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Section II – Le risque et le droit

Section 1 Division des risques bancaires

87. Typologie des risques bancaires et problématique des fonds propres229. Aux cours des

dernières décennies du XXe siècle, nous sommes entrés dans une « civilisation du risque » 230

ou de « société du risque »231 et le risque a envahi toutes les disciplines et tous les métiers. C’est notamment le cas du domaine bancaire où la gestion des risques semble être devenue le thème autour duquel gravitent tous les métiers de la banque, voire l’existence même des établissements bancaires. La complexité des produits et opérations bancaires, tout comme leur diffusion à grande échelle, ont déterminé les banques à mettre en œuvre des méthodologies de suivi et de gestion des risques de marchés et de crédit de plus en plus sophistiquées. Dans ce contexte, la problématique des fonds propres des grands établissements bancaires à dimension internationale s’est avérée cruciale, car liée au besoin de mesurer et gérer les risques afin de renforcer la solidité et la stabilité du système bancaire international. L’activité du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, institué en 1975 par les gouverneurs des banques centrales des pays du Groupe des Dix et rassemblant les autorités de contrôle des banques, s’inscrit dans cette logique économique de la détermination des besoins des fonds propres des banques internationales en regard de leurs principaux risques. Si à l’époque de l’Accord de Bâle I (1988)232, le risque de crédit était le seul risque reconnu par les autorités prudentielles

bancaires, le risque de marché233 et le risque opérationnel234 vinrent s’y ajouter

respectivement en 1993 et 2005.

88. Capital réglementaire et prise en compte des risques importants. L’idée centrale de

Comité de Bâle - autour de laquelle toutes les règles d’évaluation et de calcul du capital

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% 229%Voir%notamment%:%J.FPh.%KOVAR%et%J.%LASSERREFCAPDEVILLE,%Droit!de!la!régulation!bancaire,%RB%éd.,%2012,n°% 518%et%ss.%% 230 %L’expression%a%été%employée%par%P.%LAGADEC,%La!civilisation!du!risque,%Le%Seuil,%1981% 231%Voir%U.%BECK,%La%société%du%risque,%op.!cit.,%p.%36;%Pour%Beck,%qui%dit%modernisation%de%la%société%dit% accroissement%des%risques%inconnus.%«%Comment%les%risques%et%les%menaces%qui%sont%systématiquement% produits%au%cours%du%processus%de%modernisation%avancée%peuventFils%être%supprimés,%diminués,%dramatisés,% canalisés,%[…],%de%sorte%qu’ils%ne%gênent%pas%le%processus%de%modernisation….%»%% 232%Le%premier%Accord%de%Bâle%a%été%finalisé%en%1988%et%mis%en%application%au%1er%janvier%1993.%Il%a%été%élaboré% par%une%des%instances%de%la%Banque%des%Règlements%Internationaux%(BRI)%ou%en%anglais%Bank%of%International% Settlements%(BIS)%dont%le%siège%se%trouve%dans%la%ville%Suisse%de%Bâle.%Le%cœur%de%«%Bâle%I%»%est%le%calcul%d’un% nouveau%ratio%de%fonds%propres%réglementaires%en%fonction%des%actifs%bancaires,%pondérés%par%leur%risque%de% contrepartie.%«%Le%ratio%Cooke%»,%du%nom%du%président%du%Comité%de%Bâle%de%l’époque,%fixait%les%fonds%propres% réglementaires%des%banques%à%8%%minimum%des%actifs%pondérés.%La%pondération%du%montant%des%engagements% bancaires%était%fixée%de%0%%à%100%%en%fonction%de%la%nature%de%la%contrepartie%crédit%de%la%banque.%Le%Comité% de%Bâle%ne%disposant%pas%d’une%autorité%juridique%sur%ses%pays%membres,%ses%recommandations%ont%été% transposées%dans%l’Union%Européenne%sous%forme%de%directives%européennes,%qui%ensuite%ont%été%intégrées% dans%les%droits%nationaux.%Les%pays%concernés%:%La%Belgique,%le%Canada,%la%France,%l’Allemagne,%l’Italie,%le%Japon,% le%Luxembourg,%les%PaysFBas,%l’Espagne,%la%Suède,%la%Suisse,%le%RoyaumeFUni%et%les%EtatsFUnis.%;%Au%plan% juridique,%l’activité%réglementaire%du%Comité%de%Bâle%n’a%pas%de%force%exécutoire,%ses%recommandations%et% conclusions%faisant%partie%de%la%«%soft%law%»,%appellation%qu’on%donne%de%nos%jours%aux%engagement%non% contraignants%;%Voir%en%ce%sens%D.%BLACHE,%La!régulation!des!banques!de!l’Union!Européenne!face!à!la!crise,% préf.%de%TH.%FRANCQ,%éd.%Revue%Banque,%2009,%p.%121.% 233 Voir%infra%n°%94%F95.% 234%Voir%infra%n°92,%93,%228,%238.%

