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Discussion de la méthode de mesure de la cavitation mise en place

La méthode mise en place utilisant le Xyl’em après centrifugation des échantillons présente certains inconvénients par rapport à d’autres méthodes dont le Cavitron. En effet, la construction d’une courbe de vulnérabilité demande un nombre important d’échantillons (supérieur à 20) afin de mesurer la résistance à la cavitation sur plusieurs gammes de pression. A contrario, le Cavitron permet l’obtention d’une courbe de vulnérabilité à partir d’un seul échantillon. De plus, l’utilisation de plusieurs échantillons pour construire une courbe de vulnérabilité induit une certaine variabilité contrairement à la méthode du Cavitron. On peut apprécier la mesure de cette variabilité intra-spécifique induite par la mesure de la conductance hydraulique de plusieurs échantillons en comparant la courbe de vulnérabilité du Phragmites australis (Roseau, Annexe 1, page 15) obtenue par la méthode du Cavitron et la courbe de vulnérabilité de la Glyceria fluitans (Annexe 1, page 7) obtenue par la méthode du Xyl’em.

La courbe de vulnérabilité à la cavitation de la Glyceria présente un coefficient de corrélation (R²) de 84.38% et une erreur standard d’estimation du modèle de 18.32 %PLC.MPa-1 Les écarts-types présentés sur la courbe témoignent de cette variabilité notamment au point d’inflexion de la sigmoïde, qui correspond au PLC50%, où la variabilité est maximale.

Chez le roseau, le coefficient de détermination (R²) est de 99.49% et l’erreur standard d’estimation de 4.16 %PLC.MPA-1. Dans ce cas le modèle utilisé représente presque parfaitement les mesures. Pour la méthode du Cavitron, la variabilité intra-spécifique est représentée par l’obtention de plusieurs courbes de vulnérabilité à la cavitation. Ceci ayant été réalisée avec l’Echinochloa crus Galli où 3 échantillons (donc 3 individus) différents ont permis l’obtention de trois courbes de

Arrhenatherum elatius multiples Pression (MPa) -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 P LC (% ) 0 20 40 60 80 100

Melica ciliata multiples

Pression (MPa) -5 -4 -3 -2 -1 0 P LC (% ) 0 20 40 60 80 100

FIGURE N°16 : courbes de vulnérabilité à la cavitation de Arrhenatherum elatius et Melica ciliata obtenues en utilisant la méthode du Cavitron sur plusieurs échantillons en simultané.

FIGURE N°17 : analyse de l’aire des vaisseaux de métaxylème de 3 espèces représentatives (Lolium perenne, 41 mesures, mésophile, Brachypodium pinnatum, 45 mesures, xérophile et Glyceria fluitans, 28 mesures, hydrophile) calculées sur des coupes transversales (grossisement X100) via le logiciel ImageJ. Début de résultats d’anatomie

193,17 329,09 444,38 0,00 100,00 200,00 300,00 400,00 500,00 600,00 A ir e m o ye n n e d e s vai sseau x d e m é taxyl è m e ( µ m ²)

on peut supposer que la résistance à la cavitation varie d’un individu à l’autre, ce qui expliquerait la variabilité observée avec la méthode du Xyl’em après centrifugation.

La méthode du Xyl’em après centrifugation présente également un inconvénient lors du prélèvement. Etant donné la nécessité de prélever plusieurs échantillons pour une courbe de vulnérabilité, il est important, pour les espèces à touffes, de prélever sur la même touffe si possible (les tiges qui en sont issues proviennent alors de la même talle et ont donc le même patrimoine génétique). De ce fait, on peut se poser la question pour certaines espèces où nous avons eu beaucoup de variablité entre les échantillons si cette notion de patrimoine génétique importe de manière significative dans les résultats ou non ? Les données d’anatomie devraient permettre de répondre à la question, si la cause de la variabilité observée s’explique par la variabilité anatomique des vaisseaux du xylème.

