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Les minéraux au sein des sols évoluent en contact avec la solution et les différents agents altérants qu’elle contient (protons, acides et ligands organiques). Ceux-ci sont apportés par les intrants atmosphériques, produits par les plantes et les micro-organismes qui leurs sont associés ou issus de la décomposition de la matière organique. La détermination de leur contribution aux flux d’altération ainsi que les différents mécanismes par lesquels ils interagissent avec les minéraux du sol sont des éléments clés dans l’identification des processus pédogéniques actifs ainsi que de leur évolution. Les micas sont des minéraux répandus dans les sols à travers le monde. Ils appartiennent à la classe des phyllosilicates 2:1, composés d’un feuillet TOT chargé négativement (deux couches tétraédriques entourant une couche octaédrique - le feuillet sera qualifié par la suite de structure) et d’un espace interfoliaire principalement occupé par du potassium. Du fait de cette organisation, et en fonction des agents altérants, les micas dans les sols peuvent s’altérer suivant deux types de réactions : la dissolution (mise en solution simultanée de tous les éléments chimiques) ou la transformation (mise en solution d’une partie seulement des éléments du minéral, notamment le potassium lors de la transformation du mica en vermiculite) (Robert et Pedro, 1972 ; Robert et al., 1979). Dans un sol, où ces réactions ont lieu souvent en même temps, il est impossible de déterminer les taux de dissolution et de transformation actuels des micas à partir d’un bilan en solution des éléments majeurs (le potassium comme beaucoup d’autres éléments est fortement recyclé) ou à partir d’un bilan minéral (impossible de distinguer les vermiculites en cours de formation par rapport aux vermiculites anciennes).

Pour tester si les différents agents altérants peuvent induire des mécanismes d’altération spécifiques et traçables, une série d’expériences en laboratoire destinées à évaluer le comportement d’un mica en contact avec 3 agents chimiques différents a été menée, en utilisant l’acide chlorhydrique (protons), l’acide citrique (acides organiques) et un sidérophore (ligands organiques ayant une forte affinité avec le fer). La sensibilité du bore et de ses isotopes aux différents mécanismes d’altération de la biotite (dissolution vs. transformation) est également évaluée.

Ces expériences ont été menées à deux pH différents (3 et 4.5) pour une durée totale de 885 heures (37 jours) à 20°C (+/- 1°C) dans un système clos en flux continu (afin d’éviter les contaminations). Le minéral-test retenu est la biotite car c’est un mica répandu dans les sols développés sur un substrat granitique.

Pour tracer l’avancement de l’altération de la biotite, les concentrations en éléments majeurs (Si, Al, Fe, Mg, K) ainsi que les concentrations et compositions isotopiques du bore des solutions sortantes sont systématiquement mesurées.

Ce travail

« Experimental dissolution vs. transformation of micas in acid soil conditions: clues

from boron isotopes. Voinot A., Lemarchand D., Collignon C., Granet M., Chabaux F.,

Turpault M.-P. »

a été soumis pour publication le 23 juin 2012 à la revue Geochimica et Cosmochimica Acta.

Résumé:

Les minéraux des sols évoluent en contact avec l’eau et les différents agents altérants (protons, acides organiques, ligands) fournis par les apports atmosphériques ou par la végétation environnante ainsi que la faune qui lui est associée. La détermination de leur contribution respective aux bilans d’altération ainsi que des mécanismes par lesquels ils interagissent avec les minéraux des sol est une étape clef dans l’affinage des modèles de développement de sol, de la compréhension des interactions sol-plante et en fin de compte de la pérennité des sols.

Afin de tester l’influence de différents agents chimiques sur les mécanismes d’altération des micas (dissolution vs. transformation), nous avons réalisé une série d’expérimentation en laboratoire avec la biotite en utilisant trois types d’agent altérant présents dans les sols forestiers : les protons (HCl), les acides organiques (acide citrique) et les ligands organiques (sidérophores). Les expérimentations ont été conduites à deux pH différents (pH 3 et 4.5) pour une durée de 37 jours à 20°C dans des réacteurs à flux-continu. La biotite a été retenue comme minéral-test car c’est un minéral réactif et répandu dans les sols. Pour suivre l’avancement des réactions d’altération, la concentration ainsi que la composition isotopique du B dans les solutions sortantes ont été contrôlées, de même que les concentrations des éléments majeurs (Si, Al, Mg, K et Fe). Le choix du B comme indicateur des processus d’altération a été motivé par sa présence dans les différents sites de la biotite (sites interfoliaires et structuraux). Un fort contraste de composition isotopique entre ces sites a été mis en évidence (δ11B~80‰), ce qui a permis de quantifier aisément les contributions respectives des sites interfoliaires et structuraux au B total dissous.

Les taux de réaction respectifs de ces sites cristallographiques ont été déterminés à partir des concentrations et compositions isotopiques du B dans les solutions sortantes. La comparaison avec les éléments majeurs révèle que les taux d’altération calculés à partir du B sont systématiquement supérieurs (les taux étant jusqu’à 4 fois plus élevés que ceux déterminés à partir des éléments majeurs) dans toutes les conditions expérimentales testées, particulièrement en présence de sidérophore.

Une des conclusions majeures de cette étude est que le comportement des isotopes du B en solution est très sensible à la nature de l’agent altérant. L’utilisation d’acide citrique conduit à une contribution quasi-stoechiométrique des sites interfoliaires et structuraux ; l’utilisation d’acide chlorhydrique conduit à un taux de transformation supérieur au taux de dissolution, et enfin l’utilisation de sidérophore conduit à une altération quasi exclusive des sites interfoliaires (transformation). Les implications en terme d’interactions plantes-minérales et de pérennité des sols sont importantes, les réactions de dissolution induisant une destruction de la structure minérale alors que les réactions de transformation, à travers des échanges chimiques dans les espaces interfoliaires, sont conservatives et réversibles.

Experimental dissolution vs. transformation of micas in acid

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