gravitent - est la suivante : tous les risques importants encourus par la banque doivent être pris en compte dans le cadre d’un processus d’évaluation des fonds propres. Les banques doivent disposer des fonds propres adéquats pour couvrir l’ensemble des risques liés à leurs activités. Même si le Comité admet que tous les risques ne peuvent pas être mesurés avec précision, un processus doit être élaboré pour les estimer, les surveiller et les gérer. Par conséquent, toutes les banques doivent examiner les risques de crédit, opérationnels, de marché et de liquidité, sans qu’il s’agisse d’une liste exhaustive.

§1. Le risque de crédit

89. Notion. Le risque de crédit est la forme la plus connue du risque sur les marchés de

capitaux et probablement le principal risque pour une banque. Il résulte de l'incertitude quant à la possibilité ou la volonté des contreparties ou des clients de remplir leurs obligations. La littérature spécialisée le défini comme étant « le risque de défaut de remboursement de

l’emprunteur, mais c’est aussi le risque que la valeur d’un actif financier varie en raison d’événements particuliers affectant la solvabilité potentielle de l’emprunteur »235. Cependant, pour comprendre la notion telle qu’elle est consacrée par le Comité de Bâle et par les directives européennes relatives au capital réglementaire, il convient de distinguer les pertes attendues des pertes inattendues. Les premières ne constituent pas un risque de crédit au sens de la réglementation bâloise et ne doivent pas être couvertes de fonds propres. Elles sont couvertes par la tarification du crédit qui est censée prendre en compte le montant à risque pour une opération donnée (exposure at default), la probabilité de faire défaut de la contrepartie (default probability) et la perte en cas de défaut (loss given default). Mais, « l’incertitude autour de ces trois composantes peut générer des pertes non attendues »236. C’est la raison pour laquelle seules les pertes inattendues, c’est-à-dire excédant les valeurs prévues, doivent être couvertes par les fonds propres237.

Le risque de crédit se manifeste sous trois formes : le risque de défaut de remboursement (risque de contrepartie, risque de faillite ou risque de crédit au sens propre), le risque de recouvrement en cas de défaut et le risque de variation de l’exposition à l’approche du défaut238. En d’autres termes, le risque de défaut de remboursement est le risque que

l'emprunteur ne rembourse pas sa dette à l'échéance fixée239. L’évaluation du risque de crédit

revient en premier lieu à la question de la solvabilité de l'emprunteur visé. Si l’emprunteur est une entreprise, cette solvabilité dépend à la fois des éléments purement internes à l'entreprise,

