 26.4SA pourrait peut-être être expliqué par la plus grande sévérité du pronostic de ces fœtus dont ce n’est pas l’anomalie échographique effective qui a mené leur discussion en CPDP mais bien la réalité d’une pathologie maternelle (antécédent, séroconversion, irradiation…)

Enfin, l’incidence des maladies génétiques dans notre population (14.8%) est nettement majorée par rapport à la population française (estimée par l’InVs et le registre des malformations à 0.7%).

Ainsi notre population étudiée apparait comme nettement plus à risque de malformation fœtale, en comparaison avec l’ensemble de la population française. Alors pourquoi avoir fait ce choix de population ?

Tout dossier de fœtus porteurs de fémur court, considéré donc comme à risque, sera systématiquement discuté collégialement au CPDPN. Hors, l’ensemble des dossiers traités au CPDPN de Nice concernent des patientes habitant Nice mais également sa région (patientes de Grasse, Cannes, Antibes,Fréjus, Monaco, Bastia mais également d’Italie). Si nous avions voulu être pragmatiques et sélectionner une population tout venant et non à risque (c’est-à-dire toutes les grossesses à risque ou non suivies entre le 1er janvier et le 30 juin 2013) il aurait été nécessaire de

recueillir toutes les données des grossesses en cours durant cette période dans l’ensemble de ce territoire. Outre les nombreux perdus de vue auxquels il aurait fallu s’attendre, nous nous serions exposés à un nombre important de données manquantes. Il s’agirait d’un travail pharaonique extrêmement long et difficile à réaliser. Notre population est certes à risque mais il s’agit d’une population facilement colligable, plus restreinte et dont les données sont bien standardisées, assez exhaustives et dont réunies par un même point d’ancrage : la grossesse à risque. Elle permet par ailleurs de répondre aisément à nos questions et d’en extrapoler les réponses en les adaptant à la population totale française.

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