• Aucun résultat trouvé

Les dispositions de la loi les moins importantes pour déterminer une peine

Les dispositions de la loi qui sont les moins importantes pour déterminer une peine, c’est-à-dire celles qui ont été invoquées le moins fréquemment et qui ont le moins de poids aux yeux des juges, sont présentées dans cette section. Chaque juge a identifié les dispositions qu’il estime correspondre à ces caractéristiques. Toutefois, bien que certaines dispositions soient nommées par plus d’un juge, aucun consensus ou tendance claire ne ressort des discours analysés. Les points abordés sont divers : c’est cette diversité qui est reflétée dans cette section. Ces dispositions ont trait à deux des facteurs présentés au paragraphe 38(3), à la notion de « perspectives positives », aux principes énoncés aux alinéas 3(1)b)(iv), (v), 3(1)c)(i) et (iii), ainsi qu’au principe énoncé au sous- paragraphe 38(2)b).

2.1 Les facteurs présentés au paragraphe 38(3)

Il s’agit ici des deux facteurs présents au paragraphe 38(3) qui ne figurent pas dans la section précédente. Le juge A n’accorde pas un poids considérable à l’ampleur des dommages causés et à la réparation de ces derniers. Selon lui, ces facteurs, présentés aux sous-paragraphes 38(3)b) et c), ne sont pas fréquemment plaidés par la poursuite et la défense. Il précise que les avocats connaissent les juges et qu’ils savent quels principes plaider devant chacun d’eux. Dans le même ordre d’idées, le juge B inclut parmi les dispositions les moins importantes l’alinéa 38(2)e)(iii), selon lequel la peine doit susciter le sens des responsabilités chez l’adolescent, notamment par la reconnaissance des dommages causés à la victime et à la collectivité. Il soulève l’hypothèse que ces dispositions sont peut-être moins souvent invoquées car on ne parvient pas souvent à trouver des mesures pour les mettre en application.

2.2 La notion de « perspectives positives »

Le juge B inclut également dans cette section la notion de « perspectives positives », en anglais « meaningful consequences », présentée aux paragraphes 38(1), 3(1)a) et 3(1)c). Il explique ceci par le fait que cette notion est nouvelle ou parce qu’elle n’est pas bien comprise. À cet égard, il souligne l’interprétation effectuée par la juge Rondeau avec laquelle il exprime son désaccord. Comme il a été mentionné plus haut, la juge Rondeau a interprété l’expression « perspectives positives » en lui attribuant le sens de l’expression utilisée dans le texte anglais qu’elle a traduite par les termes « conséquences significatives ». Elle a estimé que cette expression se rapprochait davantage de l’intention du législateur. Selon le juge B, le terme « conséquences » utilisé dans cette traduction renvoie à un aspect trop punitif. Pour lui, l’expression doit refléter quelque chose de grand et de positif.

« [Les] meaningful consequences, en français, perspectives positives, il faut que ça soit grand, positif. Il faut que ça soit, ça vise à la fois à réhabiliter et à réintégrer le jeune dans la société et c’est clair que si on suit ça, on va atteindre l’objectif qui est la protection de la société. »

Par exemple, la privation de liberté d’un jeune peut l’aider à se réadapter, ainsi qu’à se responsabiliser, mais cela ne doit pas viser à le punir, la dissuasion ne faisant pas partie des objectifs régissant la LSJPA.

2.3 Les principes présentés à l’article 3

Le juge B identifie dans cette catégorie le sous-paragraphe 3(1)c)(i), soit renforcer le respect de l’adolescent pour les valeurs de la société. Il souligne la difficulté de l’atteinte de cet objectif sur le plan pratique. Que doit-on faire pour y arriver? En guise de réponse, il soulève l’imposition de travaux bénévoles. Il compte également parmi les dispositions les moins fréquemment invoquées par les parties devant lui les principes énoncés aux alinéas 3(1)b)(iv) et (v), soit la prise de mesures opportunes qui établissent clairement le lien entre le comportement délictueux et ses conséquences, et la diligence et la célérité avec lesquelles doivent intervenir les personnes chargées de l’application de la loi. Le peu d’importance accordée à ce dernier point tient peut-être au fait qu’il est connu que l’on doive agir avec diligence et que le sens qu’a le temps n’est pas le même pour un adolescent et un adulte.

