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Partie 2 : Quantification des souches de Wolbachia présentes chez des

4) Discussion

L’analyse des densités de Wolbachia des femelles mono-infectées a montré que les densités étaient significativement plus élevées pour wVulP que pour les deux autres souches

wVulC et wVulM. Ces résultats sont en accord avec l'hypothèse selon laquelle les souches ayant

co-évolué avec leur hôte depuis moins de temps que d’autres souches montrent des taux de multiplication supérieurs aux souches plus anciennes. En effet, la souche wVulP est issue d'un phénomène de recombinaison entre wVulC et wVulM et représente donc la souche la plus récemment acquise par A. vulgare. Cette courte coévolution avec son hôte expliquerait donc potentiellement son taux de transmission à la descendance plus important que celui des deux autres souches plus anciennes à l’échelle évolutive (Cordaux et al., 2004). Compte tenu d’une multiplication plus importante de la souche wVulP, on pourrait s’attendre à des sex-ratios plus fortement biaisés en faveur des femelles pour les portées infectées par cette souche comparées aux portées infectées par les autres souches. A l’échelle populationnelle, l’examen des prévalences de wVulP dans la population de Poitiers semblent conforter cette hypothèse puisque le taux de femelles infectées est en augmentation au cours du temps et avoisine en 2013 approximativement 95 % des femelles.

Cette étude a également mis en évidence des densités similaires chez les femelles mono- infectées par wVulC comparées à celles abritant la souche wVulM. Ce résultat va à l'encontre de ceux obtenus par Dittmer et al. 2014 qui ont montré que les densités de la souche wVulC sont plus importantes que celle de wVulM et ce dans de nombreux tissus dont les ovaires. Ce résultat peut s’expliquer par le faible nombre d'individus analysés et mono-infectés par wVulM ou par un 'effet population'. En effet, une structuration génétique significative des populations hôtes a été mise en évidence au sein de notre échantillonnage (Verne et al., 2012) et nous savons également que, chez la guêpe Leptopilina heterotoma, le génotype de l'hôte comme les conditions environnementales peuvent affecter les densités de Wolbachia (Mouton et al., 2007).

En ce qui concerne les infections multiples, les résultats ont montré que pour l’ensemble des bi-infections wVulC/wVulM, la souche wVulC présentait des densités nettement supérieures à celles de la souche wVulM. Ce résultat met en avant une plus forte capacité de multiplication de

wVulC comparée à wVulM ce qui est en accord avec l'étude de Le Clec'h et al. (2014) qui

ovaires par la souche wVulC comparée à la souche wVulM. Ainsi, la co-infection wVulC/wVulM pourrait se diriger vers une fixation de la souche wVulC au fur et à mesure des générations. Si l'origine de cette co-infection se trouve dans les transferts horizontaux, alors ceux-ci pourraient jouer un rôle dans le remplacement de wVulC par wVulM au sein des populations naturelles. Un tel remplacement a d'ailleurs été suggéré par Cordaux et al. (2004) qui considèrent la souche

wVulC comme envahissante.

La compilation de ces résultats révèle des densités de wVulC beaucoup plus fortes chez les femelles bi-infectées que chez les femelles mono-infectées. A l'inverse, les densités de

wVulM sont moins importantes en bi-infection qu’en mono-infection. Ces résultats semblent

s’expliquer par une multiplication plus rapide de wVulC qui viendrait coloniser rapidement les ovaires, utilisant ainsi les ressources et l’espace au détriment de wVulM chez ces femelles bi- infectées. De tels exemples, entre deux Wolbachia ont déjà été mis en évidence chez le coléoptère

Callosobruchus chinensis (Kondo et al., 2005) où les densités de la souche de Wolbachia wCon

sont deux fois moins importantes en bi-infection (lorsque cette souche est associée à la souche

wOri) qu'en mono-infection. En revanche, nos résultats indiquent également que la co-infection

par wVulC et wVulP n'affecte pas les densités bactériennes. On retrouve ce type de résultats chez des guêpes et des papillons pour qui la coexistence entre deux souches de Wolbachia n'affectait pas leurs densités (Ikeda et al., 2003; Mouton et al., 2003; Mouton et al., 2004). Toutefois, l'absence de différence entre wVulP et wVulC chez les femelles bi-infectées pourrait également être due à un échantillonnage trop faible (N = 4) pour obtenir une différence statistique significative.

La densité bactérienne peut jouer un rôle important dans la transmission de la souche à la génération suivante. Dans le cadre d'une infection multiple, les deux souches féminisantes peuvent entrer en compétition et la souche présentant une colonisation des ovaires plus rapides et donc une densité plus forte pourrait avoir une probabilité de se transmettre à la génération suivante plus importante. Si tel est le cas pour A. vulgare, alors un scénario hypothétique possible serait que les infections multiples seraient des phases de transitions au cours desquelles, la souche

wVulC prendrait l'ascendant sur la souche wVulM, remplaçant cette souche au cours du temps au

sein des populations naturelles, tandis que wVulP prendrait le dessus sur les deux autres souches en raison de sa densité bactérienne moyenne plus importante. Elle pourrait alors progressivement envahir les populations au dépend des deux autres souches.

5) Perspectives

Les perspectives de ce travail portent sur trois directions :

(i) connaître le taux de transmission de wVulP en isolant des femelles gravides en provenance de la population de Poitiers en vue de sexer la descendance afin de tester une corrélation entre charge bactérienne et transmission (féminisation).

(ii) vérifier un 'effet population' sur la régulation de la charge bactérienne, en quantifiant les densités bactériennes chez un plus grand nombre de femelles infectées échantillonnées au sein de différentes populations naturelles, ou expérimentalement, en quantifiant les densités bactériennes chez des femelles issues de différentes lignées auxquelles on aurait préalablement injecté l'une des souches de Wolbachia.

(iii) estimer le nombre de générations nécessaire pour atteindre la fixation d’une souche de Wolbachia dans les cas de bi-infection. Une première expérience afin de vérifier le remplacement de wVulM par wVulC serait d’injecter cette dernière dans des femelles naturellement infectées par wVulM et de suivre au cours des générations la transmission des souches afin de confirmer notre hypothèse préalablement suggérée. Il conviendrait également de tester en qPCR les descendants F1 et F2 obtenus par Johnson qui avait injectée des femelles avec des charges bactériennes similaires pour wVulC et wVulM (J. Johnson, com. pers.), ceci nous permettrait d’estimer le facteur de dilution d’une souche par rapport à l’autre et donc d’extrapoler sur le nombre de générations permettant la fixation de wVulC.

PARTIE 3 : Etude de facteurs féminisants autre que Wolbachia :

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