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Chapitre 4 : Voies technologiques pour l’activation du dopant

2.2. c Discussion

Cette étude a montré que, dans nos conditions expérimentales, des recuits laser avec une puissance d’excitation au-dessus de 1 J/cm² engendrent des dégradations importantes de la couche de GaN. Si on se rapporte aux simulations présentées en Figure 99, cela veut dire que la couche de GaN n’est pas portée au-delà de 1000-1100 °C et il y a donc peu de chance d’obtenir une modification significative de l’état du magnésium implanté ou de l’endommagement de la couche. Cela est en accord avec les mesures de PL présentées sur la Figure 106 qui ne montre aucune modification significative du spectre même après une exposition à 100 flashs à 1 J/cm² ou 1 flash à 1,1 J/cm². La Figure 106 met même en évidence une diminution de l’intensité des bandes de PL pour les couches exposée à 10 et 100 flashs à 1,1 J/cm² ce qui indique une dégradation de la couche de GaN. Cette dégradation n’est pas surprenante puisque, comme on l’avait vu sur la Figure 100, les surfaces soumises à ces recuits avaient fissuré.

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Figure 106: Spectre de PL à 5 K d’échantillons implantés avec une dose de Mg de 1015 at/cm² à 100 keV et recuit à 1000 °C après différents recuits laser.

Dans les conditions actuelles, le recuit laser dans nos conditions expérimentales ne semble donc pas adapté pour un recuit secondaire d’activation du Mg implanté à cause de deux phénomènes limitant la stabilité de la surface à haute puissance d’excitation:

- L’apparition de failles macroscopiques caractéristiques d’une relaxation mécanique.

- La formation d’une texturation de la surface probablement liée à la recombinaison de dislocations et/ou de fautes d’empilements qui se traduit par la formation de structure en marche semblables à des ‘’cross-hatch patterns’’.

L’extension en profondeur des fissures macroscopiques tend à indiquer qu’elles se forment suite à une relaxation mécanique due à différence de CTE dans l’empilement. Comme on peut le voir sur la Figure 107, la comparaison de l’alignement de ces fractures et de l’orientation du cristal de GaN indique que les failles se propagent selon la famille de direction cristalline <1 1 -2 0>. Or, cette famille de direction correspond à l’intersection entre les plans de clivage du GaN, les plans {1 -1 0 0} et la surface (orthogonale à la direction c). Il est possible que le choc du recuit et le gradient soudain de température provoque cette relaxation par fracture de la couche de GaN.

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Figure 107: Comparaison des transformées de Fourier d’une image de microscopie optique d’une surface de GaN fracturée et

d’une image AFM 10x10 µm² de la surface du GaN après recuit laser orientées par rapport au cristal de GaN.

En ce qui concerne les formations observées à l’AFM, leur origine reste encore incertaine. Si elles correspondent bien à une structure de type « cross-hatch », elles devraient correspondre à l’intersection entre les plans de glissement pour les dislocations du matériau et de la surface du GaN. Les structures semblent se propager dans les directions appartenant à la famille <-1 1 0 0> par rapport à la maille du GaN. Ils pourraient alors s’agir des plans inclinés du type {1 1 -2 2} qui font partie des plans de glissement dans la maille hexagonale du GaN [18]. L’origine la plus probable de ces structures correspondrait donc au glissement de dislocations de type a+c selon le système 1/3<-1 -1 2 3>/{1 1 -2 -2} qui est le système de glissement de dislocations le plus favorable et actif dans le GaN [19]. Néanmoins, à notre connaissance ce système de glissement n’a jamais été observé auparavant lors de recuits de couche de GaN. Des observations TEM dans le plan (1 0 -1 0) viennent soutenir ces hypothèses. En effet, comme on peut le voir sur la Figure 108.a, elles révèlent de nombreuses bandes de dislocations dans le GaN. Ces dernières sont orientées selon une direction inclinée de 58 ° par rapport au plan (0001) ce qui correspond à l’angle attendu entre les plans (1 1 -2 2) et (0 0 0 1) [19]. Le système de glissement proposé est donc bien actif dans nos échantillons. Des observations au niveau de l’interface entre le GaN et la première couche de buffer AlGaN montrent une différence de l’orientation des dislocations dans le GaN et l’AlGaN (Figure 108.b). On peut donc faire l’hypothèse que le recuit laser apporte au système cristallin une énergie suffisante pour induire le glissement de dislocations de type a+c selon le système 1/3<-1 -1 2 3>/{1 1 -2 -2} dans la couche de GaN depuis l’interface avec l’AlGaN jusqu’à leur interaction avec la surface.

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Figure 108: Observations TEM dans le plan (1 0 -1 0) d’échantillons implanté avec une dose de 1015 at/cm² de Mg et recuit par la combinaison d’un recuit d’1 h à 1100 °C sous N2 et d’un recuit laser de 1 flash à 1,2 J/cm². a) Image prise en surface de l’échantillon et b) image prise à l’interface entre le GaN et la première couche tapon d’AlGaN. Les flèches bleues indiquent les

probables dislocations a+c. Les repères jaunes sont orientés par rapport aux directions indiquées dans la Figure 107.

On voit donc que le recuit laser semble fournir une énergie suffisante pour induire le glissement de dislocations depuis l’interface avec les couches tampon jusqu’à la surface du GaN. Ce phénomène induit la formation de « cross-hatch » et ce sont probablement les mêmes structures qui ont pu être observées sur les échantillons recuits par RTA. La corrélation éventuelle entre l’augmentation de la dose de Mg implanté et l’apparition de ces « cross hatchs » pourrait être validée par un traitement laser d’échantillons implantés à différentes doses. Cela n’a cependant pas pu être finalisé pendant ce travail de thèse.

Bien que sur le papier, le recuit laser présente des caractéristiques potentiellement très intéressantes pour l’activation du Mg implanté, nos résultats montrent que de nombreuses études et des adaptations importantes du procédé sont nécessaires pour pouvoir utiliser cette technologie. La puissance d’excitation limite à laquelle la couche irradiée reste stable doit être augmentée et cette limite de stabilité pendant le traitement ne semble pas directement dépendre du procédé d’implantation mais plutôt de l’empilement des couches de nitrures sur Si et/ou de la couche de protection. Des améliorations doivent donc être explorées afin de limiter la formation de fractures de relaxation et la décomposition de la surface de la couche de GaN. L’utilisation d’une protection plus épaisse en rajoutant une couche de Si3N4 LPCVD pourrait peut-être aider à prévenir ce type de dégradation. Il faut aussi mieux

comprendre l’impact du glissement des dislocations observé pendant le recuit sur les propriétés de la couche et la répartition du dopant. Enfin il faudra aussi vérifier l’impact de ce type de recuit pour d’autres doses et sans le recuit primaire afin de mieux évaluer son effet sur l’activation du dopant et la correction de la maille.

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