La réponse du juge F va dans le même sens que celle de son collègue le juge B. Il ajoute cependant le principe présenté à l’alinéa 3(1)c)(iii), selon lequel les mesures doivent offrir aux adolescents des perspectives positives et faire participer leur père et mère, leur famille étendue, les membres de la collectivité et certains organismes sociaux parmi ces dispositions. De plus, il précise que l’utilisation des comités consultatifs est également peu commune. La faible utilisation de ces comités est aussi mentionnée par le juge C. Ce dernier inclut également parmi ces dispositions le peu d’importance accordée à l’utilisation de certaines mesures prévues à l’article 42, soit la réprimande, ainsi que les libérations conditionnelles et inconditionnelles. Celles-ci ne sont suggérées que très rarement par les parties. Le juge E identifie également ce dernier point parmi les dispositions les moins importantes pour la détermination de la peine.

2.4 Le sous-paragraphe 38(2)b)

Tel que mentionné dans la section précédente, le paragraphe 38(2)b), selon lequel la peine doit être semblable à celle qui serait imposée dans la région à d’autres adolescents se trouvant dans une situation semblable pour la même infraction commise dans des circonstances semblables, est considéré comme un facteur important dans la détermination de la peine par la moitié des juges ayant siégé dans d’autres régions que Montréal. Toutefois, certains juges, dont le juge A, ne sont pas du même avis. Ce dernier inclut ce paragraphe parmi les dispositions les moins importantes pour déterminer une peine. Le juge C, pour sa part, soulève que le principe inclus au sous- paragraphe 38(2)b) n’a jamais été plaidé devant lui. Il ajoute cependant que si une province peut être vue comme une région, alors là on pourrait comparer si les peines sont semblables d’une région à l’autre grâce à la jurisprudence. Le juge G, qui a siégé uniquement dans la région de Montréal, mentionne qu’un acte criminel (peu importe dans quelle région il a été commis) demeure un acte criminel. Il rappelle que ce sont les circonstances du délit qui importent.

2.5 Conclusion

Bref, certaines dispositions de cette loi sont considérées par les juges interviewés comme figurant parmi les moins importantes pour déterminer une peine et ce, bien qu’aucune unanimité ne ressort de leurs discours. Il s’agit des facteurs présentés aux sous-paragraphes 38(3)b) et c), soit les dommages causés à la victime et du fait qu’ils ont été causés intentionnellement ou étaient raisonnablement prévisibles et la réparation par l’adolescent des dommages causés à la victime et à la collectivité. Ont également été inclus dans cette catégorie la notion de « perspectives positives » et les principes énoncés aux alinéas 3(1)b)(iv), (v), 3(1)c)(i) et (iii), ainsi que celui énoncé au sous- paragraphe 38(2)b). Il s’agit de la prise de mesures opportunes qui établissent clairement le lien entre le comportement délictueux et ses conséquences, ainsi que la diligence et la célérité avec lesquelles doivent intervenir les personnes chargées de l’application de la loi. Il s’agit également des principes énonçant que les mesures prises à l’égard des adolescents doivent renforcer leur respect pour les valeurs de la société, leur offrir des perspectives positives et faire participer leur père et mère, leur famille étendue, les membres de la collectivité et certains organismes sociaux. Finalement, il s’agit du principe selon lequel la peine doit être semblable à celle qui serait imposée dans la région à d’autres adolescents se trouvant dans une situation semblable pour la même infraction commise dans des circonstances semblables.

Documents relatifs