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%

235%M.%DIETSCH,%J.%PETEY,%Mesure!et!gestion!du!risque!de!crédit!dans!les!institutions!financières,%2ème%édition,% Revue%Banque,%2008,%p.%30.% 236 %Y.%BOUDGHENE%et%E.%DE%KEULENEER,%op.!cit.,%p.%153.% 237%Idem%pp.%150%F151.% 238M.%DIETSCH,%J.%PETEY,%op.!cit.,%p%15.% 239%S'il%était%à%l'origine%une%préoccupation%pour%les%seuls%organismes%bancaires,%il%concerne%pourtant%toutes%les% entreprises%(notamment%via%les%créances%qu'elles%accordent%à%leurs%clients,%qui%sont%des%formes%de%prêt%à%court% terme),%et%nombreuses%sont%aujourd'hui%amenées%à%l'intégrer%dans%leur%gestion%afin%de%le%minimiser.%

mais aussi d'éléments contextuels externes comme la localisation géographique, la situation économique globale et les perspectives d'évolution sectorielle.

90. Evolution. Depuis les années 1980 le risque de crédit est devenu une préoccupation

majeure pour le milieu financier. Au cours des trois dernières décennies, l’analyse de risque de crédit et son traitement ont considérablement évolué sous la pression des deux chocs

pétroliers,240 de la dette des pays en voie de développement, de la montée des risques pays, la

percée du transfert du risque de crédit, la déréglementation financière, la renforcement de la concurrence, la mondialisation des opérations financières et plus récemment la crise des « subprimes ». De plus, le niveau historiquement bas des taux d’intérêt et l’abondance de liquidités ont suscité une intense recherche de rendement. La baisse des taux d’intérêt a encouragé la prise de risque ainsi qu’un recours accru à l’endettement, les investisseurs souhaitant s’assurer des taux de rendement élevés. Dans ce contexte, le transfert du risque de crédit s’est développé afin de répartir le risque entre les investisseurs pour améliorer leur résistance financière en cas de chocs. C’est l’ingénierie financière qui a permis d’extraire le risque de crédit des bilans des banques et de le scinder en différentes parts et ensuite de les restructurer en produits de portefeuille. Ce processus est la base même des mécanismes de titrisation241 dont le but déclarer est celui de diminuer l’impact du défaut d’un émetteur important sur ses créanciers. La titrisation fut vue comme le moyen miraculeux de faire ainsi que les pertes liées à ce défaut soient supportées par un grand nombre d’investisseurs.

Cependant, ces mécanismes de transfert du risque ont contribué à l’ampleur de la crise des « subprimes » car ils ont augmenté l’opacité dans la distribution des risques. La plupart des transactions se déroulant sur les marchés de gré-à-gré et n’étant pas recensées de manière centralisée ont favorisé l’apparition d’une zone d’opacité dans le système financier liée aux mécanismes de transfert de risque. Par conséquent, ni les acteurs financiers, ni les régulateurs ne pouvaient connaître l’identité des détenteurs ultimes du risque ce qui a représenté un grand facteur de risque de confiance dans la solvabilité des participants au marché.

« L’atomisation »242 des risques à laquelle a abouti le transfert des risques, s’est accompagnée

« d’une augmentation de l’effet de levier intégré aux instruments eux-mêmes »243, ce qui a rendu difficile d’évaluer leurs effets à long terme. Il s’agit là d’un endettement « caché » qui n’apparaît pas dans les statistiques d’octroi de crédit. L’évaluation de l’ampleur et de

