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II. U N CADRE DEONTOLOGIQUE IMPLICITE ET LACUNAIRE

2.4. Des dispositifs sectoriels de prévention des conflits d’intérêts : les obligations de déclaration

2.4.2. Les dispositifs de déclaration d’intérêts en France ne font pas l’objet d’une approche

En France, les dispositifs de déclaration d’intérêts existent essentiellement dans deux secteurs, selon des modalités plus ou moins contraignantes et en complément des incompatibilités déjà examinées : dans le domaine de la santé publique et pour

certaines autorités administratives indépendantes. Enfin, certains fonctionnaires sont, en raison de leur situation particulière, soumis à une obligation d’information de leur autorité hiérarchique des intérêts qu’ils détiennent et qui sont susceptibles d’entrer en conflit avec leurs fonctions.

Dans le domaine de la santé publique, l’enjeu principal est de prévenir les conflits d’intérêts sans pour autant entraver l’indispensable recours à l’expertise. L’article L. 1451-1 du code de la santé publique (cf. Deuxième partie, point 2.1.2.1.), prévoit ainsi que les membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, à l'occasion de leur nomination ou de leur entrée en fonction, adressent à ces ministres « une déclaration mentionnant leurs liens directs ou indirects avec les entreprises, établissements ou organismes dont les dossiers pourraient être soumis à l'instance dans laquelle ils siègent, ainsi qu'avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ces secteurs. Cette déclaration est rendue publique et est actualisée à leur initiative dès qu'une modification intervient concernant ces liens ou que de nouveaux liens sont noués ».

Outre ces dispositions transversales, plusieurs organismes font l’objet de dispositifs spécifiques.

Ainsi, conformément aux articles R.161-84 à R.161-86 du code de la sécurité sociale, les agents, collaborateurs occasionnels et membres des commissions de la HAS adressent au président du collège, à l'occasion de leur nomination ou de leur entrée en fonctions, une déclaration mentionnant leurs liens, directs ou indirects, avec les entreprises ou établissements dont les produits entrent dans son champ de compétence, ainsi qu'avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ces secteurs. Cette déclaration est rendue publique et elle est actualisée à leur initiative, dès qu'une modification intervient concernant ces liens ou que de nouveaux liens sont noués127.

Tous les membres (membres nommés et membres de droit) des conseils, commissions et de toute autre instance scientifique consultative siégeant auprès de l’AFSSAPS ainsi que les personnes lui apportant leur concours ou collaborant occasionnellement aux travaux de l'agence (experts/rapporteurs) doivent effectuer une déclaration d'intérêts. Il en va de même pour tous les agents, quel que soit leur statut, travaillant pour l’établissement. L’obligation de remplir une telle déclaration a été instaurée par une décision du directeur général de l'Agence du médicament dès 1994, avant que la loi du 1er juillet 1998 sur le renforcement de la sécurité sanitaire ne le prévoie explicitement par des dispositions désormais codifiées à l’article L. 5323-4 du code de la santé publique.

Il en allait de même des membres et collaborateurs occasionnels de l’AFSSA (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) et de l’AFSSET (Agence française de sécurité sanitaire et de l’environnement au travail), avant la fusion des deux organismes au sein de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), dont les membres et collaborateurs sont soumis aux mêmes règles128.

127 Article R. 161-85 du code de la sécurité sociale

128 Article L. 1313-10 du code de la santé publique

Enfin, des dispositifs similaires existent également pour :

- les comités de protection des personnes (article L. 1123-3 du code de la santé publique) ;

- le comité d’agrément placé auprès du ministre de la santé pour la délivrance de l’agrément pour l’hébergement de données de santé à caractère personnel (article R. 1111-11 du même code) ;

- la commission des accidents médicaux (art. R. 1142-30-1) ;

- le comité économique des produits de santé (art. L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale) ;

- la commission de la transparence (art. R. 613-17 du même code).

Chaque organisme a donc son propre système de déclaration d’intérêts, celles-ci étant remises, selon la fonction de la personne concernée, soit au président de l’organisme, soit au responsable administratif des ressources humaines. A l’aune d’évènements récemment révélés qui sont survenus en matière de santé publique, de telles déclarations n’apparaissent pas constituer une réponse à tous les problèmes qui peuvent se poser. Elles ont néanmoins introduit depuis une quinzaine d’années dans ce domaine une utile prévention, qui n’a cependant atteint sa complétude que récemment, le respect de ces règles ayant connu une généralisation progressive.

L’AFSSAPS, dans son bilan 2008 du dispositif de gestion des conflits d’intérêts, indique ainsi qu’alors que 16% des 557 membres des instances n’avaient pas effectué de déclarations d’intérêts en 2000, ils étaient moins de 1% en 2008, alors que le nombre de membres soumis à l’obligation de déclaration avait, dans le même temps, quasiment triplé.

Les membres de certaines autorités administratives indépendantes sont également, au-delà des incompatibilités édictées pour certaines d’entre elles (cf.

Deuxième partie, point 2.1.), soumis à des obligations de déclarations (AMF, Autorité de contrôle prudentiel, CNIL…), selon des modalités plus ou moins formelles mais qui généralement imposent simplement l’information du président du collège sur les intérêts détenus.

Quel que soit le domaine considéré, les règles relatives à la publicité des déclarations d’intérêts existantes sont variables. Si les déclarations des organismes cités dans le domaine de la santé doivent être « publiques », cela n’implique pas nécessairement une large publicité (comme la mise en ligne sur Internet), et tous les éléments de cette déclaration ne sont pas pour autant diffusés sans limites. Ainsi, s’agissant de la HAS, les déclarations sont rendues publiques sur le site de la HAS pendant toute la durée du mandat des intéressés, mais, pour des raisons de protection de la vie privée, la partie relative aux proches parents n’est pas publiée en intégralité. Est seulement publiée l’information que le déclarant a un proche parent ayant un lien avec une ou plusieurs entreprises dont le nom est cité. Les régimes existants s’efforcent ainsi de concilier l’exigence de transparence et le respect de la vie privée.

Enfin, certains fonctionnaires sont soumis à des dispositions spécifiques, qui prévoient la déclaration d’intérêts ponctuels et limitativement énumérés à leur autorité hiérarchique.

Les textes prévoyant de telles informations ou déclarations semblent relativement rares. La Commission a en particulier relevé les dispositions relatives aux directeurs des directions départementales de la protection des populations ou des direction départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations et à leurs adjoints, qui, en vertu du décret n° 2009-1484 du 3 décembre 2009 relatif aux directions départementales interministérielles, doivent déclarer au préfet si leur conjoint, leur partenaire lié par un pacte civil de solidarité, un parent ou un allié jusqu'au troisième degré inclus donne professionnellement des conseils fiscaux ou juridiques ou exerce la profession d'industriel, de commerçant, d'agriculteur ou de prestataire de services, en précisant l'étendue géographique où s'exerce cette activité.

De même, les personnels de catégorie A de la direction générale des finances publiques dont le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un parent jusqu'au troisième degré inclus exerce des fonctions de dirigeant dans une entreprise ou un organisme public situé dans le même département que celui où ils sont affectés, sont tenus, en vertu de l’article 24 du décret n° 2010-986 du 26 août 2010, d'en faire la déclaration au service.

2.4.3. Les déclarations d’intérêts existantes portent sur des intérêts