Confirmation des résultats de conductances hydrauliques

Les résultats présentés sont à confirmer de plusieurs manières :

i) Répétabilité des mesures : il est nécessaire de ré-éditer les mesures sur les espèces testées (en prenant soin de conserver les mêmes lieux d’échantillonnage pour gommer un éventuel effet extrinsèque du milieu de croissance). Il serait également important de compléter les mesures en prenant des échantillons sur les mêmes espèces mais ayant poussées dans des milieux différents afin d’observer si on mesure un P50 similaire ou si des différences apparaissent. Ceci permettrait de proposer l’hypothèse d’incidence du milieu de croissance sur la mise en action des mécanismes de résistances à la cavitation et donc indirectement à la sécheresse

ii) Mesurer les résistances à la cavitation des espèces testées par d’autres méthodes expérimentales. Le travail ayant été commencé (mesure de quelques espèces par la méthode du Cavitron), cependant les mesures donnant des courbes de vulnérabilité probables (Phragmites australis et Echinochloa crus Galli) n’ayant pas été réalisées avec la méthode initiale mise en place, rien ne peut être confirmé. De même, les deux espèces utilisées dans la méthode initiale et avec le Cavitron présentent, avec la dernière méthode, des résultats différents (par exemple pour la mélique la méthode du Xyl’em donne un P50 de -5.55MPa tandis que la méthode du Cavitron à plusieurs échantillons donne un P50 de -2.46MPa. Cela pouvant être expliqué par plusieurs paramètres : 1) plusieurs échantillons en mesure simultanée 2) milieu d’échantillonnage différents

Modélisation des courbes de vulnérabilité

Les courbes de vulnérabilité sont tracées en ajustant un modèle mathématique à une série de données. Le modèle utilisé a été construit et éprouvé chez les ligneux. Comme on peut le voir sur la courbe du dactyle (Annexe 1, page 13) en dessous d’une tension appliquée (pression en MPa)

FIGURE N°18 : Vulnérabilité interspécifique à la cavitation de nombreuses espèces végétales ligneuses et non ligneuses.

ce qui peut laisser penser à une embolisation native c’est-à-dire non induite par la centrifugation, alors que le modèle propose un ajustement à un taux d’embolisation plus faible (tendant vers 0% d’embolie). Ceci étant expliqué par l’équation du modèle mathématique qui force son ajustement à 0% de PLC pour des pressions voisines de 0 MPa. Ce choix ayant été fait de part l’hypothèse qu’à des tensions faibles dans les vaisseaux de xylème, l’embolisation est nulle, ce qui ne semble pas aberrent d’un point de vue écophysiologique. Cependant, il serait intéressant de vérifier l’influence de cet ajustement sur la valeur du P50.

En s’appuyant sur les résultats d’analyse de données (Annexe 1, détail pour chaque espèce testée) il est possible d’affirmer que la fonction mathématique utilisée pour ajuster les données et permettre de calculer des valeurs clefs telles que le P50, le P100 ou le Pcav, est adaptée et modélise de manière efficace la vulnérabilité à la cavitation des différentes espèces. En effet, pour les 16 espèces étudiées grâce à la méthode du Xyl’em après centrifugation, les coefficients de détermination (R²) sont supérieurs à 0.70 (minimum observé pour Elymus campestris avec un coefficient de détermination (R²) de 0.7761) et 11 espèces ont même un coefficient de détermination supérieur à 0.85.

_ Discussion des résultats d’anatomie

Mesure des diamètres des vaisseaux de xylème

Comme on a pu le voir précédemment, le diamètre des vaisseaux de xylème a été calculé par analyse d’image ainsi que l’aire en coupe transversale de ces vaisseaux. Il en ressort une différence d’aires (µm²) entre espèces mais qui ne semble pas corrélée à la vulnérabilité à la cavitation. On peut alors supposer que la vulnérabilité à la cavitation des poacées prairiales est déterminée par la structure de la paroi des vaisseaux de xylème et non dans leur capacité volumique de conduction de la sève brute.

Mesure de l’épaisseur des parois

La mesure de l’épaisseur des parois a été réalisée avec le logiciel ImageJ. Cependant, l’acquisition des données a été réalisée manuellement, ce qui implique des erreurs de mesures. De plus, les coupes microscopiques réalisées n’ont pas permis d’obtenir une netteté des images acceptables pour évaluer l’épaisseur des parois. Le travail est donc à poursuivre.