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% 240%Le%second%choc%pétrolier%(1979F1982)%a%entraîné%tout%d’abord%une%crise%des%matières%primes,%et%ensuite%une% crise%bancaire,%puis%systémique%qui%a%conduit%le%Mexique%au%défaut%de%paiement.%% 241%Par%"titrisation"%il%faut%comprendre,%au%sens%du%règlement%(UE)%n%°%575/2013%du%26%juin%2013,%précité,%«%une% opération%par%laquelle,%ou%un%dispositif%par%lequel,%le%risque%de%crédit%associé%à%une%exposition%ou%à%un% ensemble%d'expositions%est%subdivisé%en%tranches,%et%qui%présente%les%deux%caractéristiques%suivantes:%a)%les% paiements%effectués%dans%le%cadre%de%l'opération%ou%du%dispositif%dépendent%de%la%performance%de%l'exposition% ou%de%l'ensemble%d'expositions;%b)%la%subordination%des%tranches%détermine%la%répartition%des%pertes%pendant%la% durée%de%l'opération%ou%du%dispositif%»% 242%J.FP.%REDOUIN,%Le!risque!de!crédit!:!même!transféré,!il!ne!disparaît!pas,%Intervention%de%M.%J.FP.%REDOUIN,% premier%sousFgouverneur,%Paris%Europlace,%Stockholm,%29%mars%2007,%disponible%sur%internet%à%l’adresse%:%% http://www.banqueFfrance.fr/fr/instit/telechar/discours/disc20070405.pdf%(page%consultée%le%5%septembre% 2011).% 243%ibidem.%

l’incidence de cet effet de levier244 sur l’ensemble du système financier a été quasi impossible, mais avec des répercussions désastreuses sur la liquidité du marché, en vulnérabilisant les banques.

§2. Le risque opérationnel

91. Une évaluation nécessaire et cruciale. L’analyse d’un nombre d’événements désastreux

pour le monde financier245 a mis en évidence les conséquences néfastes de l’enchaînement de

circonstances qui relevaient plutôt de problèmes organisationnels ou technologiques que d’une mauvaise gestion du risque de crédit ou de marché. Le constat des pertes importantes liées à l’inadéquation ou à la défaillance des processus internes a conduit à ce que l’évaluation du risque opérationnel ne puisse plus être ignorée ou négligée. A la lumière de Bâle II, l’évaluation du risque opérationnel devient ainsi de plus en plus cruciale pour le rating d’une banque et sa gestion sera considérée comme un différenciateur potentiel et une source

d’avantage concurrentiel246. A titre d’exemple, l’année 2008, en sus de la crise financière, a

vu se produire deux incidents majeurs de risque opérationnel au coût similaire à un défaut de crédit : les fraudes dites Kerviel et Madoff. La fraude de Jérôme Kerviel à la Société Générale qui a touché le milieu bancaire français a englouti quasiment une année de bénéfice pour la banque247. Cette perte est due à l’inadéquation ou la défaillance de plusieurs processus internes qui ont créé les conditions propices d’une fraude interne de si grande envergure.

92. Notion. Le risque opérationnel a été défini pour la première fois par la Banque des

règlements internationaux248 et, plus particulièrement, par le Comité de Bâle249 en juin 2004

