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Chapitre III- L’ADN circulaire clos covalent : un « minichromosome viral » persistant

III. 6.2-Distribution de l’ADNccc lors de la mitose

Le devenir de l’ADNccc lors de la mitose induite par la lyse hépatocytaire vient d’être élucidé. Récemment, une équipe a montré grâce à des canetons infectés par DHBV et traités par entécavir que l’ADNccc n’était pas perdu lors de la mitose des cellules. Toutes les molécules d’ADNccc sont distribuées dans les cellules filles et aucune n’est perdue lors de la réformation de la membrane nucléaire (Reaiche-Miller et al., 2013).

D’après un modèle informatique développé dans le papier de Mason, le modèle n°3 où l’ADNccc serait distribué de façon équivalente dans les cellules filles lors de la mitose nécessiterait un renouvellement de 2,6 foies pour éliminer complètement l’ADNccc ce qui est trop élevé par rapport aux données expérimentales obtenues, et ce, même avec une faible efficacité expérimentale. Il semblerait donc que l’ADNccc soit éliminé en partie par une distribution inégale dans les cellules filles lors de la prolifération des hépatocytes (Mason et al., 2009).

De plus, certaines cellules infectées contiennent moins d’une copie d’ADNccc par cellule entrainant une perte probable de l’ADNccc par mitose (Zhang et al., 2003).

En conclusion, l’ADNccc peut être éliminé des cellules par des moyens cytolytiques et non cytolytiques. Néanmoins, la cinétique de clairance de l’ADNccc est lente car il est présent dans la cellule sous forme d’un minichromosome épigénétiquement modifié, que la nature asymétrique du cycle viral protège l’ADNccc des inhibiteurs de polymérase et que la formation d’ADNccc est possible à partir des virions circulants et des capsides intracellulaires (Zoulim, 2005).

III.7-La clairance thérapeutique

Comme nous avons pu le voir, l’ADNccc est très stable même lors de la clairance du HBV par le système immunitaire. Sa demi-vie varie de 3 à 30 jours selon le type de cellules utilisées pour sa mesure (Zoulim, 2005).

On pourrait penser que l’utilisation d’antiviraux permettrait l’élimination complète de cet intermédiaire de réplication. Malheureusement tout n’est pas si simple. En effet, les antiviraux n’empêchent pas la formation initiale d’ADNccc à partir de virions circulants

53 même lorsque le traitement est débuté avant l’infection (Delmas et al., 2002; Köck et al., 2003). Néanmoins, l’amplification de l’ADNccc par le recyclage des capsides dans le noyau est inhibée mais l’ADNccc préexistant n’est pas éliminé (Delmas et al., 2002). Avec un traitement adéfovir, il faudrait, d’après un modèle informatique, environ 14,5 ans pour éliminer complètement l’ADNccc d’une infection chronique (Tsiang and Gibbs, 2004).

La déplétion de l’ADNccc grâce aux analogues de nucléosides est due à un manque de capsides pouvant être recyclées dans le noyau. Ceci suggère donc un traitement de longue durée pouvant mener au développement de résistances (Zoulim, 2006).

En ce qui concerne les nouveaux traitements comme les TALENs, trop de paramètres comme la délivrance du vecteur ou l’efficacité de reconnaissance des cibles sont encore inconnus pour évaluer la durée nécessaire du traitement pour éliminer l’infection HBV (Schiffer et al., 2013).

Cependant, la découverte du récepteur du HBV pourra permettre le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques alliant un inhibiteur de l’entrée virale avec un analogue de nucléoside. De plus, la découverte récente de l’induction de la dégradation de l’ADNccc via la protéine Apobec 3A et 3B après l’activation du récepteur de la lymphotoxine-β est prometteuse (Lucifora et al., 2014).

Malgré la disparition des marqueurs viraux, il reste toujours des traces d’ADNccc, entre 0,01 et 0,1 copie par cellule, chez les chimpanzés deux ans après l’infection (Wieland et al., 2004b). Ce faible taux d’ADNccc est visible malgré le maintien d’une réponse immunitaire anti-HBV (Rehermann et al., 1996). L’ADNccc est donc responsable de la persistance du HBV dans les cellules infectées.

La réactivation de ces molécules est liée à leurs contrôles par le système immunitaire. En effet, lorsque le système immunitaire est diminué comme lors d’une greffe de moelle osseuse par exemple, le virus peut se réactiver à partir du stock d’ADNccc présent dans les cellules (Lau et al., 1997). Il semble donc important de comprendre la formation, la régulation et l’élimination de cet ADNccc afin de développer des traitements adaptés contre cette molécule. Combinés à des analogues de nucléos(t)ides ou à un inhibiteur de l’entrée virale, la stabilisation de l’infection chez des patients chroniques semble possible.

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Objectifs des travaux de recherche

Malgré l’existence d’un vaccin efficace contre le virus de l’hépatite B, ce dernier demeure un problème majeur de santé publique avec plus de 240 millions de personnes chroniquement infectées dans le monde.

La chronicité de cette maladie et le risque de développer des cirrhoses et HCC sont dus à plusieurs paramètres.

Premièrement, l’ADNccc, du fait de son maintien au sein de l’hépatocyte, est responsable de la persistance du virus au cours du temps. En effet, des traces de cet ADN, à partir duquel le cycle viral peut s’initier, sont encore retrouvées deux ans après une infection chez le chimpanzé (Wieland et al., 2004b). La persistance de cette molécule est due à sa non élimination par les analogues de nucléos(t)ides. En effet, les antiviraux ne ciblent ni sa formation initiale à partir de virions circulants, ni la molécule préexistante au sein des cellules infectées (Delmas et al., 2002).

La variation de la réponse immunitaire chez les patients ainsi que la sélection de variants peuvent aussi provoquer des rebonds de charge virale contribuant à la chronicité de la maladie et au risque de développer une cirrhose (Chan et al., 2011; Dény and Zoulim, 2010).

Enfin, l’intégration du génome d’HBV dans le génome de la cellule hôte, un facteur aggravant de l’hépatite B chronique, possède un caractère oncogénique.

Les objectifs de ces trois études sont donc de :

- comprendre l’accumulation de l’ADNccc ainsi que sa régulation afin de trouver de nouvelles cibles antivirales pour son élimination.

- améliorer le suivi des patients en utilisant des marqueurs sériques adaptés et corrélés aux différentes phases de la maladie. Ainsi les traitements pourraient être adaptés à chaque étape de la maladie et une réactivation antivirale pourrait être détectée.

- améliorer les traitements antiviraux (analogues de nucléos(t)ides) en modifiant leurs structures chimiques pour augmenter leurs efficacités antivirales et pour éviter le développement de résistances virales. Cela permettra de diminuer la charge virale et donc par conséquent le risque de dommages hépatiques et d’intégration de l’ADN viral.

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