Perspectives

Si on compare les résistances à la cavitation des poacées étudiées avec des données provenant d’études sur les ligneux (Figure n°18) on remarque que les graminées prairiales semblent être plutôt, dans l’ensemble, adaptée à résister à la cavitation. Il serait intéressant d’approfondir la comparaison ligneux-poacées.

Comme on peut le voir sur la Figure n°19, il semble exister un lien entre la vulnérabilité à la cavitation des graminées prairiales testées et les qualités hydriques du milieu sur lequel on les

FIGURE N°19 : régression linéaire de la vulnérabilité des espèces de graminées prairiales testées en fonction de la répartition hydrique des espèces.

FIGURE N°20 : place de la résistance à la cavitation dans la survie de l’espèce à la sécheresse.

R² = 0,6968 R² = 0,8042 0 2 4 6 8 10 12 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 H u m id ité é d ap h iq u e (i n d ic e s) H u m id ité at m o sp h é ri q u e (i n d ic e s) PLC 50% (MPa)

Valences écologiques (Julves 2005-2009) en fonction des PLC50% de graminées prairiales

Etat de survie de la plante

Déficit hydraulique

Résilience à partir des méristèmes à la base des talles

Résistance à la

cavitation

? ? ?

Méristèmes parties aériennes

retrouve, soit, plus une espèce évolue sur un milieu assez séchant plus sa résistance à la cavitation de ses vaisseaux de xylème est forte. On peut noter que la corrélation entre les PLC50% des espèces testées et l’humidité édaphique (Annexe 4) du sol est plus importante (R² = 0.80) que la corrélation entre la même variable et l’humidité atmosphérique (R²=0.69). Une hypothèse étant que la plante en tant que vecteur du flux hydrique entre le sol et l’atmosphère est adaptée physiologiquement aux variations de l’humidité du sol en priorité de l’humidité atmosphérique.

Résistance à la cavitation dans la survie à la sécheresse des poacées (Figure n°20)

Chez les poacées, une embolisation des vaisseaux du xylème provoque l’arrêt de la circulation de la sève et donc la sénescence des feuilles mais non la mort des méristèmes qui sont situés à la base des talles. Autrement dit l’individu survit, contrairement aux ligneux où les méristèmes meurent en même temps que les parties aériennes. Ainsi, la résistance à la cavitation n’a pas la même place dans la survie d’un ligneux ou d’une poacée. Volaire F. propose [15] que les Poacées ont cette capacité étonnante de survivre tant que le méristème à la base de la talle contient suffisamment de sucres (et notamment des fructanes) et une hydratation minimale, et même une capacité de repousse après complète dessiccation (et donc plus de photosynthèse). De plus, cette capacité de survie à la dessiccation serait différente chez les espèces de poacées, plus l’espèce survie dans un milieu séchant plus sa capacité de conservation des méristèmes est efficace.

Il serait intéressant d’étudier la résistance à la cavitation des vaisseaux de xylème des feuilles de poacées afin de vérifier si elle est identique ou non à celle des vaisseaux de la tige. De même, étudier l’hydraulique des racines permettrait de mieux comprendre les mécanismes de conservation des méristèmes en période de sécheresse. L’étude de la vulnérabilité à la cavitation chez les Poacées reste très pertinente même si les conséquences sont moins majeures que chez les ligneux, puisqu’en présence de cavitation la perte des feuilles entraine une baisse l’activité photosynthétique et donc de la mise en réserve de nutriment, réserve utilisées par les méristèmes pour survivre à une sécheresse.

Réflexion personnelle et intérêt du stage

Ce stage en laboratoire m’a permis d’observer et de comprendre le fonctionnement du monde de la recherche dans une unité mixte où enseignants-chercheurs, chercheurs et techniciens travaillent en collaboration sur des sujets appliqués et théoriques. De par son aspect principalement méthodologique ce travail m’a apporté une capacité d’organisation du travail, de la mise en place des étapes de la recherche à la confirmation des résultats obtenus en passant par une grande partie de réflexion sur le travail accompli, dans quel but et vers quelles hypothèses, toute une méthode abordée pour effectuer des recherches dans de bonnes conditions. J’ai également pu enrichir mes connaissances sur le fonctionnement des végétaux, notamment au niveau de leur fonctionnement hydraulique.

Bibliographie

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SITES INTERNET

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