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% 244%Sur%la%notion%de%levier%voir%100%Clés%pour%comprendre%la%nouvelle%économie,%L’Echo,%Bruxelles,%2009,%p.%60%:% «%le%levier%ou%leverage%indique%à%quel%point%une%entreprise%a%dû%s’endetter%pour%financer%ses%activités.%On%dit% d’une%entreprise%qui%a%beaucoup%plus%de%dettes%que%de%capitaux%qu’elle%a%un%levier%élevé.%Un%levier%peut% accroître%la%rentabilité%d’une%entreprise%:%si%les%investissements%rapportent%davantage%que%les%intérêts%sur%les% fonds%empruntés,%l’effet%levier%joue%pleinement.%Mais%si%un%investissement%ne%donne%pas%les%résultats% escomptés,%le%levier%accroît%également%les%pertes.%Dans%ce%cas,%l’entreprise%sera%souvent%contrainte%de%réduire% son%levier%financier%en%accélérant%le%remboursement%de%ses%dettes.%».%% 245%Ne%seraitFce%que%la%panne%informatique%de%Bank%of%New%York%–%hypothèse%d’école%de%risque%opérationnel%–% en%1985.% 246%La%mauvaise%application%des%procédures%de%contrôle%opérationnel%aurait%engendré%dans%l’industrie%bancaire% des%coûts%supplémentaires%de%10%milliards%de%dollars%;%source%:%J.FC.%BORIES,%J.FE.%PALARD,%«%Les%banques%sontF elles%vouées%à%devenir%des%organisations%à%haute%fiabilité%?%%»,%Banque%n°%740,%octobre%2011,%p.%64%;%BCBS,%QIS2,% janv.%2010,%www.orx.org% 247%Ce%n’est%pas%le%seul%cas%de%fraude%interne%de%si%grande%envergure.%A%titre%d’exemple%nous%pouvons%citer% l’exemple%classique%en%matière%de%risque%opérationnel%majeur%:%la%faillite%de%la%banque%britannique%Barings%suite% à%la%perte%de%près%d’un%milliard%d’euro%entrainé%par%un%employé%qui%a%spéculé%sur%l’indice%Nikkey%des%sommes% très%importantes.%L’analyse%causale%de%l’incident%a%démontré%qu’une%telle%fraude%a%été%possible%à%cause%de%la% défaillance%des%systèmes%de%contrôles%et%d’un%chevauchement%des%tâches%:%l’employé%était%à%la%fois%responsable% du%backFoffice%et%du%trading%;%Sur%«%l’affaire%Kerviel%»,%Voir%O.%DUFOUR,%Kerviel!:!enquête!sur!un!séisme!financier,% éd.%Eyrolles,%2012%;%Sur%le%partage%de%responsabilité%entre%la%banque%et%son%trader,%Voir%Cass%crim.%19%mars% 2014,%n°%12F87416,%D.%2014,%716,%obs.%T.%COUSTET.% 248 En%anglais%:%Bank%for%International%Settlements%(BIS).% 249%En%anglais%:%Basel%Committee%on%Banking%Supervision%(BCBS).%

comme « le risque de perte résultant de carences ou de défauts attribuables à des procédures,

personnels et systèmes internes ou à des événements extérieurs. La définition inclut le risque juridique, mais exclut les risques stratégiques et de réputation »250. Après les modifications successives des Accords de Bâle, le droit européen a adopté en 2013 une définition similaire : « le risque de pertes découlant d'une inadéquation ou d'une défaillance des processus, du

personnel et des systèmes internes ou d'événements extérieurs, y compris le risque juridique »251.

D’autres définitions sont encore possibles : par défaut, on peut considérer que les risques opérationnels seraient tous les risques, autres que ceux de crédit, de marché et financiers, « de

nature à interrompre ou compromettre le bon fonctionnement de l’entreprise, à remettre en cause l’atteinte de ses objectifs, ou à entraîner des dommages susceptibles d’affecter sa rentabilité ou son image »252.

93. Le risque juridique – composante du risque opérationnel. Il convient d’observer que le

risque juridique est inclus par le régulateur dans la large catégorie des risques opérationnels. Son champ d’action est très vaste, car tous les processus internes sont inondés par le droit.

§3. Le risque de marché et le risque de liquidité

94. La consécration du risque de marché. Un exemple révélateur d’influence réciproque

entre le législateur européen et le régulateur international est la consécration du risque du marché. Les Accords de Bâle I, tels qu’édictés en 1988, concernaient uniquement les exigences en fonds propres liées au risque de crédit auquel sont exposées les banques. Malgré le fait que le risque de marché peut être considérable, sa couverture n’y était pas prévue. C’est en 1993 qu’il sera pris en compte pour la première fois dans calcul du capital réglementaire à

l’initiative du législateur européen253. Le Comité de Bâle a suivi la démarche bruxelloise en

publiant un amendement visant à intégrer le risque de marché dans le capital réglementaire

des établissements bancaires, ainsi que des recommandations prudentielles254.

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%% 250 %BIS,%The%New%Basle%Capital%Accord,%June%2004%;%“Operational%risk%is%defined%as%the%risk%of%loss%resulting%from% inadequate%or%failed%internal%processes,%people%and%systems%or%from%external%events.%This%definition%includes% legal%risk,%but%excludes%strategic%and%reputational%risk.”.% 251%Art.%4%paragraphe%1%point%52)%du%règlement%(UE)%n°%575/2013%du%Parlement%européen%et%du%Conseil%du%26% juin%2013%concernant%les%exigences%prudentielles%applicables%aux%établissements%de%crédit%et%aux%entreprises% d'investissement%et%modifiant%le%règlement%(UE)%n°%648/2012%;%Avant%l’entrée%en%vigueur%du%règlement%UE%n°% 575/2013%le%risque%opérationnel%était%défini%par%le%législateur%européen%comme%«%risque%de%pertes%directes%ou% indirectes%résultant%d’une%inadéquation%ou%d’une%défaillance%attribuable%aux%procédures,%au%facteur%humain%et% aux%systèmes,%ou%à%des%causes%externes.%»%;% 252 %CH.%JIMENEZ,%P.%MERLIER,%op.!cit.,%p.%18.% 253%Directive%93/6/CEE%du%15%mars%1993%relative%à%l’adéquation%des%fonds%propres%des%établissements%de%crédit% et%à%celle%des%entreprises%d'investissement.% 254%Au%niveau%européen,%Voir%art.%325%à%377%du%règlement%(UE)%n°%575/2013,%dit%«%CRR%»,%précité,%et%art.%83%de%la% directive%2013/36/UE,%dite%«%CRD%IV%»,%précitée.%En%France,%relatif%à%la%surveillance%prudentielle%des%risques%de% marché,%voir%Règlement%CRBF%n°%95F02%du%21%juillet%1995%modifié%relatif%à%la%surveillance%prudentielle%des% %

95. Définition du risque de marché. Le risque de marché est « le risque de perte qui peut résulter des variations de prix de marché d’instruments financiers composant le portefeuille de négociation de la banque (« trading book »). Les sources de risques peuvent être diverses, comme des variations du cours des actions, des taux d’intérêts, des taux de change, etc. »255. Ainsi, l’on peut maintenant affirmer que lorsque la valeur d’un actif détenu par une banque varie en raison de l’évolution des prix sur les marchés financiers, elle est confrontée à un risque de marché. Celui-ci vise l’ensemble des instruments financiers et produits de base détenus en vue de leur revente et/ou prises par la banque avec l’intention de profiter à court terme de écarts réels et/ou escomptés entre le prix d’achat et de vente. Le champ d’application de ce risque est très large, car il comprend en égale mesure les positions en instruments financiers prises par l’établissement de crédit pour son propre compte et les positions prises en tant qu’intermédiaire pour le compte de ses clients (brokerage) et les positions générées par une activité de teneur de marché (market making) sur les marchés boursiers.

96. Ressemblances et différences entre le risque de marché et le risque de liquidité. Si

l’on part de l’hypothèse que la banque peut acheter et vendre tout type d’instruments

financier256, c’est-à-dire des instruments financiers primaires (ou au comptant) et des

instruments dérivés, le risque de liquidité est simplement une forme de risque de marché. Dans cette perspective, le risque du marché et le risque de liquidité dépendent tous deux de la volatilité des prix. Cependant, le risque de liquidité se distingue le plus souvent du risque de marché et la rareté de la liquidité peut s’avérer fatale lorsque le manque de confiance gagne les investisseurs. Le 25 septembre 2008, les épargnants, apeurés par la chute de Lehman Brothers, se sont précipités retirer leurs avoirs causant ainsi la faillite de la Washington Mutual, première banque d’épargne américaine. Les retraits représentaient plus de 16 milliards de dollars de dépôts, une somme qui a asséché totalement la liquidité de la banque américaine, obligée de fermer ses portes257.

97. La notion de « liquidité ». La liquidité d’une banque et de toute entreprise par ailleurs se

définit comme étant la capacité à rembourser ses dettes exigibles à court terme. Stricto sensu, la liquidité est l’argent que la banque a en caisse. Lato sensu, la notion envoie aussi à la